Chapitre 51 : Les Destins Liés
Assise dans le silence, Daegan tenait avec douceur la main du Père Pyrlig. Le malheureux avait été retenu par Brida durant longtemps, et elle l'avait envoyé délivrer un message emplit de haine avant de le poignarder en bas du ventre. S'accrochant à sa foi, le prêtre blessé avait fait route à Eoferwic ( il avait apprit que le Roi Saxon s'y tenait) et durant la nuit de festin des Danois pour célébrer leur Roi Sigtryggr, Pyrlig était allé s'écrouler aux pieds d'Edward. Uhtred avait bien vite été informé de la présence du religieux, qu'il s'était empressé d'aller voir. Le pauvre était blême comme un cadavre et peinait à s'accrocher à la vie. Mais il luttait. Le guerrier se promit donc de tuer Brida quoi qu'il en coute. Quant à Daegan, on l'avait prévenu de la venue de Pyrlig après qu'elle ait domptée son cheval, Leofric, qu'elle avait ramenée à son enclos dans le silence et le calme. Hâtive, la femme avait accouru au chevet de son vieil ami et ne l'avait point quitté depuis. Parfois, il ouvrait avec peine les yeux et lui souriait mais cela lui demandait de faire preuve d'un effort terrible.
L'ancienne demeure de Sigtryggr, où vivaient désormais Edward et son amante et où Pyrlig se reposait, n'avait pas les murs très épais. Et l'on entendait avec aisance ce qu'il se passait dans la grande salle qui faisait face aux imposantes portes du foyer. Daegan n'eut donc aucun mal à entendre les bruits de pas aller et venir. Or, elle reconnu avait aisance ceux qui venaient de pénétrer sur le plancher de bois. Le rythme, le bruit des semelles, le son de la cotte de maille, c'était là le pas de son père.
"Seigneur Uhtred, accueillit Edward."
Fronçant les sourcils de curiosité, la sœur de Sihtric lâcha la main de Pyrlig (qui dormait profondément) et s'approcha de la porte de la chambre où l'on avait logé le religieux blessé. Elle ouvrit une courte fente pour y glisser son œil et observer ce qu'il se passait.
"Je n'ai rien pour vous, pas de Brida, pas d'Aethelelm, pas de certitude pour Pyrlig, répondit le guerrier qui avait passé la nuit à arpenter les terres aux alentours à la recherche de la Danoise.
- Comment vont les Danois ? Les Danois d'ici, d'Eoferwic ? interrogea le Roi.
- Depuis quand vous souciez-vous de leur sort ?
- Depuis que je suis leur Roi. Je sais cela parait un peu étrange, je ne m'attendais nullement à régner ici.
- Vous avez toujours convoité ces terres.
- C'est vrai, mais j'avais l'espoir d'une conquête sans heurt et d'une cohabitation.
- Et au lieu de cela vous avez fait de leur Roi un martyre.
- En effet, et je vois sa veuve dans une peine qui émouvrait jusqu'aux cœurs les plus secs.
- Elle est jeune, et leur amour était très fort. Elle a presque tout perdu, son avenir, sa demeure, son rang. Toutes choses qu'elle donnerait pour le retrouver, lui.
- Cependant sa peine pourrait attiser les troubles..."
Daegan roula des yeux en voyant qu'Edward en revenait bien rapidement à la politique, tandis qu'elle songeait lui trouver une certaine compassion pour Stiorra. Or, ce mouvement de ses pupilles fit divaguer la trajectoire de son regard, et celui-ci croisa les yeux d'Aldhelm. Il semblait amusé de la voir écouter aux portes comme le ferait des enfants. Discrètement ils se sourirent avant de replonger leur intérêt sur la conversation d'Uhtred et du Roi.
"...Peut-être serait-il bon qu'elle s'applique à la cacher.
- C'est impossible.
- Peut-être pourrais-je lui offrir, de quoi l'apaiser. Il me faut regagner mes terres dans le sud, occuper à nouveau le trône du Wessex.
- Vous craigniez que Aethelelm...
- Je ne crains personne, coupa Edward. Mais je soupçonne qu'il tentera de semer la discorde là-bas. Je dois donc asseoir la paix ici.
- Dites cela à Brida, je suis sûr qu'elle se soumettra à vos désirs, dit Uhtred avec ironie.
- Brida certainement pas, mais Stiorra peut-être. Du moins, je l'espère.
- Je ne vois pas ce que vous attendez d'elle.
- Dites-lui de me prêter allégeance publiquement, pour manifester aux Danois qu'aucune rancœur ne demeure entre nous.
- Je crains qu'ils n'aient trop endurés pour accepter cela.
- Nous avons tous trop endurés."
Songeur, Uhtred se tourna auprès du trône. Il était vide, car Edward n'y siégeait plus. Il s'était levé pour converser avec le guerrier. Ce dernier vit alors en ce siège royal, la silhouette d'Aethelflaed. L'espoir qu'elle avait insufflé aux Merciens, la renommée, et la paix qu'elle leur avait apportée. Elle avait été une dirigeante plus que digne.
"Si elle pouvait diriger son peuple comme votre sœur le faisait en Mercie, cela lui redonnerait un but. Pour elle, ce serait un nouvel espoir.
- Tant que son but ne serait pas de monter son peuple contre moi.
- Je doute qu'elle soit tentée par l'idée d'une rébellion. En revanche, elle refusera d'être baptisée.
- Je sais qu'elle l'a été enfant, mon père l'avait ordonné. Elle est donc déjà sauvée et y revenir serait inutile. Je ne veux que la reconnaissance de mon autorité suprême sur Eoferwic.
- Cela lui vaudrait votre protection ?
- Bien entendu.
- En ce cas je vais lui dire d'accepter, merci mon seigneur. C'est un grand honneur auquel ma fille ne s'attend certes pas.
- Un Roi incapable d'honorer ses plus grands guerriers, ne sera jamais un grand Roi, déclara Edward en posant une main sur l'épaule d'Uhtred."
Sur ces derniers mots, le père de Daegan se retira avec, en tête, l'idée de convaincre sa cadette d'accepter cette offre plus que généreuse. Quant à son ainée, elle referma doucement la porte et se remit au chevet de Pyrlig. Ce dernier ronflait à en réveiller les morts. Cela amusa la femme qui laissa un soupire d'aise lui échapper. Posant sa tête sur le bord du lit du religieux, elle se laissa aller à ce sommeil qu'elle n'avait guère prit durant toute la nuit. Ses émotions s'apaisaient, et la retombée des évènements lui calmèrent ses nerfs. Ainsi, la sœur de Sihtric tomba dans la pénombre des rêves.
Lorsque le soir fut tombée, que le repas du Roi prenait place sur la grande table où, autrefois, festoyaient joyeusement Sigtryggr et Stiorra ainsi que leurs plus proches guerriers, Daegan se trouva invitée par Edward lui-même à prendre place à l'attablée. Il désirait la remercier d'être au chevet de Pyrlig et de prendre bon soin de lui. La femme, taraudée par la fatigue, n'eut cœur à refuser cette invitation grandement surprenante. D'autant plus qu'elle allait devoir partager le repas avec son ancien amant et la nouvelle conquête de ce dernier. Or, l'estomac encore noué des dernières émotions, la fille d'Uhtred n'eut guère un grand appétit et se contenta de toucher la viande du bout de son couteau. Aldhelm était présent également, mais il ne dinait pas et se contentait d'attendre les ordres de son souverain. Cependant le silence était de marbre. L'on entendait les feux des torches crépiter, et les pas à l'extérieur s'écraser dans la terre.
" Je n'ai pas encore prit le temps de vous remercier d'avoir écarté Aethelstan de la bataille, dit Edward en brisant le calme.
