CHAPITRE 25 : THERAPIE
Souvenir.
— Qui t'a permis d'arrêter de jouer au piano ? gronda l'un des membres du personnel en refermant brusquement le couvercle sur mes doigts.
L'asile psychiatrique.
Un lieu où l'on devrait guérir les maladies, mais au Grove Center, elles ne font que s'aggraver.
Le claquement sec du couvercle résonna dans la pièce, mais je continue de regarder le point devant moi.
La douleur aurait dû être insupportable, mais elle ne me touchait plus vraiment. Depuis que je suis revenue de cette île, où la civilisation avait laissé place au cannibalisme, je n'étais plus vraiment moi-même. Ce que j'avais vécu là-bas m'avait brisé. Je me sentais vide, presque morte à l'intérieur.
Les voix dans ma tête, qui autrefois me submergeaient, étaient maintenant étouffées par mes propres murmures.
— Continue ! Immédiatement !
Je continue alors, soulevant le couvercle, tout en regardant devant moi.
Mes doigts se mirent à bouger à une vitesse mécanique, presque automatique, comme s'ils avaient une vie propre.
— Tu pourriras ici comme tous les autres, ici !
Je continuai de jouer, les notes se succédaient sans que je les ressente, sans que je sois vraiment là. C'était comme si mon corps se contentait de suivre une routine apprise depuis longtemps, tandis que mon esprit restait enfermé dans cette île, loin de tout, loin d'ici.
Il se pencha vers moi, son souffle chaud et agressif contre mon oreille.
— Personne ne t'entendra. Personne ne viendra.
La colère dans sa voix ne faisait que renforcer ma certitude : je ne faisais déjà plus partie de ce monde. Il pouvait dire ce qu'il voulait, me menacer autant qu'il le souhaitait, cela ne changeait rien. Je n'étais plus là.
— SA SUFFIT !
Le couvercle retomba brutalement sur mes doigts à nouveau, déjà parsemés de petits pansements à cause des blessures passées.
— Tu fais vraiment pitié, pauvre merde ! Les fous comme toi devraient se faire implanter des aiguilles jusqu'à ce qu'ils en crèvent... Tu dégoûtes tout le monde.
Je ne répondis rien, gardant les yeux fixés sur ce point imaginaire devant moi. Mais une larme chaude coula lentement le long de ma joue. Ces mots, je les avais toujours entendus, depuis que j'étais petite. Ils avaient été mes compagnons constants, un rappel cruel de ce que le monde pensait de moi.
— Tu es inutile, stupide, naïve, horrible, une abomination, un fardeau pour tous ceux qui croisent ta route. Ta présence est une erreur, un gâchis de l'existence. Tu n'as aucune valeur, aucun avenir. Tu es une déception, une erreur de la nature.
Une erreur de la nature...
Une erreur de la nature...
Une erreur de la nature...
Une erreur de la nature...
Une erreur de la nature...
— Je te parle, imbécile.
Je reçois un gant en pleine fasse. Je clignai des yeux, essayant de revenir à la réalité.
Satané souvenir. Il aurait pu brûler comme le faux cadavre que ma mère avait utilisé pour simuler sa putain de mort.
Kyle et moi étions près d'une station-service. Je m'appuyais contre la portière de sa Porsche, observant le liquide s'écouler dans le réservoir. Les bruits du monde extérieur semblaient étouffés par le souvenir qui me hantait.
— Pourquoi tu m'as balancé tes gants ? Fulminai-je.
— Pour te ramener à la réalité. Tu étais à nouveau dans ton monde.
— Non, je... Je pensais à...à...
Je me sentis à court de mots, incapable de formuler ce que j'avais vraiment en tête.
— Tu quoi ? T'as perdu ta langue ?
Je levai les yeux au ciel et me détachai de sa voiture. Sa froideur n'était pas nouveau.
