Chapitre 2 (13) : Bloodbath
Alors.
À quel point suis-je dans la merde ce matin ?
Faisons un petit tour d'horizon rapidement histoire de se faire une idée. J'ai les yeux fermés et j'ai encore ma couverture. Bien. Je ne suis pas en train de crever de chaud. Bien. J'ai un truc qui pèse sur ma taille et bien que ce ne soit pas bien lourd ça l'est trop pour être simplement un oreiller. Moins bien.
J'ai le dos appuyé contre ce qui est indubitablement mon matelas, j'en déduis donc qu'ouvrir les yeux me permettrait d'avoir une meilleure idée générale de mon environnement sans trop avoir à bouger. Ce qui est une très bonne chose. J'emploie donc cette solution parfaitement évidente et laisse à mon cerveau le temps de s'habituer à la lumière avant de balayer mon lit du regard.
La couverture est toujours en place, et deux oreillers ont atterri sur le sol, l'un à moi, je crois, et l'autre sans doute à Emerens. J'ai dormi en jean parce que flemme de me mettre en caleçon pour la nuit, et je sens ma peau gratter de partout, preuve que je ne l'ai pas enlevé dans mon sommeil sans m'en rendre compte. Et même si le bilan général ne me paraît pas être trop dégueu, je ne peux m'empêcher de grincer des dents en m'apercevant que le poids autour de ma taille n'est ni plus ni moins qu'un bras posé en travers, comme si je n'étais qu'un vulgaire coussin.
Emerens dort encore. Un rapide regard dans sa direction m'apprend qu'il est tourné vers moi, logique vu que son bras est quasiment en train de m'enlacer. Son visage est détendu et sa respiration est suffisamment profonde pour que le déplacement d'air provoqué m'effleure la joue, ce qui en dit pas mal long sur notre proximité pendant la nuit ; sympathique de voir qu'il a bien dormi, beaucoup moins de me rendre compte que comme attendu, je ne pourrai pas m'échapper comme ça... Enfin, pas comme si je ne m'y attendais pas, effectivement. Je savais à quoi je m'exposais en invitant le dragon dans mon lit. Mais bon maintenant, il va falloir que je me démerde pour me tirer de là.
Quelle galère.
Va falloir être rapide. Si je suis trop lent, il risque de me faire le coup du piège à loup ; si je suis trop brusque et lent à m'éloigner, je vais me prendre une tarte. Ne me reste donc plus qu'une seule solution : Sacrifier mes os.
Je prends un peu d'élan, me prépare psychologiquement à hurler de douleur, et roule d'un coup sec hors de son étreinte avant de, comme je m'y attendais vu la vitesse que j'ai prise, tomber au sol. Heureusement pour la branquignolle que je suis, je tombe en plein sur mon postérieur qui à défaut d'être agréable à regarder fait un excellent coussin ; ma douleur est donc étouffée dans mes rares onces de graisse, et je peux me permettre de me relever presque immédiatement en me félicitant de ma tentative réussie...
Emerens n'a toujours pas bougé d'un pouce, et c'est à peine s'il grogne dans son sommeil. Je considère donc ça comme une victoire sur tous les flancs. Victoire dont je vais profiter pour aller me prendre une petite douche et me changer en quatrième vitesse, parce que bon, j'ai pas trop, trop envie de forcer ma chance...
Enfin du coup, quand je sors de la salle de bain, apprêté comme il faut et ayant la satisfaction de ne plus puer la transpi, il y a du mouvement dans le lit. Et je vois son occupant relever la tête avec une sacrée sale gueule du matin, en train de tâtonner mon côté du lit, avant de me remarquer et de cligner des yeux. Un léger sourire se dessine sur ses lèvres. Ah bah ça c'est pas croyable. Emerens qui sourit sans avoir bu son café ?
« ... Salut, Thibs.... Bien dormi ?
— Autant que faire ce peut avec ton bras en travers de mes côtes, je bougonne plus pour la forme qu'autre chose. Je savais pas que sur mon front y'avait marqué peluche. »
Loin de s'offusquer, le coupable de cet horrible délit baille ostensiblement avant de se redresser. Je vois ses cheveux s'échapper de son élastique et partir dans tous les sens de là où je suis. Seigneur, va y avoir des mèches blondes plein mon oreiller maintenant.
