XXI - Retour en Adrastée - Partie 2
08 juillet 1875 — Yaqutane, province de Nara
Le même jour, alors que la nuit étalait déjà ses ténèbres depuis longtemps, ni Lunera, ni Solèna, n'étaient couchées. En fait, elles n'étaient même pas à Arkhess. Elles demeuraient actuellement cachées derrière une haute bâtisse dans un petit village du royaume de Yaqutane. Les deux femmes profitaient de l'imposante ombre pour être à l'abri des regards, tout en guettant discrètement la place principale du village. Toute dallée de pierre, on ne pouvait rater le bel obélisque qui se dressait fièrement vers les cieux.
Toujours aussi impatiente, Lunera ne cessait de lorgner la colonnade, certaine qu'il allait bientôt apparaître. Pâle et anxieuse, Solèna préférait rester en retrait. Quel ne fut pas son choc en apprenant que Lunera avait déjà rencontré Garland V au cours de ses voyages !
Alors qu'elles venaient juste de rentrer de leur visite chez les lamias, Lunera avait insisté pour se rendre immédiatement au royaume de Yaqutane. Solèna avait tenté de la dissuader, arguant qu'il était nécessaire de d'abord réfléchir à un plan. Le seul délai qu'elle obtint après une demi-heure de vociférations acharnées était le temps d'une sieste pour se reposer avant de prendre un navire volant pour Nara.
Elles quittaient donc Arkhess le temps d'une nouvelle nuit, le voyage intercontinental jusqu'en Adrastée ayant été particulièrement long. Enthousiaste, Lunera comptait capturer Garland V pour l'emmener de force à Arkhess. Là-bas, elle ferait tout son possible pour soutirer l'information cruciale qui déterminerait la suite de sa quête de soi.
De son côté, Solèna était tendue à l'extrême. Partir sans un minimum de préparation ne la ravissait guère. Elle n'avait cessé de rouspéter tout le temps du trajet, médisant de la promptitude indésirable de l'Ange d'Arkhess. La ministre eut encore l'impression d'entendre Lunera s'exclamer : « Non, Solèna ! C'est une chance unique que je ne dois pas laisser passer. »
— Peut-être que ce n'est qu'un malentendu, chuchota Solèna.
— Taisez-vous, persifla Lunera, impérieuse. Ce n'est pas un malentendu ! Vous allez voir. Dès qu'il arrive, on attend le moment opportun pour le prendre en filature et le capturer.
Ennuyée, la ministre métamorphosa un caillou qui se trouvait là en chaise avec dossier, ne supportant plus de rester sottement debout.
Une bonne heure passa sans que Garland V ne pointe le bout de son nez. Alors que Solèna s'apprêta à proposer un retour à Arkhess, Lunera se dressa aussi droitement que l'était la colonne de la place et invita sa conseillère à se rapprocher.
Au loin, à la lumière blafarde de la lune, un vieil homme au dos voûté et à la démarche lente presque hésitante s'approchait du centre de l'esplanade. Il gardait les mains derrière son dos et son visage ridé semblait pensif. Tout dans son allure faisait penser à un de ces vieux sages partisan de la méditation. Après avoir longuement traîné sa carcasse éreintée, l'homme s'arrêta devant l'obélisque.
Là, contre-toute attente, tel un félin, il fléchit ses genoux et bondit avec une vivacité sans égale vers la sommet de la construction. Il se réceptionna à un pied et inspira bruyamment, avant de s'asseoir en tailleur et de se mettre à apprécier pleinement l'air frais de la nuit.
Depuis leur poste d'observation, Lunera et Solèna demeuraient abasourdies. Qui aurait pu croire que ce vieillard soit capable d'une telle prouesse ? Lunera se tourna vers Solèna et lui lança un regard éloquent en ayant l'air de lui rétorquer : « Je vous l'avais bien dit ! », comme si le fait qu'il s'agisse de Garland V était une évidence.
Celle-ci se contenta de hausser les sourcils. Mais si elle devait être honnête avec elle-même, une telle démonstration indiquait que le vieil homme devait être hors du commun. Par son extrême vitalité dont la source était inconnue, on disait que derrière cette vieillesse traîtresse, Garland V conservait une jeunesse aussi resplendissante qu'un printemps fleuri.
