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La rentrée

Nostalgie, c'était le sentiment qu'éprouvaient la plupart des étudiants durant les derniers jours de vacances. Mais pour Anatole, c'était l'impatience et l'excitation.

Il venait d'emménager dans le quartier avec ses parents et son frère Ethan. L'adolescent n'avait pas encore eu l'occasion de se faire des amis, il n'aimait pas sortir et ça ne lui manquait pas tant que ça. Même s'il s'était amusé à passer les deux mois de vacances enfermé dans sa chambre, son "repaire", en lisant des comics et en jouant aux jeux vidéo, il commençait à avoir envie de partager ses passions avec une autre personne de son âge.

Son frère détestait lire et trouvait les super-héros ridicules ; c'était tout son opposé. Ethan préférait passer ses journées dehors à s'entraîner sur le terrain de basket du coin avec l'idée de réussir les sélections pour rentrer dans l'équipe de son nouveau lycée.

Anatole passa sa journée comme les autres, dans son repaire sombre aux rideaux tirés en permanence. Réprimant son excitation à l'idée de découvrir sa nouvelle école et de se faire plein d'amis d'ici moins d'une semaine, il alluma sa console.

Anatole chassa une mèche rebelle de cheveux roux foncé qui obstruait sa vue et remonta ses lunettes rondes et turquoises pour commencer sa partie d'Arkham Asylum dans les meilleures conditions. Ses yeux verts pâle scrutaient l'écran avec attention pendant que son esprit s'évadait dans un autre monde.

Soudain, la porte de sa chambre s'ouvrit d'un coup, sans que l'on ne frappe. Il n'était pas si difficile de deviner l'identité de la personne qui venait de rentrer.

- Je vais au parc avec Jérémy, tu veux venir ? demanda Ethan.

Jérémy. C'était l'ami que son frère s'était fait dès la première semaine d'emménagement, ou plutôt, le petit-ami. Ils s'étaient vite rapprochés et Anatole les avait surpris en train de s'embrasser pendant qu'il se réapprovisionnait en sodas entre deux combats de Batman.

Ethan avait déjà abordé le sujet de son homosexualité en faisant une confidence de son crush à son frère quelques années auparavant. Ce dernier avait vite changé de sujet car c'était la première fois qu'il tombait amoureux d'un garçon et il n'était pas encore à l'aise avec ça, bien qu'il soit maintenant ouvertement gay. Anatole et lui n'en parlaient pas vraiment, il n'y avait rien à dire là-dessus. Si Ethan voulait se confier, il l'aurait probablement fait à quelqu'un capable de le comprendre et donc issu de la communauté LGBT+. Par la force des choses, Jérémy était devenu le premier ami d'Anatole dans sa nouvelle vie.

- J'arrive dans cinq minutes, répondit ce dernier en sauvegardant sa partie.

Anatole sortit de son repaire et traversa le couloir pour aller retrouver son frère qui l'attendait déjà dehors, une balle de basket à la main.

L'adolescent plissa les yeux et mit une main en visière à son front ; cela devait faire deux jours qu'il n'avait pas été exposé à la lumière naturelle. Le soleil réchauffait son teint laiteux parsemé de boutons.

- Tu devrais sortir plus souvent. Ça s'appelle le soleil ! se moqua Ethan avec un sourire en coin.

Il avait beau être le plus jeune, il ne manquait jamais une occasion de charrier Anatole sur son mode de vie si éloigné du sien.

Les deux garçons marchèrent ensemble jusqu'au parc pour retrouver Jérémy.

Le rouquin appréciait beaucoup ce dernier, surtout qu'il rendait Ethan heureux : malgré les apparences trompeuses, il prenait son rôle de grand frère très à cœur. Il jeta un coup d'œil au cadet qui affichait un sourire béat et rougissait déjà à l'idée de retrouver son bien-aimé. Ethan avait beau jouer les durs, il était fou amoureux de Jérémy.