« Je m'excuse, je m'excuse, marmonne Emerens dans le bâillement, d'un ton sans trop de conviction bizarrement. Tu viens me faire un câlin ?
— Nan, tu pues et je viens de me laver, je suis tout propre. Va prendre une douche et on en reparle. »
Nan mais sans blague. Y'a des limites à ce que je peux supporter, hein. Enfin bon, il a pas l'air de protester plus que ça, vu que je le vois se lever, raccrocher sa jambe artificielle et se diriger dans la salle de bain non sans m'avoir ébouriffé les cheveux au passage. Sérieusement, mon pote, ta paume pleine de transpi sur mes cheveux tout propres, on aurait pu s'en passer ! Et dieu merci il pense à prendre des vêtements... j'avais moyen envie de le voir traverser ma chambre en caleçon. Ou pire, en serviette. Je crois mon pauvre cerveau de pansexuel perdu aurait pas supporté.
Contrairement à beaucoup de légendes sur la masculinité, Emerens met au moins une bonne heure à se préparer. Si bien que lorsqu'on quitte enfin la chambre, j'ai eu le temps de ranger ses affaires dans un tiroir vide de mon placard, de les réorganiser deux fois, de refaire mon lit, retaper les oreillers, réfléchir à changer les draps, ne pas changer les draps tout compte fait, me demander s'il n'a pas glissé dans la douche, vouloir aller voir, me raviser au dernier moment et faire au moins cent tours sur moi-même dans le plus profond des ennuis. Et la matinée est bien avancée quand on peut enfin sortir prendre le petit déjeuner, entre moi qui bougonne dans ma tête et lui qui a toujours pas eu son café et fait par conséquent une gueule assez dégueulasse.
Mais c'est pas moi qui vais lui faire remarquer, pour une raison toute simple qui s'appelle je tiens à ma putain de vie...
Un mouvement de recul dans le coin de mon œil attire mon attention. Comme tout bon pégu curieux, je me tourne, et me crispe devant le visage perdu de Ruben, qui a retenu un petit cri en me voyant regarder dans sa direction. Il tient son poignet contre lui, visiblement avec précaution. Super le réveille-matin...
J'aurais bien aimé aller lui parler, parce qu'après tout c'est l'occasion idéale, mais je n'ai même pas le temps de faire un pas vers lui. Son visage se tord sous l'effet de je ne sais trop quelle émotion violente, et avant même que je n'aie pu l'interpeller, il se retourne et se précipite en courant dans la direction opposée à la mienne. Son poignet toujours serré contre lui. Aoutch. Pas que je ne l'aie pas mérité, mais ça fait toujours bien mal.
Disons que ça a de quoi me mettre de bien sale humeur. Je laisse échapper un grognement de frustration, et Emerens se penche vers moi.
« Ça va aller ?
— Ouais, p't'être, quand Ruben aura accepté de me parler, que je cesserai d'être rongé par la culpabilité, je grogne, oubliant tous les vœux de sauvegarde de ma vie. Et là c'est pas gagné. Il a quoi au poignet, tu crois, en plus ? »
Heureusement pour moi. Emerens ne semble pas dans l'idée de me grogner dessus à son tour. Il se contente de prendre son menton entre ses mains.
« Je ne sais pas, mais m'est avis qu'il faut se dépêcher d'aller à la salle à manger se renseigner. Je dois parler à Ansgar, de toute façon. Tu viens ? »
Il faut surtout se dépêcher d'aller à la salle à manger pour manger, mais bon ça c'est un détail mineur, on va dire, pas vrai ? Non parce que le grondement de mon estomac vient de me raconter une tout autre version de l'histoire. Enfin de toute façon, que ce soit pour la faim ou les rapports, on a une destination en commun, et c'est la salle à manger, donc eh bien c'est parti, mangeons, mangeons.
Il n'y a pas grand-monde sur place. Alannah est en train de siroter son café en pianotant sur son ordinateur je ne sais trop quoi et je ne sais pas si je tiens à savoir ; Ansgar fait de même, d'ailleurs, en compagnie de Sachiko qui croque avec enthousiasme dans une mangue, de manière bien assez dégueulasse pour en foutre partout sur son menton. Pas que je puisse la blâmer, c'est super dur de bouffer des mangues comme ça.
