[En média, j'ai mis une musique d'ambiance]

Lorsqu'il émergea de l'obscurité, il sentit quelque chose couler sur ses lèvres... Non, pas que sur ses lèvres, quelque chose qui lui coulait sur le visage. Il garda les yeux clos, ne se sentant même pas la force de les ouvrir. Tout autour de lui, l'oxygène commençait à s'échapper. L'homme prit une grande bouffée d'air, et sentit une autre goutte de sang ruisseler sur sa joue. Une blessure au front, sûrement. Rien de grave. C'est alors que son transmettoïde à impulsions internes, greffé à l'intérieur de son cerveau, s'activa.

- Maître ? Maître Lǽm'Kaŷsch ? Est-ce que vous allez bien ?

Après un petit effort, ce dernier ouvrit les yeux. Il se trouvait dans l'espace, dérivant dans une bulle d'air que sa puissance attirait. Devant lui se trouvait une planète, ou en tout cas un corps céleste d'une taille considérable, et d'une noirceur renforcée par la lumière qui formait un halo lumineux autour, comme si une étoile s'y trouvait cachée derrière.

Lǽm'Kaŷsch était allongé dans sa bulle d'air, sur une plaque de glace qu'il avait très certainement dû invoquer précédemment, même si il ne se souvenait de rien. C'est juste un détail.

- Qui êtes-vous ?, répondit-il, méfiant.

- Maître, vous ne vous rappelez pas ? Je suis Gavin, votre apprenti. Nous sommes ici pour chercher le Talisman de Napħk-Vhȉdraṋ, le but de votre quête.

Effectivement, il ressentait bien la présence d'un jeune garçon, debout, sur une paque de glace également, flottant dans les airs à quelques kilomètres de distance. Gavin s'était probablement posé en retrait par rapport au sorcier. Il voulait te trahir, ne l'écoute pas ! Mais d'autres présences se manifestaient à lui, plus éloignées. Des présences agressives, menaçantes. Comme s'il avait pu lire dans les pensées de Lǽm'Kaŷsch, Gavin ajouta :

- Et vos soldats, Maître, sont également ici, avec vous. Ils attendent vos ordres.

- Seigneur Lǽm'Kaŷsch, fit une voix d'homme dans son transmettoïde. Si vous ne vous rappelez pas, je suis Vữr'Wràth, Commandant de la XXXVe Légion Impériale. Nous avons deux cent mille hommes dans le système qui sont prêts à agir d'un instant à l'autre. Mon Seigneur, avec tout le respect que je vous dois, je vous demande : qu'est-ce qu'il s'est passé ?

- Vous vous avanciez vers la planète, en nous disant que vous alliez regarder un peu, voir ça de plus près, expliqua Gavin. Vous vous êtes rapproché de cette planète, et là, il y a eu un grand flash de lumière !

Il marqua une légère pause, et ajouta d'une voix chargée de honte :

- Et malgré vos entraînements, j'ai été aveuglé, Maître ! Je n'ai rien pu voir de ce qui s'était passé. Quand j'ai rouvert les yeux vous étiez là, allongé. Je suis désolé !

- Pas de souci, mon petit, le rassura Vữr'Wràth. Nous aussi, on a rien pu voir : les senseurs de nos méchas ont saturé ; les images sont inexploitables.

Pendant ce temps, Lǽm'Kaŷsch s'était relevé, et sa main gauche serrait fortement son Bâton de Pouvoir, un focalisateur de deux mètres de long, terminé par un cristal de yellorite. D'un geste mental, il réactiva sa connexion à l'Etherium. Fort de cette puissance retrouvé, il renforça son sort et la boule d'air se renforça autour de lui en tourbillonnant. Ils cherchent à t'attirer dans un piège, Lǽm, ils te mentent ! « C'est sans doute vrai » se dit-il, « je ne me rappelle pas d'eux, pas plus que cette histoire de talisman. » Alors qu'il réfléchissait, une nouvelle menace surgit.

Depuis l'astre de roche, des essaims avaient décollé, et fonçaient droit vers eux. Ces insectes faisaient chacun quasiment une dizaine de mètres de long. Leurs corps étaient dans le monde matériel alors que leurs ailes traversaient la frontière des mondes et volaient dans l'Etherium. Chacun des abdomens de ses créatures se terminait par un dard aiguisé, et si Lǽm'Kaŷsch en croyait ses maigres souvenirs, ce dard était également empoisonné, gorgé d'un acide redoutable. Différentes couches enveloppaient la partie matérielle de ces bêtes, suffisamment résistantes pour résister à la décompression interplanétaire. Malgré leur apparence, ces bêtes sont très gentilles, il suffit de bien savoir s'en occuper. Le sorcier fut presque surpris par sa propre réflexion, tant son intuition lui disait tout le contraire.

- Seigneur Lǽm'Kaŷsch, des Frelons approchent, ajouta la voix de Vữr'Wràth. On va se les faire. J'envoie les méchas en avance.

Il s'agissait d'humanoïdes métalliques, spécialisés dans le maintien de l'Ordre Impérial. À l'intérieur de chacun de ces bijoux de technologie se tenait un pilote, dans le torse du mécha. Par extension, ce terme, qui à la base ne désignait que la partie robotisée, en était venu à représenter ces unités d'élite de la Galaxie. Le bras gauche d'un mécha se terminait par une sorte de grand cylindre de métal à base octogonale sur lequel étaient fixés des disques de métal en rotation ultra-rapide, capable de découper tout et n'importe quoi. Le bras droit se terminait par un analogue de main humaine, avec cinq doigts et au niveau du poignet se trouvait un lance-grappin. Dans leur dos, la propulsion était assurée par un jetpack composé de neuf moteurs à ion.

