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Chapitre 4 (6) : Plans and Discord

On a rejoint le groupe dans le silence, sans Sachiko, ni Emerens, ni mon amour-propre.

Ansgar a pris Seo-jun à part pour discuter un peu avec lui, ce qui fait que je me suis retrouvé entre les pattes d'Alannah, d'Ibrahim, de Moanaura et de Nako, également revenue bredouille, histoire de me faire bombarder bien gentiment de questions.

Auxquelles je n'ai bien évidemment pas répondu, parce que je n'avais pas que ça à foutre de satisfaire la curiosité des gens.

Enfin. Je devais avoir l'air suffisamment pitoyable pour qu'Ibrahim me fasse un câlin avant d'aller se coucher. Et Alannah m'a salué avec un sourire, ce qui veut dire que cette journée n'est pas complètement perdue. Mais quand même.

Me voilà donc tout seul dans ma chambre, sans aucun moyen de débrancher mon cerveau qui m'attire vraiment. La bonne vieille flemme paralysante qui chez les TDAH a un nom scientifique mais qui chez moi est juste un concentré de grosse merde.

Heureusement, ma chambre a la télé. Bon, j'ai pas le câble, mais Netflix, c'est déjà pas mal. Du coup, je zappe, de temps à autres, histoire de chercher une série à regarder, mais sans Ibrahim à mes côtés pour finir Naruto, disons que j'ai moins envie de commencer un truc. Ou même regarder de nouveau un truc.

C'est chiant.

Et si je laisse mon cerveau vagabonder, il me remmène, invariablement, à cette scène dans la rue du complexe industriel. Au regard vide d'Emerens, un couteau sous la gorge, alors que Sachiko allait lui ouvrir la carotide sans la moindre forme de regret. À ce qui traversait les yeux de cette dernière alors qu'elle retirait sa menace.

Et je ne veux pas y réfléchir plus que ça.

Un petit toc-toc a le mérite d'interrompre mon égarement plus zapping incertain. Plus que ravi d'avoir une distraction, mais pas franchement rassuré, je me redresse de mon lit, passant mon T-shirt en quatrième vitesse. Nan mais je veux dire, y'en a qu'un ici qui a eu le privilège de me voir torse poil, et ça m'étonnerait que ce soit lui...

« Qui c'est ?

— C'est moi, Thibs, répond une voix fatiguée de derrière la porte. Je peux rentrer ? »

... Ah bah si, c'était lui, en fait. Bon ben trop tard, j'ai déjà remis mon T-shirt. Je donne mon accord, et la porte s'ouvre sur un Emerens aux cheveux en bataille, des cernes se dessinant sous ses yeux lourds de fatigue. Un pansement orne sa pomme d'Adam, là où Sachiko a enfoncé son couteau.

Je me redresse d'un coup sur mon lit, lui faisant une place.

« Ça va, mon vieux ?

— Aussi bien que quelqu'un qui vient de manquer de se faire égorger, rigole Emerens, un peu aigre, avant de s'installer à côté de moi. Mais on fait aller. »

Ouais, ouais, on fait aller, alors que t'as encore plus une tête de vampire que tout à l'heure, à d'autres. Je me colle à son flanc à peine est-il calé sous les couvertures avec moi, et il se met à me gratouiller la tête non sans un certain empressement. Ça fait du bien, on va pas se mentir.

« Enfin, il y a plus important, il soupire, une fois qu'on est calés tous les deux. Ça va, toi ? Désolé que tu aies dû voir ça... »

.... Il se fiche de moi ce-

Je me redresse, décalant sa main de mes cheveux un peu involontairement mais on ne peut pas tout avoir, avant de me pencher vers lui et de lui attraper le menton.

« Emerens. Mec. Mon ami que j'aime très fort. T'as failli te faire tuer à coups de poignard dans la gorge. Tu trouves vraiment que c'est le moment de te préoccuper de comment j'ai vécu d'y avoir assisté ? »

D'entre mes doigts, je le vois pincer les lèvres.

« Mais je ne suis pas mort. Je vais bien. J'ai... Je me suis soigné. Fin de l'histoire. »

Sa main retourne dans mes cheveux. Jolie tentative, mais je ne vais pas te lâcher pour autant, figurativement comme littéralement. J'ai toujours ton menton entre mes doigts, du con.

Et ce que m'a dit Seo-jun pèse très lourd dans ma petite tête.

Je devrais pouvoir t'aider aussi.

