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• Interlude II •
Jay
Le monde magique, un siècle plus tôt.
Les Cieux avaient depuis quelques années peaufiné et déposé sur Terre leur toute nouvelle création. Les créatures qui détenaient tous les pouvoirs, une version améliorée de l'humain, des êtres qui maniaient la nature et collaboraient avec les essences de notre monde. Les sorciers.
La lignée ne devait cesser de croître pour conquérir le monde magique et régner sur cette face de l'humanité que les Cieux leur avaient confiée. Ils en avaient fait de toute sorte, certains capables de détendre le vent, d'autres de se jouer des flammes et même un peuple capable de dompter le sable. Personne ne pouvait rien contre eux, pas même les fées qui existaient depuis bien plus longtemps.
Tout commença par l'apparition de l'Assemblée. La demeure qui avait accueilli les premiers pas du premier sorcier. Le Seigneur Park.
Un homme dont le cœur, l'esprit et tous les vaisseaux affluant au sein de son corps étaient rythmés par la puissance de chaque élément. Il était le père des sorciers, celui qui les avait tous fait exister. Le point d'ancrage dans cet océan inconnu où tous allaient plonger. Grâce aux Cieux lui ayant offert une belle femme au nom d'Esmée, le début d'une descendance chargée de robustesse put enfin voir le jour.
Esmée lui avait donné un premier fils, un bonhomme aux cheveux d'or. Puis un second, un charmant garçon aux mèches à la teinte de la nuit. Les deux avaient hérité des dons du père, l'un plus que l'autre. Leurs âmes étaient nourries de magie, leurs cœurs battaient sous la chamade de la sorcellerie.
Et une fois les deux frères ayant atteint une certaine maturité, l'âge de s'envoler sans les ailes de leur mère, cette dernière fut contrainte de retourner de l'autre côté, de traverser le portail magique et de vivre sa vie d'humaine aux côtés de ses semblables.
C'est alors sous le toit de l'Assemblée que les trois sorciers créèrent plus de secrets que de découvertes sur leur nouvelle réalité.
***
Sa chambre ne lui servait en réalité qu'à fermer les paupières à la recherche de Morphée, et cela à tout moment de la journée. Jay pouvait dormir la nuit et s'occuper le jour, où au contraire, il traversait l'Assemblée sous le regard des étoiles et fermait ses yeux sous la chaleur du soleil.
À ce moment précis, Jay fuyait son paternel. Il avait bien fait attention à ce qu'aucun regard trop curieux ne court derrière lui, laissant ses pas l'emmener au sommet de l'Assemblée. Il ralentit au bout du couloir, prenant un dernier virage avant de gravir l'échelle et de pousser la trappe qui menait au grenier. Il pouvait enfin respirer.
Le bois craqua sous ses pieds mais la légèreté de ses pas faisait que d'en bas, on ne l'entendait pas. Jay tâtonna dans l'obscurité, il connaissait l'endroit comme sa poche mais il n'était jamais à l'abri d'un vase tombé ou d'un carillon qui s'ajoutait. Ce fut pile au moment où Jay décida d'allumer les flammes dans ses yeux, que celles des bougeoirs se mirent à danser sur leurs mèches, illuminant la pièce et par ailleurs, le lustre qui venait de perdre près de 10 centimètres de hauteur juste sous son nez. Un peu plus et il aurait fini défiguré.
Jay avait fêté son dix-huitième anniversaire il y a quelques mois maintenant. Une certaine fierté l'avait gagnée quand il avait réussi à enflammer la bougie sans allumette et l'éteindre sans même s'en approcher. Quel efficace héritage son père lui laissait. Cela faisait près de trois ans que ce raffut s'était réveillé en lui au même titre que les paillettes éclatantes dans ses yeux, héritées de son père.
Les sorciers allaient enfin exister. Et cette fierté fut plus grande encore quand, Jad, son frère cadet avait fini lui aussi par laisser la magie prendre possession de son esprit.
Jay avait un temps d'avance sur Jad. Il maniait déjà, jouait déjà avec la nature du bout de ses doigts. Néanmoins, la différence les avait marqué, bien plus que ce que le Seigneur Park, et même les Cieux avaient pu imaginer.
Puisque oui, il fallait le repréciser. Jay fuyait celui à qui il devait la vie.
Il était comme lui pourtant. Il avait tout pour gravir les échelons et mener son espèce au sommet. Mais Jay ne savait pas, Jay ne pouvait pas. Alors Jay restait au grenier, slalomant entre les mannequins habillés et les cartons qu'il avait vidé, fouillé et pas pris la peine de ranger.
Mais ce qu'il préférait faire au sommet de l'Assemblée, c'était s'amuser avec les bouteilles vides de liqueur que son père consommait. Jay en faisait une jolie file indienne et, du bout de ses doigts, il créait un souffle frais qui s'immisçait dans le goulot de la verrerie. Des sons doux en sortaient, une légère mélodie qui l'apaisait, si seulement ce n'était que ça être sorcier. Parfois, (souvent pour être honnête) sa force lui échappait et un son strident se dérobait des bouteilles de verre, Jay en était même déjà venu à briser cette fragile matière par le souffle de ses doigts.
Et aujourd'hui, alors qu'il réussissait enfin à faire durer dans le temps sa tendre mélodie, un gnome le fit sursauter, et par ailleurs exploser les seuls instruments de son orchestre de verre.
— Toutes mes excuses Monsieur Jay, s'inclina le gnome.
Jay répondit d'un simple sourire, son attention et sa concentration maintenant figées sur les morceaux de verre qu'il tentait de faire voler jusqu'au carton du fond qui lui servait de poubelle. Ils se mouvaient dans l'air, un par un, sous le regard peiné du gnome qui allait et venait entre le léger souffle qui berçait la verrerie et le bout de langue du blondinet qui s'échappait d'entre ses lèvres. La créature attrapa alors de ses mains acérées les derniers résidus qui jonchaient le sol.
— Tu te dépêches parce que c'est mon père qui t'envoie ?
En plus de s'être invité dans sa cachette attitrée et d'avoir saccagé son orchestre de verre, le gnome ne lui répondit pas, époussetant plutôt les dernières traces de poussière qui salissaient ses doigts.
— Je n'irais pas, contesta fermement Jay.
— Et comment vais-je lui expliquer cela ?
— Dis lui que je suis malade, en balayant l'air de sa main.
Le gnome soupira, sa tête basculant sur le côté avant de continuer :
— Monsieur Jay, s'il vous plaît.
En effet, Seigneur Park avait attendu que ses deux fils soient animés par les éléments pour leur inculquer le savoir que les Cieux lui avaient chuchoté à l'oreille. Les trois sorciers avaient posé le point final sur la théorie il y a fort longtemps. Il leur avait fallu une semaine à peine, celle suivant l'apparition des éléments de Jad, pour que les deux frères puissent assimiler toutes les informations que leur père avait à leur donner. Mais cela faisait une poignée de mois que la pratique durait, trainait, et que Jay la fuyait.
