25 juillet 1875 — Arkhess

Deux semaines plus tard, le grand jour du rituel arriva. Les préparatifs acharnés, orchestrés par Sawse et Solèna, furent retardés par leurs travaux respectifs, la vie courante au château raflant tout le temps dont elles disposaient. Déjà, Garland les retarda de deux jours, refusant net de délier sa langue. Hélas pour lui, les pouvoirs qu'il avait lui-même donné à Sawse se retournèrent contre sa personne. Torturé de la plus vile des façons, il consentit finalement à donner des indications plus ou moins précises pour la création du Cercle.

Le moment décisif arriva. Solèna s'était arrangée pour congédier une bonne moitié du personnel du château, s'ingéniant à trouver des excuses pour tous. Avec la reine, elles décidèrent de pratiquer le Rituel en début de soirée.

Lunera arriva la dernière, l'air maussade, une cape jetée nonchalamment sur ses épaules. Profitant du peu de temps libre qu'elle détenait avant le Rituel, elle était retournée s'égosiller chez Akman en espérant le persuader. Peine perdue comme les quinze derniers jours. Le major n'avait pas pointé le bout de son nez et refusait net de sortir de chez lui. Pas même son frère ne l'avait vu durant ces semaines. La reine avait perdu tout espoir de retrouver son entente avec Akman.

— Nous vous attendions, Majesté... déclara Solèna.

Penaude, Lunera leva les yeux vers sa ministre. Celle-ci tenait dans ses mains un épais traité de magie. Arkh et Aria étaient également présents, à l'écart du sublime Cercle d'Uraera monté par Solèna et Sawse. Cette dernière se tenait en plein milieu avec la carcasse décharnée de Garland V, les lorgnant tous d'un regard mauvais.

— Vous avez fait un travail formidable... murmura Lunera d'un ton appréciateur en arpentant les contours du Cercle.

La précision des symboles, mêlant lunes et étoiles, figures géométriques en tout genre, arabesques majestueuses et autres splendides dessins, ravissait Lunera. Le Cercle était similaire en tout point à celui du Palais des Chimères.

— Commençons sans plus attendre, siffla Sawse, un ton sauvage décelable dans sa voix.

— Oui, allons-

Soudain, un petit « pop ! » retentit, interrompant la reine et dans un petit nuage de fumée, un parchemin enroulé et scellé tomba à ses pieds. Curieux, ses amis se tournèrent vers elles se demandant qui pouvait solliciter la reine avec une lettre hyper-express. Intriguée, Lunera se pencha et attrapa le courrier. Elle décacheta le sceau représentant deux mains entrecroisées qui tenaient une sphère et déroula le parchemin.

À l'attention de l'Ange d'Arkhess

Chère Lunera,

Je vous écrit en amie ce courrier informel pour vous annoncer le retour de mes chevalières depuis leur expédition à Callisto. Outre les traces décelables de la Naga Exaltée, elles ont retrouvé son corps en décomposition dans les souterrains que vous m'avez décrit. Elles me l'ont rapporté, concluant enfin les siècles d'opprobre jetée par cette lamia sur notre peuple.

Je tenais à vous en informer afin de vous remercier encore une fois. Ce geste peut vous sembler petit mais sachez que vous êtes glorifiée en héroïne auprès des Lamias des Sables Noirs. Merci. Mille merci, chère Lunera.

J'en profite, par ailleurs, pour vous dire que l'aura noire que je ressentais aux alentours de l'Adrastée s'est déportée à Arkhess. Votre aura est toujours perceptible donc je ne doute pas de votre réussite dans cette affaire. J'en suis très heureuse. Toutefois, veillez à toujours faire attention, chère Lunera.

N'hésitez jamais à me solliciter si vous avez besoin. Forces, conseils, ressources, je mettrais tout mon pouvoir de Grande Dame Vipérine pour vous y aider.

Prenez bien soin de vous,

Daea, Grande Dame Vipérine

Lire les mots de la Grande Dame fit plaisir à Lunera. Une nouvelle personne venait étoffer ses arrières. Daea serait une grande alliée, elle n'en doutait pas un seul instant.

— Qui est-ce ? se permit Solèna.