C'est pas juste.

C'est vraiment pas juste.

« Et moi, je grommelle, j'ai eu le temps de digérer. Et je m'inquiète plus de te voir frôler la mort que de comment je prendrais y assister. C'est le principe. »

Il pousse un profond soupir. Dont je profite pour enfoncer un peu le clou.

« Emerens. Je suis ton meilleur ami. Ce que tu veux pour toi. Je m'inquiète pour toi, et je te connais assez pour voir quand ça va pas. J'ai besoin de savoir pourquoi ça va pas.

— Pourquoi ? Je te l'ai dit ce matin. Parfois, tu ne peux juste pas aider.

— Sauf que ton parfois à toi, c'est tout le temps, du con. »

Il grimace. Ses doigts se resserrent dans mes cheveux, et je vois son regard qui dérive, qui se pose partout sauf sur mon visage. Il refuse visiblement jusqu'à me regarder dans les yeux. Même alors que je suis pratiquement installé sur ses genoux, son menton dans mes mains.

J'suis peut-être un énorme forceur. Mais dans le cas présent, je m'en bas les couilles. Fallait que ça sorte. Que ce soit pour ma confiance que pour faire comprendre à cet imbécile qu'il n'est pas le seul à s'en faire pour l'autre quand il ne va pas bien. Que parce que sinon je vais m'asseoir dessus et le ruminer au point de ruiner ma relation avec lui jusqu'aux regrets éternels.

Pas question de le laisser s'échapper. Et puisque je suis presque assis sur ses hanches, autant finir le travail. Je me pose, et un grognement lui échappe alors qu'il essaie de se soustraire à mon poids, mais impossible d'échapper au Thibault lourdingue. Chacun son tour, mon gars.

En désespoir de cause, il pousse un profond soupir.

« Thibault, tu sais que je t'aime énormément, pas vrai ?

— Je sais. C'est réciproque. C'est pour ça que j'insiste. »

Quelques secondes de silence. Je les prends pour préparer ma prochaine attaque.

« Je te demande pas de tout me déballer d'un coup. Ou de me changer en thérapeute. Je veux juste que tu arrêtes de tout ramener à moi quand je te demande ce qui va pas. Et de te dire que je veux t'aider, putain, même si tu veux pas de mon aide... »

Merde, je vais chialer. Ça devient trop sensible pour moi, cette conversation, et je crois que ça va pas aider mon cas si je me mets à sangloter sur ses genoux. Mais au moins, c'est dit. Le message est passé. Et j'espère qu'il le retiendra, d'une manière ou d'une autre.

La main qui était dans mes cheveux passe jusqu'à mon dos. Et il me plaque contre lui avec délicatesse, mon menton trouvant sa place réservée dans le creux de son épaule. Bon. On va dire que j'accepte bien volontiers le câlin pour essayer d'éviter de fondre en larmes devant lui. Avec un peu de chance, son T-shirt étouffera même mes potentiels reniflements.

Je le serre contre moi aussi fort que je peux, et il me rend mon étreinte avec une douceur que je n'espérais pas, son pouce caressant délicatement ma colonne vertébrale.

« Je ne veux pas que tu t'inquiètes pour moi, Thibs, il chuchote dans le creux de mon oreille. Tu ne devrais pas avoir à t'inquiéter pour moi. Mon objectif, c'est que tu sois aussi heureux que possible. Même ici.

— Je m'inquièterai pour toi que tu le veuilles ou non. Alors sois sympa et rends-moi le boulot plus facile au lieu de t'isoler quand tu te prends un choc. »

Le courant d'air de son soupir me caresse la nuque.

« Je ne suis pas doué avec les mots. Surtout pas pour ce genre de choses. C'est triste, pour un écrivain, mais je n'y peux rien. Et ça ne changera pas du jour au lendemain. Il faut que tu acceptes ça.

— Putain, Emerens, je viens de te voir te faire égorger, je m'exclame, ma voix montant un peu trop dans les aigus pour être honnête. J'ai cru que tu allais te faire tuer, et toi tu arrives comme une fleur en me demandant si je vais bien sans même te demander si je ne voulais pas TE voir aller bien ?!? Et tu me demandes d'accepter que ça continue, de te voir donner sans recevoir alors que merde, je m'inquiète et je m'inquièterai que tu le veuilles ou non ? »

... Et voilà je chiale. Bravo Thibault, super manière de continuer une conversation. Et évidemment, lui, il me berce en douceur, sa tête collée à la mienne, les bras enroulés autour de moi, comme si j'étais un enfant à consoler.

