IX - Installations
25th of July– 11th of August 1999
Chronology
2nd of May 1998 : Battle of Hogwart
La veille du départ de la joueuse de Quidditch, Harry se sentit très déprimé. Il était épuisé par les efforts qu'il avait dû faire pour ne pas montrer sa répugnance pour le projet de son amie et appréhendait encore plus le moment où Ginny s'en irait. La jeune fille leur avait bien indiqué qu'elle revie²ndrait le samedi de la quinzaine suivante car son équipe ne jouait pas, mais cela faisait presque un an qu'ils se voyaient tous les jours et il savait qu'elle lui manquerait beaucoup.
Bill et Fleur dînèrent avec eux ce soir-là pour souhaiter bonne chance à Ginny. Harry ne fit pas honneur au repas et fut soulagé quand vint l'heure d'aller se coucher. L'air réjoui de son amie lui avait semblé difficilement supportable.
Cela faisait une heure que le jeune homme se retournait dans son lit quand la porte s'ouvrit doucement et qu'une silhouette se glissa dans la chambre.
— Je n'arrive pas à dormir, avoua Ginny d'une voix piteuse.
— Trop contente pour trouver le sommeil ? la rembarra Harry d'un ton boudeur.
Ginny le poussa pour l'inciter à partager son matelas avant de répondre :
— Non, j'ai le trac.
— Il faut que je te remonte le moral, en plus, se rebiffa Harry qui avait atteint les limites de sa bonne volonté.
— Serre-moi juste dans tes bras, lui demanda-t-elle.
Harry s'exécuta, n'arrivant pas à trouver d'objection à ce programme.
— On s'écrira, lui promit-elle le nez dans son cou.
— Ce n'est pas pareil.
— À moi aussi, tu me manqueras.
— Mais tu pars quand même.
— Et toi, tu vas devenir Auror. Tu ne laisserais pas tomber pour moi, non ?
— Écoute Ginny, si c'est pour me convaincre que tu as raison, ce n'est pas la peine. J'ai dit que j'étais d'accord, je t'ai encouragée à signer et cela fait deux semaines que j'affirme à ta mère que je suis ravi que tu t'en ailles, alors pas de morale, s'il te plaît !
Ginny resta silencieuse un moment avant de déclarer :
— Je te remercie de ne pas m'avoir laissée tomber. Je t'ai demandé beaucoup.
— Oui, bon, c'est normal, admit Harry. C'est juste... que je n'ai pas envie que tu partes.
— Cela ne me fait pas plaisir d'être séparée de toi, mais je sais que je fais le bon choix, lui assura Ginny. Alors on profite d'être ensemble maintenant, d'accord ?
Quand Harry se réveilla le lendemain matin, elle était déjà levée. Ce fut Mr Weasley qui l'accompagna à Holyhead. Il voulait voir par lui-même où sa fille allait vivre désormais et discuter avec ceux qui allaient la faire travailler.
Le père de famille revint assez satisfait. La présidente du club lui avait plu. Les installations sportives étaient du dernier cri, l'entraîneuse et l'infirmière qui s'occupaient du bien-être physique des joueuses lui avaient paru sérieuses. Mr Weasley avait également été présenté à la future camarade de chambre de Ginny et elle lui avait fait bonne impression. Harry se demanda ce qui l'aiderait à se sentir mieux, lui. Comme il ne trouvait pas de réponse, il prit sa moto pour aller se défouler dans la campagne environnante.
*
Dès qu'il avait reçu ses notes d'examens, Harry avait posé sa candidature auprès du bureau des Aurors, accompagnée d'une lettre de motivation. Quelques jours après le départ de Ginny, il fut convoqué au ministère pour un entretien d'évaluation. Il s'y rendit en cheminée et fut reçu au niveau deux, dans une petite pièce.
Deux hommes et une femme étaient assis côte à côte derrière une table. Leurs visages étaient familiers à Harry : il les avait croisés lors des différentes commémorations et leur avait épinglé une médaille sur la poitrine quelques mois auparavant. Cela devrait bien se passer, se dit-il.