La route se fit en silence, l'un pensant à son amour en dribblant, l'autre aux connaissances qu'il ferait à la rentrée. C'était très gentil de la part d'Ethan de l'inviter aux sorties de temps en temps, mais Anatole ne voulait pas les déranger et il avait hâte de se faire ses propres amis.

Jérémy était assis sur un banc en dessous du grand chêne qui faisait toute la splendeur du parc. Le jeune homme ne faisait rien, contemplant les passants d'un air distrait pendant que sa jambe gauche remuait frénétiquement : il était impatient. Sa tête se tourna brusquement alors qu'ils n'étaient qu'à une dizaine de mètres, comme s'il sentait la présence de son petit copain. Son visage s'illumina d'un grand sourire aussitôt qu'il vit Ethan.

Jérémy se leva et les salua chaleureusement tous les deux en échangeant un regard complice avec le plus jeune des deux frères. Les trois amis avancèrent ensemble pour se promener dans le parc.

- Je vois que tu as réussi à faire sortir le vampire de sa tanière, lança Jérémy à Ethan tandis que le roux se renfrognait.

- Ça n'a pas été si dur que ça, je crois qu'il commence à se lasser...

- Je dois juste refaire un tour au Comics' store, c'est tout !

Ces deux-là s'entendaient définitivement trop bien au goût d'Anatole et ils semblaient s'être ligués contre lui. L'adolescent traîna un peu la patte, pas tout à fait convaincu d'avoir fait le bon choix en accompagnant son frère.

- Ça va, reste pas dans ton coin ! dit alors ce dernier en faisant demi-tour pour le rejoindre. Je ne doute pas que tu aies des activités très... passionnantes ; seul, dans ta chambre obscure, en compagnie de ta console et de tes BDs.

- Comics, corrigea automatiquement Anatole.

- Ouais, c'est pareil !

Anatole ne voulait pas en rajouter et laissa donc couler, de nouveau
copain comme cochon avec ses deux compères.

- J'ai faim ! se plaignit-il quelques instants plus tard. On va chercher des frites ?

- C'est mauvais pour mon régime ! Comment veux-tu que je passe les sélections si je m'engraisse !? s'exclama Ethan, son ballon frappant le sol et sa main en alternance tel un yoyo.

- Tu peux bien te faire plaisir de temps en temps !

Jérémy était un excellent médiateur et temporisait toujours les deux frères.

Les trois garçons allèrent donc acheter des frites et retournèrent dans le parc s'asseoir sur un banc. Anatole se rua goulûment sur le paquet devant le regard réprobateur de son frère : son mode de vie avait beau être déplorable, il ne prenait jamais un gramme.

Une fois le met terminé, Anatole prit le sac en papier qui avait contenu les frites, fit sauvagement trois trous dedans, et le mit sur sa tête. Jérémy éclata aussitôt de rire et Ethan eut un semblant de sourire face à la scène.

- Je suis Bagman !

- Génial, comme super-héros ! renchérit Ethan avec sarcasme.

- Ça peut pas être pire que Zeitgeist de X-Force, son pouvoir, c'est le supervomi.

- Beurk.

- Ouais. Et l'Anarchiste, toujours dans X-Force, a une super transpiration et Maggot, X-Men, a des limaces mutantes qui vivent dans son système digestif.

- On est ravi de l'apprendre.

- Mais ça, c'est Marvel, DC Comics ne fait pas des trucs aussi dégeux...

- Finalement, c'est pas mal Bagman, dit Ethan avec un sourire entendu et bienveillant.

- Ouais, je vais même me promener comme ça.

- Déconne pas, mec.

- Tu ne m'en crois pas capable ?

Ethan ne put que pousser un soupir face à l'obstination de son frère. Après tout, c'était amusant d'oublier un peu le sérieux et de se laisser aller.