C'est encore moi qui me fais consoler, putain. Alors que je voulais absolument l'éviter. Alors que je voulais juste qu'on parle de lui. Me revoilà dans ma connerie, à pleurer comme un con pendant qu'il me rassure, pendant que c'est lui qui se paye tout le boulot émotionnel, alors qu'il vient de manquer de se faire tuer, alors que je tentais de lui faire comprendre que je voulais qu'il me parle davantage.

J'en ai marre.

J'en ai marre, et le pire dans tout ça c'est que même dans cette situation, ses bras autour de moi me font du bien.

« J'ai vu pire, Thibault, il chuchote à mon oreille, le ton rassurant. Je peux encaisser une simple tentative de meurtre. Ça ne devrait pas m'empêcher de m'occuper de toi.

— ça devrait aller dans les deux sens.

— Je n'ai pas besoin qu'on s'occupe de moi, Thibs. Savoir que tu es là, heureux, et que tu m'aimes me suffit amplement. D'une certaine manière, ça m'aide bien plus que ce que tu peux imaginer. »

Incapable de parler entre les sanglots que je retiens, je me contente de renifler dans son T-shirt. Et son étreinte se resserre autour de moi comme un cocon plein d'amour.

« Allez. On va dormir un peu, toi et moi. Ça ira mieux demain. Je te le promets. »

Et je n'ai pas d'autre choix que de le croire.



Le réveil du lendemain a été très difficile.

J'ai dû pleurer dans mon sommeil, parce que mes joues sont humides et irritées, et que je crois qu'un troupeau d'éléphants a fait la zumba dans mon crâne. J'ai l'impression d'avoir la gueule de bois, et c'est extrêmement désagréable.

Même si ça ne l'est pas autant que de songer à hier.

Emerens, visiblement, s'est réveillé avant moi. Évènement. Il me regarde avec un sourire affectueux, l'air absolument pas affecté par mes yeux sans doute rouges et bouffis et ma tête d'enterrement du réveil mise au carré. Comment il fait pour me trouver beau, tiens, je me le demande.

Son sourire s'élargit alors que ma vision se fait plus claire.

« Bien dormi, marmotte ?

— De toute évidence, non, je marmonne, encore passablement de mauvaise humeur. T'en as d'autres des comme ça ?

— On peut toujours essayer. Mais tu as fait le tour du cadran, Thibs, il sourit. Il est plus de midi, je t'attendais pour me lever. »

... Plus de–

Mais à quel point j'étais crevé moi ?!?

Et en attendant je comprends mieux pourquoi il était réveillé avant moi. Même si je comprends beaucoup moins pourquoi il m'a attendu. Enfin bon, c'est rien ça c'est Emerens. On va pas chercher trop loin des excuses à son comportement.

Il tend sa main, qui retrouve encore le fouillis qu'est mes cheveux. Ça va finir par devenir la maison de ses doigts, tiens.

« Ça va ? t'as l'air éclaté.

— Dis au troupeau d'éléphants qui a élu domicile dans mon crâne de se casser et d'arrêter de faire la fête et ça ira p't'être mieux, je grommelle en évitant de commenter sur mes joues rougies et mes yeux bouffis. J'ai l'impression de m'être pris une gueule de bois sans avoir eu le plaisir de boire. »

Il hausse les épaules, avant de redresser la tête pour m'embrasser la joue. Pile sur les traces de larmes.

« Je connais pas trente-six moyens de chasser un troupeau d'éléphants. Allez viens, on va prendre un bain bien chaud. Ça te fera du bien. »

Je suis trop fatigué pour protester. Si bien que je le laisse me prendre dans ses bras pour me traîner jusqu'à la salle de bain sans un mot, à deux doigts de prendre son épaule pour un oreiller.



On arrive au rez-de-chaussée de l'hôtel à moitié éclatés, à moitié endormis, et le reste à peu près de bonne humeur. Ce qui est plutôt une bonne nouvelle puisqu'il faut être de bonne humeur pour affronter le regard empli de réprobation d'Ansgar, qui tape le sol d'un coup sec de sa canne avant de se relever.

« Ce n'est pas trop tôt. Je peux savoir ce que vous fabriquiez ?

— Thibault dormait, réplique Emerens, glacial. Autre chose ? »

Ansgar pousse un profond soupir.