— Ma voiture est bien la seule chose pour laquelle je suis prête à mourir. Alors évite de me faire des traces, ajoute-t-il.
— Dans tous les cas, vous les hommes préférez les biens matériels au lieu de vous occuper de vos partenaires.
Je l'entendis glousser.
— Putain, il t'en fallait peu pour redevenir détestable. Pourtant, tu n'es ni ma partenaire, ni mon ex, donc je ne vois pas où est le rapport, rétorque-t-il en retirant le pistolet de l'essence du réservoir et le rangeant dans son socle.
— C'est vrai, tu n'es rien pour moi. Tout comme je suis rien pour toi, dis-je d'un ton pensif.
Nos regards se croisèrent brièvement, puis il baissa les yeux vers le sol avant de se détourner, me tournant le dos.
Je ne pouvais m'empêcher de me demander si Kyle avait déjà eu des relations significatives dans son passé. Pas forcément amoureuses, mais même juste intimes. Après tout, Maddy n'avait pas tort : Kyle dégageait une aura de pure luxure. Son arrogance et son charme naturel étaient tels qu'ils pouvaient faire succomber n'importe qui, même les plus endurcis.
Il est beau, je devais l'admettre malgré moi. Très beau.
Mais c'est toujours la même histoire.
Un homme qui a tout pour plaire, mais dont le caractère détestable ruine tout le reste.
Je continue :
— Et à vrai dire, j'ai plutôt du mal à te voir dans une relation amoureuse... ça doit être vraiment...
Il se retourna, un sourcil levé, l'air interrogateur.
— Vraiment quoi ?
— Intense. Tu serais capable de tuer ta copine dans l'acte.
Je m'attendais à ce qu'il réagisse avec un ricanement ou une remarque cinglante, mais sa réaction resta étrangement neutre, presque ennuyée.
— Ne me vois pas dans une relation amoureuse. C'est totalement inutile, riposta-t-il en refermant le réservoir avec un bruit sec.
— Quoi ? D'aimer ? demandai-je en arquant un sourcil.
Il rangea le tuyau d'essence avec soin, prenant un instant pour bien le replacer.
— Oui, il n'y a aucun intérêt à donner de l'amour. On ne gagne jamais rien.
Je le regardai avec un mélange de scepticisme et de curiosité. Sa déclaration était sombre comme s'il parlait en reconnaissance de cause.
— C'est ça, ta vision du monde ?
Il haussa les épaules, sans vraiment me regarder.
— C'est juste ce que j'ai appris. Les gens prennent ce qu'on leur donne sans rien offrir en retour. Donc je ne vois pas l'épanouissement dans la vie à deux.
— Ce n'est pas parce que tu as vu ça dans ton enfance que c'est véridique Kyle...
— Ah, et puis quoi ? Je suis censé croire en quelque chose de mieux parce que c'est ce que tu veux entendre ?
Je secouai la tête, frustrée mais consciente de l'impasse dans laquelle se trouvait notre conversation.
— Non, je veux juste dire que les expériences passées ne définissent pas forcément l'avenir. On peut toujours choisir de voir les choses différemment, d'espérer autre chose.
Pourquoi cette simple discussion commence à ressembler à une dispute ?
— Tu as vécu des déceptions amoureuses quand tu as repris une vie normal, en quoi tu as été épanouit, dis-moi ? Car jusqu'à la preuve du contraire, tu n'es plus avec ? Me lance-t-il d'un ton sec.
— Tu sais, même si j'ai eu des déceptions, ça ne veut pas dire que je ne trouve pas de moments de joie ou de satisfaction dans ma vie.
Je pris une respiration tout en cherchant à exprimer ce que je ressentais vraiment et en essayant à capter un minimum de son attention.
Mais je sens que c'est fichu d'avance.
— Les relations peuvent être compliquées, mais ça ne signifie pas qu'elles n'ont pas de valeur. Chaque expérience, même difficile, peut apporter quelque chose de positif.