Quelques minutes plus tard, le jeune garçon ne vit pas une taupinière, à cause de son nouveau couvre-chef qui réduisait considérablement son champ de vision, et se prit les jambes dedans, s'étalant de tout son long pour le plus grand bonheur d'Ethan et Jérémy dont le rire était à peine contenu.

Anatole grommela en se relevant à l'aide de la main que son frère lui tendait avant de lui aussi rigoler de sa maladresse. Il était grand et fin, et surtout très gauche, mais il ne s'en plaignait pas, ça lui faisait passer de bons moments comme celui-là.

- Tu veux devenir taupe-man, finalement ? Ou alors tu te reconvertis à la Star Wars, Darth Mole ? se moqua Ethan en riant.

- Les chauves-souris et les taupes ne sont pas si éloignées, figure-toi.

- Ouais, sauf que Batman est stylé. T'imagines ton costume si tu te déguises en taupe ?

- Avoue que c'est pas si mal, le sac en papier, tout compte fait.

- Ok, c'est pas faux...

Les trois amis poursuivirent leur route, marchant aléatoirement jusqu'à sortir du parc. Ils arrivèrent sans le vouloir au terrain de basket sur lequel Ethan s'entraînait tous les jours et là où il avait rencontré Jérémy. Ils échangèrent un regard complice en se remémorant ce souvenir.

- Maintenant qu'on est là, autant jouer !

- Compte pas sûr moi ... râla le garçon aux lunettes turquoises.

Ethan ignora son frère et courut au centre du terrain, suivi de près par Jérémy. Le plus jeune des deux frères, qui ne se séparait jamais de son ballon de basket, lança le début de la partie, seul face à Jérémy qui
devenait son rival le temps d'un match.

Anatole resta sur le côté avec son air faussement outré durant dix minutes avant de rejoindre la partie même s'il avait le sport en horreur. Il courut de toutes ses forces en s'imaginant à la place de Flash et subtilisa la balle des mains de Jérémy pour la lancer avec la précision de Green Arrow.

... ou pas.

Il manqua le tir et Ethan récupéra aussitôt la balle pour marquer un panier réussi.

- Bien essayé. Je croyais que tu ne voulais pas jouer? dit-il avec malice.

- Oui, ben, j'ai changé d'avis !

Ethan passa sa main dans les boucles de son frère et Anatole fit semblant de détester ça avant de ne céder au sourire qui s'efforçait de franchir ses lèvres. Jérémy rigola face à la complicité des deux garçons liés par le sang et profita de leur moment d'inattention pour récupérer le ballon.

- Hé ! C'est de la triche !

- Tous les coups sont permis ! Comme en amour ! rétorqua-t-il avec un clin d'œil coquin.

- C'est ce qu'on va voir !

Ethan courut à sa suite, plus le tacla au sol tel un footballeur américain. Anatole me put s'empêcher de le comparer au super-héros Hawk des Titans.

- Tu disais ? demanda le basketteur à son copain immobilisé par ses bras.

- Je disais que le ballon est à toi, chéri.

Profitant de ce moment, Ethan déposa un baiser sur ses lèvres avant de le soulever de ses bras musclés pour le remettre sur pied.

- Je ne t'ai pas fait mal ?

Jérémy secoua la tête de gauche à droite, sans lâcher Ethan des yeux.

- Il est tard. Je crois qu'on ferait mieux de rentrer, dit-il avec un regard brûlant de désir.

- Oui, tu as raison. Il vaut mieux se coucher pour être en forme. La rentrée, c'est demain.

Les trois garçons quittèrent le terrain, et traversèrent le parc dans le sens inverse. Anatole traînait, devant presque courir pour rattraper ses deux amis qui semblaient vraiment très pressés. À bout de souffle, il s'arrêta à l'entrée du parc pour récupérer : il avait fait assez de sport pour un an.

- Tu peux rentrer à la maison. Je repasse chez Jérémy. Dis à maman que je ne sais pas quand je rentre. Si je rentre.