Il préférait manier ses éléments à sa guise. Notamment les flammes des chandeliers qui perdaient de leur éclat, il s'empressa de les aviver, celles dans ses yeux n'y manquaient pas. Et cela sous le regard interrogateur du gnome qui sentait la chaleur prendre doucement vie dans la pièce, doucement vie sur sa peau et jusqu'à la pointe de ses oreilles. Jay souriait à s'en fouler la mâchoire, une jolie grimace que le gnome analysa d'un sourcil haussé. Pourtant, son expression interrogatrice dégringola sur son visage au même titre que les frissons dans son dos lorsque les doigts nus de Jay s'approprièrent l'arrière de son oreille, pile à l'endroit où le gnome rangeait les quelques mèches de cheveux qui avaient l'habitude de le déranger. Il l'aurait presque blessé de ses griffes acérées si Jay ne lui avait pas présenté devant son nez un chrysanthème, belle fleur de l'éternité.
La bouche entrouverte, le gnome aurait pu gober les mouches ou apprécier la saveur de l'air. Jay pensait vraiment pouvoir l'amadouer avec une simple fleur ? Il aurait au moins pu proposer un bouquet. Le gnome s'apprêta à parler mais Jay le fit taire en réduisant son cadeau en cendre. Plus de traces de tige ou d'une quelconque pétale, son chrysanthème s'évapora entre les murs du grenier en une délicate fumée.
— C'était prévu, mentit Jay, les yeux rivés sur la montagne de cendres qu'il venait de créer.
— Heureusement que je comptais la refuser.
Jay espérait que son spectacle fonctionnerait, bien qu'au fond, il en doutait. De plus, ce foutu gnome n'était pas du genre à abandonner, lui rabâchant de descendre, lui répétant en boucle les mots "leçons" et "père". Tout ce que Jay détestait.
Pourtant, il fut bien contraint d'obéir. Qui oserait décevoir le père des sorciers ? Sûrement pas son fils aîné. Quoique, rien ne l'en empêchait, cela aurait été une fois de plus parmi toutes celles qui précédaient.
Jay fut contraint de baisser ses armes pour s'engouffrer avec le gnome dans les couloirs de l'Assemblée. La seule et unique raison qui l'avait poussé à céder était le dernier argument de la créature :
— Ne vous en faites pas Monsieur Jay, la salle de combat est condamnée, c'est un cours théorique que votre père veut vous donner, dans la salle de classe de l'aile droite.
Ce fut donc sans retenir la trappe ni ralentir ses enjambées qui martyrisaient le vieux sol de l'Assemblée que Jay s'enfonça dans les couloirs, suivi de près, ou peut-être de loin, par le gnome, il n'en savait trop rien.
— Mon frère y est déjà ?
Mais on ne lui répondit pas.
— Tu m'en veux parce que j'ai brûlé ta fleur ?
Seuls les rayons glacés du soleil s'infiltrant par les fenêtres lui répondirent. Et en plus de le leurrer, ils n'aimaient pas bavarder.
Jay se retourna, ne percevant qu'une tâche au loin ; la silhouette du gnome se reflétant dans ses yeux. Il était figé, un bras le long du corps et l'autre montrant la direction opposée.
— Oui votre frère y est déjà, cria le gnome au bout du couloir, il est par là-bas ! en secouant le bout de ses doigts.
En effet, le cours se déroulait sur l'aile droite, il s'agissait simplement de sa façon d'encore éviter ce qui l'attendait...
***
Rester assis le derrière scotché sur sa chaise lui donnait des crampes au fessier. Cela devait faire une heure ? Peut-être deux, et ça ne le choquerait même pas si on lui annonçait que cela en faisait trois !
Il n'écoutait même plus la voix de son paternel, elle titillait son cerveau d'un bruit de fond si lointain qu'il n'en comprenait plus rien. Jay se battait contre ses pensées, esquivait les deux ou trois sorts que son père avait schématisé sur le tableau à craie, même le crissement du bâtonnet sur la surface verte ne l'avait pas fait émerger. Et si un gnome apparaissait ? Son père le virerait. Et s'il se levait ? Son père le jugerait. Est-ce qu'il pouvait indéfiniment plier ce morceau de papier qu'il ne cessait de martyriser depuis son arrivée ..?
— Jay !
... La réponse était non.
Sa voix le frappa si fort que Jay eut l'impression de la sentir résonner partout à l'intérieur de lui, elle en faisait trembler son palpitant et vibrer ses os. Pire encore, les décibels qui avaient frôlés les nuages réveillèrent tout ce que Jay s'efforçait de cacher quand son paternel se tenait à ses côtés. Ses flammes quittèrent son esprit pour éclairer ses orbes et par la même occasion, aviver le morceau de papier qui traînait encore sur son bureau.
— Éteins moi ça.
Jay se releva. Terrible idée, ses jambes peinaient tout d'un coup à le supporter. L'angoisse s'accrochait à ses mollets telle une sangsue qui lui suçait le sang, aspirant tout le courage qui courait dans ses veines. Il ne lui restait plus rien, rien mis à part ses poumons, qui, affolés, s'efforcèrent à faire entrer la moindre poussière d'oxygène dans son esprit malmené. Pourtant, ce fut le vent qui se défit de ses doigts tremblants. Il souffla si fort dans la pièce que Jay n'en remarqua pas le soupir qui s'échappa des lèvres de son paternel. Son pouvoir s'agitait, nourrissait les flammes qui finirent de dévorer la feuille de papier pour mordre le bois de la table.
Jay était tétanisé, la lueur des flammes ne faisait que montrer aux yeux de tous son visage déformé par la peur. Même la chaleur qui l'encerclait ne pouvait le faire bouger. Ça recommençait. Encore.
Son cerveau se figea malgré le rythme effréné que prenait chacune des cellules de son cœur. Il battait, frappait, faisait paniquer Jay. Chaque boum essayait de le ramener à la réalité, mais Jay était bloqué dans la sienne. Celle qui lui disait qu'il n'était qu'une fausse note dans la partition que son père avait créé, un trou béant dans le vêtement cousu par les doigts déterminés de son paternel. Il lui devait tout mais ne lui offrait rien.
Il s'en voulait. Et si les Cieux l'avaient simplement créé pour user de son don pour des futilités ? Cela lui suffisait. Mais lui auraient-Ils réellement offert toute cette puissance pour allumer des bougies et jouer de douces mélodies dans de la verrerie ? Jay savait que son père, son frère et lui existaient pour faire perdurer leur capacité.
Et il avait fallu qu'il soit incapable de se canaliser.
Le feu avalait la table comme un affamé, la chaise ne tarderait pas non plus à y passer et Jay ne bougeait toujours pas le moindre doigt.
— Ça ne cessera donc jamais ? Jay ! Réveille-toi bon sang !
Les bruits. Les voix. Les cris de son père, ceux du vent. Tout ce qui se tramait autour de lui appuyait plus fort sur la corde mal accordée que Jay était dans cette partition qui se devait d'être sans faille. La chaleur continuait de monter, il n'avait pourtant qu'à faire appel au troisième élément qu'il possédait. Un coup d'eau et tout cesserait. Mais rien ne venait. Ce fut à peine si l'on entendait les canalisations distribuer plus fort le liquide qui y vivait.
Pourtant, tout finit par s'arrêter, et ce n'était pas grâce à lui. Son père non plus n'avait pas levé le moindre pouvoir, il voulait qu'il se débrouille, qu'il comprenne, qu'il réussisse enfin. Mais Jay sortit de ce cauchemar grâce au jet d'eau lancé par son petit frère, encore assis, le liquide dégoulinant le long de ses doigts jusqu'à tâcher les manches de sa chemise blanche.