À part Flushy, qui vient se traîner dans nos pattes avec son air blasé de capybara, personne d'autre ne semble être dans le réfectoire. C'est pas très étonnant vu l'heure, mais j'avoue que ça me met quand même relativement mal à l'aise. Ne pas savoir où est passé tout le monde peut être une source de tensions, hein, surtout dans un lieu ou ils pourraient genre mourir.
Emerens ne perd pas de temps. À peine son café dans sa main, il se dirige vers Ansgar d'un pas sûr, et Sachiko, sans doute n'ayant que moyennement envie de se le coltiner et je suis ravi de voir qu'elle devient raisonnable, lève les yeux au ciel et se casse en moins de deux le temps qu'il s'assoie en face de lae Dictateurice. Et comme un malheur n'arrive jamais seul, elle se dirige en plein sur moi.
Suuuuupeeeer.
Bon, j'ai personne pour me sauver la peau en cette joyeuse matinée de printemps amazonien, et tous les regards que je jette en direction d'Alannah ne l'empêcheront pas de rester concentrée sur je ne sais trop quel boulot sur son ordinateur. Super. Ma seule distraction, ça va être de manger. Mais vu la gueule de Sachiko, ce n'est pas empiler trois tartines de brioche au Nutella avec une orange et un énorme pot de fromage blanc sur mon assiette qui va m'empêcher de la voir me regarder avec son sourire.
En désespoir de cause, je fais de mon mieux pour me trouver un prétexte pour ne pas parler, à savoir, mâcher lentement et avec le plus de bouffe possible dans la bouche. C'est pas poli de parler la bouche pleine qu'ils disent. D'habitude je m'en fous, surtout parce que quand j'ai un truc à dire faut qu'il sorte... Mais bon là....
Quel dommage que cette piètre tentative ne me serve pour ainsi dire strictement à rien. Sachiko, loin d'être découragée, s'assied en face de moi.
« Bien dormi, p'tit croyant ? Je m'attendais à entendre des hurlements de douleur et une malédiction ou deux à Satan ce matin... »
Ouais bah écoute, je sais gérer mon meilleur ami au lit quand même... Mauvaise formulation. Mauvaise formulation. Putain. En attendant, je me contente de lever les yeux au ciel, et de finir ma bouchée en prenant tout mon temps. C'est tout juste si un grognement ne s'échappe pas de ma gorge. Derrière la brioche, ça fait pas bon ménage. M'enfin.
Et Sachiko en attendant n'est toujours pas prête à me lâcher les basques... Je suis pas d'humeur à essayer de décrypter une énigme humaine de si bon matin, moi, nom de Zeus.
En désespoir de cause, je décide d'être sympa et de répondre sur une gorgée de café.
« Tu t'attendais à quoi ? Un meurtre ?
— Hmmm, c'est vrai que ça commence à se faire tard dans le second chapitre, mais nan. C'est un enculé de première, ricane-t-elle, mais c'est bien le dernier que je verrais te tuer. Pas que des gens n'aient pas envie d'essayer, s'entend ! »
.... Rassurant. Et j'ai vraiment pas envie de lui demander qui elle pense faire partie du lot. À personne, d'ailleurs. Trop peur de voir un certain bonhomme aux cheveux violets dans la liste depuis hier soir. De toute façon, les gens ne manquent plus de mobiles pour me déchiqueter en un milliard de débris de roux grincheux... à commencer par une certaine théorie désormais révélée au grand jour.
La situation semble d'ailleurs bien faire rire Sachiko, vu la taille de son sourire.
« Oh t'inquiète, avec un pit-bull pareil, les gens vont vite se raviser avant de te planter un couteau dans le lard, mon bonhomme ! Va y avoir plein de bras cassés avant la fin de cette Tuerie ! »
J'espère que non. Surtout qu'Emerens, même doté d'une force respectable, n'a pas l'air d'en avoir assez pour éclater le bras de qui que ce soit. Mais l'idée me fait quand même assez froid dans le dos. Est-ce qu'il est vraiment en mesure de me protéger contre un assassinat ?
De toute façon, j'ai fini mon petit déj', alors je ne peux pas faire grand-chose d'autre que de répondre à Sachiko.
« Mouaif, sincèrement, je ne tiens pas à forcer la chance, ni la mienne ni la tienne.