Ethan venait d'abandonner Anatole pour aller retrouver son amoureux, pas difficile de deviner leurs intentions. Il remonta ses lunettes rondes sur son nez et sourit en voyant Ethan et Jérémy main dans la main, baignés par la lueur orangée du soleil déclinant. Anatole fit le chemin inverse à pied, seul. Heureusement, ce n'était pas long.

Une fois chez lui, il enfila son pyjama Batman et partit se coucher. Il eut un peu de mal à s'endormir, surexcité.

Demain, il se ferait plein de nouveaux amis, demain, il vivrait vraiment dans ce quartier et pas juste dans sa chambre, demain, il commencerait une scolarité qu'il espérait aussi brillante que celle de Tony Stark (sans trop y croire). Et qui sait, demain, peut-être trouverait-il l'amour d'une jolie lycéenne ?

Il avait hâte. Anatole savait déjà comment il s'habillerait et son sac était prêt depuis plus d'une semaine, attendant patiemment le lendemain, sur sa chaise de bureau, à l'effigie de son propriétaire.

Ensuite, l'adolescent repensa à la merveilleuse journée qu'il venait de passer : à sa promenade dans le parc, à la friterie, à sa chute, à ce fameux super-héros sac, à sa partie de basket, à sa complicité avec son frère, à son nouvel ami Jérémy, à l'amour qu'entretenaient ces deux derniers.

Anatole s'endormir, le sourire aux lèvres.

***

Anatole était en route pour le lycée. Son réveil Batman en forme de chauve-souris avait sonné très tôt et il avait pris soin d'enfiler son T-shirt Joker. Il était fin prêt.

Son frère n'était pas rentré, il avait dû passer la nuit avec Jérémy. Anatole marchait donc seul, tendu, les mains crispées sur son sac-à-dos DC comics et le sourire aux lèvres. Il avait attendu ce moment durant toutes les vacances. Il avançait vite, à la fois excité de savoir ce qui l'attendait et impatient de découvrir ses nouveaux amis.

L'adolescent arriva bien vite devant l'établissement, respira un grand coup et rentra. Il pénétra dans le hall d'entrée aux murs gris où régnait le brouhaha incessant des élèves qui se retrouvaient après avoir été séparé pendant deux longs mois.

Personne ne parut le remarquer, tout le monde semblait absorber par la conversation. Anatole ne se laissa pas décourager pour autant et, franchit la porte qui devait mener à la cour.

C'était la première fois qu'il rentrait dans cette école, donc il ne savait pas trop où aller. Le rouquin découvrit que le réfectoire se situait sur la gauche et fit quelques pas avant de descendre les escaliers qui menaient dans la cour de récréation noire de monde.

Une fille montait les marches dans le sens inverse. Elle portait un top bleu qui dévoilait son nombril, d'immenses boucles d'oreille en anneaux et une queue-de-cheval brune qui retombait sur la lanière de son sac de marque qu'elle portait à l'épaule.

Anatole lui fit un sourire maladroit auquel elle répondit en le regardant de haut en bas avant de secouer la tête et de passer son chemin.

Perplexe, le garçon s'arrêta quelques instants. Il avait mieux connu comme accueil, mais il n'allait pas se laisser décourager si facilement : il avait lu suffisamment de comics pour savoir qu'il ne fallait jamais baisser les bras malgré les obstacles.

Les étudiants se trouvant à l'extérieur étaient tout aussi peu disposé a l'accueil que l'étaient ceux du hall. Anatole décida alors d'explorer un peu le bâtiment, c'était l'occasion de prendre ses marques. Il déambula dans les couloirs, croisant d'autres adolescents qui le dévisageaient de haut en bas en s'arrêtant sur son teint laiteux, ses boucles rousses et ses lunettes rondes et turquoises qui volaient la vedette à ses yeux verts pâles : la mode, ça n'avait jamais été son fort.