Jay ne le remercia même pas. Ses yeux parlèrent pour lui, ils lui demandaient pourquoi, le grondaient de leur couleur similaire à celle des abysses des ténèbres.
Son père, debout sur l'estrade, s'approcha. Ses chaussures firent craquer le bois des marches, ses mains cherchèrent refuge dans les poches de son pantalon à pince. Et ses mots l'attaquaient alors que le ton de sa voix ne voulait pas le menacer.
— Qu'est-ce qui se serait passé si Jad n'était pas intervenu ?
Ses orbes quittèrent son petit frère pour s'attarder sur les souliers de son père. Il ne pouvait relever la tête, comme si sa nuque se devait de supporter toute la tension de la pièce. Elle était froide mais lui brûlait la peau, faisait rouler la sueur sur son dos.
Ledit Jad ne savait que faire, il imitait son grand frère. Bien que lui n'ait pas échoué, ses joues se colorèrent en rouge.
— Réponds moi Jay, d'un ton sévère.
— Je-
— Tu aurais tout brûlé, encore. Tout détruit, encore. Rien contrôlé, encore.
Ce timbre là, ces mots là, empreints de jugement, souillés de frustration brouillaient plus sa vision que tous les cris et coups qu'il aurait pu recevoir.
— Je le sais père.
— Alors pourquoi tu ne fais pas ce qu'il faut pour y mettre un terme !
Sa paume frappa ce qu'il restait du bureau de Jay. Et le meuble, noirci par la chaleur, brûlé de douleur, s'effondra sous la force qu'il fut contraint d'accepter.
Jay sursauta, esquivant de peu les morceaux de bois qui auraient pu balafrer ses pieds cachés dans ses souliers. Jad aussi eut un mouvement de recul sur sa chaise.
— J'essaye ! Je fais de mon mieux père ! en relevant enfin la tête, ses bras se mouvant contre son gré.
Soudain, la porte s'ouvrit sans qu'aucun des trois sorciers ne bouge mais Jay et son frère comprirent bien vite qu'il s'agissait d'une œuvre de leur cher père, le seul capable de déplacer les meubles par le souffle de son corps sans avoir besoin de le mouvoir. Il ne fallut pas le moindre regard, encore moins un petit mot pour que Jad comprenne qu'il n'était pas le bienvenu dans cette pièce qui emprisonnait le savoir. Il se leva donc de sa chaise sous l'ordre silencieux de son paternel et quitta la pièce, un dernier regard vers Jay qui gardait le sien figé mais tremblant dans les prunelles de son père.
— Tu ne fais pas assez, ce n'est pas de simples étincelles que tu dois contrôler, mais l'entièreté de tes pouvoirs ! Sois reconnaissant de posséder cette puissance, travaille plus et prend enfin tes responsabilités Jay.
A quoi bon parler s'il connaissait ses torts ? Jay n'avait rien à redire, Jay devait se contenter de hocher la tête et d'accepter...
— Si ton frère l'a compris, il n'y a pas de raison que tu ne puisses pas le faire aussi.
... Mais son paternel devait admettre que jamais Jay ne serait comme son frère cadet.
— Tu es mon fils Jay, et je t'aime, mais je n'hésiterais pas à faire ce qu'il faut pour que tu comprennes l'importance de la situation.
Sur ses derniers mots, Jay s'inclina et fuit la pièce quand la permission lui fut donnée.
L'air qui volait dans le couloir lui fit l'effet d'une bouffée fraîche. Jay ferma les yeux, appréciant l'oxygène qui se baladait dans sa trachée pour alimenter ses poumons enfin calmés des malheurs subis plus tôt. Néanmoins, il ne fut pas tranquille bien longtemps. Il ne l'était jamais vraiment en fin de compte; si ce n'étaient pas les gnomes de son paternel qui le suivaient, son petit frère, bien que l'écart ne soit pas profondément creusé, le faisait, ayant décidé de lui courir après dans les escaliers de l'Assemblée.
— Qu'est-ce que tu veux ?
— Rester avec toi.
Jay ne put retenir un soupir. Était-il trop dur avec lui ?
— Laisse-moi tranquille.
Jad n'en avait que faire. S'ils avaient bien un point commun, c'est que les deux frères n'écoutaient rien. Alors Jad ne fut pas le moins du monde gêné ou agacé de suivre son frère aîné dans le grand jardin que les gnomes entretenaient. Jay avait eu vent que l'herbe fraîche et les lauriers leur rappelaient leur village adoré.
— C'est comme ça que tu me remercies ? en accélérant le pas pour se retrouver plus près de Jay.
— Je dois te remercier de toujours réussir ce que tu entreprends ?
Alors que le vent soufflait sur ses mèches assorties à une nuit d'hiver, Jad se stoppa dans sa course, rattrapé par les mots crachés par Jay.
— D'avoir sauvé ta mise, précisa Jad.
Jay sentit sa présence s'éloigner, peut-être même que son égo se faire un peu bousculer.
— Tu ne devrais pas faire ça lorsque père nous enseigne, continua le cadet en rattrapant son aîné.
— Plier des morceaux de papier ou mettre le feu à des tables ?
Jad serra les dents avant de répondre, son cerveau se transformant en une véritable balance. Pour ou contre parler à Jay ?
— Ne pas porter attention à ce qu'il nous apprend, c'est important.
Le poids de la vérité pesait décidément plus lourd que celui de la cacher.
— C'est important pour toi, pas pour moi, se lamenta Jay, son derrière rejoignant l'herbe fraîche.
— Jay... soupira le cadet, tu as la chance de posséder tous les éléments, ne gâche pas tout s'il te plaît.
— Toi aussi tu t'y mets maintenant ?
Jad s'arrêta dans son élan de s'asseoir à ses côtés. Il regardait Jay arracher les brins d'herbe, aimables d'accueillir son fessier.
— Ne le prends pas mal, je suis désolé... C'est juste que parfois je me dis que ce serait formidable d'être toi.
A cet instant, le gazon du jardin remercia Jad, en seulement quelques mots Jay avait arrêté de le martyriser. Ses yeux allaient et venaient entre ceux fuyant de son cadet et son avant-bras qu'il grattait tant qu'il finirait presque par en faire couler une goutte de sang.
— Qu'est-ce que tu racontes ?
Ses mots volèrent d'entre ses lèvres, un peu comme le soupir de Jad alors qu'il s'asseyait juste face à Jay, leurs quatre semelles se rencontrant.
Il était ridicule. Jad n'avait rien à envier à Jay. Il se faisait sermonner sans cesse, se retrouver embêté à chaque fois que le mot "pouvoir" était prononcé, alors que lui... Jad n'avait qu'à lever son petit doigt pour que toute son énergie émane de lui dans un contrôle que Jay n'avait encore jamais expérimenté.
Jad était tout ce que Jay aurait voulu expérimenter.
— Tes dons sont apparus depuis une année à peine et tu les manies déjà à ta guise, poursuivit Jay, irrité.
— Je suis tellement épuisé que j'ai l'impression que cela dure depuis une éternité !