— Plus tard, répondit la reine. Passons au Rituel.

Elle rangea la lettre dans une poche et s'avança vers Sawse, confiante. À ses yeux, ce courrier était un heureux présage.

— Localisez précisément le Saphir Sidéral, indiqua Lunera. Je vous fais confiance.

Elle se rangea ensuite sur le côté avec Aria et Arkh. Solèna les rejoignit.

— Esse Primordial ! Uraera Mezame ! prononça Sawse N, d'un air austère.

Crépitant avec la même ardeur qu'un brasier infernal, une gerbe de magie pure prit naissance au centre du cercle si près de Garland qu'il en louchait. Des étincelles, tantôt rougeâtres, tantôt violâtres, explosèrent à divers endroits sous les yeux impressionnés des amis de la reine. Celle-ci assistait à son deuxième Rituel et observait l'éveil du Cercle, l'air grave.

Les symboles s'allumèrent un à un depuis la périphérie jusqu'au centre. L'écusson d'Uraera, cette fameuse lune entrecroisée d'arabesques aux courbes parfaites, s'enlumina à son tour. Le Cercle était fin prêt à l'utilisation.

Sawse N s'avança avec davantage de grâce qu'elle n'en avait jamais eu de toute sa vie, leva ses mains vers le plafond comme si elle faisait une supplique aux cieux et rugit la formule implacable, sa voix durcit par les aspérités d'une haine trop longtemps portée :

— Akopein Cosmos !

Portée par une formidable impulsion magique, Sawse se mit à léviter. Enveloppée dans une lueur mordorée semblable à un cocon, elle canalisa toute sa force et l'envoya d'un jet sur Garland V. Les contours du Cercle s'illuminèrent d'un éclat aveuglant et diffusèrent une lumière surnaturelle, comme vivante, qui vint rejoindre l'ordre de Sawse. L'élan du Cercle se mêla à celui de l'ancien Ange, formant ainsi un maillage lumineux autour du Sacrifié.

Les lumières se gâchèrent alors, obscurcies par des ténèbres profanes et inquiétantes. Comme animées par un élan mortifère, elles se teintèrent d'une dangereuse couleur mauve avant de virer à un noir mortel. Elles fondirent tel un rapace sur Garland plongeant et disparaissant dans son corps. Le vieillard laissa alors échapper une série de hurlements stridents, glapissant la douleur terrible infligée par le Rituel qui saccageait ses organes de l'intérieur.

Cette magie pure circula à grande vitesse sur sa peau ridée, la marquant par des sillons rougeâtres semblable à de la lave en fusion. Son oeil de verre tomba au sol et fut réduit à néant immédiatement par l'intense pression du Cercle. L'orbite béant fit sensation auprès de Lunera et de ses amis, s'imposant comme une vision d'horreur au sein de se spectacle de sorcellerie.

L'oeil jaune de Garland devint fou, roulant sur lui-même, détraqué par les maux du Rituel. Sa peau s'atrophiait à vue d'oeil. Son cou se tendait à l'extrême faisant ressortir davantage les cordons saillants gorgés de sang qui lui servaient de veines jugulaires. Ses cris finirent par s'atténuer au fur et à mesure que la vie lui échappait. Alors, le Rituel se conclut par une salve de puissance qui s'abattit sur son corps achevant de lui arracher son âme de double centenaire.

Sawse N se posa à terre, les yeux fermés. Impressionnée, Lunera s'approcha doucement d'elle en tenant sa respiration, n'attendant que le moment où la Clairvoyance aboutirait. Solèna les observait avec de grands yeux, atterrée à l'idée qu'une magie aussi malveillante puisse exister. La chaise d'Aria demeurait vacante, celle-ci s'étant enfui en plein milieu du Rituel, saisie par des hauts-le-coeur terribles. Arkh, de son côté, tenait les accoudoirs de sa chaise si fort que ses jointures étaient aussi livides que son visage.

— Sawse... murmura Lunera.

Elle jeta un oeil à la carcasse carbonisée de Garland V, espérant que toutes les années à son actif puissent vraiment servir à l'identification du Saphir Sidéral. Sawse se tourna vers elle et rouvrit ses yeux. Lunera retint une exclamation stupéfaite : ils étaient changés !