Il me regarda en silence, ses yeux semble réfléchir à ce que je viens de dire. Mais avant qu'il puisse répondre, il se détourna brusquement.
— Eh bien, je te le dis, l'amour ne sert à rien.
Et sur ces mots, il me tourna le dos et se dirige vers le magasin de la station. Je serrai les poings, m'enfonçant les ongles dans la peau, puis le suivis de loin.
Kyle entra dans le magasin sans se retourner, allant directement vers le caissier. Je restai en arrière à quelque centimètre, faisant semblant de m'intéresser aux produits alors que j'écoute sa conversation.
— Tu as ce qu'il me faut ? Demande Kyle.
Le caissier ne répondit pas tout de suite, comme s'il voulait s'assurer que personne n'entend leur conversation. Je pris une boîte de lessive et me mis à lire la notice avec une attention exagérée, faisant mine d'être complètement absorbée.
— Putain Kyle, j'aurai des problèmes...
— Tu n'auras rien.
— Le maire interdit ce genre de...de chose. Je risquerai d'être condamné à mort.
— Mais Oliver et moi sommes proches. Tu crois que c'est pour quoi que j'ai accès à tant de réseaux et que la moitié de Manhattan m'appartient ?
Mes yeux s'écarquillèrent aussitôt.
Oliver et Kyle...
OLIVER ET KYLE ?!
Mon patron et mon kidnappeur se connaissent ?
Mais bordel, tout le monde a décidé de faire alliance avec ce gorille déjanté ? Il y a des claques qui se perdent.
Sous le choc, je laissai tomber la boîte de lessive au sol. Le bruit sec attira l'attention des clients, qui me lancèrent des regards furtifs avant de reprendre leurs achats. Je me penchai pour ramasser la boîte, mes mains tremblent légèrement tandis que je tends l'oreille :
— Tu as ramené quelqu'un ? demanda le caissier en jetant un coup d'œil dans ma direction.
— Ne fais pas attention à elle, vois-la comme une plante verte.
Une plante verte ?
Je m'avance vers eux. Ca ne servait plus à rien de faire semblant, surtout que mon envie de brûler vif Kyle grandit à chaque vérité que j'apprends.
— La plante verte t'a explosé les couilles plus d'une fois, lançai-je d'un ton sec.
Le vendeur éclata de rire en me dévisageant.
— Wow, elle n'est pas silencieuse, celle-là, comparé aux autres que tu kidnappes, Volkov.
Aux autres...
J'ai jamais questionnée ce qu'il leur avait fait.
Dès mon premier jour dans cette maison, Eden m'a avoué que Kyle avait nettoyé de fond en comble ma chambre car elle était abandonnée autrefois.
Est ce que les autres vivaient dans la cave ? Les prisons que j'ai pu apercevoir ?
Pourquoi j'aurai le droit à ce traitement, moi ?
Je marquai un temps d'arrêt en essayant d'assembler les pièces du puzzle. Ce caissier n'était pas un simple employé de station-service, mais un complice de Kyle.
Ce dernier me lança un regard noir, mais loin de me déstabiliser, cela me donna encore plus envie de le provoquer. Il saisit rapidement un petit sachet posé sur le comptoir et le glissa dans sa poche, pensant que je ne l'avais pas remarqué.
— Tu sais ce qu'il te reste à faire, lança l'homme d'un ton peu assuré.
— Je te promets, tu n'auras aucun problème, répondit Kyle avant de lui serrer la main.
Je les observai, déconcertée par leur échange mystérieux. Qu'est-ce qui se tramait exactement ? Leur complicité, leurs secrets, tout cela commençait à me peser. Avec un soupir, je m'éloignai, préférant ne pas m'attarder davantage sur cette scène.
— On dit que toute tes paroles valent de l'or...
— Chacun de mes mots compte, répondit Kyle.
Je me dirigeai vers le rayon des jouets pour enfants tout en sentant leurs regards pesants dans mon dos.