— Oh, franchement, je n'appellerai pas ça de la chance, ricane Sachiko. Pas quand Ruben est passé avec son poignet cassé ce matin. Tombé dans un couloir, qu'il disait. Moi je dis, il est tombé sur quelqu'un de pas très amical... »
... Et merde, ça commence. Donc, Ruben avait bien le poignet cassé. Et visiblement il s'est passé un truc, parce qu'on ne fait pas une chute pareille pour se péter un os sans raison, même quand on est aussi fragile que Ruben Andersen. Quant à savoir ce qu'il s'est passé...
« On va voir un peu avant de dire que quelqu'un lui a pété le poignet, je soupire. Je lui demanderai. Si j'y arrive.
— Oh, moi je le dis. Inutile de lui demander, surtout que t'y arriveras pas. Il a croisé le chemin d'un mec qui en voulait à sa peau. Ou autres scénarios impliquant un meurtre... On sait jamais après tout, non ? »
Je lève les yeux au ciel. Doucement les certitudes...
« J'vais attendre un peu avant de me fier à tes devinettes. Tu te bases sur quoi pour dire ça ? Même si c'est certes très probable, on en sait rien, c'est tout le souci. Et avant de me dire que Ruben voulait tuer quelqu'un, je vais me demander où il s'est cassé le poignet et comment. »
Sachiko continue de sourire, mais je vois le tic de sa paupière à ma réponse je l'avoue quelque peu méprisante. Vous voulez que je dise quoi aussi... On appelle ça l'exposition des faits, ma grande. Et les faits sont que Ruben, très fragile de base, s'est cassé le poignet dans des circonstances inconnues. Point.
De nouveau, je lève les yeux au ciel.
« Tu ne vas pas me demander de faire confiance à ta chance ? ça varie, la chance, Sachiko. Le jour où tu te tromperas et ou je me serai fié à ça la fois de trop pourrait bien sceller nos existences.
— Je te demande de me faire confiance, sourit la Chanceuse, un peu plus tendue cependant. Je ne me trompe pas, point. Ce n'est pas la chance qui le dit. C'est ma nature divine.
— Les dieux ne saignent pas. Et excuse-moi, je siffle, de me montrer rationnel à l'égard de quelqu'un qui porte le titre d'Ultime Chanceuse. On ne t'a pas appelée Ultime Prophétesse que je sache ? Pas que ça existe dans notre temps, mais bon. »
Oui, je m'énerve, mais là ça sent la bonne conversation stérile et je n'ai vraiment pas envie de me prendre toute l'étendue de son complexe de Dieu. Bon, si ça continue, je vais me faire baffer, mais tout plutôt que de jouer la compliance forcée...
Enfin, pour l'instant, elle n'a pas l'air de vouloir m'en coller une. Même si son sourire me semble davantage plein de dents que de sincère camaraderie, tiens.
« Étrange que tu dises ça, parce qu'on t'a surnommé, toi comme Amane, le Prophète de la fin des Temps dans certain milieux. Quoi ? Ricane-t-elle. Tu croyais que ta théorie n'avait pas eu le temps d'être lue ? Entre les Monokuma et certains fanatiques, crois-moi, y'avait largement de quoi faire.
— Ni lui ni moi ne sommes investis d'une putain de mission divine ! Je ne peux m'empêcher de crier. C'est à peine si on a mis au jour un concept ou deux de philosophie qui certes a des bases scientifiques, mais derrière n'a rien d'annonce de l'Apocalypse ! C'est les Monokuma qui le prennent comme ça, je crache, bouillant d'une certaine rage qui n'est sans doute pas tournée contre Sachiko uniquement. Et regarde où ça nous a menés.
— Toi peut-être, mais moi si, sourit la Chanceuse, sa voix pleine de fiel. Et si tu tiens tant que ça à te comporter comme un hérétique trop rationnel pour son propre bien, je vais te donner des faits à manger. Qui a trouvé les lettres et les vêtements pour accuser Aldéric ? Et où ? Qui savait où chercher sans le moindre indice ? Pas toi, que je sache, n'est-ce pas ?
— Tu es l'Ultime Chanceuse, nom d'un chien, je grommelle, de plus en plus agacé. Les probabilités elles-mêmes jouent en ta faveur, c'est le principe de ton Ultime. Mais je ne vais certainement pas renier les lois mathématiques pour te croire sur parole à tout ce que tu ponds du haut de ton complexe de Dieu ! »
Sachiko se penche sur sa chaise. Son sourire n'est plus que carnassier, désormais, et malgré tout ledit esprit rationnel dont je suis si fier, tout ce que je trouve à faire, c'est reculer dans la peur assez peu factuelle qu'elle tente de m'arracher un morceau du visage à grands coups de dents. Mais comme les faits me le disent, elle n'en fait rien. Elle se contente de coincer mon menton entre ses doigts.