Face à son air perdu, il ne reçut pas de bonjour, pas de sourires compatissant seulement des rires.

Après un moment, la sonnerie retentit. Anatole était complètement déboussolé et ne savait pas ce qu'il devait faire, alors il se précipita dehors et remarqua que les élèves sortaient du hall pour se réunir au milieu de la cour où se trouvaient tous les autres.

Bien qu'Anatole soit très grand, sa corpulence squelettique lui permit de se faufiler jusqu'au bas des marches.

En haut, le directeur commença le discours de début d'année que personne n'écoutait car, même ceux qui aurait voulu n'auraient pas pu à cause des conversations nerveuses et incessantes des adolescents impatients.

Le silence se fit soudain pour l'instant crucial : les classes.

Le directeur annonçait les noms des élèves un à un en les intimant de suivre leur titulaire. La fille brune au top bleu alla rejoindre un professeur chauve avec un bouc.

- Anatole Evrard, appela le directeur.

C'était son tour. Il était dans la même classe que cette fille. L'adolescent observa son titulaire de plus près : il portait un T-shirt Star Wars, des piercings aux oreilles et avait l'air amical. Finalement, tout ne s'annonçait pas si mal.

D'autres étudiants arrivèrent et quand le proviseur annonça le nom de la classe suivante, Anatole su qu'ils étaient au complet. Il n'y avait pas d'autres visages "connus" à l'exception de la fille au top, ce qui l'arrangeait, car il n'avait pas vraiment eu de bon rapport.

Toutefois, le jeune homme éprouvait une certaine joie à idée de connaître au moins quelqu'un, même de vue. Il est vrai que la fille, n'avait pas été très sympa, mais le jeune rouquin se dit qu'elle était sûrement pressée : peut-être était-ce son premier jour à elle aussi ? Ça leur aurait fait un point commun. Et puis, elle était très jolie. Anatole avait retrouvé le sourire et avança en suivant le professeur, en tête de file.

En voyant que la fille était restée au fond du rang, il traîna la patte pour atteindre son niveau. Il se fit bousculer par quelques élèves pressés de prendre sa place devant, mais ne le prit pas personnellement. Après-tout, il était en plein milieu du passage.

Anatole tenta d'adresser un nouveau sourire chaleureux à la brune auquel elle répondit avec un air gêné, mais ça, il ne le remarqua pas.

- Salut. Moi, c'est Anatole, se présenta-t-il.

La fille le regarda avec de grands yeux comme pour lui demander s'il était sérieux. Elle trouvait ce genre de présentation démodé : à l'époque actuelle on demandait son Instagram. Dire son prénom, c'était d'un ringard...

- Peneloppe, répondit-elle sobrement avant de détourner le regard comme pour fuir la conversation.

- C'est la première fois que je mets les pieds ici.

Peneloppe ne l'écouta pas finir sa phrase et rejoignit l'avant du rang.

Anatole ne comprenait pas sa réaction et préféra se dire qu'elle venait de reconnaître un ami devant, et peut-être ne l'avait-elle pas entendu poursuivre la conversation.

Juste devant lui, trois filles semblaient en grande conversation. Anatole décida de se rapprocher et d'écouter afin de potentiellement y prendre part.

- Tu as entendu, Marie-Charlotte ? Il y en a un qui s'appelle Anatole ! Non, mais ça devient du n'importe quoi ! Mais c'est quoi pour un prénom ? Moi, si j'avais un nom pareil, je préférerais me suicider direct !

- Ouais, ta grave raison, Faustine. Il ferait mieux de changer de nom ou de vivre caché, parce que là...

Anatole n'écouta pas le reste. Il était sidéré par cette cruauté. Elles ne le connaissaient même pas, ne lui avaient jamais parlé, ne connaissaient pas son apparence... Parce qu'il était mieux leur nom ?

Anatole resta fort : ce n'étaient pas trois pouffiasses qui allaient lui gâcher la journée qu'il attendait avec impatience.