— Je vous en prie, prenez place, Monsieur Potter, l'invita le président du jury qui avait les cheveux gris, en lui désignant une chaise leur faisant face.
Harry obéit en tentant de sourire pour cacher sa nervosité.
— Nous avons pour but d'établir si votre profil convient à la fonction d'Auror, dit Cheveux-gris sans se départir de son air sévère. Savez-vous que vous avez un casier judiciaire impressionnant ?
— Vraiment ? fut tout ce que put dire Harry qui avait espéré que tous ses démêlés avec les anciennes autorités du ministère avaient été effacés.
— À quatorze ans, vous avez passé une audience disciplinaire pour usage de la magie devant des Moldus. Mais vous avez finalement été déclaré innocent, commença Cheveux-gris. Quelques mois plus tard, vous avez été soupçonné d'avoir formé un groupe séditieux à Poudlard en contrevenant au décret d'éducation numéro vingt-quatre. Mais le professeur Dumbledore a affirmé qu'il en était le seul responsable et la procédure n'a pu être menée à son terme. Durant votre dix-huitième année, vous avez été déclaré ennemi public n° 1. Vous êtes en outre suspecté de vous être introduit sans permission au ministère en utilisant du Polynectar, il y a un an et demi de cela, et de vous y être livré à des actes de vandalisme. Quelques mois plus tard, des témoignages vous désignent comme responsable d'un cambriolage de la banque Gringotts. Qu'avez-vous à dire à ce sujet ?
Harry se sentit rougir de gêne et d'agacement à la fois.
— J'espère que, euh, je n'aurai plus affaire à la justice, commenta-t-il, refusant de se justifier.
Il ne put voir sur leurs visages fermés si cette défense était la bonne ou non.
— Que feriez-vous si les ordres que vous receviez étaient en contradiction avec vos convictions ? attaqua l'autre sorcier, qui avait des cheveux noirs et bouclés.
— Je pense que je le ferais savoir, dit lentement Harry.
— Vous soumettriez-vous aux directives ? insista son contradicteur.
Harry se donna quelques instants de réflexion.
— Cela dépend des conséquences de cet ordre, finit-il par répondre honnêtement. Si cela doit être préjudiciable à des innocents, je ne pense pas que je l'exécuterai.
— Vous êtes conscient qu'un Auror est soumis à sa hiérarchie ? insista Cheveux-noirs. Il ne sera plus question de faire cavalier seul comme vous en aviez l'habitude.
— Mais j'aurais apprécié avoir un peu plus d'aide, s'écria Harry, outré et fatigué de devoir encore justifier les initiatives que les circonstances l'avaient obligé à prendre.
— Monsieur Potter, lui demanda la sorcière, qui portait un large bandeau vert sur l'œil droit, il semble que vous ayez l'habitude de commander.
— Moi ? s'étonna Harry. Non, pas vraiment.
Ses interlocuteurs parurent sceptiques :
— N'avez-vous pas formé et dirigé le groupe connu comme l'Armée de Dumbledore ? demanda Bandeau-vert. N'avez-vous pas mené la révolte de Poudlard l'année dernière ?
— C'est Neville Londubat qui a décidé de l'insurrection et les professeurs ont tout organisé, indiqua Harry. Pour l'armée de Dumbledore, je donnais des conseils, mais je ne commandais personne.
— Tous ces jeunes gens se déclarent cependant prêts à vous suivre.
— Ah ! fut tout ce que trouva à dire Harry.
— Savez-vous, au moins, que nous avons maintenant chez nous un certain nombre d'entre eux ? demanda Cheveux-noirs.
— Euh, oui, mais je n'y suis pour rien.
Les sorciers se regardèrent, visiblement amusés.
— Savez-vous pourquoi le bureau des Aurors a si peu recruté ces dernières années ? interrogea Cheveux-gris.
— Non, admit Harry.
— Parce que Poudlard n'arrivait pas à former correctement ses élèves en défense contre les forces du Mal, expliqua Cheveux-noirs.
Harry songea que, vu les professeurs qui s'étaient succédé pendant sa scolarité, ce n'était pas très étonnant.
