Partie 1
Assis sur la banquette arrière de la calèche, Jungkook entendait davantage les éléments se déchaîner qu'il ne les voyait.
La pluie battait contre la vitre, rendant le paysage indiscernable dans toute cette obscurité et cette pluie. L'air glacial s'infiltrait quant à lui dans la calèche, refroidissant les mains et les pieds. Aucune personne sensée ne serait sortie par un tel temps. Pourtant, Jungkook était là, non sans une bonne raison; ce soir se tenait la plus grande réception jamais donnée dans la région, dans cette campagne lassante et isolée de tout centre important.
Et Jungkook était invité.
Il soupira; son souffle laissa une traînée de buée sur la vitre du carrosse. Le trajet s'allongeait et les secousses commençaient sérieusement à le déranger. Toute compte fait, devrait-il ordonner au cocher de faire demi-tour ? Le bal avait certainement déjà commencé...
Lorsque les chevaux battirent impatiemment le pavé et que le cocher, simple silhouette noire à l'avant du véhicule, se mit à les calmer pour les mettre au pas, Jungkook se redressa sur son siège. Ils y étaient, enfin.
Il tenta de voir à travers la buée de la vitre, essayant de deviner ce qui se déroulait à l'extérieur. Il distingua à peine la silhouette du manoir dans la nuit noire; une bâtisse qui, selon les dires de quelques domestiques dont il avait écouté les conversations, avait été acheté il y a quelques mois à peine par un riche étranger.
Il y eut du bruit à l'avant, la calèche s'immobilisa. Rien ne se passa durant de longues secondes, puis on vint enfin ouvrir la porte à Jungkook qui s'impatientait. Ce dernier se plaça sous le parapluie qu'on lui tendait, puis avança sous le déluge, protégé des gouttes.
Jungkook marcha rapidement jusqu'à l'entrée de la demeure et distança presque le cocher qui portait son parapluie.
Une fois abrité sous le porche, Jungkook mit son loup –un masque noir, paré de plume de corbeau– et congédia le cocher. Puis il fit face aux deux valets dressés devant les portes. D'un geste, il sortit son invitation d'une poche de son costume hors de prix. L'enveloppe n'avait pas un pli; il l'avait reçu il y a quelques jours à peine et il devait avouer que l'invitation l'avait surpris. Après tout, il ne connaissait pas personnellement l'organisateur de cette fête...
Et ça faisait bien longtemps qu'il n'était pas allé à un bal.
L'un des valets vérifia l'invitation pour la forme, puis s'inclina respectueusement.
« Monsieur le vicomte, c'est un honneur. »
Jungkook esquissa un rictus forcé avant de passer les portes qu'on s'était empressé de lui ouvrir. Elles se refermèrent sur lui, comme closes à jamais.
À l'intérieur, l'ambiance était bien loin du silence morbide de la nuit et de la monotonie de la pluie. Les festivités battaient leur plein. On mangeait, buvait, discutait et dansait volontiers, nullement préoccupé par ce qui se passait dehors. Ici ne comptait que les titres, les relations et le vin.
Jungkook avança avec hésitation dans la foule à demi-sobre. D'abord perdu, le soudain stress qu'il avait ressenti peu avant d'entrer se dilua dans une drôle de frustration; celle d'être comme un inconnu. Quelques convives le reconnurent et le saluèrent avec réserve, mais aucun ne s'approcha pour l'accueillir réellement ou pour échanger quelques mots. Les autres, trop saouls, étaient occupés à danser.
Jungkook obliqua vers l'endroit le moins animé; le buffet. Là, un domestique lui servit du vin dans un verre en cristal à l'éclat somptueux. Jungkook sirota ce grand crus comme s'il n'avait rien de spécial, incapable de se détendre. Très rapidement, un autre domestique lui proposa également des mises en bouche appétissantes, qu'il refusa sèchement. Il se contenta dédaigneusement de son simple désaltérant.
Puis il tenta de deviner à qui appartenaient les visages sous les loups. Ce n'était pas difficile malgré la cohue. Jungkook repéra d'anciens amis de son père, qu'il n'avait jamais revu depuis le trépas de ce dernier. C'est en les voyant s'amuser si innocemment qu'une rage lointaine, longuement enfouie, refit surface. À croire qu'une fois mort, les Jeon ne suscitaient plus d'intérêt. Pas même son successeur, Jungkook, qui lui était bel et bien vivant.