Lunera continuait d'épier l'individu avec une telle intensité qu'elle n'en cillait même pas. Soudain, l'homme rouvrit ses yeux et les porta à l'endroit précis où étaient cachées la reine et sa ministre. Alarmée, Lunera se rabattit violemment vers l'arrière, en bousculant Solèna. Le coeur de la reine battait à toute allure, menaçant de briser ses côtes.
Il nous a repérées !
Elle en était certaine. Maudissant son inattention, elle invita Solèna à se tenir prête. Si Garland V était aussi effroyable qu'on le décrivait, Lunera comptait sur la main secourable de sa meilleure acolyte pour y venir à bout.
Lunera attendit de retrouver une respiration plus régulière pour oser jeter un nouveau coup d'oeil. Le vieil homme regardait ailleurs, l'air toujours aussi pensif. Mais Lunera avait beaucoup appris des mois qui s'étaient écoulés plus qu'en dix-sept ans d'existence. Côtoyer la noblesse d'Arkhess lui avait appris à décrypter les plus fins comportements. Elle ne se fierait pas à cette innocente illusion.
Alors, Lunera resta sur ses gardes, attendant le moment propice pour lui tendre un guet-apens. Si elle se précipitait ou agissait inconsciemment, elle risquerait de réveiller les habitants endormis et de rameuter une attention indésirable sur elle. Il fallait à tout prix qu'elle évite qu'on la reconnaisse, maintenant qu'elle était mondialement connue pour ses méfaits. Le pire qui pourrait lui arriver serait de perdre la trace de Garland V et que l'Adrastée apprenne son statut royal. Lunera frissonna rien qu'en y pensant.
— Lunera... siffla Solèna.
La jeune fille se concentra sur le moment présent et porta son regard vers le sommet de la stèle. Vide. Personne ne s'y tenait dessus. Au bord de l'apoplexie, Lunera se sentit nauséeuse et entreprit de le chercher du regard, craignant qu'il ne s'approche d'elles.
En fait, le vieillard s'éloignait. Il repartait d'où il était venu. Il avançait toujours lentement, avec difficulté, butant parfois sur les pavés discontinus de la place. Retenant leurs souffles, les deux femmes le suivaient silencieusement des yeux.
Soudain, il s'arrêta et tourna sa tête vers la maison où étaient abritées la reine et la ministre. Il les fixa cinq secondes avant de reprendre ensuite sa marche, d'un pas plus rapide, plus assuré.
Il sait !
La jeune reine resta interdite. Le comportement du vieillard était très étrange. Lunera eut l'impression qu'il l'invitait à la suivre.
J'en mettrais ma main à couper...
— Solèna, murmura-t-elle. Je vais suivre Garland V...
— Rien ne nous dit que c'est bien lui ! la coupa la ministre.
— Chut ! Il va à gauche et d'après la carte que vous avez réussi à dénicher, il se dirige vers une des sorties du village ! Il n'y a rien là-bas.
— À défaut d'une mission d'éclairage, remarqua Solèna d'un ton acerbe, comme vous n'avez pas voulu que l'on inspecte les lieux, je peux vous assurer que...
Mais Lunera ne sut jamais ce que sa ministre assurait car elle était déjà sortie de sa cachette. Elle fila sur les traces du vieil homme.
Agacée par tant d'impatience, Solèna la rejoignit discrètement et lui pria d'être extrêmement prudente. La reine se posta derrière un arbre au tronc massif et pencha sa tête, Solèna à ses talons. Garland V avait enjambé le muret qui délimitait le village de Nara et continuait sa marche rapide. Sa silhouette ne cessait de s'amincir jusqu'à devenir un point à peine visible. Lunera attendit qu'il disparaisse de son champ de vision pour sortir de sa cachette.
Les deux femmes remontèrent toute l'allée et sortirent du village à leur tour. La rue dallée se poursuivait par un sentier de terre battue sur lequel la reine évolua pendant quelques secondes avant de se réfugier à nouveau derrière un arbre. Le chemin bifurquait en deux : une voie principale, large, et une autre, si étroite qu'il fallait avancer en chaîne si on voulait l'emprunter à plusieurs.
— Solèna ! murmura-t-elle en pointant son index. Regardez !
La ministre suivit son doigt et vit l'homme qu'elles traquaient arriver devant une maisonnette en bois, à l'issue du passage exigu qui descendait le long d'une petite colline. Le sentier était lugubre et obscur, d'une pareille solennité qu'un temple. De nombreux arbres s'établissaient en une voûte de verdure tout le long du chemin et leurs branches épaisses occultaient la lumière.