— L'année dernière, continuait Cheveux-gris, comme nous manquions de personnel, nous avons décidé de proposer un poste à tous les jeunes gens qui avaient participé à la bataille de Poudlard, considérant que ça leur avait servi d'examen d'entrée. Nous avons pu constater qu'ils avaient d'excellentes bases en duel. Ils ont affirmé que c'était à vous qu'ils les devaient.
Il fallut quelques secondes à Harry pour assimiler ces informations.
— Vous avez fait une proposition à tous les membres de l'AD qui se sont battus à Poudlard ? demanda-t-il confirmation.
— À tous ceux qui ne sont pas retournés à l'école pour terminer leurs études, précisa le Cheveux-gris.
— Vous avez demandé à Ron Weasley ? insista Harry.
Les examinateurs se consultèrent du regard et Cheveux-noirs finit par répondre.
— Oui, nous l'avons fait. Mais il a refusé.
Harry baissa les yeux pour ne pas laisser voir son émotion. Ron, pensa-t-il, pourquoi es-tu toujours aussi discret sur tes actes les plus héroïques ?
— Il aurait fait un bon Auror, dit-il doucement.
— Les bons Aurors sont ceux qui désirent l'être, répliqua Bandeau-vert.
Mais il le voulait ! eut envie d'assurer Harry. Il le revit en cinquième année, quand il avait exprimé ce vœu à l'occasion des entretiens d'orientation.
— Monsieur Potter, désirez-vous être Auror ? le questionnait la sorcière.
— Oui, Madame, répondit Harry se secouant pour revenir à l'instant présent.
— Pensez-vous en avoir les qualités requises ?
— Je l'espère, assura-t-il avec toute l'assurance qu'il put rassembler.
— À votre avis, quelles sont les qualités que nous recherchons chez nos candidats ? s'enquit-elle.
— Un bon niveau en défense, comme vous le disiez tout à l'heure, commença Harry. La volonté de poursuivre les mages noirs, continua-t-il. Savoir enquêter...
Il se tut, ne sachant quoi ajouter.
— Esprit de corps, discipline, méthode, capacité d'analyser une situation et de mettre en œuvre un plan, continua Cheveux-noirs. Pensez-vous en être suffisamment pourvu ?
Esprit de corps ? se demanda Harry. On va dire que oui. Discipline ? Je suppose que cela s'apprend. Méthode ? Hum ! Analyse ? De temps en temps. Plan ? Oui, j'arrive à suivre les plans d'Hermione. Généralement.
— Je pense que oui, affirma-t-il en tentant d'en paraître convaincu.
— Avez-vous déjà utilisé des Impardonnables ? interrogea subitement Cheveux-gris.
Harry, surpris, se sentit rougir. Il envisagea de répondre par la négative, mais vit au regard des examinateurs qu'il s'était trahi.
— Ça m'est arrivé, reconnut-il donc.
— Lesquels ?
— L'Imperium et le Doloris, avoua-t-il en se demandant s'il n'était pas en train de se fermer définitivement la possibilité d'être accepté.
— Pas l'Avada ? demanda Cheveux-noirs.
— Bien sûr que non ! s'indigna Harry.
— Même contre Vous-Savez-Qui ?
— J'ai déjà expliqué publiquement que Voldemort s'était tué avec son propre sort !
Il avait prononcé le nom tabou à dessein, mais fut déçu : aucun des trois n'en sembla troublé.
— Alors, pourquoi le Doloris ? insista Cheveux-noirs.
— Parce que Carrow était un salaud et qu'il l'avait beaucoup utilisé, lâcha Harry se disant qu'il n'avait plus grand-chose à perdre désormais.
— Voldemort utilisait beaucoup l'Avada, lui rétorqua tranquillement Cheveux-gris. Et il l'a fait contre vos parents et contre vous.
— Je n'ai jamais eu envie de devenir un assassin pour autant, s'agaça Harry. C'est lui qui voulait ma peau. Si j'avais pu l'arrêter autrement, je l'aurais fait.