Au centre de la salle, on dansait la gigue de façon désordonnée. Jungkook vit un gentilhomme écraser le pied d'une demoiselle, qui éclata pourtant de rire. Étonné de voir les invités aussi avinés, Jungkook se tourna à nouveau vers le buffet. Il ne les trouvait pas dans leur état normal; pourquoi boire autant ? L'occasion n'avait rien de si spéciale. Était-ce lui qui avait perdu l'habitude des réceptions ? Jungkook se sentait partagé entre sa colère et le soulagement de ne pas être comme eux. Il baissa les yeux sur le buffet, désireux de se changer les idées.
Les tables décorées exposaient des plats nombreux et exotiques. L'organisateur n'avait visiblement pas lésiné sur les moyens; homard, crabes, viandes de choix aux truffes, canard laqué... il y avait de tout et à foison, ce qui était assez étonnant à une heure aussi tardive. Les invités avaient-ils trop bu pour se rendre compte du festin qu'il y avait là ? Jungkook s'attarda un instant sur la décoration de la salle, choisie avec goût.
« L'ennui ne vous accable pas, j'espère ? questionna soudain une voix inconnue. »
Jungkook se tourna par instinct. À côté de lui, un homme s'était approché sans qu'il ne le remarque. Il portait un loup blanc serti de perle nacrée. Il avait beau porté un masque qui ne cachait que le contour de ses yeux, Jungkook ne reconnaissait pas son visage.
Mais ses yeux... Jungkook n'en avait jamais vu de semblables.
Ils étaient aussi clairs que l'eau de source, d'un bleu fragile. Jungkook crut halluciner, mais ses doutes furent mystérieusement balayés, car l'instant d'après ils étaient d'un brun tout à fait banal. Certainement la lueur des lustres qui lui jouait des tours.
Quand il sortit de leur contemplation, Jungkook racla sa gorge pour cacher sa gêne soudaine et détourna le regard, espérant que son geste démontre son désintérêt feint.
« À qui ai-je affaire ? cingla-t-il. »
Il songeait déjà à congédier cet homme qui le troublait. Il ignorait son nom mais ce devait être un opportuniste pour oser l'approcher ainsi.
Nullement affecté par son ton, l'homme inconnu exécuta une révérence élégante; un geste parfaitement maîtrisé.
« Comte Kim Namjoon, dit-il. Je suis ravi de faire votre connaissance, monsieur le vicomte. J'espérais vous rencontrer ce soir. »
Jungkook tenta vainement de ne pas afficher sa surprise, mais ce fut plus ardu qu'il ne le pensait. Son expression se décomposa.
Cet homme était l'organisateur même de ce bal. C'était lui qui lui avait envoyé l'invitation.
Jungkook, perdant de sa superbe pendant un instant, ne trouva rien d'autre à dire de plus pertinent:
« Eh bien, c'est chose faite à présent. »
Jungkook s'inclina ensuite d'une manière bien raide, conscient des règles et des coutumes qu'il n'avait pas pratiqué depuis longtemps.
« Messire, ajouta-t-il.
– Inutile d'être si formel. »
Le comte hocha la tête avant de s'approcher plus près, pour prendre une bouteille sur la table du buffet. Après quoi il resservit Jungkook de vin. Son mouvement fit se raidir le noiraud, qui n'osa pas reculer. Ce n'était pas son rôle de servir les invités, il avait une solde de domestiques pour cela.
« Merci, lâcha Jungkook quand le comte reposa la bouteille avec un sourire.
– Permettez que je vous appelle par votre prénom ? Les formalités sont d'un ennui.
– Bien sûr... »
Confus par tant de familiarité, Jungkook se concentra sur son propre verre, craignant de se ridiculiser s'il regardait ailleurs. Il essaya d'avoir l'air détaché, mais il se sentait raide et incapable de se détendre. Que voulait-il ? Que cherchait-il ? Le comte ne partit pas vaquer à d'autres occupations, au contraire. Il resta à ses côtés, visiblement désireux de faire la conversation.
« Comment trouvez-vous cette fête ? interrogea Namjoon.
– C'est... un véritable succès, répondit Jungkook avec retard. Les invités ont l'air de passer un excellent moment.