L'ingratitude frappait les adolescents de plus en plus tôt, seize ans à peine et Jad se plaignait presque d'exister, Jay ne put se résigner à lui flanquer un coup dans le pied, qui les fit rire tous les deux.
Jad s' allongea, les yeux rivés vers les nuages qui se moulaient pour raconter leurs histoires au ciel bleu.
— Tu te rappelles quand j'ai eu mes éléments ? Tu étais la première personne à qui je l'ai annoncé, tu es passé avant père, Jay tu te rends compte ?
— J'aurais préféré que tu ailles geler son lit et pas le mien.
— Tu n'en as pas marre d'être agaçant ? en poussant sur la semelle de Jay qui se colla à la sienne.
Jay s'autorisa à sourire. Contrairement à ses bras tendus vers l'arrière qui supportaient son poids, ses commissures ne s'épuisaient jamais. Jay n'était pas du genre à montrer toutes ses dents, un léger sourire en coin qui traduisait le poids de ce qu'il ressentait.
— Tu as tout fait fondre avant que père n'arrive de toute façon, poursuivit Jad.
Le pire dans ce que Jad racontait, lui qui tenait simplement à se remémorer un instant qu'ils avaient partagé, c'était que ce jour-là aussi, Jay n'avait rien contrôlé.
— Tu sais Jay quand je disais que je t'enviais, tu n'avais pas à le prendre mal... C'est juste que j'admire ta puissance. J'ai toujours pensé qu'un jour j'aurais d'autres pouvoirs qui arriveraient, pour être comme toi... Mais je n'en ai que deux et j'en aurais toujours deux, et je ne suis rien moi, à côté de toi.
Le pire dans ce que Jad racontait, lui qui tenait simplement à se confier à son frère aîné, c'était que ce jour-là aussi, Jay aurait aimé être comme lui.
***
Les jours se muaient en nuits, et les nuits devenaient des puits à murmures accusateurs. L'impression qu'on le pointait du doigt, qu'on criait à chacun de ses défauts sans pour autant chuchoter à la moindre qualité. La vie de Jay se détériorait, sa relation avec son père était complètement sabotée. Ce qui aurait dû les unir, cette magie qu'ils partageaient devenait un fossé infranchissable.
Son père le voyait comme un fardeau, une entrave à son ascension et à la perpétuité des sorciers. Et Jay ne pouvait que répondre par le chagrin et la haine. Le blond s'était fait happer par la négligence de son père, une vive douleur qui se transformait aujourd'hui en une rancœur infinie.
Au fil des années, la lumière ne parvenait pas à le rattraper, pas même Jad qui avait tout essayé pour retrouver son frère aîné. Jay ne pouvait plus supporter le regard plein de tendresse que leur père lui offrait à chaque fois, ce regard qu'il aurait tant aimé partagé avec lui aussi.
Il devait subir le noir de ses yeux passer de la frustration au dégoût qu'il éprouvait à chaque fois que leurs orbes se rencontraient. La famille se brisait, le sentiment d'exclusion se renforçait.
Malgré tout ce qu'il se passait, tous ces ressentiments accumulés, jamais ô grand jamais Jay n'avait songé à heurter le moindre grain de poussière qui les constituait ; il s'efforçait de sourire pour ne pas exploser. Il avait félicité son frère pour son mariage, sa belle-soeur pour sa grossesse, et cela malgré les messes-basses de son père à son égard. Puisque Jad avait un avenir, Jad était devenu un grand homme, un grand sorcier. Et surtout, Jad allait pouvoir offrir à son fils l'héritage magique que tous les Park possédaient.
Aujourd'hui encore, Jay serrait les dents. Non pas pour faire taire tous les mots rêvant de s'échapper de ses lèvres, mais pour apaiser la douleur physique qu'on lui infligeait à ce moment même.
Sa vie prenait un tournant fatal en cette nuit dénuée d'étoiles.
Poussé à bout, les insultes avaient fusé, sa voix s'était levée envers celui à qui il devait la vie. Et désormais il en payait les frais. Il ne se débattait même pas, à quoi bon ? Il en avait déjà trop fait.
Jay eut à peine le temps de réaliser que les limites avaient été dépassées que son corps se fit propulser contre le miroir du hall d'entrée. Chacune de ses vertèbres se moulait au verre qui lui traversait la peau, qui faisait rouler le sang dans son dos. Il n'eut pas le temps de se plaindre puisque de loin, son père en faisait son pantin. Par la simple maîtrise du vent, Seigneur Park releva son fils aîné, ses jambes ne touchaient plus le sol et ses vêtements déchirés laissèrent sa peau lésée salir les murs de l'hémoglobine qui coulait à flot.
Du noir, il peindrait tous les murs en noir après ça.
Les lèvres de Jay virèrent au bleu et ses mains agrippèrent si fort sa gorge que la peau s'en s'arrachait, il tentait de se délier d'un lien invisible à ses yeux mais que son père contrôlait. Lorsque Seigneur Park relâcha la pression à son cou, l'oxygène qui s'infiltrait lui brûlait la trachée. Ce fut pire encore que d'en être privé. L'air bouillonnait. L'impression que tous ses organes s'effritaient, qu'ils n'étaient plus que cendres dans l'incendie qu'était son esprit.
Jay hurlait des excuses, suppliait son pardon. Mais la pitié n'était pas prête d'arrêter l'auteur de ses maux. Au contraire, son sourire se relevait à chaque cri de douleur que son propre fils émettait.
— Père ?
Et ce qu'il croyait être son sauveur était devenu le nouveau responsable de ses pleurs.
— Tu tombes bien.
Ses mots prononcés et toute la magie s'envola. Jay tomba à genoux, la douleur était telle que ses os se mirent à vibrer.
Les pupilles rondes de Jad enfermaient la catastrophe du hall et la panique de Jay.
Jad s'inquiétait pour lui ? Peut-être qu'il rêvait.
Malheureusement, le blond eut à peine le temps de cligner des yeux, de revenir à la réalité que des ronces se dérobèrent de sous ses pieds. Elles l'immobilisaient contre le mur, lui grignotaient les mollets pour venir dévorer ses cuisses et enfonçaient leurs épines dans son dos mis à nu et déjà lésé.
— Occupe toi de lui, ordonna Seigneur Park.
— Q-quoi ?
— Tu veux finir comme lui ?
Il hurla ses mots et un éclair s'échappa de ses doigts, effleurant Jay qui ne cilla même pas, trop épris par la scène se déroulant sous ses yeux.
Ceux de Jad abandonnèrent leur couleur chocolat pour laisser place à des prunelles grises où brillaient quelques éclats bleus.
À ce moment précis, frappé par le vent, agressé par l'eau et détruit par la glace, Jay savait que plus jamais il ne partagerait leur vie.
***
Le ciel pleurait sa détresse, laissait sa rage le transpercer de ses éclairs tranchants. Pour une fois, Jay n'y était pour rien. Son corps était bien trop meurtri, son coeur et tout son esprit aussi pour exprimer ses dons qui encore cette nuit, lui avaient pourri la vie.
Il n'avait d'autres choix que de quitter l'Assemblée. Il ne pouvait pas retourner se coucher, se réveiller le lendemain et déjeuner avec ceux qui l'avaient humilié, ceux qui partageaient son sang et ses pouvoirs qui l'excluaient au lieu de l'intégrer dans cette lignée.