— Est-ce pour cela que vous lui avez proposé de se rendre ?
— Oui, je devais le faire, même si je savais qu'il ne l'accepterait jamais.
— Ce Doloris et cet Imperium étaient-ils indispensables ? reprit Bandeau-vert.
— Je ne vois pas comment j'aurais fait sans l'Imperium. C'était important et je ne voulais blesser personne, se justifia Harry.
— Et le Doloris ? réitéra Bandeau-vert, le visage impénétrable.
Harry hésita. Il se repassa la scène et avoua, gêné :
— Je suppose que j'aurai pu le stupéfixer. Mais je venais d'apprendre qu'il avait torturé des amis à moi et il était en train de frapper une personne que j'estime beaucoup.
— C'est une justification à vos yeux ? s'enquit Cheveux-gris sur un ton neutre.
— Non, admit Harry en baissant le regard. Je n'aurais pas dû le faire.
— Le referiez-vous dans des circonstances semblables ? s'intéressa Cheveux-gris.
— J'espère bien ne plus me retrouver dans cette situation, répondit Harry. Si cela arrivait... je ne sais pas. J'espère que non.
— Nous vous remercions, lui dit Cheveux-gris.
Il fallut quelques secondes à Harry pour comprendre que l'entretien était terminé. Sans un mot, il se leva et sortit de la salle. Il s'était rarement senti aussi déstabilisé. Il avait l'impression qu'on l'avait retourné en tous sens pour trouver ses failles. Il avait bien peur d'avoir perdu toutes ses chances.
*
De retour au Terrier, Harry tenta de faire bonne figure, tout en se demandant comment il leur expliquerait pourquoi il n'avait pas été retenu. Heureusement, les Weasley n'insistèrent pas tellement sur son entretien, persuadés que ce n'était qu'une formalité en ce qui le concernait. Cependant, alors que Harry montait se coucher, Ron le suivit dans sa chambre.
— Ça, c'est si mal passé ? s'étonna-t-il.
— Une catastrophe, avoua Harry, soulagé de pouvoir en parler à quelqu'un. Ils m'ont ressorti tout mon casier judiciaire et ils n'ont pas trop apprécié le Doloris.
— Quel Doloris ? demanda Ron.
Harry réalisa qu'il n'avait confié cet épisode à personne et entreprit de le raconter à Ron.
— Tu as bien fait, s'exclama-t-il quand Harry eut fini. Cette pourriture le méritait !
— Oui, mais bon, un Impardonnable, c'est... impardonnable, soupira Harry.
— Tout n'est peut-être pas perdu, l'encouragea Ron. S'ils ont tellement de mal à recruter, ils ne vont pas refuser les services du Survivant juste parce qu'il a eu la main leste avec un Mangemort.
— Oui, enfin, il vaut mieux éviter ce genre de sort quand même, tempéra Harry mal à l'aise, songeant que Ron avait beau dire, il n'en avait jamais lancé pour autant.
— Je suis sûr qu'ils vont te prendre, lui assura Ron. Les sorciers veulent que tu sois Auror, Harry.
— Mais si je ne suis pas un bon Auror, il vaut mieux que je fasse autre chose, non ?
— Tu racontes n'importe quoi. Quel autre métier pourrait mieux te convenir ? Tu casses du mage noir depuis que tu as un an.
— Tu sais bien que c'est ma mère...
— Justement. Pour un type qui ne sait rien faire, tu en as fait beaucoup, non ?
Harry sourit. Que deviendrait-il sans Ron ? Puis il repensa à ce qu'il avait appris l'après-midi même :
— Ron, commença-t-il. Tu... euh, tu ne regrettes pas d'avoir refusé leur proposition ?
Ron rougit violemment.
— Comment tu le sais ? demanda-t-il d'un ton gêné.
— Ils me l'ont dit.
— Ils auraient mieux fait de se taire, grogna-t-il.
Il laissa passer un moment et haussa les épaules :
— Je ne regrette pas, non. Je suis heureux de ce que je fais.
— Tu aimes vraiment être commerçant ou tu le fais pour George ? s'inquiéta Harry.