- Je tiens à lui, il est normal que je lui porte secours, répondit Daegan en prenant sa coupe de vin pour la porter à ses lèvres.
- Bien sûr, vous avez prit soin de lui comme Uhtred a prit soin de vous, jadis. Or, il a grandit et est désormais un jeune homme qui n'a nul besoin d'être dicté.
- Il m'a été difficile de le voir jeune homme, je dois l'avouer. Durant de longues années lui, ainsi qu'un jeune Danois, m'ont aidés à faire face à une grande épreuve de ma vie et à me trouver un but. Mais il me faut reconnaître qu'il est désormais pleinement prêt pour vous servir, sire.
- Etait-ce le deuil du frère de Sigtryggr, Ivar, que vous avez porté ? Je ne vous savais pas tant en amour, d'autant plus qu'il m'a été rapporté que c'était votre propre loup qui lui a porté le dernier coup. Etiez-vous mariez?
- Non, ce n'était guère son deuil. "
A nouveau, la femme porta sa coupe à ses lèvres et bu à grande gorgées. Elle termina pleinement son vin comme elle le faisait si souvent à la taverne avec Finan, Sihtric et Osferth, lorsqu'ils s'adonnaient à la beuverie. Se détournant de son ancienne amante, bien peu bavarde, Edward porta son attention sur Aldhelm qui n'avait dit mot.
" Que tous se préparent pour la cérémonie, prévenez les Danois que vous jugerez bon d'inviter. Ils seront les témoins du serment de Stiorra.
- Les esprits devraient se calmer, c'est très habile, complimenta le conseillé."
Retenant sa langue, Daegan préféra se tenir à grande distance de la politique de ce diner. Elle n'en avait ni le cœur, ni la force car elle connaissait sa cadette. Cette dernière était aussi buttée que leur père. La femme peinait donc à imaginer que Stiorra se plierait aux désirs d'un Roi Chrétien. Mais peut-être qu'Uhtred avait pu lui faire entendre raison.
"Pourquoi ne vois-je pas le plat de Dame Eadgifu ? question le Roi en pointant le bout de table vide qui lui faisait face.
- J'avais cru comprendre que vous l'aviez renvoyé, dit l'homme.
- Non, je n'ai rien fait de tel.
- Et bien, ses servantes sont en train de refaire ses malles pour repartir."
Posant son couteau et ne terminant guère son repas, Edward se leva de son siège, sans présenter d'excuses, et s'en tourna à la chambre qu'il partageait avec sa dernière conquête. Daegan, quant à elle, prit la cruche de vin et se versa une nouvelle coupe.
" Vous le complimentez fort bien, j'ignore où vous trouvez la patience et les mots pour ne jamais le mettre en rogne, dit-elle en relevant ses commissures malicieusement.
- Des années de pratique, sourit Aldhelm. Pensez-vous que Stiorra prêtera serment ?
- Je l'ignore. Je dois avouer, malgré moi, que je connais mal mon frère et ma sœur, nous avons été séparés durant la plupart de notre vie. Il n'y a que mon bâtard de frère, Sihtric, que je connais plus que quiconque. Alors je ne saurai répondre à votre question."
Alors qu'elle faisait tournoyer l'alcool rouge dans sa coupe, la femme se trouva surprise de voir la main d'Aldhelm s'approcher de son visage. Avec délicatesse, il passa ses doigts dans ses longues boucles ébènes avant de les retirer pour chasser un bout de terre séchée. Interloquée par ce geste, elle garda son regard fixe sur l'homme et ne bougea guère, tandis que celui-ci reprenait pleinement sa place.
" Vos cheveux lâchés vous vont bien, et il est rare d'en voir d'aussi long, mais vous ne devriez pas les trainer dans la boue, rit l'homme."
Daegan pouffa en posant sa main sur sa bouche pour ne point recracher le vin qu'elle venait de verser entre ses lèvres. Elle ignorait, par ailleurs, combien de coupes elle avait bu. Or, le breuvage était exquis.
" J'ai domptée un cheval que l'on disait fou, je suis persuadée qu'il est la réincarnation de Leofric, mon premier père.
- Pourquoi dites-vous cela ?
- Quelqu'un m'a dit un jour que les grands guerriers tombés au combat se réincarnaient sous forme de chevaux lorsque leurs proches avaient besoin d'eux.
- C'est une belle pensée.
- Je le crois aussi.
- Vous êtes également une belle pensée."
Ecarquillant les yeux, la sœur de Sihtric reposa sa coupe de vin à demi pleine sur la table. Elle n'avait finalement plus soif.
" Vos joues sont rouge, constata Aldhelm.
- C'est le vin, répondit rapidement la femme. Je crois avoir bien trop bu et je suis harassée par la fatigue. Je vais aller rejoindre ma couche avant de m'effondrer sur la table du Roi telle une ivrogne. Je ne dis pas que je suis une ivrogne, évidemment, il fut un temps où je ne buvais même plus d'ale. Mais les années m'ont rattrapées, et puis les fêtes à Rumcofa étaient nombreuses alors on se laissait aisément emporter, enfin qu'importe, je...Je vais me retirer."
Maladroitement, Daegan se leva de son siège et vacilla quelque peu par la vitesse de son mouvement. Aldhelm se redressa également, penaud, les bras le long du corps, il songeait avoir dépassé quelques limites de sa pensée.
" Pardonnez-moi si mes mots vous ont offensés, ce n'était guère mon but, dit-il.
- Je le sais, bonne nuit seigneur Aldhelm, et merci pour la conversation ainsi que la boue dans mes cheveux. Je saurai à qui faire appel si mes boucles se salissent à nouveau."
Le pas qui peinait à tenir la trajectoire droite, Daegan quitta le toit du foyer qu'occupait Edward. Elle sentait l'alcool, autant par son haleine que dans son corps. Elle était épuisée, n'avait guère mangée et avait bien trop profitée du vin. Ce n'était guère un mélange favorable. Le froid de la nuit ne la sortit pas même de son esprit embrumé. D'eux-mêmes, ses pas l'a conduire à l'intérieur d'une petite habitation où, auparavant, logeaient les invités de Sigtryggr. Désormais c'était les guerriers d'Uhtred qui y prenaient place.
Tentant d'ouvrir la porte sans faire le moindre bruit, en vain, la femme pénétra sous le toit et se laissa tomber sur une paillasse. Elle ne l'avait guère choisit au hasard, et celui qui y dormait déjà se réveilla en sursaut avant de tirer la dague qui était posé à son coté, et de relever brusquement son buste dans le but d'une défense. Il baissa cependant sa garde en constatant la personne qui venait de se glisser sous ses couvertures.
" Par Odin, Daegan, que fais-tu là ? pesta t-il.
- N'ai-je pas le droit de dormir avec mon frère ? maugréa t-elle en retour en gardant ses yeux clos.
- Tu as ton propre lit.
- Mais c'est avec toi que je veux dormir ce soir, Sihtric. Maintenant ferme donc ton caquet, j'aimerais trouver le sommeil."
Soupirant, le bâtard de Kjartan reposa sa dague et croisa le regard interloqué de Finan. L'irlandais dormait juste à coté et avait été réveillé par le bruit de la porte s'ouvrant, ainsi que la silhouette vacillante de la femme, et il se retenait de rire devant le spectacle qu'on lui offrait. Roulant des yeux, Sihtric se recoucha au coté de sa jeune sœur. Cette dernière vint se blottir dans ses bras et se mit à laisser quelques larmes rouler sur ses joues avant de renifler bruyamment. L'homme haussa les sourcils de surprise quant à ce brusque changement de comportement.