Le professeur s'arrêta. Il ouvrit une porte et invita la classe à rentrer. Les bancs avaient vécu, les chaises aussi et le tableau était dans un état épouvantable, mais Anatole se dit que c'était ainsi dans toutes les écoles. Leur titulaire s'installa à son bureau, devant tous les autres déjà occupés par les élèves et attendit le silence. Le rouquin vit tout le monde s'installer, il scruta la salle pour voir si personne n'était seul et il vit une fille blonde sans camarade de classe. Il avança vers elle et quand il posa sa main sur le dossier de la chaise, prêt à s'asseoir, elle posa hâtivement son sac dessus en prenant bien soin de l'ignorer.

Il se retourna et remarqua un garçon au seul banc occupé de la dernière rangée, il avait de longs cheveux, un skate déposé derrière lui et un air je m'en foutiste. Anatole s'avança confiant, et le garçon daigna lui adresser la parole après l'avoir lorgné sous toutes les coutures de ses yeux bleus perçants.

- Sorry man. J'préfère la jouer solo.

- Ok, pas de soucis, rétorqua l'adolescent avec un faible sourire avant de se rabattre sur la place à côté, une des deux seules encore libres.

Il entamerait donc cette première journée seul. Sans qu'il ne s'en rende compte, le professeur l'avait regardé chercher une place impatiemment et s'empressa de prendre la parole dès qu'il fut assis.

- Bonjour à tous.

Il marqua une pause avant de poursuivre avec agacement.

- Je n'ai pas entendu, excusez-moi, dit-il d'un air faussement désolé. Bonjour.

- Bonjour, entonna la classe en chœur avec l'énergie et l'enthousiasme des alcooliques anonymes.

- J'aime mieux ça. Je serais votre professeur de morale et de philosophie ainsi que votre titulaire cette année. Je vais commencer par faire la liste des présences pour voir si tout le monde est là.

Il commença par citer des noms qu'Anatole entendait pour la première fois, n'y ayant pas prêté attention lors de la formation des classes.

- Peneloppe Deauville ?

La fille au top bleu leva la main d'un geste précis et élégant en faisant tournoyer un large bracelet assorti à sa tenue autour de son poignet.

Le professeur hocha sa tête qu'il repencha aussitôt sur sa fiche de présence pour poursuivre.

- Anatole Evrard ?

Le jeune garçon leva timidement sa main qui ne dépassait presque pas la hauteur de sa tête. Les autres élèves scrutaient la pièce des yeux à la recherche du fameux Anatole qui se trouvait parmi eux. Tous les regards se braquèrent vers lui avec une effrayante synchronisation.

Le titulaire décocha un regard obscur à Anatole pour ne pas s'être montré bien visiblement pendant que des murmures s'élevaient dans la salle.

- Alors c'est lui, Anatole ?

- Il est roux.

- Tu as vu ses lunettes ? Rondes comme Harry Potter !

- Elles sont turquoise...

- Et ses yeux ? Ils sont si pâles !

- Franchement, il aurait pu choisir une meilleure couleur. Ces lunettes ne les mettent absolument pas en valeur.

- C'est quoi ce T-shirt ? Il fait peur le bonhomme dessus. Il fait écrit quoi en dessous ? "Life is a joke" C'est plutôt lui dans notre classe la joke.

- Il a plein de boutons ! Beurk ! Ça me dégoûte !

- Tu as vu son teint ? Tu crois qu'il a déjà vu le soleil ?

Il y avait énormément d'autres commentaires et remarques, mais Anatole ne put entendre que celles-là. Il se sentait honteux d'être ainsi examiné comme une bête de foire. Ces autres adolescents de son âge ne le connaissaient pas et osaient pourtant le juger si sévèrement.