— Les deux, répondit Ron. Cela me plaît de vendre des farces et attrapes et donner des idées pour les utiliser. Et puis, ça m'aide de penser que Fred serait content que je ne laisse pas George tout seul.
Harry regarda son ami. Une fois de plus, il se sentit impuissant.
— Ne fais pas cette tête, lui fit Ron. Tout va bien, je vais bien, tu vas devenir Auror et nous allons vivre heureux jusqu'à la fin des temps.
— Mhmh, répondit Harry, pas convaincu.
— J'ai pris une résolution, lui apprit Ron.
— Laquelle ?
— Je vais aller habiter ailleurs qu'ici. Je vais tâcher de me trouver un endroit sur le Chemin de Traverse.
— Il y a une raison spéciale ? s'enquit Harry, n'osant demander s'il allait s'installer ou non avec Hermione.
— Ouais, il paraît qu'il faut que je montre que je sais me prendre en main, dit Ron d'une voix qui monta dans les aigus, indiquant ainsi que les remontrances de sa sœur étaient encore fraîches dans sa mémoire.
— Pourquoi n'habiterais-tu pas avec moi ? songea soudain Harry. Je pensais m'installer au Square Grimmaurd.
— Ah oui, ce serait génial ! s'enthousiasma Ron. Tu pars quand ?
— Le mois prochain, décida Harry. Le temps de rendre l'endroit vivable. Mais euh... (Harry se souvint de la raison première de son déménagement.) Ça ne t'embêtera pas si Ginny vient aussi de temps en temps ? formula-t-il avec délicatesse.
— Tant que tu acceptes qu'Hermione passe régulièrement, répondit Ron.
Les deux amis échangèrent un sourire teinté de mâle complicité.
— Tu as fait des progrès en cuisine ? interrogea Harry tentant de prendre l'air sévère.
— Euh... je pourrais faire un peu de ménage, indiqua piteusement Ron. Grâce à ma mère, j'ai de l'entraînement. Quoi ? demanda-t-il en voyant Harry éclater de rire.
— Tu croyais vraiment que j'allais m'installer sans Kreattur ? se moqua Harry.
— J'ai toujours adoré cet elfe, assura Ron sans le moindre respect pour la vérité historique.
*
Quand Molly apprit leur projet, elle commença par tenter de les en dissuader. Constatant que leur décision était irrévocable et que son mari soutenait les jeunes gens, elle exigea de vérifier par elle-même la salubrité et le confort de la future demeure de son fils et de son protégé.
— Je passerai dès demain faire la liste de tout ce qu'il y a à faire avant que vous puissiez loger là-bas, indiqua-t-elle.
— Kreattur viendra faire le ménage, tenta Harry.
— Nous savons dans quel état il a laissé cette maison, lui rétorqua-t-elle d'un ton pincé.
Les garçons se regardèrent, alarmés. Ils venaient tous deux d'avoir la même pensée. Elle n'allait quand même pas venir régulièrement chez eux pour vérifier que la maison était propre et bien rangée, hein ?
— Je commence à comprendre pourquoi Bill et Charlie sont partis si loin, commenta Ron quand ils abordèrent le sujet entre eux.
— Elle n'a jamais essayé d'aller chez George ? s'enquit Harry.
— Si, au début, quand il s'est installé avec Fred. Mais comme tout était piégé là-bas, elle a renoncé assez vite. Les jumeaux ont affirmé que c'était juste des produits en cours de test, mais je suppose que c'était des armes anti-maman en réalité.
— Il va falloir inventer la nôtre, soupira Harry qui n'avait pas du tout envie qu'elle débarque quand Ginny viendrait lui rendre visite.
— À ce propos, il va falloir désactiver la projection que Fol Œil avait installée pour injurier Rogue et virer le portrait de la mère Black, suggéra Ron. Je ne me vois pas me justifier à chaque fois que je rentre chez moi, enfin chez toi.
— Chez nous, affirma Harry. Bon, on demande à Hermione, comme d'habitude ?