– Et vous ? »
Moi ? songea le noiraud. Non, il ne passait pas le meilleur des moments. L'homme qui lui parlait le mettait bizarrement dans un état de confusion qu'il n'arrivait pas à quitter.
« Également, s'empressa de dire Jungkook.
– Vous n'en avez pas l'air, lança Namjoon, qui avait visé juste et qui le savait, au vu de son regard insistant.
– Mes excuses, bredouilla Jungkook, gêné. »
Namjoon esquissa alors un sourire qui creusa des fossettes dans ses joues, et le noiraud éprouva alors comme... un vide, rapidement comblé par quelque chose qui lui disait, en son fort intérieur, regarde-moi. Il chercha à regarder ailleurs, mais elle restait là, cette sensation, cette voix...
Il allait y céder lorsque la prochaine question du comte le ramena à la réalité tant elle était incongrue:
« Puis-je vous inviter à danser ?
– Danser ? répéta Jungkook. Vous êtes sérieux ?
– Bien sûr.
– Je ne crois pas que ça soit... bien vu, marmonna Jungkook.
– Ne vous en préoccupez pas, les convives ne feront pas attention à nous, assura Namjoon. Ne faut-il pas savoir s'amuser, de temps à autre ? Ce n'est qu'une petite danse. »
Sur ces mots, le comte tendit son bras à son invité pour l'inciter à accepter. Jungkook hésita grandement; il ne voulait guère froisser son hôte, mais il avait également peur du jugement qu'on lui porterait s'il acceptait. Deux hommes qui dansent, ça frôlait le ridicule, quand bien même l'un d'eux se trouvait être le maître du bal.
Les mots du comte résonnèrent dans sa tête, à moins que ça ne soit autre chose...
Juste une petite danse.
« J'espère que vous dites vrai, céda Jungkook, alors qu'il posa sa paume sur son bras et que ses doigts agrippèrent timidement son vêtement. »
Namjoon eut un hochement de tête certain. Il l'entraîna ensuite parmi les autres convives, après avoir abandonnés leurs verres sur le buffet, et les fit s'engouffrer dans la foule qui terminait de danser de façon chaotique.
Tous deux prirent position, alors que, comme réglé sur leurs mouvements, la musique changea, démarrant sur un son lent et élégant. Une valse.
« Dites-moi, débuta Namjoon. Appréciez-vous être ici ? »
Jungkook haussa les épaules, soudain incertain. Il eut envie de répondre oui sans réfléchir, pour faire plaisir à son interlocuteur, mais curieusement, quelque chose l'en empêchait. La voix revint. Mentir ne sert à rien. Il ne devait pas mentir.
« Pas vraiment, avoua Jungkook. »
Le comte n'en sembla même pas vexé. Il acquiesça simplement. Jungkook, désireux de s'expliquer, reprit vite la parole.
« Les autres, ils... »
Il hésita sur les mots à employer et jeta même un regard aux alentours, vaguement préoccupé. Mais personne ne faisait attention à eux; les invités dansaient comme de parfaites marionnettes, tout comme Jungkook, dont le corps suivait les mouvements du comte. Ce dernier menait clairement la danse.
Et à nouveau, cette voix... non, ce n'était pas une voix. Plutôt une volonté qui n'était pas la sienne. Le comte le regardait fixement. Dis-moi la vérité.
« Pour tout vous dire, ils m'insupportent, termina Jungkook. Je les déteste.
– Et pourquoi cela ? questionna Namjoon. »
Jungkook essaya de cacher son expression perturbée et ça aurait été un succès grâce à son loup, mais ses lèvres tiquèrent.
« Ils sont hypocrites.
– Tout autant que vous, lâcha Namjoon. »
Son ton semblait mi-taquin, mi-sérieux, et ça atteignit Jungkook directement au cœur; comme s'il avait été poignardé.
Jungkook essaya d'arrêter la danse et de se détacher en faisant un pas en arrière. Mais Namjoon perçut son geste, car il le garda près de lui en saisissant son coude. Il n'y mit pas beaucoup de force, mais sa fermeté parlait d'elle-même.
« Veuillez m'excuser, expliqua le comte. Je ne voulais pas vous offenser. »
Jungkook ne le voulait pas, mais ses excuses aux allures sincères adoucirent l'amertume au fond de sa gorge. C'était rare pour lui de donner des secondes chances, car il craignait plus que tout d'être déçu ou trahi. Mais quand il regardait les yeux du comte...