" Pourquoi pleures-tu ? interrogea t-il dans un chuchotement.
- Je crains un homme.
- Quelqu'un te veut du mal ?
- Non, tout au contraire, il est trop bon avec moi, mais il ne faut pas qu'il m'aime. Il ne le faut pas, car jamais je ne pourrai lui rendre cet amour. Le seul amour que je peux donner est empoisonné de déshonneur. Il ne faut pas...Il ne faut pas..."
Sur ces derniers mots, Daegan s'endormit dans les bras de son ainé. Celui-ci n'était pas certain d'avoir tout comprit des mots de sa sœur. Il savait que la femme ne voulait guère se marier car elle craignait de jeter le déshonneur de son viol sur son époux, mais le guerrier n'était pas certain d'avoir parfaitement interprété le début de ce discours. Or, un bruyant ronflement l'interrompit de ses pensées. Enfouie contre lui, la femme respirait si fort, que cela lui rappelait le grand et fort Clapa qui faisait presque autant de bruit. Soupirant de nouveau, Sihtric songea que la nuit allait être particulièrement longue. Cependant, il était heureux que Daegan soit venu le trouver.
Passant une main dans ses longues boucles noires, Daegan les sentit lui chatouiller le haut des cuisses, cela même à travers son pantalon. Sa chevelure était lourde, mais elle semblait l'être davantage en cette matinée. Le bon vin du Roi avait eu raison d'elle, et un mal de crâne avait naquit à son réveille. Or, elle n'avait guère eut plus de temps que celui d'avaler un bock d'eau et un morceau de pain, que déjà elle était convoquée sous l'ancien toit de Sigtryggr afin d'être témoin du serment de Stiorra envers Edward. Le reconnaissant comme souverain suprême, mais agissant comme régente sur les terres de son défunt époux. La sœur de Sihtric, qui avait dormit jusqu'à bien trop tard et avait été réveillée en hâte par Finan pour se joindre aux nombreux invités de ce serment, doutait grandement que sa cadette accepte cette offre. Or, Daegan ne remettait guère en cause les sages paroles qu'Uhtred avait sans doute employé à l'égard de la cadette de ses filles.
Sur les grandes dalles brillante de la salle où trônait Edward, Stiorra s'avançait. Ses pas claquaient le sol comme une sinistre mélodie dans le silence qui pesait sur l'endroit. Lui emboitant l'allure, Wolland, le plus fidèle de ses guerriers. Et aux cotés du Souverain, parmi les hommes de son père qui se trouvaient derrière Uhtred lui-même, Daegan, qui espérait que sa sœur fasse un judicieux choix, et qu'elle ne laisse guère la fougue de son amour l'ébranler.
"Agenouillez-vous devant votre Roi, dit Aldhelm qui tenait l'autre coté du fils d'Alfred."
Il y eut un grand calme. L'on entendait le vent pénétrer et claquer le bois de l'habitation auparavant Danoise. Ainsi que le souffle court de Stiorra. Le visage de cette dernière se décomposait en d'innombrable expressions.
" La sagesse me dicte de m'agenouiller, mais mon cœur se refuse à obéir, déclara t-elle la voix tremblante."
Une grande surprise s'éprit des témoins rassemblés, tandis qu'Uhtred perdait son air assuré et le Roi sa splendeur. Sa colère ne semblait guère loin et sans doute l'habitait-elle déjà. Discrètement, Daegan jeta un coup d'œil à Edward pour observer sa future réaction. Elle croisa malencontreusement les yeux d'Eadgifu qui était également présente. Elle avait fait grand chemin pour venir rejoindre son amant, et il se murmurait que celle-ci était enceinte et qu'un mariage ne serait plus à tarder.
"Je suis désolé, tenta de se rattraper Stiorra.
- On m'avait fait part de votre accord, dit le Roi entre ses dents serrées.
- Je voulais respecter le vœu de mon père, mais c'est contraire à ma loyauté envers mon mari, et à tout ce que lui et moi avons construit ici, à Eoferwic. Je ne crois pas que vous laisserez les Danois vivres en paix.
- Si vous refusez votre loyauté au Roi cela ne sera pas sans conséquence, ajouta Aldhelm afin de faire basculer le choix de Stiorra et de calmer les tensions qui prenaient vie."
La mâchoire serrée, plus de crainte que de colère, Uhtred s'approcha de la plus jeune de ses enfants afin de lui faire entendre raison.
"Tu dois te reprendre, glissa t-il.
- Votre but était de m'humilier ! clama le Roi blessé dans son orgueil, je vous rendais votre dignité et une vie confortable.
- La seule chose que je veux, vous ne pouvez pas me l'offrir.
- Stiorra tu as tord ! insista le frère de Ragnar.
- Non, je ne me renierai pas pour gagner une protection. Je veux ma liberté ! Et si ce vœu de liberté doit me jeter dans les bras du bourreaux alors qu'il en soit ainsi, j'irai rejoindre mon mari.
- Non ! s'opposa Uhtred avant de se tourner auprès d'Edward. Sire, sur le champ de bataille vous m'avez donné votre parole qu'elle serait épargnée."
Même à quelques pas de lui, Daegan ressentait l'immense tension qui tendait le corps du fils d'Alfred. Elle entendait son souffle court et sec, ainsi que ses doigts se cramponner avec force au bois de son trône. La matière craqua sous sa poigne et les anneaux qu'il portait aux doigts claquèrent comme un fouet.
" Vous et tous ceux qui vous suivent êtes exilés d'Eoferwic ! déclara le Roi sans laisser place au doute. J'exige de ceux qui restent une complète obéissance ! Si vous n'êtes pas partit avant le couché du soleil, je serai enclin à moins de clémence."
La tête haute, Stiorra pivota et s'en retira de la grande salle, laissant uniquement derrière elle le bruit claquant de ses talons sur le sol. Plusieurs des siens la suivirent dans son mouvement, car beaucoup lui étaient fidèle et beaucoup partiraient à ses cotés avant la fin du délais accordé par le Roi.
"Amenez Rognvaldr ! Qu'il s'agenouille devant moi, une épée sous la gorge si il le faut ! tonna Edward."
Tournant sa langue dans sa bouche, Uhtred s'approcha du Roi et se décida à une dernière supplication.
" Laissez-moi essayé de la raisonner, Rognvaldr vous trahira Sire et vous le savez..
- Alors je le ferai exécuter et j'en trouverai un autre, et j'agirai ainsi autant de fois que nécessaire pour ne plus avoir affaire à cette cité de malheur ! Oubliez Stiorra vous aussi."
A son tour, Uhtred tourna les talons et accouru derrière sa fille afin de lui apporter raison et clairvoyance. Daegan, ne se sentant guère plus utile, emboita le pas à son père et retrouva l'extérieur. Il faisait encore froid, mais bien moins qu'auparavant. Sous le porche de l'ancienne demeure de Sigtryggr, la femme cherchait son père du regard. Elle ignorait quelle direction il avait emprunté. Plissant les yeux, elle aperçue plusieurs Danois se hâter dans une même direction. Suivant cette unique indication qu'on lui offrait, elle se hâta parmi les rues en marchant dans la boue fraiche. En tournant à l'angle, elle décrypta des éclats de voix familiers dont elle se rapprocha.
" Ton allégeance aux Saxons t'a privé d'accomplir ton destin, tout en faisant de toi le jouet de Brida et le nigaud préféré du Wessex."
Fronçant les sourcils, Daegan observait Stiorra cracher un venin empoisonné au visage de leur père. Jamais elle n'avait connu sa cadette ainsi, ce n'était plus une rébellion mais une véritable guerre qui éclatait.
"Pardon ? siffla Uhtred entre ses dents.