*
Le lendemain, on fêta l'anniversaire de Harry. Ginny ne put venir, mais avait envoyé une lettre et un cadeau par hibou. Après avoir mangé le gâteau, Harry et Ron exposèrent leur problème à Hermione :
— Théoriquement, aucun sortilège ne permet d'annuler un sort de Glu perpétuelle, décréta la jeune fille. D'où l'origine de son nom, ajouta-t-elle doctement, faisant grincer les dents de Harry.
— Tu es vraiment sûre ? insista Ron.
— Si le professeur Dumbledore n'a pas réussi à détacher ce tableau et si les Black n'ont pu modifier la décoration dans la chambre de Sirius, il y a peu de chance que je fasse mieux, lui répondit Hermione.
— Je me demande si je ne vais pas tout simplement acheter une autre maison, songea Harry.
— Pourquoi ?
— Parce qu'il est hors de question que je partage mon foyer avec la mère de Sirius.
— Mais, je n'ai pas dit qu'il n'y avait pas de solution, opposa Hermione.
— Si ! affirmèrent les deux garçons.
— J'ai dit qu'aucune magie ne pouvait le faire, précisa-t-elle. Mais il y a une façon très simple de ne plus être incommodé par le tableau. Faites monter un mur devant. Dans le noir et sans stimulation sonore, la magie de la peinture se mettra en sommeil et s'affaiblira au fil du temps. Un enduit et une bonne couche de peinture permettront de masquer les images dégradantes dans la chambre de ton parrain, Harry.
Les pin-up ne gênaient pas Harry, mais il ne le dit pas, trop content d'avoir enfin une solution pour venir à bout du portrait de Mrs Black.
— Et pour la projection installée par Maugrey ?
— Le contre-sort devrait être à la portée d'un futur Auror. Je pense avoir la formule dans un de mes livres. Je vous l'apporterai la prochaine fois.
Harry piqua du nez car il attendait toujours le résultat de son entretien d'évaluation. Mais Hermione enchaînait déjà :
— Tu as reçu une lettre de Ginny ? Comment ça se passe pour elle ?
— Bien répondit Harry ravi de changer de sujet. On la reverra dans une semaine.
— J'ai l'impression que les Harpies sont bien parties dans le championnat, commenta Ron. Elles ont fait de très bonnes éliminatoires le mois dernier.
*
Harry oublia tous ses soucis d'ordre professionnel quand Ginny arriva le vendredi soir. Elle était ravie de ses premiers contacts avec son club. Elle vivait le championnat dans les coulisses des joueuses, les assistait pour les entraînements et avait déjà commencé un programme de mise en forme.
— L'ambiance est très sympa, assura-t-elle. Un peu comme un dortoir de filles, mais en plus drôle.
Ron et Harry échangèrent un regard perplexe.
— Qu'est-ce que tu veux dire ? Comme un dortoir de garçons, avec des soutiens-gorge qui traînent par terre au lieu des chaussettes sales ? s'enquit Ron.
— C'est ça et on parle de garçons au lieu de parler de filles, confirma Ginny.
— Ron ! Ginny ! s'indigna Molly.
Harry sourit, mais était en même temps un peu gêné à l'idée qu'on parle de lui comme on parlait des filles dans les dortoirs masculins de Gryffondor.
Harry avait adopté pour principe de ne jamais se retrouver dans le même lit que Ginny quand les autres membres de la famille étaient dans la maison. Il n'y avait dérogé qu'une seule fois, la veille du départ de la jeune fille. Lorsque celle-ci se faufila dans sa chambre cette nuit-là, il songea cependant que même le Survivant pouvait de temps en temps oublier ses principes.
— Normalement, j'habiterai chez moi la prochaine fois que tu reviendras, indiqua-t-il à Ginny plus tard, alors qu'ils se préparaient à dormir.
— À ce propos, j'ai dû mal comprendre ce que me disait maman. Tu n'as l'intention de demander à Ron de s'installer avec toi, j'espère ?
— Cela te dérange ?
— Et comment ! Je croyais qu'on allait pouvoir se voir tranquilles et j'apprends que mon frère sera là pour jouer les chaperons.