L'homme arriva devant une clôture, tourna une clé dans la serrure et entra. Il ne referma même pas la barrière derrière lui. Il franchit ensuite les quelques mètres qui le séparait de son domicile, l'ouvrit et franchit le seuil de la porte. Cette dernière resta entrouverte et le vieillard disparut dans l'obscurité de l'humble demeure.
Solèna et Lunera échangèrent un regard, puis elles dévalèrent ensemble la pente, profitant de l'ombre austère des arbres pour ne pas être repérées. Elles s'arrêtèrent derrière deux chênes qui avaient poussés côte-à-côte l'un de l'autre. À hauteur d'homme, leurs troncs n'étaient séparés que de quelques centimètres. Une cachette idéale pour voir sans être vu.
— Maintenant, discutons un peu de notre stratégie, dit Solèna. Comptez-vous l'interroger ? Nous ne pouvons pas ignorer l'éventualité qu'il s'agisse d'un simple vieil homme.
Lunera ne l'écoutait pas et craquait déjà ses jointures.
— Le combat, ça me connait ! chuchota-t-elle avec ferveur.
— Majesté !
— Solèna, dit Lunera avec sérieux. C'est Garland V, j'en suis persuadée. Je vous ai tout racontée lorsque je l'ai connu, il y a quelques mois. Vous en connaissez, vous, des vieillards qui savent lancer des Sortilèges de la Mort à tout bout de champ ? Et puis, avouez qu'il ressemble à l'affiche de la Quête Éternelle.
Solèna acquiesça de mauvaise grâce.
— Je ne le sous-estimerai pas, c'est pour ça que j'ai pensé à un plan. Je suis bien contente que nous ne soyons pas dans l'enceinte du village. Nous pourrons nous en donner à coeur joie !
— J'ai peur, frissonna Solèna. Garland V se tient devant nous... Je-
— Pas d'inquiétude, mon amie ! Vous allez vous cacher ici et j'irai chez Garland. Regardez donc sa clôture et sa porte, il m'invite clairement à entrer ! Voyez-vous la grande fenêtre de l'étage ?
Solèna leva ses yeux vers le toit et vit en effet une surface de verre réfléchir la lumière de la lune.
— Je vais faire en sorte de propulser Garland V à l'aide d'un sortilège de mon cru. Au moment où vous verrez son corps tomber, vous aurez pour tâche de le ligoter et de le bâillonner.
— Ne pouvons-nous pas discuter, d'abord ? demanda Solèna, exaspérée par la rapidité à laquelle Lunera songeait au combat.
— Ah, parce que vous comptez embarquer Garland pour le châtier à Arkhess après lui avoir demandé la permission autour d'une tasse de thé et de biscuits au gingembre ? ironisa Lunera.
Solèna lui lança un regard assassin, avant de reporter son attention sur la porte en bois de la chaumière, toujours entrouverte.
— Dégainez votre lance, la conseilla Lunera en relevant. Je compte sur vous.
L'Ange d'Arkhess se noua les cheveux pour ne pas être gênée et sortit la Terreur Lunaire, offerte par Arkh. Il s'agissait d'un présent extrêmement précieux pour elle, si bien qu'elle s'était délestée de sa fidèle Lame Jahanama. Celle-ci reposait désormais dans un coffre au sein de ses appartements.
Lunera s'apprêta à sortir de sa cachette, lorsqu'elle entendit un craquement. Parmi les bruits de la nature, ce son avait quelque chose d'étrange et d'inquiétant. Une présence humaine ? La reine se retourna, méfiante, tandis que Solèna levait sa lance.
— Faites attention à vous, murmura Lunera. Les lieux ne semblent pas sûrs.
Elle dévala ce qui restait du sentier et arriva devant la cloison en bois. Lunera se glissa à travers l'ouverture, en veillant à faire le moins de bruit possible. À peine la franchit-elle qu'une subite bourrasque se leva et fit claquer la barrière avec force. Le cadenas rouillé heurta la chevillette de fer dans un grand fracas métallique. La pauvre jeune fille sentit ses cheveux se dresser d'effroi sur sa tête.
Ce vent est magique, sans aucun doute...
Lunera resta immobile pendant une minute entière, des sueurs froides au dos, attendant que le ciel ne lui tombe sur la tête. Sa respiration se faisant moins chaotique, Lunera déglutit et se fit violence pour faire un pas en avant.