- Ce sort ne sera certainement pas le mien.
- Stiorra, il suffit ! intervint Daegan en s'approchant au coté du guerrier. Ta perte a été grande, et je comprends ta peine, mais tu ne peux pas être ainsi revêche. Tu emplois des mots qui ne sont pas les tiens.
- Qu'en sais-tu ? Nous ne sommes pas du même sang ! Tu es née Danoise et préfère te pavaner parmi les Saxons, tu fais hontes à tes ancêtres, le Valhalla t'a fermé ses portes depuis bien longtemps.
- Qui es-tu donc pour parler au nom des Dieux ? répliqua la femme en s'approchant de sa cadette tout en plantant un sombre regard dans ses yeux. Tu crois agir comme une Reine, mais tu te comportes comme une petite fille. Ne me parles pas d'honneur ou de honte alors que je pourrais te faire manger la terre avec aisance. Que tu tournes le dos au Wessex, je le comprends, mais que tu craches ta haine auprès de ta famille, cela je ne peux le tolérer. Pas après tous les sacrifices que notre père à fait pour nous.
- Mon père, pas le tiens, conclut Stiorra en leur tournant le dos."
Daegan poussa un vif juron avant de croiser les bras sur sa poitrine, sans défroncer ses traits durcit. Une main se posa sur son épaule. Inutile qu'elle se tourne, elle savait que c'était Uhtred.
" Le deuil l'a rendu aigre, j'ai grand peine à la reconnaître, dit-elle.
- Moi aussi, mais si elle refuse de nous écouter, peut-être écoutera t-elle son frère."
D'un hochement de tête, la femme approuva les dires de son père. Ainsi, leurs chemins se séparèrent. Uhtred se décida à aller quérir l'aide son fils, Uhtred le Jeune qui était au chevet du père Pyrlig. Quant à Daegan elle se précipita dans le premier angle de maison qu'elle trouva et y vida grandement ses tripes. Le vin avait eut bon gout la veille, mais en cette mâtiné, il était comparable à une bière chaude qui lui était impossible à digérer.
" Daegan, tout va bien ? s'enquit une voix."
Essuyant le vomis qui lui restait en bord de lèvres, la fille d'Uhtred tourna son regard pour rencontrer la silhouette d'Aethelstan. Il avait fière allure dans son armure, et semblait avoir gagné plusieurs années depuis qu'il était au service de son père. De garçon, il était devenu homme. Et Daegan y avait été aveugle et n'avait guère put célébrer cela avec lui.
" Je vais bien, assura t-elle. Le Roi m'a invité à sa table hier soir, et j'ai bien trop consommée de son bon vin."
Le bâtard d'Edward eut un rictus et s'approcha d'un pas pour venir au plus près de la femme.
" A Rumcofa, tu n'avais de cesse de me réprimander lorsque je buvais trop, plus d'une fois j'ai dégobillé sur tes tissus. J'aimais ma vie à Rumcofa, et parfois il m'arrive de regretter tout ce qu'il s'est passé depuis. Parfois, j'aimerais que tout redevienne comme avant, et que notre seule préoccupation soit la chasse."
Plissant les sourcils, Daegan posa une main l'épaule de l'enfant qu'elle avait élevée. Elle lui sourit tendrement, dégageant ainsi une attitude maternelle. Du bout de l'un de ses doigts, elle lui chassa une boucle qui lui tombait devant les yeux. En lui, la fille d'Uhtred avait l'impression de se voir à son âge.
" Plus rien ne sera comme avant, car aujourd'hui n'est pas comme hier, et demain ne sera pas comme aujourd'hui. Nous avançons à chaque seconde. Parfois le chemin semble étroit, effrayant, on a l'immense impression de se tenir au bord d'une falaise avec une peur tenace de trébucher. Mais le chemin reste là, tracé et sans fin. Parfois tu marcheras dans des plaines verdoyante, parfois sur des rochers coupant. Mais rappelles-toi que chaque épreuves devient une leçon, et chaque moment de paix, un rêve. Alors ne regrette rien, car tout un chemin inconnu et excitant t'attend. Tu ne reverra peut-être jamais Rumcofa, mais tu verras des lieux plus grands où tu te forgeras des souvenirs plus intenses. Ton enfance est révolue, Aethelstan, mais ta vie d'homme ne fait que commencer, n'es-tu pas content d'y découvrir ce qu'elle te réserve ?"
Aethelstan sourit vivement, et vint en retour poser sa main sur l'épaule de Daegan. Tout deux se regardèrent un instant. Ils ouvrirent leurs bouches pour entamer d'autres mots, mais leur discussion ne reprit guère. Des cris d'alerte les mirent en garde tandis qu'un cheval au cavalier avachis, pénétra à grand pas dans Eoferwic. Voyant ses amis s'y diriger avec hâte, la femme sentit qu'elle devait faire de même. Détournant son attention du jeune homme, elle accouru jusqu'à la monture dont Sihtric en tenait déjà les rênes.
" Est-il mort ? interrogea la sœur de ce dernier en s'approchant du cavalier.
- Je le crains."
Plissant les yeux, Daegan entrouvrit les lèvres froidement macabre du soldat Saxon qui gisait sur sa monture. Sans signe de répugnance, elle plongea deux doigts entre les dents du cadavre et en sortit un parchemin marqué au sang. Avec hâte elle le déplia, ne prenant guère compte que ce message pouvait être adressé au Roi. Peu de mots s'y trouvaient, mais cela suffit à la mettre en pleine alerte.
" C'est l'œuvre de Brida. Finan, va chercher mon père, dit-elle sans quitter le papier qui dormait dans ses mains."
L'irlandais ne s'opposa guère et trottina jusqu'à l'intérieur de l'ancienne demeure de Sigtryggr. L'instant qui suivit, Uhtred en sortait à grand pas. Les traits de son visage étaient froncés et marqués de soucis et de colère. Lançant un bref regard à Sihtric et Daegan, le guerrier s'approcha du cavalier mort et l'observa plus en détail.
" Tu as dis que c'était Brida ? s'assura t-il auprès de sa fille.
- Oui, elle a glissé un message pour toi sur ce cadavre.
- J'écoutes.
- Elle a simplement écrit "A Loidis" et "Qu'il vienne seul".
- C'est tout ? Juste Loidis, rien d'autre ? s'enquit Finan afin d'avoir davantage de précision.
- Non.
- Je sais où elle est, déclara le frère de Ragnar en tournant les talons pour s'approcher de son cheval."
Ne parvenant à retenir sa langue et ses pensées, l'irlandais accourut derrière son ami de longue date. D'une main sur l'épaule, il l'arrêta dans sa course et eut toute son attention.
"Uhtred, il ne faut pas que tu y ailles seul, c'est surement un piège.
- Bien entendu c'est un piège, nos destins sont liés depuis l'enfance, c'est le dénouement. Alors soit elle me tue, soit je la tue."
Se détournant de son ami, le guerrier marcha d'un pas lourd jusqu'aux écuries afin de seller son cheval et de partir au plus vite. Il savait que s'il mourrait des mains de Brida, il avait des amis pour veiller sur sa famille, ainsi qu'une fille ainée en qui il plaçait toute sa confiance. Daegan saurait quoi faire si il ne revenait guère, et sans doute même reprendrait-elle Bebbanburg. Au fond de lui, lorsqu'il s'était retiré à Rumcofa, il avait toujours sentit que ce ne serait guère lui qui reprendrait Bebbanburg, mais bien Daegan. Alors il ne craignait guère la mort.