Il n'arrivait juste pas à tourner les talons. C'était... physiquement impossible. Pardonnez-moi.
« Ce n'est rien, marmonna Jungkook, faussement froissé. »
Un sourire du comte suffit à ce que le noiraud se sente à nouveau confus, mais une confusion qui n'avait rien de désagréable. Il avait la sensation que les piques et les remarques ne signifiaient rien, que derrière se cachait autre chose.
Le comte s'intéressait à lui.
« Avez-vous des ennemis ici ? interrogea Namjoon, alors qu'ils reprenaient mécaniquement la danse.
– Non, lâcha Jungkook sans le regarder. Je n'emploierais pas ce terme.
– Pourtant, il doit bien y avoir des invités que vous ne portez pas dans votre cœur. Autrement, vous ne seriez pas resté seul près du buffet. »
Le comte visait juste, encore une fois. Jungkook, silencieux, ignorait quelle attitude adopter. Cet homme le perçait à jour sans difficulté, et il commençait déjà à s'y faire.
« Vous fuyez aussi mon regard, continua Namjoon. Dois-je en déduire que vous avez aussi de l'aversion pour moi ?
– Non, répondit Jungkook, dans un élan d'honnêteté qui le surprit lui-même. Vous ne m'êtes pas désagréable, je n'ai juste... pas l'habitude de discuter autant. Et surtout pas de moi.
– Je suis une oreille attentive, vous pouvez dire ce que vous voulez en ma présence. »
Jungkook, d'un haussement d'épaule se voulant désinvolte, se laissa tenter.
« Il y a ici de nombreux amis de mon défunt père, expliqua Jungkook à demi-voix. Des amis qui dînaient régulièrement à notre table, que mon père invitait à la chasse, à qui il rapportait des cadeaux de ses voyages... et pourtant, aucun n'est venu aux obsèques. Ils se sont tous détournés de ma famille. »
Amer, Jungkook fixa les autres invités sans jamais en regarder un précisément. Il y avait derrière ces loups des visages qu'il connaissait et haïssait depuis l'enterrement de son père, il a de cela déjà sept ans. Sept année à se demander si l'un d'eux avaient vraiment un cœur...
« Quand mon père est parti, continua Jungkook. C'est comme si tous ses amis n'avaient jamais existé. Aucun n'est venu me montrer de soutien, je n'ai pas eu d'aide de leur part pour gérer les affaires de mon père. Des rumeurs ont commencé à circuler sur mon père, sur son mariage avec ma mère... »
La gorge nouée, Jungkook déglutit péniblement. Continuez. Dites ce que vous avez vraiment sur le cœur.
« Ironique n'est-ce pas ? reprit Jungkook. Étant petit, j'avais toujours trouvé ces personnes incroyables.
– Je comprend pourquoi vous ne les portez pas dans votre cœur, fit le comte, d'une voix grave. Mais le vent finit toujours par tourner, soyez-en sûr. »
Jungkook haussa une épaule. Il n'avait plus aucune envie de danser, pourtant le comte ne le lâchait pas et faisait les efforts pour lui. Ses mots ne le consolaient pas, mais au moins, il semblait le comprendre. Ça lui suffisait amplement.
Ils continuèrent à danser durant encore un long moment. Le comte lui faisait toujours la conversation de temps à autre, comme pour le maintenir éveillé, sans quoi Jungkook se serait sûrement fatigué. Il fixait l'épaule du comte, attiré par ses yeux sans oser les regarder; il sentait son regard sur lui, de plus en plus insistant, de plus en plus pressant à chaque pas.
Ils ne dansaient pas avec aisance. Jungkook savait qu'ils avaient certainement l'air ridicule, mais Namjoon dirigeait si bien qu'il en oubliait presque l'absurdité de ce qu'ils faisaient. À un tel point que Jungkook se consacrait tout entier à résister à l'envie de le regarder dans les yeux...
Quand enfin ils s'arrêtèrent, la musique avait disparue. L'ambiance venait de s'éteindre, alors qu'étrangement, plus personne ne parlait dans la salle.
Jungkook, un peu perdu, observa la foule muette autour de lui.
Beaucoup d'invités le fixaient, même ceux qui, tout comme lui, semblaient aussi perdus derrière leur masque.
