3. Giclées de sang sur les murs
Je me suis réfugiée derrière un tonneau de vin par réflexe, sans même un regard pour mon père. Je n'ai pas réfléchis, c'est venu tout seul.
Les soldat se sont précipités sur tout le monde, les épées dans la main, tranchant bras et jambes.
J'entendais les cris de douleur de Mireille, la vieille serveuses qui passait son temps à m'expliquer la biologie féminine, en soulignant que j'avais de la chance d'être un garçon. Je lui posais souvent des questions, mais à ma grande déception, elle se taisait et me répondait que si j'avais été une fille, ça aurait été différent.
-PITIÉ !!!
Je ne réagissais pas, cachée derrière mon bouclier, rêvant de m'enfuir.
Les coups continuaient non-stop, personne n'y échappaient.
De temps à autre, je me hasardais à regarder la vue, espérant voir mon père en vie.
Il était toujours affalé sur sa table, endormi, ignorant le carnage qui se faisait entendre autour de lui.
Les meurtrier se préoccupaient à peine de lui. Son existence n'était même pas assez importante pour être détruite.
Je n'étais pas loin de la fenêtre, et la peur me poussait à l'ouvrir, pour m'enfuir loin, loin...et ne plus jamais revenir.
Avec une inspiration, je me mettais à traverser le bar le plus discrètement possible.
Je m'y approchais à pas feutrés, longeant les tables où s'entassaient des cadavres.
Je croisais le regard rempli de larmes du cuisinier, Kristoff.
Il était en boule contre lui même, sous la table de la cuisine. Du sang, des morts, tout ses compagnons avaient été tué, mais il en avait échappé.
Du moins pour le moment.
À côté du lavabo où on lavait les légumes ensemble, durant les jours heureux, se trouvait un soldat que je n'avais pas vu tout à l'heure, sûrement du renfort, qui portait un uniforme où une petite dune était dessinée. Comme sur le papier du noble.
Il cherchait partout, pour trouver quelqu'un à descendre.
Kristoff tremblait de plus en plus, les yeux écarquillés par la terreur. Il se mordait la main pour ne pas hurler, le sang commençait même à couler de cet endroit.
Le pauvre voulu me faire un signe de main pour me dire de dégager, ce qui le fit bouger. Sa jambe heurts le pied de la table, qui se mit à tanguer dangereusement et provoqua la chute d'une assiette sur le sol. Le bruit attira des pas.
Le soldat.
J'assistais, incapable de fermer les paupières, à la plus violente des morts. Kristoff se faisait démembrer, toujours en vie. Un bras, coupé lentement, afin de souffrir aussi longtemps que possible. Puis une jambe, puis l'autre. Les morceaux d'os voltigeaient partout, le sang giclait sur les murs, et par dessus tout cela, les cris monstrueux de douleur, de supplication de mort. Il voulait que ça s'arrête, il abandonnait.
Et puis, la tête.
Il ne restait plus qu'une mare de sang, où traînait les restes de l'homme qui faisait de si bonnes soupes aux croûtons croquants.
Je m'enfuyais, oubliant d'être silencieuse.
La dernière image que j'aperçus des cuisines, c'était le visage satisfait du soldat.
Il était fier.
Quand j'arrivais enfin vers la fenêtre, j'aperçus le dehors.
Les « dune » farfouillaient dans les maisons en riant, en tuant femmes et enfants et en récoltant toute les richesses -pourtant maigre- des habitants de mon village.
Vêtements, outils, ustensiles, bijoux, tout y passait.
Sortir était impossible.
J'étais coincée dans cet endroit, là où la mort me hurlait de venir dans ses bras.
Je m'adossais derrière un autre tonneau, me bouchant les oreilles.
Pitié.
Je voulait que ça s'arrête.
Après une heure de travail, leur mission accomplie, les meurtriers sont partis, sans même vérifier si il restait un seul survivant.
Si il l'avais fait, l'avenir de la Boussole aurais bien changé.
En effet, notre pays était basé sur une sorte de Boussole, avec 4 royaumes principaux, dont deux étaient bien dominants, ce qui provoquait sans cesse des guerres et des querelles que nous devions endurer sans protester, nous, le village entre les deux empires.
Nous nous trouvions au croisement entre l'est et l'ouest, ce qui causait la venue quotidienne de soldats ou de mercenaires vêtus différemment, se disputant sur la possession de quelles parties du hameau appartenaient à qui, et quels endroits précis du village étaient les plus fertiles, le genre de problèmes dont se soucie un abruti de roi.
Nous étions habitués à ce genre d'excursions, ça ne changeait pas grand chose aux jours normaux.
Du moins avant ça.
-Regarde, fils. C'est ici que tu peux observer la cruauté de l'homme.
Pas de réponse.
Des gens étaient entrés, dont une voix familière.
Le noble.
Lake.
-Cherche des survivants, il doit bien en rester un.
-J'essaye, mais si c'est le cas, il doit être bien caché, y'a tellement de corps !!!
-Ne sois pas impoli !! Certes, ces gens ne sont pas aisé comme nous, mais ils ne méritent absolument pas ça.
-Oui, oui, je sais. AAH !!! BERK, UN BRAS !!
Le « bras » en question qui se trouvait être une simple main fut lancé à l'autre bout de la pièce par le garçon terrifié par une coulée de bière de tout à l'heure, et arriva juste à côté de moi.
Les gros doigts ensanglantés tenaient quelque chose en leur creux, encore avec force.
La poignée d'un grand verre de bière. Du grand verre de bière. Le grand verre de bière.
Et l'annulaire portait un anneau.
La main était celle de mon père.
Je ne retenais pas un cri.
-Hmmm ?
Le petit homme au chapeau marcha jusqu'à moi, et m'agrippa la chemise.
-Oh ? Un survivant !!! Père !!! Venez voir !!!
Le paternel s'avança et me jaugea de haut en bas.
-Tient ? C'est celui de tout à l'heure.
Je tombais à la renverse, sans tenter de me rattraper.
-Papa...
Les coups d'épées et les giclées de sang à travers la pièce qui se terminaient enfin et le choc d'imaginer mon village entier mort me traversèrent l'esprit en même temps, sans oublier de me perturber.
Je ne regrettais pas ce que je venais de subir, ni m'en réjouissait.
Une nouvelle vie commençais, et s'apitoyer sur le passé n'aurais servi à rien.
C'est ainsi que mon village fut détruit, et que je n'y retournais jamais.
Jamais.
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