Mais Jay n'avait pas de plan, nulle part où se réfugier, alors il n'avait pas vu plus loin que la forêt qui bordait l'Assemblée. Il y passerait la nuit, et peut-être même celle d'après. Peu importe les rumeurs y courant, tant pis si on venait le chercher, ça ne risquait pas de toute faç-
— Débarrasse-toi d'eux.
Jay se retourna aussitôt dans son lit de fortune, quelques feuilles qu'il avait traîné à l'intérieur d'une petite grotte que pas même la lune ne parvenait à illuminer.
— Débarrasse-toi d'eux.
Ses yeux se démenèrent à courir entre les arbres et les éclairs, cherchant à attraper l'auteur de ses mots qui lui donnaient froid dans le dos. Alors qu'il se relevait, des petites flammes au fond des yeux pour le guider, des rires se mirent à lui geler la colonne.
— Qui est là ?
Malgré ses appels, ses yeux aux milles couleurs qui arpentaient branches et terriers à la recherche de cette voix qui l'embêtait malgré le bruit que le ciel commettait, Jay ne parvint à y poser une silhouette.Peut-être qu'il délirait ? Que la fatigue le rendait fou ? Que la foudre l'avait frappé ? Il décida de faire demi-tour, rejoignant sa chambre de pierres pour la nuit. Jay réussit à poser une flammèche sur sa paume pour un peu plus l'aiguiller. Elle illuminait son chemin et la fée assise sur le rocher aux pieds de son pauvre matelas.
— Qu'est-ce que-
— Tu devrais te débarrasser d'eux.
Tout en Jay s'éteignit ; ses yeux, sa main, et sa lucidité. Pourtant, la fée, il la voyait encore, ses ailes dorées brillaient dans cette nuit accompagnée par les étincelles du ciel.
— Et je peux t'aider.
— Je n'ai pas besoin de ton aide.
La créature quitta son perchoir, un sourire aux lèvres qu'elle cacha à peine de ses doigts fins. Ses ailes obnubilaient Jay, plus encore que son sourire plus lumineux que la lune. Ses mèches orangées lui donnaient l'allure d'un renard, elle allait si bien à la forêt, sa jupette et son corset tout de roses assemblées renforçaient cette idée. Ce fut à peine si Jay fit attention à la couronne qui tenait sur sa tête alors qu'elle volait tout autour de lui.
— Nous serons déçues si tu n'acceptes pas, Jay.
Une nouvelle créature ailée sortit de sa grotte louée pour la soirée. Une blonde à la tresse ornée de pétales bleues. Et une troisième, une quatrième, et une armée de fées se dressa devant un Jay croyant rêver. Elles riaient de sa bouche entrouverte, de ses doigts aussi tremblants que ses prunelles redevenues naturelles.
— Et je ne pense pas que tu veuilles nous décevoir, pas vrai ? demanda la rousse qui se tenait devant sa troupe.
Ce fut au tour de Jay de redresser le coin de ses lèvres.
— Si tu savais comme je n'en ai rien à faire.
Jay leur tourna le dos, tant pis, il préférait dormir sous la pluie.
— Tu préfères rentrer ?
Même sans les regarder, Jay se sentit jugé, sa salive eut du mal à passer dans sa gorge. On avait touché à sa corde sensible, celle mal accordée qu'il désirait tant cacher.
— Ou te venger ?
Le ciel gronda plus fort. Mais Jay ne cilla pas. Son corps se tendait, son esprit se tordait, et ses yeux, ses belles prunelles que son paternel lui avait légué n'avaient jamais autant rayonné qu'aujourd'hui.
— Comment ? osa Jay.
— Vous n'êtes pas les seuls à être munis de capacités, tu sais ?
La rouquine s'approcha de lui, suivie de deux amies. Elles volaient autour de lui dans un rythme que Jay ne parvenait pas à suivre des yeux, une chorégraphie qu'elles seules maîtrisaient. Elles tournaient à ses pieds, autour de sa tête, partout où son corps saignait. Jay ne décelait que les paillettes se dérobant de leurs ailes pour tâcher ses vêtements déchirés et sa peau souillée. Et aussi bizarre que cela puisse paraître, cette texture sur sa peau lui fit un bien fou. À la vue de son teint qui se recolorait, de ses plaies qui se fermaient et de son corps qui se détendait, l'armée de créatures miniatures riait, riait et riait, alors Jay ne put que les imiter.
Elles voulaient l'aider, et l'avaient provué. Elles voulaient le venger, alors elles échafaudèrent un plan ; immobiliser Seigneur Park grâce à leur poussière enchantée, et Jay se chargerait de lui faire payer son adolescence torturée.
— Les Cieux nous le feront payer, on ne peut pas, mon père a gagné et gagnera pour l'éternité.
Anastasia, la rouquine qui tenait tant à faire exploser la rage qui sommeillait en Jay, s'installa sur son épaule.
— Nous, les fées, n'aurons pas de problème, les Cieux ne nous accordent plus aucune importance.
— Mais pour ce qui est de toi, ajouta Mélusine, la blonde tressée, le risque en vaut la peine.
— Ne vaut-il pas mieux deux ou trois années de malheur céleste plutôt qu'une vie entière de calvaire ? tenta Anastasia.
La balance tanguait, à droite et à gauche. Oui ou non ? Tuer ou supporter ?
— Et La Présidence ?
— On va t'aider à fuir avant qu'Elle ne soit mise au courant.
— On s'occupe de tout Jay, le conforta Anastasia, toi tu n'as qu'à laisser parler tout ce que tu as subi, tout ce qui te consume. Laisse tes pouvoirs exploser.
Il n'allait pas chercher à se contrôler. Il n'allait pas faire taire la rancœur qui hurlait en lui. Jay venait de trouver un moyen de cesser ce calvaire, et personne allait l'en empêcher. Au fond tout ce qui lui manquait c'était quelqu'un qui le soutenait.
***
L'Assemblée était plongée dans le noir, mais l'obscurité ne valait pas celle qui consumait le coeur de Jay.
Les marches tremblaient sous ses pas, de peur, par la confiance qui se dégageait de lui qui ne faisait pourtant que marcher, la tête haute, le dos droit et accompagné des hurlements du tonnerre et de la clarté des éclairs. Ils illuminaient le temps d'une seconde ses yeux aux milles couleurs et ses lèvres relevées, étirées par tout le courage qu'il portait.
Jay n'était pas d'humeur à reculer, déjà au sommet des escaliers, mais ses pouvoirs mijotaient encore dans ses veines qui bouillonnaient à mesure qu'il s'enfonçait dans les couloirs de l'Assemblée.
Toutes les portes étaient verrouillées. Excepté celle qui menait à la bibliothèque, celle qui lui avait offert une vue sur son paternel qui, de dos, ne vit pas son fils aîné s'approcher de lui, arpentant les dos des livres du bout du doigt, d'anciens grimoires qu'il avait lui-même rédigé, et d'autres parchemins qui avaient eu l'honneur de connaître la sensation de sa plume les griffonner. Dommage, il n'en lirait pas ce soir, il n'en lirait plus jamais.
Lorsque les prunelles emplies de sagesse, brillantes d'autorité que Jay avait tant désiré briser, rencontrèrent ses propres yeux animés par la hargne qu'il possédait, Seigneur Park comprit que son destin était scellé.