Jungkook sentit le froid de la honte s'insinuer en lui. Il se tourna vers Namjoon, l'air de chercher de l'aide ou de confirmer un terrible soupçon; celui d'une éventuelle trahison, d'un coup monté contre lui pour le ridiculiser. Mais ce n'était pas le cas.
Comme tout à l'heure, le comte lui souriait. Rien ne semblait déplacé chez lui, pourtant c'était étrange. Quelque chose clochait.
« Je crois qu'il est l'heure du repas, annonça le comte. »
Très à l'aise, il tendit son bras à Jungkook qui le prit par automatisme, puis il le guida plus loin alors que tous les yeux de la salle étaient posés sur eux. Leurs regards les suivaient sans jamais les lâcher.
À présent debout en haut des marches, sous les grands lustres dorés, Namjoon venait de les placer au centre de cet intérêt bizarre. Depuis leur poste, ils étaient exposés à tout le monde, dominant la grande salle.
« Mes chers invités, mes chers frères et sœurs, débuta le comte d'une voix forte. »
Tous les convives écoutaient, tout ouïe.
« Je crois qu'il est l'heure d'apaiser la faim, d'étancher la soif. Levez votre verre, que je dédie à Jeon Jungkook. »
Il fallut un instant à Jungkook pour comprendre, mais il avait trop froid pour sentir la gêne d'un tel honneur. La main baguée de Namjoon serrait son épaule alors qu'une mer de verre carmin se levait vers eux. Ce tableau était aussi fascinant qu'étrange, comme si la peinture cachait quelque chose d'inavouable.
Les invités levèrent leurs verres bien haut, en direction du comte, et même les plus hésitants finirent par imiter les autres. Jungkook se rassura en se disant qu'il devait sûrement s'agir d'une quelconque tradition de l'hôte, car jamais il n'avait assisté à un tel toast. La totalité des convives participaient, ils paraissaient presque comme hypnotisés.
Puis Namjoon se tourna vers lui.
« Jeon Jungkook, j'ai l'immense honneur de t'annoncer que parmi tous les invités... »
À nouveau, le comte fit un grand geste pour désigner l'assemblée, muette et attentive.
« Tu as été choisi. »
Jungkook fronça durement les sourcils, peinant à comprendre le sens de ses mots. Il jeta un coup d'œil incertain à la foule. L'ambiance devenait pesante, lourde et vraiment inquiétante. Ce n'était pas normal.
« De quoi parlez-vous ? lâcha Jungkook.
– Ça signifie, cher vicomte, que vous allez assister à un spectacle unique en son genre.
– Un spectacle ? répéta Jungkook. »
Namjoon sourit. Un sourire sans fossettes, faible, étrange. Quand il se tourna vers l'assemblée, le comte leva son bras comme pour donner un signal.
« Faites-vous plaisir mes frères et sœurs, qu'il ne reste rien ! »
Une euphorie incontrôlable se saisit de la foule, subitement bruyante. Puis, les exclamations de joie se transformèrent en cris d'affolement. Certains invités se mirent à hurler.
Jungkook ne comprit d'abord pas pourquoi, incapable de voir ce qui n'allait pas tant la foule d'invité s'était compactée. L'agitation laissa entrevoir des costumes arrachés et ensanglantés alors qu'une forte odeur de sang s'éleva dans l'air.
Jungkook vit une noble arracher brutalement le corset d'une autre et se jeter sur elle.
À ce moment-là, il eu la sensation pure et simple d'être poussé dans un cauchemar. Sous ses yeux, des hommes et des femmes se dévoraient.
Du haut des marches, Jungkook comprit que le danger ne venait pas de l'extérieur. Il provenait de l'intérieur, des convives eux-mêmes.
Des invités en mangeaient d'autres.
Tétanisé, Jungkook sentit pourtant la prise d'une main froide sur son bras et il ne reprit ses esprits qu'en voyant le comte très près de lui.
Namjoon le fixait de ses yeux bleus. La couleur était hypnotisante, irréelle. Il ouvrit la bouche, dévoilant une rangée de dents blanches serties de deux canines.
Saisi d'effroi, Jungkook s'éloigna brusquement et manqua de trébucher dans les escaliers. Il s'agrippa à la rampe.
« N'ai pas peur, dit Namjoon en levant une main accueillante vers lui. La douleur n'est qu'éphémère. »
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