Je m'arrêtai soudain devant un ours en peluche adorable. Je le pris dans les mains et d'un coup, la voix de Kyle derrière moi résonne dans mon oreille.
— Tu n'es pas assez vielle pour ce genre de connerie ?
— Thanksgiving approche, ce n'est que dans quelques jours, et Harvey a dit que Flore viendra, dis-je, comme si ses mots n'avaient pas d'impact.
— Non, il a dit qu'il va la kidnapper pour la faire venir. Dis bien les choses, rectifia-t-il, les yeux rivés sur la peluche.
Je me retourne.
— Oui, peu importe, répliquai-je. J'ai envie de lui offrir quelque chose.
Il roula des yeux.
— On a pas le temps.
— On a tout le temps, Kyle. Comme tu me l'as très bien fait comprendre hier avec ta leçon de morale.
Je lui donnai un léger coup d'épaule pour le pousser et me faufiler devant lui, prenant ma place dans la file d'attente à la caisse. Kyle me rejoint avec un air agacé, il ne contrôlait absolument pas cette situation et le voir si frustré est agréable.
— Tu te prends pour le Père Noël ? lança-t-il en croisant les bras.
— Faire plaisir à une enfant, c'est si horrible que ça ? répondis-je, sans le regarder.
La file avançait rapidement, et bientôt ce fut notre tour. Je déposai l'ours en peluche sur le comptoir sans payer, sachant que Kyle s'en chargerait. Étant donné que des collègues m'avaient reconnu hier, je n'étais pas sûre que mon excuse avait fonctionné. Mais il valait mieux qu'on me soupçonne d'avoir quitté le pays pour des vacances.
Le caissier regarda d'abord l'ours, puis Kyle, le dévisageant avec étonnement.
— Euh... je ne m'attendais pas à ce genre d'achat de ta part, dit-il avec surprise.
— Je fais ce que je veux, répond le mercenaire d'un ton sec en sortant sa carte bancaire.
Un rictus mauvais apparait sur mes lèvres, avoir le contrôle sur lui est vraiment très plaisant. Je pourrai lui faire acheter toute une garde robe pour la peine.
— C'est vraiment sympa d'acheter une peluche à ta victime, je croirai même qu'elle est ta copine.
Que je suis quoi ?
— Le jour où tu me verras sortir avec ce genre de femme, c'est vraiment que j'aurai décidé de foutre ma vie en l'air, répondit Kyle d'un ton glacial.
Sans ajouter un mot de plus, il tourna les talons et sortit du magasin. Je le regardai partir, un sourire satisfait sur les lèvres, tenant toujours l'ours en peluche.
Je repose mon regard sur le caissier qui est totalement surpris par la réaction de Kyle.
— Oh, ne vous inquiétez pas. Il est calme là encore.
Mais mes paroles ne font pas disparaître sa mine d'interrogation.
— Gardez le ticket de caisse ! Lançai-je.
Je fis un sourire en coin avant de sortir du magasin et de monter dans la voiture.
Kyle était déjà installé au volant. Il démarra sans que j'aie eu le temps d'attacher ma ceinture.
Je ne savais pas quels étaient ses plans pour la journée, mais il semblait déterminé à me garder près de lui. Bien que sa présence me donne l'envie de me jeter d'un immeuble de 24 étages, il fallait que je passe le temps.
— Sympa, ce vendeur. Comment il fait pour te supporter ?
Kyle jeta un coup d'œil rapide dans ma direction avant de concentrer son attention sur la route.
— Les gens me "supportent", comme tu dis, parce qu'ils ont une dette envers moi.
Je me penchai légèrement vers lui, l'air intrigué.
— Comme Harvey ?
Il tourna la tête vers moi, l'air surpris.
— Comment tu sais ?
— Il m'a brièvement raconté son histoire. Tu l'as beaucoup aidé dans cette prison apparemment.