« On vous a attendus toute la matinée pour discuter, donc je pense qu'on a le droit, nous tous ici, d'être quelque peu agacés par votre retard. »

Ce disant, iel balaie d'un revers de la main la table derrière elle. Pour que je constate qu'effectivement, elle est bien remplie. Ibrahim, Seo-jun, Moanaura, Nako et Alannah attendent et ils ont tous l'air plus ou moins énervés. Enfin, on va dire que l'échelle s'étend d'Ibrahim qui tape tout juste du doigt sur la table à Alannah qui a l'air à deux doigts de me jeter une chaise à la gueule.

« C'est bon, je grommelle, on est là. Excusez-moi d'être fatigué de, oh, je sais pas, le procès d'il y a trois jours que j'ai dû encore prendre en charge ? »

Et d'autres choses aussi mais j'ai envie d'être mauvaise langue. Inutile de développer sur notre petite conversation avec Emerens. Ils n'ont pas à savoir ça.

Ansgar fait la moue.

« Connaissant vos antécédents, on pensait à autre chose. Ce qui est mal engagé étant donné que tout le monde doit collaborer pour qu'on puisse mettre au point ce plan de sortie. »

Ce disant, iel s'écarte, se tourne vers la table et je la vois. Assise juste derrière elle, le menton appuyé sur sa paume, aucune expression sur son visage, les yeux fixés sur nous ; Sachiko, qui ne semble même pas bouger d'un poil alors que la canne d'Ansgar la désigne avec les autres, alors que je la remarque enfin, assise à la table.

Oublions la remarque d'Ansgar sur nos antécédents parce qu'elle était, on va pas se mentir, justifiée. Qu'est-ce que Sachiko fout là, bon sang ?!?

Emerens est raide comme un piquet. Visiblement, il ne s'y attendait pas non plus. Par contre, ma surprise doit être plus visible que la sienne puisque c'est à moi qu'Ansgar s'adresse.

« Elle est venue de son plein gré pour discuter de l'hélicoptère. Je n'ai pas à la stopper d'aucune manière. Quant à toi, Emerens, iel soupire, je t'informe que vous devrez régler votre différend de votre côté d'une manière où d'une autre avant que ça ne dégénère de nouveau. Je ne peux forcer ni l'un ni l'autre à faire ce qu'il faut, mais j'entends que ce soit résolu avant le départ. »

Iel lui jette un nouveau regard glacial. Qu'il lui rend. Suivi par un profond soupir.

« Très bien. On verra ce qui peut être réglé plus tard. Mais je ne garantis rien, Ansgar. Ce n'est pas moi qui met des couteaux sous la gorge des gens. »

Je m'attendais à une réaction plus bouillante de Sachiko. Mais elle se contente de lever les yeux au ciel, alors qu'Emerens et moi prenons place sur les deux seules chaises disponibles. Qui sont, manque de chance, pas vraiment à côté.

Je me retrouve donc entre Alannah et Nako alors qu'Emerens prend place entre Ansgar et Ibrahim, presque à l'opposé de la table. Putain, je suis sûre qu'ils ont prévu le coup, ces cons. Et le pire, c'est que je ne peux pas vraiment protester.

« Ça va ? Me chuchote Alannah alors que je m'affale sur ma chaise. T'as l'air vraiment au fond du trou...

— Je les enchaîne, en ce moment, je soupire. Entre le procès et hier, ça a saturé. Mais t'inquiète. Ça va aller. »

Elle fait la moue, et me tapote doucement le crâne pendant que Nako pose en silence une main sur mon épaule. En silence, parce qu'Ansgar vient de se racler la gorge et parle, son ordinateur ouvert.

« De ce que nous avons retiré des explorations d'hier et d'un rapide briefing ce matin, je pense que nous pouvons dès à présent établir un plan de sortie. La personne qui est en charge de ce plan sera Alannah, puisqu'elle est la seule à avoir les compétences pour construire un moyen sûr et rapide de s'échapper. Personne ne s'y oppose ? »

Silence. Ibrahim fait la moue, suivi par Emerens, mais aucun des deux ne dit le moindre mot. Ils se contentent d'échanger un regard incertain, tandis qu'Alannah se relève et hoche la tête, un large sourire aux lèvres. Ansgar lui adresse un signe entendu, avant de taper sur son ordinateur à toute allure.

