❦ Petite Tendresse. ❦
Obito pensait que jamais il ne s'était autant ennuyé dans sa vie. Comme chaque année, les Uchiha avait organisé un grand repas pour réunir toute la famille. Heureusement, l'oncle Madara était suffisamment riche pour posséder une énorme maison et tous les accueillir. Puisqu'il était le seul, il ne pouvait pas refuser, surtout lorsque Grand-Mère, la matriarche, lui forçait la main.
À côté de lui, ses trois petits cousins Itachi, Shisui et Sasuke parlaient de jeux vidéos. De l'autre côté, les adultes discutaient encore de politique. C'était absolument normal en soit, sauf qu'Obito était entre les deux et s'ennuyait à mourir.
À vingt ans à peine, les sujets de discutions de ses cousins étaient trop enfantins et ceux des adultes trop... Adultes. Pris entre les deux, il ne s'y retrouvait pas. Évidemment, aucun de ses amis ne répondaient aux messages qu'il envoyait depuis son téléphone portable caché sous la table. De même, il connaissait déjà par cœur son fil d'actualités Facebook. Il n'avait juste rien à faire, à part écouter des choses qui ne l'intéressaient guère.
Agacé, il sortit prendre l'air dans le jardin. Il faisait encore bon et le ciel dégagé offrait un magnifique spectacle. Il s'assit sur l'une des chaises longues près de la piscine et profita du silence. C'était bien plus agréable qu'à l'intérieur, à attendre pendant des heures. Penser à la soirée étudiante qu'il était en train de rater juste pour ça le démoralisait davantage.
Le grincement de la porte fenêtre lui fit tourner la tête dans sa direction. C'était Grand-Mère qui l'approchait à petits pas en s'appuyant sur sa vieille canne. Elle lui sourit et il ne put que le lui rendre.
- Ne voudrais-tu pas changer de canne ? Lui demanda-t-il alors qu'elle s'asseyait sur l'autre transat. Je pourrais te l'offrir pour ton anniversaire.
- Surtout pas. C'est mon mari qui me l'a offerte il y a longtemps, c'est la seule que j'ai et j'y tiens. Je jure que l'on m'enterrera avec !
Le brun haussa seulement les épaules avec amusement. Il n'avait jamais connu le mari de la matriarche Uchiha mais il respectait quand même le choix. Pour lui, elle était aussi précieuse que sa véritable grand-mère, décédée il y a quelques années déjà. La vieille femme et elle étaient en fait sœurs mais toute la famille s'était habituée à l'appeler Grand-Mère, si bien que même les habitants de son quartier et les commençants utilisaient ce surnom de façon naturelle.
- Tu ne sembles plus apprécier nos repas, fit-elle remarquer.
- Ce n'est pas ça... Soupira-t-il. C'est toujours agréable de passer des moments en famille. C'est juste que je m'ennuie. J'ai l'impression qu'aucune conversation ne m'intéresse.
- Tu sais, Madara était exactement comme toi quand il avait ton âge.
Obito était surpris. Son oncle était de nature calme et réservée mais semblait à l'aise avec les conversations. C'était certainement dû au fait qu'il était un adule maintenant. Penser qu'il deviendrait aussi ennuyeux qu'eux d'ici quelques années lui assombrit le moral. Il l'aimait bien malgré son air rabougri.
- Tu veux dire que ces sujets vont m'intéresser un jour ? Demanda-t-il avec un air misérable sur le visage qui fit rire la vieillarde.
- Peut-être mais je ne parlais pas de ça. Tu étais peut-être encore jeune pour t'en rendre compte mais Madara restait toujours seul, cloîtré dans son coin, avant de rencontrer Hashirama. Comme toi, il n'avait personne de son âge avec qui parler.
Naturellement, Obito regarda le couple à travers la baie vitrée. Les deux hommes passaient leur temps ensemble, il était presque impossible de les séparer longtemps. Ce n'était pas leur intention mais ils étaient devenus le couple modèle de la famille. Enfin, si on oubliait leur homosexualité. Fugaku serait envoyé d'emblée à l'hospice si aucun de ses garçons ne lui donnait de petits enfants.
- Depuis qu'il nous l'a présenté, continua-t-elle, Hashirama vient à chacun de nos repas et Madara s'est considérablement adouci, au point d'échanger avec nous à table plutôt que de s'échapper par ennui.
Obito hocha la tête, surpris que l'homme borné change aussi facilement de comportement pour un homme. Tranquillement, ils continuèrent de parler, déviant sur d'autres sujets. Grand-Mère ne s'attendait pas à ce qu'il n'ait pas encore de petite amie et était heureuse qu'il ait réussi ses examens de fin d'année haut la main.
Enfant, il n'avait jamais été bon à l'école. Il révisait ses leçons mais c'était comme si son cerveau ne voulait rien emmagasiner. Heureusement, grâce à un stage, il avait trouvé sa voie et depuis qu'il avait cette nouvelle motivation, tout se passait très bien. Ses parents avaient même eu du mal à croire en ses notes et l'avaient accusé de jouer la comédie ou de truquer ses bulletins.
- Grand-Mère, Obit, le dessert est servi ! Les appela d'ailleurs sa mère depuis la porte-fenêtre.
