Chapitre V : Gentillesse
Lorsqu'Eita entra dans sa chambre, ses rideaux étaient toujours tirés, et Emi dormait toujours. Le prince passa sa main entre ses boucles rousses, n'osant pas le réveiller brusquement.
« Encore cinq minutes...
— Il est bientôt onze heures, Emi...
— Bah attends onze heures cinq.
— D'accord... »
Emi finit par relever sa tête pour la laisser tomber contre l'épaule d'Eita. Ce dernier le prit dans ses bras avec toute la délicatesse du monde.
« Je veux dormir...
— Tu sais, si tu ne t'étais pas couché à plus de quatre heures du matin...
— Tu remets mes choix de vie en question ?
— Bien sûr. À cause de tes ''choix de vie'', tu as loupé l'heure du petit-déjeuner. Je voulais te réveiller mais...Je me suis dit que tu méritais quelques heures de sommeil supplémentaires.
— Eita...Ta gentillesse n'a d'égale que ta fortune. »
Le roux dissimula tant bien que mal son visage, avant de souffler :
« En parlant de gentillesse...
— Quelque chose ne va pas ?
— Je suis...désolé, marmonna-t-il. De t'avoir mal parlé l'autre jour. C'était...Bon, d'accord, c'était complétement intentionnel, mais...
— De quoi tu parles ? »
Les yeux d'Emi croisèrent ceux d'Eita, bourrés de candeur et de douceur. Il ne put s'empêcher de lever un sourcil.
« Wow. T'es sérieux ?
— Oui ?
— J'aurais pas dû m'excuser en fait...J'ai détruit mon égo pour rien...
— Tu m'expliques ?
— La vraie question, c'est est-ce que j'ai le choix maintenant ?
— Oui ? »
Un ricanement s'échappa des lèvres d'Emi.
« Je vais te dire quand même, sinon je vais encore faire des nuits blanches.
— Mais...Faut pas faire des nuits blanches pour ce genre de choses, c'est pas grave tu sais...
— C'est pas moi qui décide si je fais des nuits blanches ou non. D'ailleurs, pourquoi blanches et pas noires ? C'est raciste.
— Tu divagues.
— Vagues. Mais tu sais, la fois où...Où j'ai pas été très sympa avec toi parce que t'as dit le nom Rina...
— Ah oui. Peut-être. »
Le roux se décala doucement, la tête penchée sur son épaule droite.
« C'était ma mère. Enfin...Ça fait bizarre de l'appeler comme ça...Je crois que c'est la première fois de ma vie que je le dis de cette façon... »
Les doigts d'Eita s'entrelacèrent avec ceux d'Emi.
« C'est bête, je sais.
— Je ne trouve pas.
— A t'écouter, tout ce que je dis et fais est parfait.
— Mais c'est vrai, tu sais...
— Merci. Vraiment. Je sais même pas pourquoi j'ai dit son nom la dernière fois. Et quand tu l'as répété...Tu sais, j'avais toujours gardé son souvenir pour moi. Comme si elle existait, mais juste pour moi...
— Tu as eu...peur ? »
Une moue étira les muscles du visage d'Emi.
« Oui. J'ai eu peur...Qu'elle disparaisse. Qu'elle ne soit plus mon souvenir, mais le tien aussi.
— Je suis désolé...
— Non, non, surtout pas. C'est...Je suis désolé de penser comme ça, je sais que je devrais pas...T'as rien fait de mal, toi... »
Ses cils papillonnaient à toute vitesse tandis qu'il contenait ses larmes non sans peine.
« Est-ce que tu veux qu'on parle d'autre chose ?
— C'est pathétique, non ? Je voulais juste m'excuser, et je me mets à pleurer comme un débile...
— Câlin ?
— Oui... »
Emi enfouit son visage dans le torse d'Eita, tandis que celui-ci passait doucement sa main dans son dos.
« J'ai appris un truc, l'autre jour, lança le prince. Apparemment, quand tu dis quelque chose à quelqu'un quand il dort, il le retient.
— C'est extrêmement bizarre.
— Je sais.
— Si t'essayes de me faire passer un message subtilement, non, je n'ai pas retenu que tu m'as dit je t'aime hier soir.
— Emi ! Je...Je n'ai jamais insinué... »
Eita tenta de ravaler ses rougeurs.
« On va dire que je t'accorde le bénéfice du doute.
— Je sais très bien que tu ne me crois pas, mais je...Je t'assure que je te dis la vérité !
— Tu sais, Eita, c'est pas grave de pas avoir eu les couilles de me le dire en face. Je te pardonne.
— Emi ! »
Celui-ci leva la tête et éclata de rire devant l'expression gênée du prince.
« Tu es tellement vulgaire !
— Mais non, mais non. C'est juste toi qui est trop innocent.
— Je...
— Aw, je te taquine.
— J'avais remarqué... »
Emi serra le prince contre lui avec le peu de force qu'il possédait.
« Je suis trop méchant avec toi. Tu devrais porter plainte.
— Porter plainte ?
— Bah...Tu te ramènes et tu sors un : ''mon esclave il est méchant avec moi''. Bon, ça t'enlèveras toute ta crédibilité, mais c'est déjà le cas, non ?
— Mais...
— Je rigole, Eita, je rigole. Ne pleure pas.
— Je ne pleure pas !
— Et après tu dis que t'as le tiers de mon égo... »
La porte de la chambre s'ouvrit brusquement ; la servante resta figée quelques instants, avant de repartir à reculons. Ses pas affolés résonnèrent sur le carrelage.
« Je crois qu'elle est droguée.
— Emi.
— Je suis sérieux.
— C'est justement ce qui m'inquiète...
— Je crois que si elle faisait cette gueule, c'est parce qu'on se faisait un câlin. Qu'est-ce que t'en dis ?
— Que c'est probablement l'heure d'aller manger.
— Et qu'elle pensait qu'on allait – ou avait – baisé ?
— Probablement, mais je vais faire semblant de ne pas l'avoir compris.
— Bonne idée. Je vais faire pareil. »
Les paupières du roux se fermèrent un instant.
« J'ai envie de me recoucher...
— Tu n'as rien avalé depuis plus de douze heures...
— Je sais, je sais.
— C'est pour ça que tu es fatigué. Donc te recoucher ne sert à rien. Tu dois manger quelque chose.
— Tu comptes me faire la morale jusqu'à quand ?
— Jusqu'à que tu te décides à aller manger avec moi.
— C'est bon, t'as gagné...
— Bien ! »
Les yeux d'Emi se perdirent dans le sourire heureux d'Eita ; pendant quelques secondes qui lui semblèrent une éternité, il comprit qu'il était sérieusement tombé amoureux du prince.
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