« Qu'est-ce que tu penses pouvoir faire pour que ça se goupille ?

— ça va se condenser en plusieurs étapes bien simples, en fait, annonce Alannah. Déjà, Ibrahim et moi, on va chercher les plans d'un hélico qu'il pourrait piloter. Si on en trouve pas, je peux en concevoir avec le logiciel adéquat, que j'ai sur mon ordi, mais ça va nous prendre plus de temps, elle ajoute, toujours souriante. Ça, ça peut prendre entre une et deux semaines en fonction de si on trouve des plans. »

Ansgar pianote à toute allure sur son ordinateur, et Ibrahim hoche ta tête gravement. De son côté, je vois Emerens se prendre le menton entre les mains, avant de chuchoter quelque chose que je n'entends pas. Sachiko, à la droite d'Ansgar, lui jette un regard torve, mais n'insiste pas. Quant aux autres, ils n'ont pas l'air de trop réagir aux délais annoncés par Alannah.

Moi, j'ai surtout peur de l'accumulation. Si trouver les plans ou les concevoir prend deux semaines, je n'ose imaginer la conception entière de l'hélico, même avec les meilleures machines du monde... On risque d'y passer énormément de temps, même si Alannah y consacre toute son énergie. Et ce temps...

Pourrait être employé pour autre chose.

Trois mois n'ont pas empêché Ade de tuer.

« Ensuite, continue Alannah, il va falloir commencer les pièces détachées. Ça, vu la qualité des machines et comment tout s'emboîte, je pense que je n'y passerai pas plus d'une semaine si j'exploite tout le complexe, mais je suis pas à l'abri d'un imprévu, du coup je vais dire deux !

— tu auras besoin d'aide ? Demande Nako. Pour monitorer tes machines, tout ça.

— Oh, je pense pas, non ! J'ai accès à toutes les caméras du cercle 3 dans une des salles du complexe, elle répond avec entrain. J'aurai juste à surveiller et appuyer sur l'arrêt d'urgence si besoin. C'est une vraie maintenance générale, c'est trop bien !

— Une bonne chose derrière nous, soupire Ansgar. Et ensuite ? »

Alannah se gratte le menton.

« Ensuite, ça va être l'assemblage. Là, je vais voir en fonction de combien y'a de pièces détachées et de moyens techniques, mais pareil, vu la qualité des lieux, pas plus d'une semaine. Et puis après... »

Elle soupire.

« Après, ça va être les tests. Je peux pas faire voler un hélico sans être sûre qu'il respecte les normes de sécurité, surtout un hélico conçu pour transporter neuf personnes. Je pense que ce sera la partie la plus longue, même si je dois écrire les plans... Au moins trois semaines.

— Est-ce qu'on a vraiment besoin d'autant de tests, lance Nako, s'il est juste fait pour nous poser sur la ville la plus proche ? »

Ansgar fait claquer sa canne au sol.

« Cet hélico va contenir la vie de neuf personnes. Même pour quelques centaines de kilomètres avant qu'il ne cesse d'être concrètement vital, je ne peux me permettre de laisser quoi que ce soit au hasard.

— En soit, renchérit Alannah, je peux commencer les tests dans la phase d'assemblage. Mais quand je dis trois semaines, c'est trois semaines au minimum. Je réduis déjà énormément.

— Ce qui fait un maximum de deux mois, compressibles en fonction de notre chance à un mois et une semaine, si je ne m'abuse, soupire Emerens. Il va falloir qu'on tienne encore deux mois. »

Sa remarque jette le silence sur la pièce.

Je n'avais pas fait le calcul, mais il a raison. Deux mois, avec le travail non-stop d'Alannah que je ne peux pas me permettre de prendre pour acquis. Donc peut-être plus.

Deux tiers du temps qu'il a fallu à Ade pour tuer.

Deux fois plus qu'Aldéric.

Quatre fois plus que Ruben.

... Est-ce qu'on va tenir ?

Est-ce que je peux compter sur eux pour tenir ?

... Je dois compter sur eux pour tenir.

À tout prix.

Ansgar pousse un profond soupir.

« Deux mois, donc. Partons là-dessus pour éviter un faux espoir destructeur. Est-ce qu'il y a moyen qu'on t'aide pendant ces deux mois, Alannah ?