Elle traversa lentement le jardin, monta les deux marches du perron et se campa devant la porte. Elle leva son épée de sorte à ce qu'elle puisse riposter rapidement en cas d'attaque et donna un coup de pied sec sur le cadre en bois, qui s'ouvrit entièrement avec un grincement sinistre.
La jeune fille ne voyait pas plus loin que le bout de son nez. D'insondables ténèbres cachaient l'intérieur de la maison. Une sensation funeste lui tordait le ventre, tant elle appréhendait l'inconnu.
Garland V... Que caches-tu ?
Ayant conscience de se jeter volontairement dans la gueule du loup, Lunera rassembla tout son courage et franchit le seuil en murmurant un Sortilège de Lumière Mineur. Une petite sphère fleurit dans l'air et se mit à irradier d'une douce lumière. Lunera orienta le faisceau de sorte à ce qu'il s'élargisse pour bien éclairer l'espace devant elle.
Elle fit quelques pas timides en avant, le regard incapable de rester fixe plus d'une seconde. Le vestibule se poursuivait par un petit couloir, avant de s'ouvrir sur un salon. Elle entendit alors un crissement régulier, comme si quelqu'un montait des marches. D'un geste de main, Lunera propulsa sa lumière vers le salon et vit un escalier qui naissait juste en face de l'entrée, longeant le mur jusqu'à atteindre le premier étage. Une lueur orangée, vacillante, semblable à celle d'une chandelle s'éloignait au fur et à mesure qu'une silhouette gravissait les marches, jusqu'à disparaître en haut.
Lunera inspecta brièvement le salon. Un véritable désordre troublait les lieux. Les divans avaient été repoussés, dont un était même renversé. Un tapis était jeté nonchalamment sur les fauteuils. Elle jeta un coup d'oeil au sol et remarqua des traces sur le parquet semblables à de grandes balafres. Perplexe, elle déporta sa sphère lumineuse vers le sol et constata avec surprise que ce qu'elle avait pris pour des rayures de meubles était en réalité un grand dessin circulaire ornementé de divers symboles. La respiration de la reine se bloqua soudainement, comme si elle manquait d'air.
— Mais, s'écria-t-elle épouvantée, c'est un Cercle d'Uraera !
— Rien ne t'échappe, décidément, murmura une voix chevrotante derrière elle.
Poussant un hurlement à glacer le sang, Lunera fit volte-face l'épée levée. Lunera sentit sa tension monter, tant cette subite apparition lui fit peur. Sur le seuil de l'entrée, une silhouette haute se tenait, droite comme un piquet, n'évoquant nullement un vieillard au dos voûté. Garland V avait ôté son masque.
Il fit un pas en avant, et la porte claqua brusquement sans qu'il ne fisse le moindre geste pour la refermer. D'innombrables candélabres surplombés de cierges s'allumèrent, devant et derrière eux, et Lunera put enfin détailler son visage.
Ses traits, comme taillés à la serpe, reflétaient un âge extrêmement avancé bien que Garland V conservait encore une fière allure et une belle énergie. Son oeil jaune la lorgnait comme un bout de viande contrastant avec son oeil de verre, inexpressif. Son cou décharné à la peau laiteuse était traversé par des veines si saillantes, que l'on aurait dit des cordons bleuâtres.
L'affiche de la Quête Éternelle était vraiment très fidèle.
— Comment... Je... Vous étiez pourtant en haut ! balbutia Lunera.
— Il ne faut jamais se fier aux apparences, ma chère amie. Ce n'est qu'une marionnette, animée par mes soins. Je te souhaite d'ailleurs la bienvenue chez moi, dit-il en mimant une courbette polie.
Il fit un pas vers elle et Lunera en fit un derrière.
— Tu te demandes sûrement comment j'ai fait pour te repérer, n'est-ce pas ? Je savais que tu comptais revenir un jour à Nara pour me faire payer l'affront de l'autre fois. Tu n'es pas le genre de personne qui supporte de voir son honneur être trainé dans la boue... Quand bien même, encore une fois, il me suffirait de te donner une autre correction pour t'apprendre à respecter les pauvres vieillards comme moi.
Lunera émit un reniflement dédaigneux.
Il se méprend complètement, le pauvre bougre.
— J'étais très discrète pourtant, marmonna-t-elle.