Restés auprès du cadavre, Sihtric et sa sœur n'avaient dit mot. Cette dernière savait que son père ne mourrait pas de la main de Brida. Les fileuses ne lui auraient guère choisit une telle Destinée. C'était un grand guerrier qui ne pouvait mourir par la vengeance mais dans la bataille. Il n'y avait nulle autre possibilité que celle-ci. S'approchant d'elle, Uhtred le Jeune. Celui-ci titubait encore de sa douloureuse blessure subit de la main de la Danoise. Les sourcils froncés, il demanda quel sorte d'événement se préparait là. Daegan ne put lui cacher aucun détail, et préféra guère le faire. Il avait tout autant droit de savoir que tout autre. Le visage plein d'espoir, son frère cadet s'en allait d'un pas saccadé auprès de leur père. Si il y avait bien une personne aux sages paroles, c'était Uhtred le Jeune.
" C'est surement une embuscade, maugréa Finan. J'ignore où il se dirige, et il fera en sorte de ne laisser aucune trace, pour sur !
- Moi je sais où il va, déclara Daegan en croisant les bras sur sa poitrine. Il ne sera pas seul, je vais le suivre.
- Dis nous donc ! insista l'irlandais.
- Non. Je ne dirai mot, car si mon père meurt, ce sera à moi de tuer Brida et moi seule. C'est mon rôle en tant qu'ainée.
- Vous êtes aussi butté l'un que l'autre, nous pourrions vous suivre de plusieurs pas en arrière si cela est nécessaire.
- Finan, laisses les partir tous les deux, intervint Sihtric. J'ai confiance en Uhtred, et en ma sœur."
Lançant un sourire au bâtard de Kjartan, la femme quitta leur compagnie et s'en retira pour trouver une selle qui conviendrait à sa nouvelle monture, Leofric. Avec lui à ses cotés, elle était plus qu'en sécurité. Cependant, elle ne pouvait en dire mot à quiconque.
"Ouvrez les portes ! hurla t-on."
Se retournant pour observer les grandes portes d'Eoferwic s'ouvrirent, Daegan y vit son père se glisser entre elles et disparaître dans le paysage. Portant sa main à Dent-De-Loup, la femme songea qu'il lui fallait plus que se hâter si elle ne désirait guère arriver trop tard. Cependant, elle devait laisser assez de distance entre elle et Uhtred pour ne point être repérée. Ses instincts d'ancien assassin lui revinrent plus vite qu'elle ne l'aurait songé. Il lui fallait désormais être aussi discrète que les guerriers de l'ombre, car elle savait que le frère de Ragnar était loin d'être ignare et idiot pour se laisser suivre avec aisance.
* * *
Les épais sabots velus de Leofric frappaient le sol avec hardiesse. Traversant chemin, plaines verdoyantes, forêts étouffantes et paysages familiers, Daegan était à la poursuite de son père. Uhtred était partit depuis fort longtemps, et elle avait prit grand retard à seller sa nouvelle monture. Aucune attache ne semblait lui convenir. Ce n'était guère qu'il faisait le difficile, mais il semblait désirer faire perdre du temps à sa cavalière. Cette dernière, au départ, avait commencé à perdre patience. Or, se rappelant que c'était là la réincarnation d'un des plus grand guerrier du Wessex et de son premier père, elle se mit à douter d'elle-même. Sans doute y avait-il une raison pour que le cheval tente tant à lui faire perdre du temps. Cependant, ce temps perdu fut vivement rattrapé par sa superbe chevauchée. Il n'y avait pas à dire, ce destrier était plus robuste et plus fort qu'aucun autre. Sans doute aurait-il écrasé une armée de Danois par la simple force de ses sabots. Ainsi, dans le paysage verdoyant, la blancheur de Leofric contrastait terriblement avec les longs cheveux ébènes et bouclés de Daegan. Elle ressemblait à un guerrier de l'ombre, chevauchant un fantôme. L'allure était telle, que parfois la femme avait l'impression de voyager sur Sleipnir, la monture d'Odin. D'ici peu de temps, elle rattraperait Uhtred, pour sûr.
Tirant sur les rênes, la sœur de Sihtric fit arrêter la course de Leofric, et mit pied à terre. Posant un doigt sur ses lèvres, elle intima le silence à son cheval. Ce dernier n'émit aucun bruit. Lentement, le pas léger, ils avancèrent sous l'épaisse forêt qui les entourait. Daegan savait qu'elle n'était guère loin. Lorsqu'Uhtred lui parlait de son enfance, il parlait souvent de cet endroit. Un endroit empli d'heureux et de terrible souvenirs. Il lui avait tant décris la chose, que même aveugle, la femme aurait sût trouver le lieu. Accrochant la bride de son cheval à un arbre, elle décida de continuer seule, à pied. Leofric semblait s'en accommoder car déjà il s'était mit à mâchouiller quelques brins d'herbes qui dépassaient des feuilles mortes de l'hiver. Le printemps, était plus qu'installé désormais.
La main sur la garde de Dent-De-Loup, Daegan avançait. Ses sens en alerte, elle craignait de se faire surprendre par une armée menée par Brida. Nul ne pouvait savoir ce qu'elle complotait en appelant Uhtred à elle. Bien que pour sûr, elle désirait sa mort. Mais la Danoise savait également que le guerrier était une plus farouche lame qu'elle, bien qu'elle se soit grandement améliorée au fil des années. Aussi était-il possible qu'elle ait fait appel à quelques hommes pour la soutenir dans sa vengeance. Assassiner le Tueur de Danois, était plus qu'une gloire pour l'ennemi. Or, la femme ne percevait aucun son étranger. Aucun pas suspect. Aucune ambiance pesante, lourde et menaçante. Tout était calme et silencieux. Hormis l'écho de deux éclats de fer se frappant l'un contre l'autre dans un lieu lointain. Pressant le pas, la sœur de Sihtric ne peina plus à faire attention à ses arrières. Elle savait désormais que Brida était seule.
Enjambant une branche morte, sautant par dessus un amas de pierres, Daegan se mit à courir à vive allure. Elle ignorait dans quelle position se trouvait son père. Mais le son persistant des lames s'entrechoquant la rassurait. Le combat n'était pas terminé. Il n'y avait guère de mort pour l'instant. Bientôt, la femme pénétra dans de grandes herbes. Elles étaient si hautes qu'elles la dépassaient. Des cadavres de maisons, d'écuries, de puits ou d'enclos se peignaient autour d'elle. Un lieu laissé à l'abandon depuis des dizaine d'années. C'était donc ici. Là, sur cette terre que Uhtred avait grandit avec Brida, que Thyra avait l'intention de se marier, que Ragnar le jeune avait connu nombre de chevauchées, et que Ragnar le Valeureux avait péri dans les flammes. Daegan marchait dans les pas de sa famille. C'était un sentiment à la fois réconfortant, et terrifiant. Posant sa main sur un bout de bois qui devait constituer autre chose par le passé, la femme songea que d'autres grands Danois avait dû toucher cela avant elle. Inspirant l'air pour gonfler ses poumons d'aise, ce fut le son acharné des épées se frappant qui la ramena à la réalité. Par précaution, la sœur de Sihtric sortit Dent-De-Loup de son fourreau et avança à pas léger, écartant les grandes herbes qui lui attrapaient la chevelure. Courbant le dos pour ne point être repéré, elle regrettait de ne plus être une enfant et passer davantage inaperçue. Ecartant un buisson de ronces, se piquant les paumes, Daegan observa.