— Il ne va rien jouer du tout ! Enfin, il n'a pas intérêt s'il veut recevoir Hermione chez nous.
— Enfin Harry, ça n'a rien à voir. On parle de mon frère, là. Il n'a jamais accepté que je sorte avec qui que ce soit.
— Je pense qu'il a un peu évolué. Il a pris ton parti quand tu as annoncé ton contrat avec les Harpies, rappela-t-il.
— Ouais. Mais il n'a pas intérêt à faire une remarque déplacée, on est d'accord ?
— Ne t'en fais pas.
— On verra. Au fait, quand auras-tu ta réponse pour les Aurors ? Tu ne m'as même pas dit comment ça s'était déroulé dans ta lettre.
— ...
— Quoi ? Qu'est-ce qui s'est passé ?
Harry lui fit un résumé de l'entretien et lui raconta la scène avec Amycus Carrow.
— Pourquoi leur en as-tu parlé ? fut la réaction de Ginny.
— Parce qu'ils m'ont demandé.
— Tu n'étais pas obligé de le dire !
— Tu aurais pu mentir, toi ?
— Si j'avais pensé que cela allait m'empêcher d'être prise, bien entendu.
Harry en resta muet. Ginny enfonça le clou.
— Ne t'en fais pas. Je suis sûre qu'ils vont t'engager quand même. Sauf s'ils te trouvent trop naïf, bien sûr. Allez pousse-toi un peu, ajouta-t-elle en bâillant. Tu prends toute la place.
— Eh, je suis déjà à moitié dehors !
— N'oublie pas de prévoir un grand lit, Square Grimmaurd, conseilla-t-elle.
*
Le dimanche midi, toute la famille Weasley ainsi que Harry et Hermione s'étaient retrouvés au Terrier. Alors qu'ils prenaient le café au salon après le repas, Hermione demanda à Ron et Harry où ils en étaient dans leur projet d'aménagement.
— On devrait pouvoir s'installer d'ici deux semaines, annonça Harry.
— Cela m'étonnerait, rétorqua Molly. Il y a encore beaucoup à faire et Kreattur n'est pas bien efficace.
— Pourquoi n'engagez-vous pas des elfes libres pour lui donner un coup de main ? s'enquit Hermione.
— Des elfes libres, il y en a déjà ? s'étonna Harry.
— Il y en a toujours eu, expliqua Hermione. Régulièrement, des maîtres mécontents les chassaient sous un coup de colère. Soit ils se laissaient dépérir de désespoir, soit ils se présentaient à Poudlard où le professeur Dumbledore les faisait travailler. Le but du bureau de placement est de les aider à se prendre en main pour que la liberté ne les effraie plus.
— Il y a tant de maîtres qui les ont chassés dernièrement ? demanda Ginny.
— Non, cela n'arrive pas si souvent. Mais toutes les familles de Mangemorts ont été déchues de leur droit de posséder des elfes et nous en avons récupéré une cinquantaine comme ça. Passe à mon bureau lundi matin, Harry, on te trouvera des ouvriers. Oh, à propos, il faut vraiment que je modifie le nom du S.A.L.E. Je ne sais pas comment j'ai pu imaginer une telle appellation. Je n'avais aucun sens de la communication, à l'époque !
— J'espère que tu te souviens que Ron et moi avons réussi à ne pas rire, fit remarquer Harry. Si ce n'est pas de l'amitié, ça !
— Votre amitié irait-elle jusqu'à m'aider à trouver un nom plus conforme ? espéra-t-elle.
— Bien entendu s'empressa Ron. Pour la Reconnaissance des Opérations Parfaitement Réalisées par les Elfes. Le P.R.O.P.R.E. !
— Ron !
— Bénissons les Elfes, nos Amis Utiles. N'est-ce pas une B.E.A.U. ?
— George !
— Société des Elfes Libres, c'est sobre et cela ne manque pas de S.E.L. ! ajouta Bill, pince-sans-rire.
— Bill ! gémit Hermione.