Ses iris se paraient d'un camaïeu de bleu, alliant des plages sublimes de couleur, dont une teinte pervenche que jamais Lunera ne vit auparavant. Le regard de Sawse avait changé également. Il se faisait plus las, presque blasé, comme si la vision nouvelle que lui offrit la Clairvoyance était désolante. Dotée de l'illustre pouvoir rituélique, Sawse voyait.

— Votre... votre Majesté, murmura-t-elle, d'un ton éthéré.

Arkh et Solèna s'approchèrent, soudain tendus. Aria entra à son tour, le teint verdâtre.

— Parlez, Sawse, ordonna la reine, les doigts agités de soubresauts tant elle était fébrile.

— Je... Je vois tout !

Sa voix traduisait une certaine panique.

— Je... Tout Terhera m'est servi sur un plateau d'argent... Les informations déferlent par milliers dans mon cerveau... Je vois... Je vois comme une étendue infinie, toute parsemée d'étoiles ! Votre... Ma... jesté ! Aidez... moi !

Alarmée, Lunera se posta devant Sawse et la saisit par les épaules. Elle plaqua son front contre le sien et siffla :

— Concentrez-vous, Sawse... Concentrez-vous ! J'ai toute confiance en vous, allez-y !

Sawse repoussa violemment la reine. Celle-ci buta sur le cadavre de Garland et tomba à la renverse. Médusée, elle observa Sawse avec un air d'effroi.

Va... va-t-elle me trahir ?

L'ancien Ange se tenait la tête de ses mains, ses bras épais pliés dans une position grotesque. Elle gémit comme assaillie par de terribles migraines et tomba à genoux.

— Sawse ? appela Lunera, la respiration hachée.

Sawse N rouvrit soudainement ses paupières. Toute trace des teintes mystiques qui avaient coloré ses pupilles avait disparu. Seul le marron habituel subsistait.

— Sawse ?

— Dans la plus haute tour du château Sultakara, débita sa nouvelle alliée. Cachée dans un coffre scellé par le roi lui-même. Le coffre est au sommet de la tour, posé à même le sol, en présence d'autres trésors.

Lunera se releva et épousseta sa robe, ses méninges s'actionnant à toute vitesse.

— À... à Sultakara ? répéta Solèna, comme frappée par la foudre.

— Oui, croassa Sawse.

— Nous n'avons pas de temps à perdre, s'écria Lunera. Qu'attendons-nous pour mettre les voiles ?

— Pardon ? s'indigna Solèna.

— Nous partons à Sultakara, répéta Lunera froidement.

Sentant une potentielle colère venir de la part de la ministre, Aria et Arkh s'approchèrent d'elles. Qui allait vaincre dans ce duel de volonté ?

— Comment comptez-vous récupérer le Saphir Sidéral à Sultakara sans offensive ? Vous êtes l'indésirable numéro un en Adrastée. Se dévoiler à Sultakara reviendrait à signaler au monde entier que le Sceau de l'Ange a accueilli un nouveau monarque. Votre couverture tomberait à l'eau au moment même où vous poserez un pied dans le royaume d'Assad Sulta !

— Et alors ? demanda la reine, ne comprenant pas. Il faut une offensive, c'est évident. Je savais que le Saphir était à Sultakara mais-

— Et alors ? murmura Solèna, d'une voix dangereuse. Et alors ? Vous êtes la reine d'Arkhess ! Ce ne sera pas Sultakara mais l'Adrastée toute entière qui ripostera pour vous anéantir et le royaume avec ! Vous exposez Arkhess et Arkhess ne doit pas être impliqué. Nous ne pourrons jamais riposter contre les quatre armées. C'est donc un non catégorique.

Lunera eut l'impression que sa ministre venait de l'humilier d'un soufflet devant tout le monde.

— Vous... vous étiez pourtant partant au début ! rugit-elle, la voix déformée par la rage.

— Je ne pensais pas que la gemme puisse être cachée à Sultakara.

— Quoi ? QUOI ? JE VOUS AVAIS POURTANT DIT QU'ASSAD M'AVAIT INTERCEPTÉ JUSTE AVANT QUE JE NE PUISSE RÉCUPÉRER LE SAPHIR ! IL EST DONC TOUT À FAIT LOGIQUE QUE LA PIERRE SOIT DANS SON CHÂTEAU !