Devant elle, à quelques pas, Uhtred et Brida se battaient avec acharnement. Du moins, le guerrier dégageait ce sentiment de colère, de rage et de vengeance, car la Danoise était agenouillée au sol et peinait à parer les coups de son adversaire. Comme à bout de force, elle faisait de moins en moins d'effort. Daegan fronça les sourcils. Elle n'interviendrait pas. Ce n'était pas son combat. C'était celui de son père. Mais bientôt, ce dernier s'essouffla et sa hargne se dissipa, tandis que Brida laissait échapper des sanglots. Sur le visage du guerrier, on pouvait discerner avec aisance le regret, la peine et la compassion. Sa vengeance avait prit une telle place, qu'il en avait oublié qu'avant que tout deux soient ennemis, ils étaient amants et amis. Ils s'étaient aimés plus que tout. La sœur de Sihtric s'accroupit parmi les herbes et ne fit guère de bruit.
" Uhtred ! Tues-moi maintenant ! Vibeke m'attend, je veux la retrouver ! supplia Brida agenouillée dans la boue."
Afin d'avoir ce qu'elle désirait plus que tout, mourir, la Danoise se remit d'un bond sur ses jambes et accouru jusqu'à Uhtred, qui lui avait tourné le dos. L'épée levée, elle espérait que le guerrier mettrait fin à ses souffrances sur terre. Souffle-De-Serpent para l'attaque, et leurs lames s'entrechoquèrent à nouveau, tandis que les deux anciens amis se lançaient dans une danse combattive au même endroit où ils avaient grandit et coulés d'heureux jours. Le guerrier ne mit guère de temps à désarmer son adversaire avant de la faire tomber au sol. Brida s'étala de tout son long sur le dos, tandis qu'Uhtred planta son épée dans la terre avant de poser ses mains sur le cou de la Danoise, et de serrer. Or, cela dura peu, car comme prit par le choc de ses gestes, le frère de Ragnar retira brusquement ses doigts et cessa le mal qu'il infligeait à son ancienne amante.
"Uhtred ! Tues-moi ! Aller, fais le ! Aller vas-y, tues-moi, j'ai perdue toutes raisons de vivre. Je n'arrêterai pas, je n'arrêterai pas Uhtred, supplia à nouveau Brida avant que d'autres sanglots ne l'a secoue. Uhtred, je t'en pries, je t'en supplies, qu'est-ce que tu attends ? Tues-moi ! Je veux mourir."
Daegan observa un voile de tristesse peindre les traits du visage de son père tandis qu'il se refusa à tout acte. Et elle le comprit, les déclarations de la Danoise avait fait réaliser à la sœur de Sihtric à quel point la vie avait été cruelle pour elle. La trahison, le deuil, l'esclavage, la méchanceté des hommes et l'oppression avait rythmé la vie Brida, et cela depuis son enfance.
"Non, je refuse de te tuer. Si mon fils a le cœur de te pardonner après ce que tu lui as fait subir. Alors je dois faire de même, clama le guerrier en se redressant.
- Non ! Non ! Tues-moi, aller espèce de lâche ! Aller ! Tu dois le faire, envoies moi au Valhalla, aller ! batailla la Danoise en frappant Uhtred de ses mains.
- Non ! Car cela reviendrait à tuer une part de moi-même. On ne fait qu'un depuis l'enfance. On s'était trouvée, il y avait de l'espoir alors. Et l'espoir peut renaître.
- Comment pourrait-il renaître ? Le passé est le passé. Tout ce qui faisait la beauté de ce temps là est détruit. Il ne reste plus rien. Tes mots ont une odeur de merde.
- Elle est toujours là, la fille que je coursais tout autour d'ici et que je troussais parmi ces arbres, ricana Uhtred."
Malgré elle, Brida ne put se retenir de pouffer alors que le guerrier posait une tendre main sur sa joue.
" La fille que j'aimais, elle est toujours là.
- Tu crois ? Je n'arrive pas à la retrouver."
Poussant sur ses jambes, le frère de Ragnar se remit debout avant de tendre, avec bienveillance, ses mains à la Danoise.
" Ne t'en fais pas, je vais t'aider, assura t-il. Fais moi confiance."
Quelque peu hésitante au départ, Brida se laissa finalement aller à la raison et attrapa les paumes de son ancien amant. Avec douceur, elle se remit sur ses pieds. Malgré sa grande peine, peut-être lui restait-il un espoir sur cette terre. Un espoir qu'elle pourrait contempler avant de véritablement rejoindre le Valhalla. La rédemption, et l'allégement frappaient aux portes de son cœur. Daegan ne put retenir un sourire se dessiner sur ses lèvres. Elle était heureuse que les deux amis se soient retrouvés, et certaine qu'une place pour Brida pouvait être faite. Les tourments qu'avaient subit la Danoise ne devaient guère faire d'elle l'ennemie que tous croyaient. Pour la première fois depuis la mort d'Osferth, la sœur de Sihtric observait la paix, et la ressentait. Comme si un poids lui avait été retiré. Voir ces deux amis, devenu amants, puis de virulents ennemis offrait une nouvelle porte pour tous les malheureux. Gardant son regard apaisé sur Uhtred et Brida, qui collaient leurs fronts l'un contre l'autre tandis qu'un vent frais gagnait le lieu, Daegan se tamisait davantage dans les grandes herbes. Peu désireuse de gâcher une telle réconciliation. Or, son cœur eut un sursaut lorsqu'un sifflement déchira l'air, et qu'une flèche vint traverser le dos de la Danoise alors que la pointe en ressortait de sa poitrine. Malgré le choc, la sœur de Sihtric sortit Dent-De-Loup de son fourreau et se remit debout d'un bond.
Accompagnant le corps de Brida qui se raidissait dans sa chute, le regard d'Uhtred était horrifié de terreur. Après des années, il avait retrouvé son amie. Et voila qu'on la lui arrachait comme un douloureux coup de fouet.
"Brida, souffla t-il la voix cassée."
Les grandes herbes sur sa gauche se courbèrent tandis que la silhouette de Daegan en sortait. Cette dernière accouru auprès de son père, voyant le regard de Brida se poser un instant sur elle. Il lui sembla qu'elle lui lançait un dernier sourire.
" Pourquoi tu as fais cela ? tonna Uhtred."
Suivant la direction que prenait les yeux du guerrier, la sœur de Sihtric fronça les sourcils en constatant que l'autrice de cette flèche meurtrière, était Stiorra. La jeune femme se tenait, fièrement, l'arc à la main. Elle ne regrettait pas son geste.
" Je savais que tu n'aurais pas le cran de la tuer, répliqua t-elle froidement."
Posant une main réconfortante sur l'épaule de son père, Daegan serra les doigts pour lui montrer son soutien alors que Brida se laissait lâchement abandonner à la mort qui lui tendait les bras.
" Pardonnes-moi Uhtred, j'ai très froid, soupira t-elle.
- Non, non, sanglota le guerrier avant de vivement tirer la dague qu'il portait au ceinturon pour la mettre dans les mains de Brida afin que celle-ci accède au Valhalla.
- Ragnar, fut son dernier mot."
Posant ses mains sur les joues de la Danoise, les traits d'Uhtred se tordaient dans une expression de désespoir et de grande tristesse. Il suppliait pour qu'elle ne l'abandonne pas, et répétait son nom dans une mu de sanglots. Il n'était pas prêt pour lui faire ses adieux, ce n'était pas encore le moment. Mais les fileuses en avaient décidées ainsi.
Laissant son père à son chagrin, Daegan se dirigea à grand pas ferme auprès de sa sœur cadette afin de la faire revenir à la raison. La mort de Sigtryggr l'avait rendu bien plus amère que Brida avait pu l'être. Stiorra fit quelques pas pour tenter de fuir, mais son ainée lui attrapa violemment le bras, l'empêchant d'aller plus avant.
" Qu'est-ce qu'il te prend ? tonna la femme.
