Je lisais et appréciais le manga que j'avais trouvé dans la bibliothèque de la ville jusqu'à ce que le personnage principal commence soudainement à vivre des expériences qui me semblaient familières.

Bien que la gare représentée sur la double page portait un nom japonais, j'aurais juré qu'elle était celle dans laquelle je me trouvais à ce moment. Celle que je visitais matin et soir pour voyager entre mon lieu de travail et mon appartement.

C'était idiot : toutes les gares se ressemblaient, non ? Mais je ne pus m'empêcher de sortir mon téléphone pour vérifier la traduction de « Ajisai » - « Hortensia », le nom de cette gare.

Le nom de ma gare.

Je levai la tête pour regarder autour de moi avec l'impression d'être épiée, mais j'étais seule, comme toujours à cette heure. Je retournai à ma lecture et changeai de page pour voir la protagoniste se lever du banc à l'arrivée de son train.

Long manteau clair, talons moyens, chignon coiffé-décoiffé et boucle d'oreille en étoile. Je portai inconsciemment la main sur le petit bijou que je portais encore aujourd'hui.

Mon cœur s'emballa malgré moi lorsque je retrouvai dans le dessin ma façon de porter mon sac – les deux mains sur la hanse, dans le dos.

Malgré mon trouble, je grimpai dans la première rame devant moi, le manga à la main et la bouche ouverte dans une vaine tentative pour calmer ma respiration haletante.

J'observai un à un les passagers, me demandant si oui ou non je les avais déjà vus dans ce train ou ailleurs, cherchant à accrocher un regard un peu particulier en même temps que je me répétais en pensées, comme une litanie, « tu es parano ». Je pris place près d'une fenêtre et fermai les yeux.

Inspirer... expirer... voilà, j'étais de nouveau calme. J'ouvris les yeux alors que le train redémarrait, et lâchai un hoquet de surprise.

Des yeux bleu glaçants m'observaient du quai, et je les reconnus.