L'agressivité de la reine ravivant la colère de Solèna, celle-ci se redressa de toute sa hauteur prête à l'asperger de son venin.

— Arrêtez !

— Cessez immédiatement !

Arkh et Aria s'interposèrent entre elles avant que la situation ne dégénère.

— Solèna, vos craintes pour Arkhess sont légitimes, mais nous avons promis d'aider Lunera, lui rappela Arkh.

— Majesté, mit en garde Aria, vous ne pouvez pas partir immédiatement à Sultakara sans avoir au préalable réfléchi à une stratégie. Incluez aussi Arkhess dans vos décisions, le pays ne doit pas souffrir d'un de vos choix.

Les deux remontrances rendirent leur esprit aux deux femmes qui se calmèrent immédiatement.

— Vous... vous avez raison... murmura Lunera. Mais, si Solèna m'avait laissée finir, elle aurait su que j'ai une idée de parade pour repousser toute invasion du territoire, ajouta-t-elle froidement.

— Oh, vraiment ? répliqua celle-ci. Si vous êtes convaincante, je songerais peut-être à vous aider... comme promis.

Soulagés d'avoir dissiper l'orage avant qu'il n'éclate, Arkh et Aria demandèrent plus de précision à la reine.

— J'ai songé à un déploiement d'une partie de notre armée à Sultakara pour une attaque non-meurtrière, expliqua-t-elle. Le terme peut paraître saugrenue, ajouta-t-elle en voyant le sourcil de Solèna se hausser, mais laissez-moi finir. Je veux juste jeter un vent de panique sur Sultakara et créer une confusion qui me permettra de passer inaperçu tandis que je rejoindrai le château pour reprendre le Saphir Sidéral. Je donnerais pour consigne de ne pas tuer de civils et d'éviter de trop semer le sang.

De sa bouche, de tels propos paraissaient surréalistes au vu de son passif.

— Quand Darkodem sera ramené à la vie, je lui ferais cracher tout ce que je veux savoir et ensuite... et ensuite, je le sacrifierais dans le Rituel du Palladium.

— Co-comment ? glapit Solèna. Vous... vous le tueriez pour la sauvegarde d'Arkhess.

— Oui. J'ai lu attentivement l'encyclopédie que vous avez déniché. Avec mes pouvoirs de Sorcière, je pourrais dresser un bouclier qui séparera Arkhess du monde entier. Plus personne ne pourra nous attaquer et Sultakara ne pourra pas orchestrer une invasion.

— C'est... très audacieux comme plan, remarqua la ministre. Nous ne sommes même pas sûr qu'accéder au Coeur Arkhale nous permettra de ramener Darkodem à la vie.

— Mais Solèna ! soupira Lunera. Le rêve... la lettre... tout concorde ! Quelque chose se cache dans le Coeur Arkhale... Je dois le savoir !

Lunera se retourna vers les autres, en quête de leur soutien.

— Mes hommes pourront assurer cette mission, déclara Arkh. Nous avons des vaisseaux de guerre, des aéronefs, et suffisamment de soldats... Question logistique, le problème est réglé. Encore est-il, je me demande comment l'annonce d'une bataille passera aux yeux du peuple...

— Vous... vous seriez vraiment capable de sacrifier votre propre père ? hésita timidement Aria.

— Tout à fait, grinça Sawse en se relevant. Vous avez dû avoir une famille exemplaire, Aria. Nous autres n'avons connu que le mépris de nos géniteurs. Ils ne valent pas mieux que des animaux à nos yeux. Je marche donc.

La reine se tendit comme si elle venait de proférer un blasphème. Les vieilles habitudes avaient la vie dure.

— Je ne vois pas Darkodem comme un animal ! protesta Lunera. Simplement... Il a fait beaucoup de mal... et je suis certaine de ne connaître que la partie découverte de l'iceberg.

La reine prit la main d'Aria.

— Quant au Rituel... Aurais-je vraiment la force, le moment venu ?

Elle s'empara de la main d'Arkh également.