- Brida méritait la mort, car Sigtryggr n'a pas mérité la vie, et cela par sa faute à elle. Vous semblez tous l'oublier. Mais nous étions en paix avant
- Tu ne sais pas ce que Brida a vécue, tu n'étais pas encore née qu'elle avait déjà des centaines de raisons de se venger.
- Tu prends donc sa défense ? Je croyais que tu voulais sa mort toi aussi ? Tu as toujours crachée sur son nom. Mais dés que père la pardonne, tu fais de même. Tu es comme lui, tu es aussi faible.
- Faible ? répéta Daegan les dents serrées.
- Ce que père fait, tu le fais. Ce que père dit, tu le dis. Tu ne penses jamais par toi-même. Tu es pitoyable. La seule fois où tu as montrée un peu de courage c'est lorsque tu as rejoins Sigtryggr durant le siège de Winchester. Mais il faut croire que les années qui passent n'arrangent guère ta raison. Comme père, tu lèches les bottes du Roi Saxon. Tu as perdue ton courage, celui que j'admirais. Celui dont tu faisais preuve au siège de Winchester. Lorsque tous les Danois te respectaient, lorsque tu marchais avec ton loup. Regardes toi désormais. Tu ne m'inspire que de la pitié et du mépris. En réalité, je commence à croire que la Daegan que j'ai vu durant le siège de Winchester n'était qu'une vaste fantaisie, et que tu n'as fait qu'embellir les idées de Sigtryggr pendant que tu œuvrais pour le Roi Saxon.
- J'aurais pu partir, siffla la femme en fronçant les sourcils. J'aurais pu partir des centaines de fois durant le siège de Winchester, mais je suis restée pour toi ! Pour être certaine qu'il ne t'arrive rien. J'ai subit la cruauté d'Ivar, pour te protéger toi ! Il m'a violé, Stiorra, m'entends-tu ? Il m'a violé avec force et méchanceté. J'étais terrifiée, mais je n'ai rien dit, j'ai encaissée et j'ai fermée mes lèvres car je voulais veiller sur toi ! Tout ce que j'ai fais durant ce siège, je l'ai pour ta sécurité, Stiorra ! Même si je suis désormais maudite par le déshonneur !
- Je n'ai jamais eu besoin de toi pour me protéger."
Sur ces derniers mots, Stiorra tourna le dos à sa sœur ainée qui avait l'étrange impression d'avoir été poignardé en plein cœur. Elle parvenait presque à sentir le froid de la lame lui traverser la chair, tandis que de vives frissons lui parcouraient le corps. Malgré elle, son déshonneur s'était échappée dans ses paroles. Elle avait avouée l'affreuse agression que lui avait fait subir Ivar et qui la hantait encore en ces jours. Le dire à voix haute, lui avait rappelé chaque parcelle de douleur, de honte et de terreur. Mais sa jeune sœur n'en avait cure. Leur lien s'était brisé, peut-être à tout jamais.
Saison 5 - Episode 8
Agenouillés sur la terre, la brume du soir venant les entourant, Uhtred et Daegan regardaient les dernières parcelles du corps de Brida se consumer par le feu. De bien tristes funérailles pour une vie si remplie. Bientôt, il ne resterait plus que l'épée noircie de la Danoise que les flammes ne pouvaient changer en cendres. C'était dans le plus grand silence que père et fille avaient décidés de rendre un dernier hommage à Brida. Pas un mot ne s'était échappé de leur bouche. Le guerrier semblait gangrené par le remord, la tristesse et le vide d'une grande perte. Il se haïssait autant qu'il tentait de faire la paix avec lui-même. Tiraillé par son passé, et la douloureuse évidence que son amie d'enfance n'était plus. Un vive sursaut le prit soudainement, il bondit sur ses jambes et se mit à fixer un point hasardeux dans le paysage environnant. Daegan, grandement surprise de cette réaction avait basculée sur son derrière et s'était empressée de poser sa main sur la garde de Dent-De-Loup.
" Qu'as-tu vu ? s'enquit-elle en se mettant sur ses deux pieds.
- J'ai cru la voir, j'ai cru voir Brida. Elle se tenait à mon coté, son visage était baigné par le soleil et un sourire, elle me demandait ce que je faisais là. Cette vision a peu duré, mais j'ai tant cru qu'elle était là."
Tordant ses lèvres dans une expression de compréhension, la femme frotta sa main sur le bras de son père pour lui montrer son soutien. Celui-ci, baissa à nouveau les yeux sur le bucher où tout ne devenait plus que cendre et poussière. Daegan, quant à elle, balaya vaguement le paysage autour d'eux. Or, ses yeux s'arrêtèrent sur une chose. Une chose peu habituelle. Fronçant les sourcils plus d'étonnement que de peur ou de colère, elle agrippa la main d'Uhtred pour attirer son attention.
"Elle est là, dit la sœur de Sihtric en pointant son doigt sur le paysage."
Le guerrier laissa son regard être guidé par le geste de sa fille. Ouvrant la bouche de surprise, ses traits se détendant, il l'aperçu. Dans les hautes herbes qui dansaient par le vent et étaient touchées par les derniers rayons du soleil, une biche s'était arrêtée à quelques pas d'eux. Elle les observa, plongeant ses pupilles dans celle du frère de Ragnar, qui poussa un soupire d'aise.
" Oui, on se reverra au Valhalla, dit-il avec certitude."
Dans leurs dos, un craquement de brindille attira soudain leur attention. Dissimulée parmi les ruines, la silhouette de Stiorra se dessinait. Uhtred se décida à courir à sa rencontre tandis que Daegan préféra rester auprès du buché funéraire de Brida. Elle et sa cadette n'avaient plus mot à se dire.
S'accroupissant auprès des cendres, la femme y passa ses doigts, récupérant un peu de poussière qu'elle frotta dans sa paume.
" Pardonnes-moi Brida, je t'ai haïs de nombreuses années, je t'ai vue en ennemie, alors que finalement nos destins se ressemblent. Nous avons vécu le deuil, la perte de l'espoir, la vengeance, et la cruauté des hommes. Mais j'ai été chanceuse d'avoir des épaules sur qui pleurer, des bras dans lesquels me consoler. Tu n'as pas eu cela. Et maintenant que je comprends enfin qui tu es, qui tu étais depuis le début, je m'en veux d'avoir craché ton nom. Je me souviens encore lorsque tu m'as soigné à Dunholm. J'étais arrivée malade, proche d'une mort, le corps gelé de glace et tes soins m'ont apportés la guérison que nul ne pouvait me donner. Sans doute aurions-nous put être amies, j'en suis persuadée. Tu étais une grande Femme Au Bouclier. Tu étais une cheffe, une meneuse. Tu aurais put accomplir de grande chose si les Dieux avaient été plus cléments. On m'appelle Femme Au Bouclier, mais je ne le suis pas encore, car je ne suis que l'une des lames de mon père. Mais je te jure que je serai la première Femme Au Bouclier des Saxons. Je ferai en sorte que cela arrive, même si je dois y laisser mon dernier souffle. Nous ne pouvons être conditionné au mariage. Nous sommes toutes aussi capable que les hommes, alors je me battrai pour ouvrir la voie aux femmes Saxonnes et Danoises. Chacune d'elles, qu'importe d'où elles viennent, leurs histoires ou que sais-je, sera la bienvenue dans mon armée. Une armée de femmes Vikings. (Daegan regarda autour d'elle, elle observa les ruines de l'ancienne demeure de Ragnar le Valeureux dont le bois était encore noirci des flammes qui avaient tués sa famille, ainsi que lui.) Ici, c'est ici que cela se passera. En ton honneur, ce sera ici."
