Je frappai trois coups à la porte de la cabane en bois pourri. Mon cœur cognait encore plus contre ma poitrine. Que faisais-je là ?j'appréhendais la suite de cette soirée. Et s'il s'énervait contre moi ? Peut-être n'était-ce pas le bon moment. Il allait, si ça se trouve, me frapper !

Ce garçon, ou cet homme plutôt, était imprévisible. Il fallait sûrement mieux que je déguerpisse sur le champ ! Je fis demi-tour, tremblante comme une feuille morte sous l'assaut du vent. D'habitude, je n'avais pas peur des hommes. Je les appréhendais plutôt comme des obstacles, ou encore des défis à relever. Je n'allais sûrement pas changer ma façon de faire à cause de lui, Adam. J'entendis la porte se déverrouiller, puis grincer.

Je n'osais plus bouger. Je ne respirais plus. Mon sang s'était figé, alors que mon cœur avait accéléré la cadence. J'étais dos à lui, raide comme une planche et succombant à l'anxiété.

- Qui êtes-vous, et que voulez-vous monsieur ? articula-t-il distinctivement.

L'espace d'un instant, j'avais oublié que je m'étais vêtue en garçon pour tromper la vigilance des paparazzis. Mes longs cheveux bruns étaient emprisonnés sous une casquette NY bleue sombre. J'avais un grand jean de la même couleur et des converses grises. Un ample sweat noire dont la capuche était rabattue sur la casquette, complétait mon vêtement. Autant dire qu'en ce moment, je ressemblais plutôt à un dealer de Cam qui s'était perdu.

- Eh Monsieur, c'est à vous que je cause !

Ma gorge empêchait à toute parole de s'évader. Je déglutis péniblement et fis volte-face. Je me retrouvai immédiatement face à lui. Ma respiration court-circuita. Son odeur me percuta. Indescriptible. Forte. Bestiale. Sauvage... pendant un court instant, ses yeux, son expression changea, mais ce fut si bref que je crus l'avoir imaginé.

- Toi...encore... que veux-tu cette fois ? j'affichai la même expression que j'avais lorsque je voyais un film d'horreur dans le noir complet. Mon cerveau n'arrivait plus à formuler les idées clairement. Et c'est quoi cet accoutrement bizarre ?

- Heu...heu je...je... j'inspirai un grand coup et me maudis intérieurement de balbutier en ce moment. La pire chose à faire, c'était de montrer ses faiblesses à un homme, surtout s'il s'appelait Adam. Je tenais à vous remercier de m'avoir sauvé avant-hier, versai-je d'une traite, les yeux fermés, en lui tendant le paquet volumineux que j'avais soigneusement préparé pour lui.

- De rien. J'ouvris juste les yeux à temps pour voir la porte se refermer devant moi.

Le sac bleu plein à craquer, était toujours dans mes mains. Mon ego en prit un grand coup. Je frappai de nouveau la porte, avec un peu plus de véhémence et de colère. Aucune réponse.

N'ayant pas entendue le déclic de verrouillage, je présumais que l'accès était encore libre. Je tirai sur le poignet, un peu trop fort et il céda. Je fixai avec terreur le bout de fer rouillé dans ma main, mon regard horrifié vacillait de la porte au poignet, et du poignet à la porte. Cette dernière virevolta brusquement, me heurtant à la tête. Je faillis tomber à la renverse.

- Je rêve ou tu viens juste de casser le poignet de ma porte ?gronda-t-il, des envies de meurtres dans les yeux. Tu voulais t'excuser, c'est fait ! Pourquoi tu ne rentrerais pas maintenant chez toi ? Ta mère doit t'attendre pour prendre le thé !

- Sale mufle ! Tu viens de m'envoyer la porte sur la figure ! répliquai-je, en massant mon front pour flatter la bosse que je sentais arriver.

- Si tu n'avais pas cassé le poignet de cette putain de porte, tu ne l'aurais pas reçu dans la tronche !

- Je voulais aussi te remettre ce petit présent, pour te remercier de ton acte héroïque, peut-être le seul de ta vie, salaud ! m'énervai-je.

- C'est le maire qui t'envoie, c'est ça ? il ricana nerveusement. Vas dire à ce fils de pute que je ne déserterais pas ma baraque ! Et ce n'est pas en envoyant une putain de Travelo à la con et un... il toisa le paquet que j'avais pris du temps à préparer, avant de continuer...un...sac de merde rempli de trucs de merde ! Maintenant, barre-toi et ne reviens jamais par ici ! Oh, et dis à notre cher maire de Cannon Beach, que ce n'est pas la peine de tenter de me faire quitter cette piaule ! Il n'y arrivera pas !

J'étais en état de choc. J'arrivai à peine à assimiler ce qu'il me disait, tellement cela me parvenait comme un langage extra-terrestre.

- Désolé, mais je ne comprends rien à ton charabia et j...

- J'ai dit : fiche-le-camp-d'i-ci. Son expression avait changé. En plus d'être stupide et travelo, t'es aussi sourde ? Ses traits s'étaient durcis, ses yeux avaient rougi, et il y transparaissait de la haine. Je ne reconnaissais plus Adam, celui qui m'avait désigné pour le bal du Summer Day. À présent, on aurait dit...un monstre... il rentra chez lui, et claqua la porte.

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