— Je compte sur vous pour m'épauler jusqu'à la fin... et m'aider à ne pas avoir peur.

— Et le peuple ? demanda Solèna avec impatience.

— Je... je n'y ai pas pensé, avoua la reine avec honte.

— Je suis vraiment très mécontente, cingla la ministre. Je ne pensais pas que cette histoire se solderait par une attaque sur Sultakara. Certes, ce sont nos ennemis de toujours mais pourquoi chercher la petite bête auprès d'eux ?

— Au pire, suggéra Aria, nous pouvons proposer l'idée de la reine au conseil interne du château en conviant les nobles. Nous voterons à main levée après que Lunera soumette sa proposition et improviserons en conséquence.

— Belle idée, Aria ! s'écria Lunera, contente.

— C'est... une solution, céda Solèna. Par amitié, je resterais neutre. À vous maintenant de faire en sorte de convaincre les nobles et autres gradés du château. Je vais organiser ça au plus vite.

Lunera la remercia, touchée que sa ministre accepte quand même de passer au-dessus de ses convictions. Ensuite, ils remontèrent au rez-de-chaussée du château après avoir bien veillé à barricader l'accès au Cercle d'Uraera. Personne ne devait savoir à son sujet.

☾☾☾

En regagnant le couloir principal du palais, ils virent une silhouette baraquée se tenir accoudée au portail massif qui fermait l'entrée du château. La nuit battait son plein et même à la lueur de la lune, le groupe ne put distinguer les traits de l'inconnu. En s'approchant, ils le virent agiter ses mains près de son visage. Un cliquètement retentit et un petit feu apparut au sommet d'un briquet, éclairant la face de l'homme... qui n'était nul autre qu'Akman. Mal rasé, l'air hébété, les sourcils froncés, il n'était plus le jeune homme rieur qu'ils connurent.

Médusée, la reine resta tétanisée sur place tout comme le reste de ses amis. Arkh cligna des yeux, surpris de voir son frère dehors après s'être cloîtré aussi longtemps chez eux et s'approcha de lui. Celui-ci alluma une cigarette et tira un coup avant d'expirer la fumée d'un air las. L'air pensif, il ne remarqua pas tout de suite son frère cadet.

— Je t'ai déjà dit d'arrêter de fumer, le houspilla-t-il en lui arrachant la cigarette.

Il la jeta à ses pieds et l'écrasa de ses bottes noirs, réduisant le mégot en cendres. Akman ne réagit même pas.

— Que fais-tu là ?

— Tout ça... tout ça, c'est pour toi. Seulement pour toi.

Il le bouscula sans cérémonie et s'avança vers la reine qui se tenait en retrait avec Solèna, Aria et Sawse. Il se posta devant la souveraine et lui tendit sa main.

— Je suis venu attendre Arkh, se justifia-t-il. Il n'est pas rentré alors qu'il était très tard. Je vous ai entendue, ajouta-t-il avec mauvaise humeur, toutes les fois où vous m'avez appelé. Considérons l'histoire comme close.

Il fallut que Solèna murmure : « La paix, Votre Majesté, la paix ! » pour que Lunera comprenne ce que voulait dire par là Akman. Les yeux remplis de larmes, elle se jeta dans ses bras et le serra à l'en étouffer tout en murmurant des excuses à intervalles réguliers. Le jeune homme ressentit des sentiments contradictoires. L'amitié qu'il éprouvait pour Ariès se confrontait dans un duel singulier avec la haine farouche qu'il conservait pour Darkodem et tout ce qui était lié à lui, de près ou de loin.

— Vous êtes enfin revenu à la raison, Akman, sourit Solèna.

Celui-ci ne répondit pas, sombre. Lunera se détacha de lui et invita tous ses amis à monter avec elle pour un dernier café avant d'aller se coucher. Elle en profiterait pour faire un topo de la situation au deuxième major.

En montant les marches marbrées, Lunera ressentit un élan de joie immense. Akman était revenu, la localisation du Saphir Sidéral était parfaitement définie, ses amis la soutiendraient jusqu'à la fin ; les raisons de ce doux bonheur étaient infinies.

J'arriverais à convaincre Arkhess... J'en fais le serment !