Tirant sa dague de son ceinturon, la femme glissa la petite lame dans la paume qui tenait les cendres de Brida. Son sang les teinta, puis elle posa sa main dans la terre pour l'essuyer. Sa promesse était faite, et depuis le Valhalla, Brida l'avait entendue. Tranchant un bout de sa chemise, la sœur de Sihtric se banda sa paume saignante sans trop s'y attarder, puis s'assit sur le sol en attendant le retour de son père.
L'instant qui suivit, Uhtred apparu parmi les grandes herbes. Il avait un air renfrogné et contrarié sur le visage. Daegan devina que sa conversation avec Stiorra n'avait pas portée meilleur fruit que la sienne auparavant. Soupirant, il accrocha les mains à son ceinturon et regarda autour de lui.
" Nous devrions passer la nuit ici, et reprendre notre route demain matin, dit-il.
- C'est plus prudent, la fatigue m'harasse.
- La dernière fois que j'ai dormi en ce lieu, je n'étais qu'un jeune guerrier idiot. J'étais un enfant, et voila que je pose le pied sur ces terres en étant un homme. Mais j'ignore si mon père Ragnar le Valeureux est fière de ce que j'ai accomplit.
- Il l'est, j'en suis certaine. Il a vu les nombreux sacrifices que tu as fais pour ta famille, il sait ce que tu as perdu, et ce que tu as gagné. Et il le sera davantage lorsque tu auras repris Bebbanburg.
- Ce n'est qu'un rêve lointain, ricana le guerrier en venant s'asseoir au coté de son enfant. Je pense que c'est à toi de la reprendre. Tu es l'ainée de la famille.
- Comme il te plait à le dire, la Destinée est tout, et reprendre Bebbanburg n'est pas la mienne.
- Quelle est donc ta Destinée si ce n'est guère de reprendre la forteresse de ton cabochard de père ? dit-il en entourant les épaules de sa fille de l'un de ses bras.
- Je commence à la percevoir, du moins je le crois. Mais seuls les Dieux le savent."
Lançant un sourire à son père, Daegan retira l'emprise qu'il avait sur elle, et s'allongea dans la terre. La nuit allait être fraiche mais pas grelotante. Son père l'imita. Ensemble, le regard tourné vers les étoiles apparentes, ils ne disaient mot.
" Cela me rappel la nuit que nous avions passés à la belle étoile après que nous ayons sauvés Hild. Iseult était là, et Leofric aussi. J'aime ce souvenir.
- Je me souviens particulièrement de tes ronflements de cette nuit là, tu faisais grand bruit pour une enfant."
La femme pouffa en donnant une tape sur le bras de son père. Puis le silence revint durant un court instant.
" J'ai entendu tes mots, déclara Uhtred.
- Quels mots ?
- Ceux que tu as dis à Stiorra. Je comprends désormais pourquoi tu as refusée tous les hommes qui se sont approchés de toi. Je regrette de ne guère avoir pu te protéger d'Ivar. Je regrette que tu aies eu à subir cet acte cruel, et que ta pureté t'ai été prise avec tant de violence.
- Un mur nous séparait, tu ne pouvais guère savoir.
- Je suis ton père, je devrais tout savoir. C'est un lourd fardeau que tu portes depuis de trop nombreuses années.
- Sihtric m'a aidé à porter ce fardeau, je n'ai guère pu lui cacher une telle chose.
- Pourquoi ne rien m'avoir dit ?
- J'avais trop honte, je ne voulais pas jeter le déshonneur sur ta famille.
- Tu n'as pas été déshonorée, Daegan. C'est Ivar qui a jeté le déshonneur sur sa famille, mais pas toi. Tu n'es pas coupable de cet acte cruel.
- Aucun homme ne voudra d'une femme qui n'est plus pure. Jamais je n'aurai époux et enfants. Je me suis faites à l'idée.
- Si un homme t'aime et comprend ton malheur, tu seras pure pour lui. Les Dieux savent que tu es pure. Ce viol que tu as subit, ne t'a rien enlevé de ta vertu. Que Thor m'envoi un éclair si je dis mensonge."
Le ciel resta clair et dégagé. Les étoiles semblèrent alors plus brillante qu'à la minute d'avant.
" Il y a un homme que j'apprécie, avoua Daegan. Mais je me suis tant faite à l'idée que j'étais maudite et déshonorée que je doute mériter son amour. Il est l'homme le plus serviable, le plus doux et le plus loyal que je connaisses. Mais il est de bonne famille, de haut rang, je ne peux lui infliger mon fardeau. La Destinée est ainsi, les fileuses ont dit que jamais je n'aurai d'enfants et d'époux, et c'est cela qui me brise le plus.
- J'ignorais que tu désirais tant une famille. Je savais depuis de longues années que tu désirais être guerrière, car même enfant tu le clamais, mais j'ignorais que tu avais ce désir d'enfant.
- Je l'ai, et de plus en plus au fil des années. Je ne veux pas que mon sang disparaisse. Même si les enfants de Sihtric le perpétueront. Je veux tout de même que mon sang, le mien, soit dans les veines d'une descendance. Une descendance pure qui fera de grandes choses. Une descendance qui aura le choix de se battre ou non, de choisir sa religion, de choisir sa vie. Je suis une femme, jamais mon nom ne sera cité ou retenu dans l'histoire. Une descendance est tout ce que je pourrais laisser derrière moi. Peut-être qu'au fil du temps mon nom se perdra, mais mon sang continuera de vivre. C'est cela que je veux.
- Tu trouveras époux aimant et enfanteras, j'en suis certain, et je ferai en sorte que jamais ton nom ne soit oublié, Daegan fille d'Uhtred et Femme Au Bouclier, dit Uhtred en embrassant le front de sa fille avant de l'attirer dans ses bras. Mais désormais il faut se reposer, à moins que tu n'aies le désir de me parler d'autres de tes pensées. Je suis à ton écoutes.
- J'ai allégé mon cœur avec ce qui me pesait le plus. Je suis heureuse que tu saches désormais, j'aurais sans doute dû te le dire plus tôt.
- Et Osferth, sa mort te peine t-elle encore ?
- Non, j'ai la sensation qu'il est avec moi. Parfois, quand je ferme les yeux, j'ai l'impression de sentir sa main sur mon épaule. Je sais qu'il ne voulait pas mourir. Mais je sais aussi qu'il est en paix au Paradis et qu'il veille sur moi. Lui et moi étions liés, nous le serons à jamais. Comme Brida et toi. Qu'importe la distance, ou la vie qui nous sépare, nous serons toujours ensemble. Nos âmes étaient sœurs."
The next is coming...
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Salutations Danois.es et Saxon.nes !
Je tiens, encore, à m'excuser de ces nombreux retards ou reports de publication (alors que je vous avais promis un chapitre par semaine)
Il se trouve que j'ai beaucoup d'occupations (séduire mon crush en fait partie d'ailleurs) mais surtout que je suis sous un traitement médical qui me pompe mon énergie. Clairement je ressemble à Uhtred qui aurait un peu trop bu.
N'étant donc, pour l'instant, pas en mesure de sortir un chapitre par semaine. J'ai pris la décision d'en publier un toutes les deux semaines. Et cela jusqu'à ce que je parvienne à rattraper mon retard pour avoir un rythme de publication plus confortable.
Je suis persuadée que vous comprendrez ma situation. D'autant plus qu'on se rapproche dangereusement de la fin, donc autant faire durer le plaisir...Oui, je ne suis pas prête à dire adieu à Daegan.
Bref, passons.
On se retrouve donc le dimanche 25 juin.
En vous souhaitant deux semaines de joie, et en donnant mon courage à celleux d'entres-vous qui passent sans doute quelques épreuves de fin d'année.
Merci, et je vous salue des deux mains !
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