— Louons les Elfes, si Purs, Reconnaissants et Efficaces, essaya encore Ron.
— Non, je ne remplacerai pas la S.A.L.E. par la L.E.P.R.E., indiqua fermement Hermione au milieu des rires.
— J'Aime Mes Amis Intelligents et Serviables, imagina Ginny.
— Il ne faut jamais dire J.A.M.A.I.S., lui opposa Arthur les yeux pétillants
— Mouvement Intercommunautaire pour nos Amis Ostentatoires et Urbains. Le M.I.A.O.U., tenta Chalie.
— Je vous déteste, assura Hermione sans pouvoir s'empêcher de rire elle aussi.
— Elfes Libres et Fiers de l'Être, avança Arthur. Tout simplement ELFE !
— Pas mal... commença Hermione.
— Les Amis de Dobby, la coupa Harry d'une voix ferme faisant taire les plaisantins.
— Oh oui, l'AD, approuva immédiatement Ginny. Cela nous a porté chance, à nous.
Hermione se tourna vers Harry et lui annonça avec détermination :
— Je veux que tout le monde sache comment Dobby a sauvé le monde sorcier.
— Il le mérite, reconnut Harry. Tu peux compter sur moi comme témoin.
*
Hermione avait fait des fiches de présentation d'elfes de maison et ils choisirent ensemble ceux qui conviendraient le mieux pour les gros travaux à effectuer Square Grimmaurd. Les nouveaux employés arrivèrent un matin et Harry les mit sous la responsabilité de Kreattur. Il se demanda si c'était une bonne idée quand il vit que le vieil elfe les accueillir avec hauteur et leur donner des ordres d'une voix sèche. Il dut le prendre à part et le sommer de les traiter avec plus de douceur.
— Les elfes libres sont paresseux et mauvais, décréta Kreattur. Ils n'ont aucune loyauté envers leurs maîtres et font du travail bâclé.
Harry se dit qu'Hermione n'était pas au bout de ses peines.
— Ce n'est pas de leur faute, s'ils ont été libérés, plaida-t-il. Mais s'ils n'en ont pas envie, ils ne reviendront pas demain, alors évite d'être brutal avec eux, s'il te plaît.
— Maître Harry a demandé une jolie maison, je dois faire travailler les paresseux.
Vaincu, Harry abandonna lâchement ses employés à leur triste sort.
Très vite, toutes les pièces furent nettoyées à fond, les cloisons repeintes et un mur fut monté devant l'indésirable portrait, qui ne manqua pas de leur dire ce qu'il en pensait d'une voix tonitruante. Les trois elfes travaillèrent ce jour-là de façon particulièrement diligente, sans que Kreattur, que Harry avait préventivement envoyé faire des courses, n'ait à intervenir.
Trois ans auparavant, la plupart des objets dangereux avaient été éliminés et Harry compléta la rénovation en se débarrassant des meubles les plus laids. Kreattur se vit aménager un grand placard dans la chaufferie — il avait refusé d'avoir une pièce pour lui — et se montra ravi que Harry lui propose de prendre une petite commode ayant appartenu à Regulus.
Harry s'installa dans la chambre de maître — ou plus exactement une suite avec boudoir et salle de bains. Ron choisit la chambre de Sirius — il aurait bien gardé l'ancienne décoration, mais admit que ce ne serait pas une bonne politique auprès d'Hermione. La chambre de Regulus devint une chambre d'amis, avec un lit d'enfant destiné à Teddy. Le salon fut transformé en une pièce agréable dans un style assez Gryffondor : fauteuils profonds rouge et or.
Molly prit en charge l'aménagement de la cuisine. De façon inespérée, ses rapports avec Kreattur s'étaient nettement améliorés. Après avoir goûté un des repas préparés par l'elfe, elle avait admis qu'il se débrouillait bien en la matière. Elle lui avait demandé sa recette et, dans la discussion, ils s'étaient découvert une passion commune pour les fiches de cuisine de Sorcière-Hebdo. Ayant désormais un sujet de conversation, ils en venaient, petit à petit à s'apprécier.
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