Soutenu par les fées qu'il ne prit pas la peine de chercher, aucune seconde ne devant être manquée, Jay déchaîna ses pouvoirs tout droit vers son paternel.
Il ne savait même pas ce qu'il faisait. Il explosait. Il souriait, sadique, au son de ses éclairs qui grondaient dans la bibliothèque, emprisonnant son père entre des barreaux d'éclairs. Il frappa du pied, et le sol se mit à trembler, à se fissurer jusqu'à atteindre la prison foudroyante où Seigneur Park s'écroula, déstabilisé par le parquet qui vibrait.
Le blond avança dans ce tumulte où ses éléments régnaient, crachés par son esprit les ayant gardés enfermés pendant tant d'années par peur de voir la destruction le ravager. Une étrange sensation lui griffait le cœur et faisait rugir ses veines. Cette nuit il commandait enfin, il dominait enfin, et jamais il n'avait été autant reconnaissant d'être né sorcier.
Une odeur de brûlé se battait dans l'air, le vent hurlait à en faire s'évanouir les étagères. Son père ne le reconnaissait pas, jamais ô grand jamais il n'avait rencontré la détermination impitoyable qui cramait les orbes de son fils aîné.
— Il est temps de briser ces liens et de prendre ma vengeance, cracha Jay, le souffle saccadé.
Son père peinait à se relever, le dos meurtri, les jambes dévorées par les flammes se dérobant du sol fracassé. Jay riait, un son empreint par la cruauté qui noya sa raison et alimenta le déluge qui inondait son cœur. Il allait enfin gagner et c'est tout ce qui comptait.
— Si tu choisis cette voie, tu ne trouveras que colère et malédiction.
Seigneur Park abdiquait, un dernier soupir de dignité se déroba d'entre ses lèvres. Il avait fauté dans son devoir de père et assumait la puissance qu'il avait lui-même légué à son fils aîné. Le père des sorciers allait se faire châtier par les mains de son propre sang.
Dans un dernier son strident, un dernier mélange d'éléments, la bibliothèque plongea dans l'obscurité. On n'y décelait plus rien mis à part les cris, les derniers hurlements de terreur du Seigneur Park dont Jay arrêta les battements de cœur.
D'un coup, Jay eut froid. Terriblement froid. Son cœur se calma, l'adrénaline s'envola. Son fort intérieur éteignit l'incendie grandissant en lui et par ailleurs ses pouvoirs qui mirent les voiles dans cette pièce qu'il avait amochée de son plein gré. Jay se tenait debout au milieu des débris, le corps de son père gisant au sol. Et la fureur illuminant ses yeux se fit remplacer par un immense sentiment de fierté. Jay n'avait pas le temps pour les regrets.
Dans la fumée dansant dans l'air accompagnée de la poussière, Jay chercha des yeux ses amies ailées. Il devait les remercier, mais surtout, se lancer dans leur plan et fuir l'Assemblée.
Il ne s'inquiétait pas même si leurs ailes colorées n'étaient pas censées passer inaperçues dans toute cette fumée. Mais aucune trace de paillettes ou de jupes entre les grimoires et le bois cassé.
— Anastasia ?
On ne lui répondit pas.
— Anastasia ?
Le silence était roi.
Sa nuque chauffait. Son estomac se serrait. Et il eut l'impression qu'on enfonçait un couteau dans chaque os de son dos.
— Anastasia !
Il se mordit les lèvres pour ne pas jurer.
— J-Jay ?
Le concerné se retourna à la volée.
Pour son plus grand malheur, il vit son petit frère dans l'embrasure de la porte. Jad lorgna la pièce, ses neurones comprirent, les larmes s'emparèrent de ses yeux. Ce fut à peine s'il parvenait à s'approcher de son frère, du corps sans vie de son père tant ses jambes peinaient à le supporter.
— Qu'est-ce que tu as fait ? dans un murmure que Jay avait à peine décelé.
Il vit les yeux de Jad se colorer de bleu et de gris.
— Qu'est-ce que tu as fait ? les décibels gravirent les cordes vocales du cadet.
— Elles vont arriver, ne t'en fait pas, elles vont arriver.
Jad n'eut même pas besoin de demander de qui il parlait, le devinant aisément. Au fond, il aurait aimé se tromper, il aurait aimé ne pas s'arracher les cheveux et maltraiter le sol de ses cents pas, il aurait aimé compatir et ne pas haïr le visage de Jay traduisant le vide le plus complet.
— Les fées, Jay ? Les fées ? Sérieusement ? Jad hurla si fort que son aîné commença à ressentir de nouveau cette chaleur s'emparer de son cœur. Quoi qu'elles t'aient promis elles ne viendront pas Jay ! Jamais ! Elles t'ont trahi ! Tu entends ? Des traîtresses !
Jay étouffa ses oreilles de ses doigts tremblants.
Jad disait n'importe quoi.
Jad disait n'importe quoi.
Jad disait n'importe quoi.
Jay fuit la pièce, manquant de heurter l'encadrement de la porte. Il tanguait, les yeux ravagés par les larmes, le cerveau embrumé par une fumée qui, comme lui, surchauffait. Il courait dans les couloirs, s'accrochait à la rampe des escaliers et criait le nom des fées. Il appelait Mélusine, implorait Anastasia. Pourtant, une fois arrivé à la lisière de la forêt, aucune fée ne pointa le bout de son nez, il n'y avait que ses cris qui firent bouger les feuilles et trembler les buissons.
— Où êtes vous ? cingla Jay, on avait un marché !
Sa gorge le piquait. Ses poumons le brûlaient. Ses yeux virèrent au rouge, ses veines ayant explosé en même temps que lui.
Épuisé, Jay s'écroula. Ses genoux cognèrent le sol trempé. La boue infiltra le tissu de son pantalon et on ne put déterminer si les gouttes ruisselant sur son visage étaient les siennes ou appartenaient au ciel.
Il hurlait après le monde, frappait la terre du poing jusqu'à sentir la chaleur de son sang couler sur sa peau.
Jay était méconnaissable.
Jad, trempé jusqu'aux os, passa presque inaperçu dans la nuit. Il attrapa l'épaule de son aîné et le retourna de toutes ses forces, Jay en perdit l'équilibre mais parvint à se rattraper sur ses coudes.
— Qu'est-ce qu'on va faire maintenant ? Hein ? Comment on va s'en sortir ?
Le tonnerre hurlait plus fort que lui.
— Qu'est-ce que je raconte ? Jad se mit à rire, ses mèches de la même couleur que le ciel se collèrent à son front. Qu'est-ce que tu vas faire ? Tu es condamné Jay ! Condamné ! Croire les fées ! Ses mains accrochèrent ses cheveux. Mais qu'est-ce qui t'a pris ? Elles nous haïssent, la jalousie les ronge et toi t-
— Ferme la ! rugit Jay.
Il envoya Jad valser d'un mouvement de bras. Les éclairs se déchaînèrent. Le corps du cadet décolla du sol. Les hurlements du vent furent bien trop violents pour laisser ceux de Jad résonner dans la colère de la forêt. Et en une seconde à peine, son corps frappa contre un rocher, chacun de ses os explosa. Même le rocher ne supporta pas le choc, complètement pulvérisé par la force de Jay. Il n'en restait rien, de vulgaires miettes toutes de rouge décorées. L'hémoglobine dégoulinait de la tête du cadet et imprégnait l'herbe malgré la vaine tentative de la pluie de tout effacer.
