Le problème avec ce harcèlement, c'est que en tant que Noir, tu dois travailler deux fois plus pour avoir deux fois moins que les autres. Donc tu ne peux pas te permettre de ne plus venir en cours.

Mais quand ta CPE ne fait rien, tu décides de prendre les choses en main. Et tu deviens très rapidement agressif avec tes harceleurs. Tu apprends à te défendre malgré toi, tu apprends à ne laisser aucune émotion négative se montrer sur ton visage.
Tu deviens l'africain gentil que tout le monde adore alors qu'on feins, personne ne sait que ce que tu endures, comme tu l'as enfouie en toi pour survivre au collège.

Au lycée, tes connaissances sont accrues. Tu as vu ce que l'esclavage avait fait à L'Afrique et aux Noirs. Tu as étudié le commerce triangulaire ou, en tant que Noir, tu étais le centre de l'attention.

Attention, un chapitre sur comment l'Afrique a subi des siècles de torture par d'autres contrées, quel merveilleux moyen d'être le centre de l'attention.

Mais c'est au lycée que tout prend un peu plus de sens. C'est au lycée que tu n'as plus peur d'être différent, de parler, de t'énerver.

Les problèmes persistent, mais pas le silence des Noirs, qui ont décidé que trop c'est trop.

Certes, si tu habites en France, tu n'as que Internet pour t'apprendre l'histoire de ton continent, pour t'apprendre que les égyptiens antiques étaient noirs, que des multitudes de royautés dont nous sommes l'héritage existaient avant la colonisation et surtout que les frontières africaines actuelles ne respectent pas les peuples africains, causant des révoltes et des violences inter ethniques. C'est au lycée que tu apprends que bien plus de peuples sont noirs, que tu n'es pas seul. Tu vois que des personnes sud-américaines sont noires, que des océaniens, des arabes et des asiatiques (plutôt sud de l'Asie) sont noirs.

Tu apprends même que Beethoven était un Afro-descendant.

Et qu'être noir n'est pas forcément une mauvaise chose pour toi, qui a subi seul des années de haine raciale gratuite.

Jusqu'à ce que tu découvres les bavures policières.
Jusqu'à ce que tu vois qu'un jeune noir qui n'avait rien fait est mort parce que la police a confondu son téléphone avec une arme et lui a tiré dessus. Et que les policiers n'ont pas été punis.
Jusqu'à ce que tu vois que la Chine a accusé les Noirs en Chine d'avoir amené le Coronavirus et les virent des chez eux, les empêchent de se déplacer où ils veulent dans une surveillance.

Ta sécurité est mise en cause à ce moment-là. Depuis peu, la mode est aux noirs. De plus en plus des filles claires veulent des hommes noirs pour avoir des enfers métisses.

Les mêmes filles qui les insultaient au collège.

Entre la mode que ta couleur de peau devient et ta sécurité remise en question, tu ne sais plus quoi faire. Tu es perdu entre rester chez toi, sachant que ça n'empêchera pas les policiers d'entrer chez toi par effraction et te tuer dans ton sommeil (oui, oui c'est arrivé) ou alors profiter de la mode que tu es devenu.

Mais dans tous les cas, tu es un objet sans valeur sauf sexuelle.

Tu n'es toujours rien à leur yeux. Tu auras beau être entouré des plus gentils, on te rappellera toujours que toi, tu es moins bien qu'un blanc.

Tu verras que le privilège blanc frappe partout, tout le temps. Tu verras que la haine noire n'est jamais finie. Et tu verras que l'Etat ne va pas forcément t'aider si tu demandes de l'aide.

Ton combat, tu le mènes sans soutien de ceux qui ont le pouvoir. Tu n'as que toi, ta force mentale et les milliards de personnes qui souffrent avec toi pour te battre. Mais on dirait que des manifestations dans le monde entier ne suffisent pas.