Ils ne disposaient toutefois pas d'une propulsion hyperspatiale, ce qui obligeait les Commandants des Légions Impériales à utiliser des vaisseaux de soutien et de transport de troupes pour leurs missions. Ici, le vaisseau en question était reparti juste après avoir posé tout ce monde pour faire un petit saut à travers l'hyperespace pour être à couvert. Il se tenait toutefois prêt à intervenir, au cas où.

Les méchas avançaient en formation régulière, formant un pavé dans l'espace qui se dirigeait vers la planète. De l'autre côté, l'essaim de Frelons s'était également arrêté à une distance raisonnable. Lǽm'Kaŷsch était situé sur le côté, et voyait les deux forces en présence se regarder face à face, un instant. Puis, elles se précipitèrent l'une sur l'autre, de façon quasi-simultanée.

Les méchas lançaient leurs grappins sur les Frelons, pour les immobiliser, et se servaient de leurs autres bras pour les éventrer avant de les balancer dans le vide. Leurs ennemis les percutaient à haute vitesse pour les déstabiliser, avant de percer les méchas avec leurs dards.

Excentré par rapport à bataille, Gavin se demandait bien à quoi il pouvait servir. Il se dirigea vers son Maître pour chercher des conseils et voir s'il pouvait lui être utile quand il rompit le silence en s'écriant à travers le transmettoïde :

- Mais... Maitre, il me semble que le Talisman, vous le portez autour du cou !

Il te ment ! Regarde, tu es complétement libre de toute volonté. Ne l'écoute pas !

Mais ces paroles paniquées n'eurent pas l'effet prévu dans l'esprit du Sorcier. Au contraire même, elles éveillèrent sa méfiance, et il inclina sa tête vers le bas, apercevant de fait le fameux talisman suspendu à un mince collier en fil transparent accroché autour de son cou. À cet instant, il comprit le plan de l'artefact, et sa rage d'avoir été dupé était impressionnante.

- Je vais t'empêcher de nuire à tout jamais, marmonna Lǽm'Kaŷsch en concentrant toute sa volonté.

Il ferma les yeux et détecta la présence du Talisman dans l'Etherium. Forcément, ce dernier était d'une nature semi-matérielle. Le Sorcier prit alors une grande inspiration, et commença à projeter des vagues d'énergie sur son adversaire, pour soumettre et briser l'esprit de l'artefact.

Instantanément, tous les Frelons s'arrêtèrent, comme s'ils venaient de recevoir un ordre, et tous ceux qui le pouvaient se dirigèrent vers le Sorcier. Mais ce dernier s'y était préparé. D'un coup de bâton, il repoussa l'un de ses agresseurs, avant de faire un tour complet sur lui-même pour en frapper un autre, qu'il foudroya. Les insectes géants étaient trop nombreux, ils se gênaient mutuellement dans leur assaut contre cet humain, qui pouvait les esquiver, les projeter l'un sur l'autre et briser leurs carapaces à l'aide du Bâton de Pouvoir.

Dans l'Etherium, les deux volontés étaient en confrontation directe, une pure épreuve de force mentale où chacune tentait d'écraser l'autre. La situation semblait bloquée quand Lǽm'Kaŷsch aperçut une mince faille dans la défense de son adversaire. C'était une toute petite brèche, mais ça ferait bien l'affaire.

Il s'engouffra dedans et l'agrandit, causant des fissures profondes à l'esprit du Talisman. Quelques secondes plus tard, ce dernier céda et tous les souvenirs de Lǽm'Kaŷsch lui revinrent quasi-instantanément. Le Sorcier s'était approché trop près de la planète, et le Talisman s'était propulsé sur lui afin de le neutraliser, générant ce flash de lumière. Mais il n'avait pas totalement réussi à vaincre Maître Lǽm'Kaŷsch, juste à lui dissimuler une partie de ses souvenirs. Cette partie qu'il venait juste de récupérer à l'instant.

Ce problème réglé, le Sorcier ouvrit les yeux. Les Frelons continuaient à suivre la dernière consigne reçue : l'éliminer. Cependant, son esprit était de nouveau lui-même, il ne se battait plus que sur un seul front désormais. L'homme leva ses deux bras écartés, tenant toujours le Bâton de Pouvoir à sa gauche qui renforçait sa puissance, tout comme le Talisman de Napħk-Vhȉdraṋ qui était désormais sous son contrôle total. Les Frelons s'élevèrent alors autour de lui. Il rapprocha ses deux bras devant lui, et l'anneau de Frelon qui s'était formé autour de lui eut le même mouvement et se compacta alors.

Utilisant son esprit comme conduit, des vagues d'énergie issues de l'Etherium se canalisèrent et débouchèrent dans ce monde, frappant les Frelons de plein fouet si bien que leurs atomes se dispersèrent au loin.

Gavin, qui était resté bouche bée devant le spectacle, jeta un coup d'œil de l'autre côté. Les méchas du Commandant Vữr'Wràth avaient également terrassé leur part de Frelons, et se dirigeaient vers eux.

- Tout va bien, Commandant, assura Lǽm'Kaŷsch. Vous avez fait du bon boulot. Maintenant, on se dirige vers la planète. Il doit rester plein de trésors là-bas à découvrir.

- Bien Monseigneur, lui répondit-il à travers le transmettoïde. Nous sommes à vos ordres.

Le Seigneur Lǽm'Kaŷsch avait toute la confiance de l'Empereur, auquel lui et ses troupes avaient prêté serment de loyauté infinie. Ils feraient leur devoir, pour la gloire de l'Empire !

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