Le jeune garçon sentit sa gorge se serrer, mais il garda la tête haute, sinon c'était fini pour lui. Tout n'était pas encore perdu, ce n'était que la première impression générale et on ne le connaissait pas encore, par contre, s'il montrait le moindre signe de faiblesse, il prendrait le statut de victime.

Le professeur entendit évidemment toutes les remarques, mais ne dit rien. Anatole se sentit bouillir de rage. N'était-il pas censé enseigner la philosophie et la morale, ce type ? Alors, pourquoi ne faisait il rien ? C'était répugnant ! Comme quoi, les apparences sont bien trompeuses.

Comme c'était le premier jour de l'année, il ne durait que deux heures, au grand soulagement d'Anatole.

Quand la sonnerie retentit, il se dépêcha de faire ses affaires et de quitter la classe sans oublier de regarder son professeur de travers. Titulaire ou pas, ça restait un beau salaud.

Certains étudiants avaient été plus rapides pour quitter la classe et attendaient le rouquin d'un pied ferme. Ce dernier prit grand soin de les ignorer et marcha d'un bon pas jusqu'à ce que quelqu'un retienne la poignée de son sac à dos DC Comics.

- Pas si vite, Harry Potter ! s'exclama un épais garçon qui faisait la même taille qu'Anatole. Qu'est-ce que tu fous dans notre école ?

- Et bien.. Euh... Je Heum... Je viens de..

- Nan, tu sais quoi ? On n'en a rien à branler, Anatole face de Troll ! Le seul truc qui doit bien rentrer dans ton petit crâne de rouquin écervelé c'est que notre bahut, c'est pas pour les losers. Mais toi, t'es un loser. Bref, on veut plus voir ta sale gueule de Troll ! Pigé ?

Le garçon n'attendit pas sa réponse et tourna les talons après lui avoir asséné une gifle monumentale.

Jamais la route n'avait paru si longue à Anatole qui avait déjà fait le chemin avec son frère. Ce dernier avait probablement déjà fini. Comme il avait un an de moins, Ethan commençait une heure plus tôt pour ne pas créer trop de bordel dans la cour.

Anatole marchait d'un pas résolu. Il voulait s'éloigner de l'école rapidement, mais il avait également peur car, il savait que le répit serait de courte durée. Le jeune homme ne pouvait s'empêcher d'espérer en son for intérieur que la rentrée n'avait pas encore eu lieu et qu'il se réveillerait de ce terrible cauchemar dans sa chambre avant de découvrir l'école pour la première fois avec anxiété et de se faire accueillir avec bienveillance.

Pourtant, il n'y avait aucun élément surnaturel ou invraisemblable comme l'esprit d'Anatole en produisait toujours par dizaines dans ses songes. Il fallait croire que c'était la réalité...

Le rouquin n'aimait pas la réalité, il ne l'avait jamais aimé. La vie était tellement meilleure avec des super-héros courageux et prêts à voler au secours des personnes en positions de faiblesse. Il regarda à nouveau son T-shirt. "Life is a joke", était-ce vraiment ridicule comme phrase ? Le Joker était un des seuls méchants à avoir trouvé grâce aux yeux d'Anatole qui était un fervent défenseur du bien. Le Joker était un personnage extrêmement complexe avec une part de naïveté ; il ne faisait pas le mal par vengeance ou intérêt, mais juste parce que ça l'amusait.

Une phrase du biopic sur ce fascinant personnage qu'Anatole avait vu durant l'été lui revint subitement en tête : "Avant, je me disais que ma vie avait tout d'une tragédie. Je me rends compte que c'est une comédie." Si seulement Anatole pouvait voir les choses de cet œil-là... Non, lui, il n'avait vraiment rien d'un super-héros ni d'un vilain. Avec lui, ça aurait donné : "Avant, je me disais que ma vie avait tout d'une comédie. Je me rends compte que c'est une tragédie." C'était complètement nul ! Non, Anatole n'avait pas sa place dans le monde des super-héros qu'il idolâtrait tant.

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