— Pouah ! s'esclaffa-t-il. Tu es bien la personne la moins discrète qui soit ! Tu n'ignores sans doute pas que les effluves harmonieuses du Coeur Arkhale se meuvent dans les airs selon un flux déterminé... Hélas pour toi, les Sorcières Hératerra perturbent ces effluves... Encore plus quand elles sont éveillées !
— Vous êtes perspicace, dites donc... marmonna-t-elle, la gorge sèche, pour gagner du temps.
Il fit un autre pas en avant et Lunera recula.
— Trêves de bavardages, ma chère amie... Je radote beaucoup, tu m'en excuseras. Un vieil homme comme moi n'a pas beaucoup de compagnie...
Il fit un autre pas, et Lunera en recula de trois.
— J'irai droit au but. Je t'accorde l'immense honneur de m'aider à prolonger ma vie... au moyen du Cercle d'Uraera sous tes pieds !
Un Rituel !?
Lunera n'eut pas le temps de réfléchir davantage car un éclat de lumière arriva à sa hauteur. Elle esquiva de justesse et la magie pure déployée heurta le mur de plein de fouet, créant ainsi une grande brèche.
— Explodor Maxima ! Explodor Maxima ! riposta Lunera.
— Hurler ne te servira à rien !
Garland neutralisait ses maléfices avec une facilité déconcertante. Lunera maintenait durement son sang-froid. Elle savait cet adversaire puissant et elle n'avait encore jamais mené de combat dans un endroit aussi étroit avec aussi peu de visibilité.
C'est ce qu'il me faut, de la visibilité !
Lunera joignit alors ses mains, songea à une explosion sidérale et la Terreur Lunaire se baigna d'une intense lumière. Elle déploya un Sortilège de Lumière Majeur d'une puissance remarquable que son ennemi ne parvint pas à repousser totalement. Momentanément aveuglé par cette clarté destructrice, Garland fut soufflé vers le buffet derrière lui qui se brisa en deux sous le choc.
Lunera profita de son immobilisation momentanée pour avancer vers les escaliers, elle devait à tout prix l'attirer en haut pour que Solèna prenne le relais. Mais Garland V s'était déjà relevé et les affres de la colère distordait son visage encore plus qu'il ne l'était.
À hauteur de la première marche, Lunera fit léviter les trois divans, qu'elle lança sans cérémonie vers l'ancien roi. Celui-ci, peu soucieux de son mobilier, les brisa un par un d'un coup de poing colossal. Poussant un soupir rageur, Lunera monta les marches quatre à quatre.
La jeune reine enjamba le corps de la marionnette magique de Garland qui l'avait piégée, et une fois au sommet des marches, elle jeta le feu à l'escalier.
— Tu ne m'échapperas pas ! l'entendit-elle crier avec hargne.
Lunera eut juste le temps de rejoindre la grande fenêtre, que Garland V la rejoignit en deux sauts. Il tenait une simple canne de mage, recouverte de bandages blancs. Il se mit alors à l'attaquer physiquement, donnant des coups de bâton vicieux et traîtres.
Il se bat admirablement bien !
Lunera se défendait plus que n'attaquait et faisait en sorte de reculer suffisamment pour attirer son adversaire juste à côté de la fenêtre. Une fumée noire et âcre commençait à s'amonceler autour d'eux, contribuant à irriter la gorge de Lunera, déjà malmenée par ses précédents hurlements. Quant à Garland, il semblait en être complètement indifférent.
— Gravija !
Une lueur violette enveloppa Lunera comme une pelisse ténébreuse.
Encore un peu... Encore un peu... Voilà !
Là, elle s'agrippa à la rambarde et sauta vers le rez-de-chaussée. Son charme d'anti-gravité s'activa et la maintint en l'air. Elle se mit à hauteur du vieil homme et hurla :
— Explodor Maxima !
Le sortilège fit exploser la vitre dans un grand fracas de verre, propulsant débris et éclats vers le jardin. Mais Garland esquiva juste à temps la déflagration avant de bondir et d'agripper le col de la cape de la reine.
— Veneficium Desinit ! rugit-il
L'enchantement qui effaçait toute influence de la gravité s'éteignit. D'une force insoupçonnée, Garland V ramena Lunera à lui et la jeta par la fenêtre. Il la laissa s'écraser par terre avant de sauter à son tour pour la rejoindre, prêt à en finir une bonne fois pour toutes.
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