Il secoue la tête avant de répondre :
— Harvey peut se montré très brutal mais il allait se faire bouffer en prison. Je n'avais pas le choix. Il a cambriolé des banques et des pharmacies pour payer les opérations de sa soeur. Ça me faisait juste pitié.
— Ou tu peux juste avoir un coeur... murmurai-je à moi même.
Mais il avait entendu.
Il se tut un moment, visiblement mal à l'aise par la révélation.
— Kyle ?
— Mmh ?
— Il est rare que les gens prennent le temps d'écouter vraiment. Je sais ce que c'est de rester prisonnier de ses pensées, murmurai-je en posant ma main sur la sienne qui tenait fermement le levier de vitesse.
Il marqua une pause en s'arrêtant à un feu rouge, utilisant l'arrêt pour observer ma main sur la sienne. Ses doigts se crispèrent en entourant le levier. Alors pour le détendre, je commençai à faire de légers cercles sur l'arrière de sa main. Ses yeux se fixèrent sur chaque caresse que mes doigts lui procuraient, comme s'il ressentait des frissons.
— Tu me laisses faire quelque chose ? demandai-je doucement.
Il leva ses yeux gris vers les miens et hocha lentement la tête. Je lui répondis par un sourire et glissai mes doigts entre les siens. Sa respiration se fit plus lourde, plus présente alors qu'il fixa nos main en contact dans ce calme marqué par ce simple geste.
— C'est ce que Nora faisait quand j'étais tendu durant mes premiers jours avec eux. Elle me l'a apprit. C'est un geste simple mais... on y trouve un certain réconfort, dis-je en retirant doucement ma main.
— Non, attends !
Je m'immobilisai, surprise par son appel.
— Continue... s'il te plaît...Reviens.
Il y avait une vulnérabilité dans sa voix. Mon cœur se serra en réalisant une fois de plus que sous sa carapace de mercenaire, c'était encore un enfant effrayé, torturé par ses propres démons.
Je restai immobile un instant, prenant la mesure de ce qu'il venait de demander. Puis, sans un mot, je glissai à nouveau ma main dans la sienne, nos doigts se retrouvant comme s'ils savaient exactement où aller.
— Je ne suis pas habitué à ça, murmura-t-il avec une voix rauque qui trahit une lutte intérieure.
— À quoi ? demandai-je doucement.
Mes doigts reprennent leurs cercles sur sa peau automatiquement. Comme pour chercher à apaiser un mal invisible.
— À ce que quelqu'un reste, admit-il, avec une honnêteté qui semblait lui coûter. Et à ce... à ce que quelqu'un le fasse sans y être forcé.
Il se remit à conduire dès que le feu passa au vert, mais sa main resta fermement enlacée dans la mienne.
Les questions tournaient dans ma tête, des questions sans réponses, mais je ne voulais pas gâcher cet instant qui me faisait frissonner.
Qui ne tente rien n'a rien.
Peut-être que c'est dans des moments comme celui-ci qu'il est plus ouvert à parler.
— Tu... tu connais Oliver depuis quand ? demandai-je, tentant ma chance.
Ma question le fit tiquer, mais je savais que j'étais naïve de penser qu'il me donnerait une réponse.
— Depuis qu'on a fait de la prison ensemble.
Oh...
Je savais qu'Oliver avait fait de la prison. À Manhattan, une ville si dangereuse, personne n'a été vraiment surpris qu'un homme avec un casier judiciaire devienne maire. Son passé était connu, mais la proximité avec Kyle, ça, c'était nouveau pour moi.
— Vous avez fait de la prison ensemble ? répétai-je, cherchant à digérer l'information.
Il soupira, comme si c'était un souvenir lointain, avant de lâcher un petit "oui."
— Il jouait le bon prisonnier pour sortir sous bonne conduite, ricana-t-il. Mais je le connais depuis bien plus longtemps. Oliver n'a pas juste tué un politicien. Il y en a d'autres.
