𝙳𝚎𝚛𝚗𝚒𝚎̀𝚛𝚎 𝚙𝚊𝚛𝚝𝚒𝚎
Bonne lecture !
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Près de quatre heures plus tard, Jean sort de la salle sombre avec un costume froissé et des yeux rougis. L'écran lui a presque brûlé la rétine, mais à présent qu'il peut enfin se dégourdir les jambes il se rend compte qu'il doit sûrement marcher comme un canard après une nuit difficile.
Juste derrière lui, Marco remonte à sa hauteur.
— Bon alors, c'était pas si terrible, si ?
— C'était affreux, siffle Jean.
L'histoire était horrible et ennuyante, la fin sans aucun sens (sûrement pour laisser une « interprétation » histoire de faire sérieux et philosophe), et les scènes trop longues et trop fixes. Le film n'avait aucun rythme.
— Ah ? Pourtant t'as pas dormi.
Et c'est bien là tout le problème, et le pourquoi du comment cela était affreux. Il n'a pas dormi. Il a regardé chaque scène avec attention et des yeux presque écarquillés d'horreur.
— Nan, j'ai pas dormi, c'est sûr.
Il veut plus ou moins mourir, à ce stade. Marco fronce les sourcils, et lui soupire largement.
Quelques minutes plus tard, une nouvelle coupe de champagne est dans la main de Jean et il la boit presque cul sec. Marco est occupé ailleurs, la salle est pleine de monde qui discute avec ferveur de l'œuvre apparemment incroyable qu'ils viennent de voir, et Jean reconnaît au loin la fille aux cheveux noirs qu'il a rencontrée plus tôt derrière les toilettes.
Il déglutit.
Une voix à côté de lui le fait presque sursauter.
— Alors, c'était comment ?
Sa tête se tourne si vite qu'il entend sa nuque craquer, juste attend pour voir Eren Jaeger s'appuyer contre le mur en croisant ses bras, touchant presque leurs épaules.
— Toi, siffle Jean.
— Moi, confirme Eren en buvant tranquillement sa coupe. C'était affreux, n'est-ce pas ? Je me suis endormi au premier tiers, je crois.
— Toi...., répète Jean un peu plus bas.
Le sourire de l'autre garçon redouble, et il fait ce qu'il peut pour contrôler son cœur qui s'emballe tout seul comme un crétin. Ses lèvres s'assèchent en repensant encore une fois au baiser qu'ils ont échangé.
— Tu ne m'as pas répondu.
— Et toi tu m'as menti !
Il n'a pas parlé fort, un peu comme un chuchotement irrité.
— J'ai pas menti.
— Pitié.
— Nan, je te jure. Tu m'as dit « toi aussi tu t'es fait traîner là ou un truc du genre ? » et je t'ai répondu « un truc du genre » parce que c'est le cas.
Jean lève les yeux au ciel, parce qu'Eren lui lance un regard innocent en battant des cils et qu'il ne veut pas être déjà aussi sensible à une technique aussi évidente.
— En vérité, je me suis fait traîner là. Je comptais sécher la première et m'excuser plus tard, mais Mikasa est arrivé chez moi pour m'obliger à enfiler ce foutu costume, et je t'assure qu'elle est plus forte qu'elle en a l'air. Elle fait de la boxe thaï. Terrible.
— Ton père est le producteur !
Eren lui renvoie un petit sourire penaud.
— Ouaip.
— Et tu joues l'un des rôles principaux. T'es littéralement dans le film que j'ai passé trente minutes à critiquer juste avant la projection.
— Ouais. Je trouvais ça trop marrant. Et franchement, je suis d'accord avec toi : ce film est à chier. Mon père aime trop faire ces trucs de philosophe avant-gardiste à deux balles.
— Tu es acteur.
— Oui. Et heureusement pour moi j'ai fait d'autres films. Je croyais que tu faisais semblant de pas me connaître au début, mais en fait t'as juste pas de culture. Ce qui est cool, mec, ça me dérange pas que tu sois un peu bête.
— Je vais tellement te tuer, siffle Jean en se rapprochant un peu. Et je ne suis pas bête, j'ai un diplôme en science, ce qui veut dire que je me fous pas mal du cinéma.
Eren se rapproche également, et tout à coup ils sont beaucoup trop proches pour être en public et Jean connaît son self-control un peu instable.
— Alors, reprend Eren. Qu'est-ce que t'en as pensé ?
— Je vais pas dire qu'il était incroyable juste pour tes beaux yeux.
— J'espère bien. Toutes les personnes de cette salle sont là pour ça. Toi tu peux dire la vérité.
— Il était pourri. Heureusement qu'ils t'ont donné des fringues potables, ça sauvait le truc.
Jean ne parle pas de cette scène où Eren n'a justement pas de fringues potables, et pas de fringues du tout en fait. Il n'en parle pas du tout. Ce qui veut dire qu'Eren comprend tout seul qu'il est en train d'y penser car son sourire s'élargit encore et il se glisse vers lui, collant discrètement sa bouche à l'oreille de Jean.
Il murmure :
— Si tu me donnes ton numéro de téléphone maintenant, il est possible que lors d'un rendez-vous futur je porte ces fameuses fringues potables.
Et à ce niveau, il y a tellement d'insinuation que Jean ne sait même pas s'il parle vraiment des fringues ou des non-fringues. Il déglutit, et la seconde d'après son smartphone est dans la main d'Eren.
— Super, dit ce dernier en tapotant sur l'écran tout en tenant son verre sans renverser une goûte (il s'envoie un message à lui-même, puis lui rend son bien). Très content d'avoir fait ta connaissance et...
Il lui lance un regard, un regard soudain un peu plus honnête et moins taquin.
— T'es super cool, comme mec.
Jean s'adoucit, le goût du champagne encore sur sa langue.
— Toi aussi, Jaeger. Même si ton métier craint un max.
Eren hausse les sourcils de manière absolument insupportable et adorable, puis se décale sur le côté pour tourner le dos à la salle et poser un baiser mouillé sur la joue de Jean.
— A plus, dit-il.
Quand Marco vient enfin le chercher pour rentrer, une trentaine de minutes plus tard, Jean peut à peine faire sembler d'ignorer le regard qu'il lui lance. Son sourire le fait presque rougir quand il dit : « Eh bien, je vois qu'on s'est pas tous emmerdés de la même manière. Eren Jaeger, hein ? ».
Et Jean lui répond d'aller se faire voir.
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Fin,
Des bisous !
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