— Non, non, non.
Jay se rua vers son petit frère. Son cœur menaça de sortir de sa cachette à chaque battement, le suivant étant toujours plus douloureux que le précédent. À chaque foulée, l'odeur du sang s'infiltra dans ses narines, une effluve qui ne faisait qu'accentuer le tsunami noyant tout son esprit.
Il n'osa pas le toucher. Le regarder lui donnait la nausée. Et ses yeux grands ouverts malgré la vie qui s'était ôtée avaient fait courir un long frisson le long de sa colonne qui tremblait, tremblait et tremblait.
Son cerveau fonctionnait à reculons, debout face au corps sans vie, Jay mit un temps fou avant de crier et de reculer. Ses jambes s'emmêlèrent, il tomba dans la boue et rampa, l'épouvante plein les yeux pour s'éloigner le plus possible de son frère.
Du cadavre de son frère.
Ses vêtements lui collaient à la peau, une fois debout, sa main boueuse sépara les mèches trempées sur son front. Mais lorsqu'il releva les yeux, une lumière de l'Assemblée l'attira.
À la fenêtre, sa belle-sœur le regardait. De là où il était, Jay voyait sa main tremblante courir jusqu'aux yeux de son fils et son regard se perdit sur les traits de son neveu. Il ressemblait à Jad, les mêmes mèches corbeaux, le même nez droit et ce sourire qu'il ne verrait plus jamais.
Ils ne pouvaient pas vivre en ayant vu ça. Jay ne pouvait pas les laisser croire qu'il était un meurtrier. Ses yeux reprirent leur profondeur bestiale. Ils devaient aussi y passer. Ils allaient tous y passer.
La femme recula, la fenêtre ne les protègerait pas. Mais possédé, complètement égaré, Jay courut jusqu'à rejoindre la porte de l'Assemblée.
Il saisit la poignée.
Mais juste avant de l'enclencher, on le stoppa dans son élan.
Les fées venues l'aider ? Sa raison qui était parvenue à s'immiscer dans le brouillard de son impulsion ?
Jay tomba au sol, ses doigts trouvèrent rapidement ses tempes, tentant de faire taire l'écho de l'alarme dans son cerveau.
Il se fit traîner contre les marches du perron cognant sa tête, la douleur l'aveuglait, la panique l'empêchait de respirer. En dépit de la tension dans son cou, Jay parvint à relever la tête et l'effroi peignit ses yeux lorsque, malgré le flou agressant sa rétine, il distingua une liane encercler sa cheville. Elle le tirait, l'entraînait dans la boue malgré ses vaines tentatives de s'en défaire.
L'effroi prit possession de lui quand tout s'arrêta ; la tension dans sa jambe, la tristesse du ciel et le cheminement de son quotidien. Lorsque, tout vêtu de noir il reconnut ceux qui allait tracer son destin.
La Présidence l'avait arrêté.
***
Jay n'avait pas fermé l'œil de la nuit. Bien que le bazar tonitruant des Cieux avait cessé, Jay ne put se résoudre à rejoindre Morphée, et aussi étrange que cela puisse paraître, son lit de fortune ; un pauvre matelas rembourré par les fleurs du jardin des gnomes, n'était pas porté responsable. C'était de la faute des murmures de sa conscience, de la discussion qu'il poursuivait seul, avec comme unique compagnie l'étreinte de ses regrets.
On vint le chercher à l'aube. De loin, une ombre attira son attention, Jay se releva alors, passant ses bras entre les barreaux avant de s'y accouder. Un homme en noir apparut, un bâton à la main qu'il frappa sur l'acier des barreaux.
— Enfile ça, Les Présidents t'attendent.
Il saisit l'ensemble gris, un pantalon sous une chemise qui tenaient bien plus chaud que ses vêtements qui avaient traîné et gardé en eux toute la crasse et l'humidité de la veille.
Une fois habillé, il prévint l'homme en noir qui se retourna et sortit de sa poche un trousseau de clés, ouvrit la porte et encercla les poignets de Jay d'une corde qu'il n'aurait pas osé oublier.
Jay sortit de sa cellule, son pseudo-sauveur l'entrainait vers sa sentence et lui pointait le chemin du doigt avant de lui emboîter le pas.
Les Cieux avaient créé un véritable gouvernement ; La Présidence commandée par Les Présidents qui avaient comme petites mains, une troupe d'hommes vêtus de noir.
Une tension se posa sur ses épaules, un poids presque aussi lourd que les portes massives qui se dressaient au bout du couloir. Leurs gravures étaient en relief, des dessins que Jay jurerait avoir été tracés à la main, représentant les quatre éléments célestes dans un cercle que le blond imaginait être le soleil.
L'homme en noir tourna la poignée, et au bruit de la porte qui s'ouvrit, tout le courage de Jay s'envola.
L'homme le poussa à l'intérieur et il manqua de trébucher mais la clarté régnant dans la pièce le contraignit à s'arrêter. Jay cachait ses yeux, tentait de s'adapter à cette luminosité que le soleil pourrait jalouser.
Enfin habitué, ses yeux papillonnèrent avant de se perdre sur les murs dorés, ornés de colonnes et de fresques qui faisaient les éloges des Cieux. Les torches s'allumèrent dans une file indienne que Jay suivit, envoûté. Leur crépitement fit taire le silence du tribunal, projetant des ombres dansant sur les murs.
Malgré sa contemplation, Jay ressentait cette tension que l'atmosphère portait malgré les courants d'air qui traversaient la pièce sans pour autant la filtrer du stress et des murmures que Jay aurait tant aimé faire taire. Et pour la première fois depuis la nuit passée, ce n'était pas dans sa tête que les voix se levaient ; des dizaines de rangées de bancs se dressaient devant lui, debout au milieu d'un cercle rouge ancré au sol qu'il n'avait même pas remarqué à son arrivée. Aucune place n'était vacante, des centaines de personnes le fixaient, le pointaient du doigt, le jugeaient. Jay, ne put que fuir leur regard odieux ou débordant d'épouvante, préférant fixer le plafond, mais à sa grande surprise, il était absent.
Le tribunal était à la vue du ciel, à la vue des Cieux, prêts à aussi participer au jugement de Jay.
— Nous sommes réunis ici pour le procès de Monsieur Park Jay, premier fils du grand sorcier, Seigneur Park.
Le Messager des Cieux. Jay en avait entendu parler uniquement par le biais de son défunt père. En réalité, tout ce qu'il voyait en cet instant lui avait été conté dans des récits que son paternel lui racontait avant que ses pouvoirs n'apparaissent.
La Présidence, Les Présidents, les hommes en noir et le Messager des Cieux, des hommes et des femmes, des êtres humains sélectionnés par les Cieux eux-mêmes pour assurer la paix dans le monde magique. Et Jay était le premier prisonnier de la lignée.
Le Messager des Cieux, le seul se démarquant dans ce nuage de personnes toutes de noir vêtues, le seul portant une cape blanche au milieu de cette obscurité humaine.
Son cœur battait la chamade, même ses prières ne le calmaient pas. Mais est-ce que les Cieux allaient exaucer ses souhaits après tout le mal qu'il avait commis ?