Je restai figée. Je savais pourquoi Oliver avait été incarcéré, mais cette connexion étroite avec Kyle me dérangeait profondément.
Il continua, indifférent :
— On est juste des connaissances, mais ouais, ça me donne quelques avantages.
Alors voilà pourquoi Kyle avait autant de pouvoir, pourquoi il possédait la moitié de la ville.
Oliver n'était pas seulement mon patron, il était un ami, un confident. Il m'avait guidée à travers chaque décision difficile et, surtout, il ne m'avait jamais jugée pour mon passé, parce que je connaissais le sien, tout aussi compliqué et sombre.
Mais savoir que Kyle et Oliver se connaissaient changeait tout. Il y avait de fortes chances que Kyle profite de cette connexion, et qu'il l'ait déjà fait.
C'est probablement la raison pour laquelle personne ne me recherche, ni Maddison d'ailleurs...
Oliver le couvre. C'est évident !
— Tu... Tu as déjà utilisé ces avantages sur moi ? demandai-je en fixant nos mains qui se touchaient.
Kyle ne répondit pas immédiatement, ses doigts se resserrent légèrement autour des miens.
— Je t'ai espionnée sans relâche pendant plusieurs années, admit-il finalement. Il n'avait rien de nouveau à m'apprendre à ton sujet. Mais c'est tout de même lui qui m'a donné ton dossier.
Mon souffle se coupa un instant. Oliver avait donc été impliqué depuis le début, offrant sans hésitation toutes les informations nécessaires à Kyle.
Ce dernier semble avoir remarqué ma panique dans mes yeux. Il se gare directement près de la maison et coupe le moteur, nos doigts toujours en train de se caresser.
— C'est moi qui lui ai demandé.
— Pourquoi ? Pourquoi je t'obsède autant, Kyle ?
Je vois son pied taper nerveusement près de la pédale d'accélération, comme s'il cherchait ses mots.
— Je... Je...
— Kyle ?
— Je ne sais pas.
Il plonge son regard dans le mien, visiblement paniqué.
— J'en sais rien, Tara. Je...
Il hésite, comme s'il essayait de mettre des mots sur une vérité indescriptible.
— C'est comme une obsession, une drogue, une putain d'addiction sans fin... J'ai besoin de....J'ai besoin de te comprendre, de savoir tout de toi. C'est plus fort que moi...et je n'arrive pas à m'arrêter.
Il continue à parler alors que la panique monte en moi. Mes mains commencent à trembler, et celle qui est encore dans la sienne s'enfonce dans sa peau, malgré moi.
Je ne veux pas être une obsession.
L'obsession de personne.
— C'est comme si chaque petit détail de ta vie...chaque mo...moment que je passe à te suivre, ça remplissait un vide en moi que je ne connaissais même pas...C'est devenu une sorte de fixation...quelque chose dont j'ai besoin pour me sentir entier.
Ses mots me procurent un frisson. Je ne sais pas si je dois paniquer face à son obsession ou être troublée par cette vulnérabilité qu'il dévoile sans filtre.
— Je...je ne sais pas quoi dire.
Il détourne les yeux, fixant la route comme s'il cherchait une réponse.
— Je sais... Mais je n'arrive pas à m'arrêter.
— Mais en tant qu'obsession...Tu as l'attention de me faire du mal un jour ?
On sait tous comment les relations obsessionnelles peuvent finir, comment un attachement malsain peut se transformer en quelque chose de dangereux. Sa main se resserre un peu plus autour du volant, ses jointures se blanchissent sous la pression. Il garde les yeux fixés sur la route, mais je vois ses mâchoires se serrer.
— Je n'ai jamais eu envie de te faire du mal, avoue-t-il. La dernière fois, dans ma chambre, quand tu as vu toutes ces photos, ces robes que j'ai faites pour toi...
Il marque une pause. J'observe attentivement les réactions de son corps. Son pied continue de tapoter tandis que sa main tremble dans la mienne.