— Pas trop ! Fin, je vais avoir besoin d'Ibrahim les premières semaines, je pense, elle annonce à voix haute, mais c'est tout, sauf si l'un d'entre vous a déjà bossé dans l'industrie ? »

L'expression de tout le monde est un superbe exemple de réponse unanimement négative. Alannah hausse les épaules, et Ansgar finit d'écrire sur son ordinateur avant de fermer les yeux.

« Ce qui nous laisse la question de savoir ce qu'on va faire pendant les deux derniers mois qu'il nous reste. Nous ne pouvons pas rester inactifs, même si Alannah nous assure qu'elle n'a pas besoin de notre aide. Des idées ?

— A se sujet, Ansgar, j'aimerais m'exprimer. »

Nako se redresse, ses deux mains appuyées sur la table. Elle a un air grave, et ses yeux regardent droit devant elle, fixés sur le visage d'Ansgar sans le voir.

« J'avais parlé d'un mémorial à la mémoire de nos tombés. J'aimerais qu'on le fasse le plus tôt possible, avant qu'Alannah et Ibrahim soient trop absorbés par leur travail. Est-ce que demain irait ? »

Le silence s'installe de nouveau.

Tout le monde fixe une Nako qui refuse de nous regarder.

Un mémorial.

On en avait parlé. C'est vrai. On en a besoin, sans doute, d'une certaine manière. On a besoin d'honorer nos morts. Tous nos morts. Histoire de nous souvenir, histoire de comprendre, histoire d'avancer.

Mais je ne pensais pas que ça serait si tôt.

Je ne pensais pas que je me sentirais... Aller si vite pour faire mon deuil. S'il s'agit vraiment d'un deuil. Je me sens un peu poussé. Est-ce légitime ? Où est-ce que je m'enferme déjà trop dans la chape de leurs linceuls ?

Nako a toujours les yeux dans le vide, le regard fixé droit devant elle. Et personne ne semble vouloir lui répondre. C'est Ansgar, qui, finalement, soupire.

« Après-demain. Pour nous laisser le temps de nous préparer. Dans le temps imparti, Alannah et Ibrahim pourrons commencer leurs recherches de plans, et nous retrouver le soir dans la plaine qui marque la fin du cercle 4. Nous ferons un feu de camp, et nous parlerons. Inutile de faire plus. Autre chose ?

— Oui, répond Ibrahim, doucement. Ce sera un travail de longue haleine, mais... j'aimerais qu'on enquête sur l'organisateur. Histoire de ne prendre aucun risque. »

Et encore une nouvelle remarque qui crée le silence, je vais finir par m'y habituer.

Cette fois, c'est Ibrahim que tout le monde regarde. Même Nako, qui s'est assise. Mais les regards sont beaucoup plus... Beaucoup moins positifs, si on peut dire ça.

Le rappel de la présence de l'organisateur ne semble enchanter personne.

Y compris, peut-être, l'organisateur lui-même ?

Emerens fait la grimace. Je le vois fermer les yeux, croiser les mains sous son menton.

« On peut enquêter. Mais sans indices ni preuves, ce sera dur. Je n'ai pas l'impression qu'ici nous donne la moindre piste.

— Et puis merde pourquoi se donner la peine ?!? S'exclame Seo-jun. Si ça se trouve, le gars est pas là, on en parle depuis le début ! Est-ce que ça vaut de se mettre en danger ? »

... D'une certaine manière, oui.

Je m'énerverais bien, mais je sens le désespoir dans son ton, et je n'ai pas la moindre envie qu'il prenne une majuscule. Seo-jun se raccroche à ce qu'il peut pour garder la pêche. J'imagine que je ne peux pas lui enlever ça.

Ibrahim pousse un profond soupir.

« Je préfère ne pas prendre le moindre risque ou me rattacher à une illusion qui va s'effondrer. Je ne suis pas Daisuke.

— Tu tiens tant que ça à mourir comme lui ?!? S'exclame Seo-jun. Merde, tu sais très bien que c'est son enquête qui lui a coûté la vie ! Tout ça pour quoi ?!? Tu n'es pas le seul à avoir vu Reina, bordel de merde !

— Non, et c'est pour ça que je ne me rattache pas à cette illusion qu'on peut sortir sans voir l'un d'entre nous se révéler comme la pire des ordures, réplique Ibrahim, froidement. Je refuse de laisser sortir une personne capable de nous enfermer ici, de recommencer, ou de nous attirer la foudre des Monokuma. Même si nous parvenions par miracle à échapper aux Tueries pour de bon, qu'est-ce qui l'empêche de recommencer, ici même, encore, et encore, et encore, tant qu'on ne le découvre pas ? Qui qu'il soit ?