Pourtant, son coeur fit plus que de se calmer, il s'arrêta pour battre plus vite encore lorsque, dans le public, il vit une demoiselle ailée à la chevelure orangée.
Anastasia le regardait, un rictus déformant son visage qu'il croyait innocent, mais maintenant que Jay comprenait, ne pouvait être que décrit par orgueil et insolence.
— Moi, Messager des Cieux, et mes confrères Présidents de ce tribunal avons été alertés par une communauté que les Cieux et moi-même regrettons d'avoir écartée. Les fées, prises de panique par le chaos que Jay commettait, nous ont tout de suite prévenu pour que des mesures soient prises.
Un tonnerre d'applaudissements gronda dans le tribunal. Anastasia s'inclinait de sa carrure miniature, souriait en battant des ailes, cachant sa méchanceté sous le rose qui lui peignait les joues. Les Cieux eux-mêmes ne manquaient pas de remercier la demoiselle et son peuple aux ailes de papillons, une brise fraîche leur cajola le visage alors qu'un arc-en-ciel grandissait au-dessus de leur tête.
— Et aujourd'hui, Monsieur Jay, je vous annonce votre châtiment, premier de la lignée des sorciers pour avoir assassiné votre père et frère cadet. Paix à leurs âmes.
Jay ne cilla pas. Il ne respirait même pas. Il avalait ces mots malgré son envie irrépressible de les cracher à la figure de tous ces gens qui le regardaient comme un animal enfermé. Pourtant, il gardait les yeux baissés sur ses poignets endoloris par les liens qui les maintenaient.
S'il n'était pas bloqué ici, il se serait fait un malin plaisir à arracher les ailes de ces pestes pour ensuite leur faire avaler leurs paillettes.
Il devait se contrôler, ne pas exploser, se maîtriser.
— Le meurtre est un acte fort punissable dans notre monde comme dans celui des Hommes. Le péché le plus exécrable qu'un vivant, quel qu'il soit, ne puisse commettre. Et aujourd'hui, je proclame haut et fort que les Cieux, seules puissances de notre monde ont choisi de maudire à tout jamais Jay, notre condamné.
Un hoquet de surprise s'éleva dans l'Assemblée, les flammes des torches escaladaient les degrés.
Mais Jay ne bougeait pas. Il écoutait.
— En tant que grand sorcier et unique descendant majeur du Seigneur Park, les Cieux vous ont conféré le titre d'Oracle. Un homme qui ne connaîtra pas la mort et vivra au côté de l'immortalité.
Le Messager des Cieux lisait son papier pour ne rien oublier alors que Jay jurerait qu'il avait déjà assimilé depuis de longues heures chaque détail que les Cieux lui avaient chuchoté.
— L'Oracle Park Jay ne connaîtra pas le bonheur. Il verra ses proches, ses amants et amantes s'éteindre et continuera de rôder dans les moindres recoins du monde magique. La vie lui sera un supplice, un ennui éternel qui ne saura être satisfait malgré tous ses pouvoirs attribués par les Cieux.
La mâchoire de Jay, du nouvel Oracle, menaça d'exploser. Par pitié qu'on le laisse s'en aller.
— N'ayant pas permis à son père d'atteindre son but de voir croître une belle lignée magique, les Cieux lui ont donc conféré un nouvel objectif dans cette vie sans fin.
Anastasia écouta attentivement chaque mot du Messager des Cieux, ce fut presque si elle se frottait les mains devant le discours, affamée d'en savoir plus sur le malheur de Jay, mais surtout, la fonction qu'elle possèderait.
— Park Jay, Oracle, devra errer dans l'humanité à la recherche d'un sorcier. Un sorcier en particulier que les Cieux créeront de leurs mains. Un sorcier qui portera le doux titre de Fiancé.
Le silence criait dans la salle.
— Le Fiancé de L'Oracle.
Jay n'avait jamais été aussi attentif depuis le début de l'audience.
— Seul le Fiancé, privilégié des Cieux, pourra sauver L'Oracle de cette malédiction. Seul un baiser du Fiancé permettra à Jay de trouver la paix éternelle.
Jay s'était fait des ennemis suite à ses choix et à ses actions commises. Ses erreurs hurlaient déjà dans La Présidence et les futurs sorciers se verraient bercés par son histoire où le titre de Grand Méchant lui serait attribué. Les Cieux l'avaient bien précisé, son Fiancé serait mortel, ainsi, si la mort le frappait, un suivant renaitrait dans la foulée, des mois ou des dizaines d'années après.
Jay n'avait qu'un objectif pour ne plus porter le poids de ses regrets, pour ne plus subir la chaleur des regards et des doigts pointés vers lui ; trouver son fiancé, l'embrasser pour rejoindre son frère et son père du côté des âmes.
— Votre père et votre frère sont morts après avoir tant donné pour l'évolution de la lignée. Et les Cieux refusent de laisser tomber des âmes aussi pures que les leurs, c'est pourquoi les Puissances qu'ils sont ont pris la décision, en plus de cette malédiction, de les venger.
Le ciel gronda, un éclair l'illumina et fit sursauter le tribunal.
— Leurs deux âmes suivront Jay, leurs fantômes le hanteront. Et cela jusqu'à la fin de la malédiction. Jusqu'à la fin de la Malédiction de l'Oracle et du Fiancé.
Le Messager des Cieux quitta enfin sa feuille des yeux, son regard se perdit dans celui aux couleurs des éléments de l'Oracle qui souriait. Jay souriait.
À quoi bon se lamenter quand tout était fini ? Ou au contraire quand tout commençait...
Le seul homme vêtu de blanc tendit les mains vers le ciel, implorant les Cieux. Aussitôt, le sol se mit à trembler, les bancs à tomber. Jay osa un regard vers le bleu au-dessus de sa tête, vers ceux qu'il avait tant déçus, et l'orage gronda, le ciel hurla, décoré par les éclairs qui, par milliers, animaient les nuages.
Jay se fit frapper par la foudre. Un éclair l'attaqua de plein fouet. Il s'écroula, attrapa sa tête qui, électrocutée, l'emmena loin de cette réalité.
Pourtant, dans ce capharnaüm que commettait les Cieux autour de lui et partout à l'intérieur de son esprit, Jay put péniblement prêter attention à Anastasia. Il ne voyait que la blancheur de ses dents dans ce flou que sa tête créait, et c'est à peine si Jay comprenait la mission que les Cieux assignèrent à la créature ailée, à peine si Jay entendait les mots que les Cieux chuchotèrent à la reine des fées.
— Et surtout n'oubliez pas que les failles sont toujours là. N'oubliez pas qu'il n'y aura que cette perle qui le sauvera.
***
Je sais pas quoi dire 😭🧍♀️
J'espère que vous avez aimé :') j'en ai bavé pour l'écrire ce chapitre, 9500 mots de révélation ! Vous savez maintenant pour Jay et Jungwon, ce fameux lien :p
Première fois que je galère autant à faire une note omg mais j'espère juste que vous avez aimé, que vous avez compris et que ça a répondu à vos interrogations au sujet du JayWon :')
Il reste des choses à avouer, mais la fin est très très proche :')
En tout cas merci d'avoir lu et d'être encore là <33
• Adiaaa •
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