— Tu es la première à avoir vu cette cachette... Je ne sais pas ce qui m'a pris. Et quand je t'ai attrapée et que tu t'es mise à pleurer... j'ai compris.
— Tu as compris quoi ?
Il tourne la tête vers moi.
— Que je ne supporterai jamais de te revoir dans cet état à nouveau.
Sa déclaration me laisse sans voix. Je me souviens de ce moment, de la peur et du désespoir que j'avais ressentis en découvrant cette facette de lui.
— Tu as réveillé un traumatisme, Kyle...murmurai-je. Mes crises se sont multipliées depuis que je suis avec toi. Avant, elles n'étaient pas aussi graves.
— Je ne voulais pas que ça se passe comme ça... dit-il enfin. Je ne voulais pas te faire de mal. Je voulais juste... Je voulais... Non...Rien ne justifie ce que j'ai fait.
Comme quoi, cet homme est capable d'avoir des remords.
Il secoue la tête, comme pour chasser ses pensées et reprendre le contrôle.
Il fait glisser ses doigts le long des miens, jusqu'à ce que son regard se fige sur ma bague. Il attrape ma main et la soulève doucement, l'approchant de son visage pour l'examiner de plus près. Mon cœur se met à s'emballer en voyant ses yeux gris perçant admirer ma bague en argent.
— Elle est... jolie.
— Maddison me l'a offerte pour mon anniversaire.
— Eh bien, pour une fois, elle a du goût, lâche-t-il avec une pointe de sarcasme.
Je fronce aussitôt les sourcils, agacée par sa remarque.
— Tu sais, elle est adorable. Je ne t'ai jamais vu lui adresser la parole.
— Et pourquoi je le ferais ?
— Peut-être parce que tu la traites comme si elle n'existait pas, rétorquai-je en retirant ma main de la sienne.
— Elle le vit mal ?
— Non...Enfin, j'en sais rien, répondis-je en soupirant, mais ce n'est pas la question.
— Eh bien alors, je ne vois pas où est le problème.
— Kyle, ne la traite pas comme une paria. Pas comme John et tes hommes m'ont traité...s'il te plait, je te le demande.
Il tourne les yeux vers moi.
— Ce ne sont pas mes hommes. Jamais je ne les laisserais te traiter ainsi, ni personne d'autre, dit-il avec une fermeté inattendue.
Je savais qu'il avait déjà évoqué son aversion pour la discrimination. C'était l'un des rares aspects de son caractère que je comprenais réellement.
Je déboucle ma ceinture et ouvre la portière pour sortir de la voiture, le regard porté vers Kyle qui se dirige vers son garage. En ouvrant la porte, je découvre une moto noire éclatante. Il se penche pour sortir un casque de moto.
— Tara ?
Je me retourne.
— Oui ?
— C'était bien... notre petit moment... Même si j'ai tout de même envie de te tuer pour m'avoir fait acheter cet ours.
Je ris doucement.
— J'ai aussi apprécié, Kyle.
Je me dirige vers la porte d'entrée, laissant Kyle déjà parti vers sa moto. À peine ai-je franchi le seuil qu'un homme au visage familier m'interpelle sur le paillasson.
— Je peux vous aider ? demandai-je, le scrutant attentivement.
Cet homme porte un cache-œil. Le même homme du Cercle.
Il m'offre un sourire glacial avant de dire :
— Rebonjour, Therasya.
---------------
À SUIVRE ! ✨
Avec la rentrée, les cours, tout ça, je pense poster maintenant tous les dimanches ! Au moins ça fera plus de suspense 🤭
J'ai vraiment essayé de publier le maximum de chapitres que je pouvais pendant ces vacances. C'est pour ça que ça allait très vite. Je voulais vraiment former une base pour que vous ayez de quoi lire pendant un moment.
Sur ceux
BISOUS ! 🤍
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