— Tu me parles d'illusion, siffle Seo-jun, mais là tu extrapoles, putain. Tout est conçu pour qu'on puisse sortir sans organisateur. Le mec est forcément ailleurs. Et ton raisonnement s'applique aussi à ce cas-là.

— Si c'est le cas, pourquoi ne devrais-je pas en être certain ? Plutôt que de m'enfermer dans tes illusions de bonne fin ? Les bonnes fins n'existent pas, Seo-jun, réplique Ibrahim dont la voix claque comme un fouet, et nous en avons tous les deux fait les frais ! Comment est-ce que tu as pu l'oublier après l'avoir perdu ? »

La voix de Seo-jun se mue en grondement. Il montre les dents, la fureur transparaissant sur son visage, à un Ibrahim qui le fixe avec un calme presque trop pénétrant.

« Ne t'avise même pas de ramener Kichiro là-dedans. Il suivait exactement la même lubie que toi, et on voit où ça l'a mené !

— Et on voit où ne rien faire a mené Reina, crache Ibrahim. Tu tiens donc tant que ça à ta fin parfaite ?

— Tu veux te battre, Ibrahim ? Fait Seo-jun en bondissant de sa chaise, les poings serrés. Parce que là, on dirait bien !

— Je ne te ferai pas l'affront de céder à ta provocation, réplique-il, les sourcils froncés seules marque de sa colère. Sauf si tu tiens tant que ça à ce que je te remette les idées en place...

— Fermez-là. Tous les deux. »

Ibrahim et Seo-jun se figent net. Avant de se tourner vers Emerens, qui les fixe avec un mépris sans nom depuis sa chaise, les doigts croisés devant lui et son regard émeraude étincelant de froid. Presque plus de froid que celui qui transparaît dans sa voix.

« J'ai autre chose à faire, il articule avec lenteur, que d'écouter vos disputes puériles sur un sujet pareil. Plus encore quand elles impliquent des gens que j'ai connus et appréciés, dont j'ai eu la nouvelle de la mort en un simple discours. »

Seo-jun grimace.

« Nan mais tu l'entends aussi ? Tu as entendu Reina comme moi, merde, tu sais que... »

Le regard glacial d'Emerens le coupe net dans sa tirade. Ce dernier se penche sur sa chaise, calmement, mais les yeux toujours déversant ce froid dans toute la pièce.

« Vous vous servez de noms pour vous justifier. Quelle que soit votre opinion, et que j'approuve l'une ou l'autre de vos idées, c'est un manque de respect total à leur mémoire. Et puisqu'on attend de moi que je ne fasse pas couler le groupe avec mes propres différents, je pense que vous pouvez garder les vôtres dans le domaine du privé. Ou bien c'est trop vous demander, Seo-jun, Ibrahim ? »

Les deux échangent un regard teinté de ressentiment. Avant qu'Ibrahim ne pousse un profond soupir, et ne se recale sur sa chaise, évitant avec soin le regard de tout le monde.

« Tu as raison. Excuse-moi. Et je m'excuse également auprès de vous tous, il ajoute, les yeux dans le vague. Je ne voulais pas m'emporter de la sorte. Mais il n'empêche que ce que je dis tient toujours. »

Emerens ferme les yeux. Et Seo-jun, de son côté, grimace de nouveau.

« Ouais, ouais, il marmonne. Désolé. »

Avant de se rasseoir en silence, d'un seul coup plus rabougri que d'habitude.

Ansgar pousse un profond soupir.

« Bien. Maintenant que la dispute est terminée, nous allons pouvoir revenir à ça.

— Une enquête, hein, je grommelle. Vous croyez qu'elle va aboutir ? »

Ansgar secoue la tête.

« Non. Mais rien ne nous empêche de la mener, puisque nous n'avons pour être franche rien de mieux à faire. Sachiko me partagera de toute façon ses pistes. Si vous souhaitez enquêter de votre côté, autant que vous vous coordonniez avec elle. »

La concernée lève les yeux au ciel, et je vois Emerens grincer des dents à la gauche d'Ansgar. Même Ibrahim, alors que c'est lui qui a proposé l'idée, n'a pas l'air ravi.

Coopérer avec Sachiko Kimura, après le coup qu'elle nous a fait ?

C'est mal barré.

Très mal barré...


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