« Si tu ne me crois pas, va voir dehors, mon petit croyant. Parce que devant la porte, tu vas trouver une très mauvaise surprise qui n'en est pas une. »
Elle relâche mon menton d'un coup sec, avant de se lever et de récupérer Flushy sous son bras. Au même moment, Emerens me rejoint, non sans jeter un regard particulièrement noir à la Chanceuse. Eh bien, j'ai une sacrée veine qu'il ne soit pas arrivé plus tôt, moi. Je soupire de soulagement, et il s'assied à côté de moi, l'air inquiet.
« Ça va ? Elle te voulait quoi ?
— Boaf, se vanter de sa chance et me parler du nombre de gens qui veulent me tuer, je fais en haussant les épaules. Rien de bien méchant. Elle voulait aussi me dire d'aller voir dehors. Je ne sais pas pourquoi...
— Hmm. Une sale blague, j'imagine. M'étonnerait pas d'elle... »
Un hurlement de terreur coupe net sa phrase.
C'est la voix de Moanaura.
Ça vient de dehors.
D'un seul coup, je suis beaucoup moins convaincu de rigoler en sortant...
Le sang me bat aux tempes, mais j'arrive néanmoins à me lever d'un bond sans renverser ma chaise. À côté de moi, Emerens, l'air nettement moins sûr de ce qu'il vient de dire, balaie la salle à manger du regard. Sachiko, évidemment, est la seule à être calme. Ansgar vient de relever la tête de son ordinateur en grimaçant, et Alannah est crispée de toutes parts. Son ordinateur, refermé sur ses genoux, émet encore un léger ronronnement, preuve qu'elle vient de le replier sans même prendre la peine de le mettre en veille.
Ansgar, les yeux plissés, se relève de sa chaise avec plus de grâce que nous tous pauvres pégus. Ses lèvres sont pincées.
« Sachiko, va chercher Seo-jun et dis-lui de venir devant la porte immédiatement. Les autres, vous pouvez aller voir. »
C'est comme si l'ordre d'Ansgar avait libéré un truc en moi. Je m'élance en dehors de la salle à manger, Emerens et Alannah sur les talons, pendant que Sachiko se précipite dans la direction opposée, pour le coup sans trop protester. Vu notre vitesse de course, il ne nous faut pas longtemps pour atteindre la porte de la maison. Et encore moins pour débouler dehors.
Moanaura est recroquevillée au sol. Assise sur l'escalier, son bras serré autour de ses jambes, l'écho du cri qu'elle a poussé est perceptible dans sa mâchoire pendante. Ses yeux sont plus larges que des soucoupes, en train de pleurer toutes les larmes à disposition, et son doigt tremblant est pointé vers le portail de la maison, à quelques mètres, qu'elle fixe sans le voir.
Ses bottes sont pleines de sang.
Et à la réflexion, le sang, on le flaire de partout. Je ne sais pas si je vois rouge, ou s'il y a vraiment autant d'hémoglobine étalée par terre, ou si je suis juste en train de me convaincre de ne percevoir que du rouge pour oublier le corps étalé à terre.
Mais aussi persistant que puisse être mon cerveau à me faire oublier la mort et le sang, je ne peux détacher mon regard de la forme gisant au sol, les bras en croix, qui malgré les bleus, les blessures et le sang je ne peux que reconnaître.
Ibrahim Nassaoui, Ultime Soldat, qui baigne dans son propre sang devant le portail de la maison, les yeux fermés sur un monde qui n'existe plus.
La seule chose que je parviens à penser avant que le monde ne devienne blanc est qu'il va vraiment falloir que je teste plus en détail les capacités de Sachiko.
"Ce Chapitre va être un bain de sang dans tous les sens du terme. Il faudra faire extrêmement attention."
Entendu depuis le placard d'un bâtiment inconnu
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Kukuw :D
Alors, un avis sur cette charmante conclusion de chapitre? :D
J'ai hâte d'entendre vos théories :D
(Et sur ce je vais me mettre en PLS dans un coin-)
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