Le brun lui fit signe et se leva. S'il y avait bien quelque chose qu'il aimait dans ces réunions de famille, c'était le dessert, fait par un excellent pâtissier et dont il n'en restait jamais, contrairement au plat. Il aida la vieille femme à se mettre debout à son tour et s'élança vers la maison quand il se sentit partir sur le côté. La suite était une succession d'images floues dans son esprit.
Il avait marché sur l'une des balles avec lesquelles Sasuke avait joué en début de soirée et avait fini dans la piscine avec une vive douleur au crâne. Il se débattait pour rejoindre la surface mais il était perdu sous l'eau, incapable de trouver la surface. Heureusement, deux paires de mains fortes l'agrippèrent et le tirèrent à l'air libre.
Il respirait fortement pour retrouver son souffle mais le battement à la tête ne diminuait pas. Il voulait y porter une main pour frotter et apaiser la douleur mais on l'en empêchait. Quand il ouvrit enfin les yeux, il fusilla Madara du regard.
- Lâche moi.
- Non, dit l'homme tranquillement, pas tant que tu essayeras d'y toucher.
Obito ne comprenait pas mais ne pouvait rien faire d'autre que d'attendre que lui et Hashirama le libèrent. Il entendait ses tantes dire aux enfants de rester à l'intérieur mais personne autour ne daignait lui dire ce qu'il se passait. Agacé au plus haut point, il décida de les harceler.
- Maintenant, j'aimerais qu'on me dise pourquoi je ne dois pas me lever ni bouger !
Il n'était habituellement pas si rude mais il supportait de moins en moins les battements dans son crâne. Le silence dura encore quelques secondes avant que Madara ne lui réponde.
- Tu es tombé, idiot.
Obito attendit la suite, qui ne vint jamais.
- Merci, ça, je l'avais remarqué, dit-il d'un ton sarcastique.
- Tu saignes de la tête, intervint Grand-Mère, alors il est plus sage que tu restes immobilisé jusqu'à l'arrivée du SAMU.
- Quoi ? Vraiment ? Je saigne beaucoup ? Tu crois que c'est grave ? Je suis sûr que vous n'aviez pas besoin d'appeler les secours...
- Voilà pourquoi on ne voulait rien lui dire, chuchota Madara vers Hashirama, il part toujours dans les quarts de tours...
- Je t'entends, claqua le jeune homme au sol.
- Eh bien au moins, son audition va très bien !
Obito le fusilla du regard mais ne dit rien de plus. Il avait toujours cette manie de se disputer gentiment avec son oncle. Ses cousins ne comprenaient pas comment il pouvait avoir le courage de l'embêter. Avec la la moue que l'homme arborait tout le temps, il faisait peur à tout le monde.
Lui, cependant, n'avait aucun problème avec ça et allait parfois même jusqu'à le provoquer. C'était un jeu qui s'était installé entre eux au début de son adolescence. Depuis, ils se chamaillaient souvent.
Quelques personnes restèrent avec lui tandis que les autres rentraient pour leur laisser de l'espace et terminer leur dessert. Il n'était pas nécessaire que tout le monde attende autour de lui, disait Grand-Mère, elle-même assise sur le transat de tout à l'heure.
Le vent frais le fit frissonner dans ses vêtements trempés. Quelqu'un avait proposé de le déshabiller pour le sécher mais la matriarche leur avait ordonné de ne pas le toucher jusqu'à ce que le SAMU arrive. C'était intelligent puisqu'il saignait de la tête mais, mince, Obito avait froid et il commençait à vraiment s'ennuyer ! Sans compter qu'il détestait de tous les voir avec un air désolé et une gentillesse qui sonnait faux. Il avait mal, certes, mais il n'était pas aux portes de la mort !
Au moment même où il soupira, les lumières bleues clignotantes apparaissèrent sur la route. Fugaku entraîna le conducteur jusque dans la cour, au plus proche du blessé. Le jeune homme grognait alors que ses parents lui chuchotaient qu'il serait entre de bonnes mains. Sa mauvaise humeur ne faisait que croître depuis tout à l'heure mais personne ne semblait s'en rendait compte.
Il allait leur demander de le laisser tranquille quand ses yeux se posèrent sur le premier homme sortit du camion. Ensuite, plus rien n'existait. Dans son uniforme sombre, il était beau et charismatique, imposant le respect. Dans un uniforme militaire, l'effet serait très certainement décuplé.
L'ambulancier n'avait pas l'air d'être beaucoup plus âgé que lui et son doux sourire, qui allait parfaitement avec sa gueule d'ange, l'envoûtait déjà. Ses cheveux gris peu communs pour quelqu'un d'aussi jeune lui donnaient un air mystique. Ses lèvres, raffinées, bougeaient mais il n'entendit rien du tout.
Enfin, quand ses yeux sombres et profonds rencontrèrent les siens, Obito se sentit défaillir.
- Oh. My. Godness !
Le brun se figea immédiatement.
- Ne me dites pas que je l'ai dit à voix haute, gémit-il pitoyablement.
- Si, répondit Grand-Mère du tac-o-tac, mais j'ai eu la même réaction de toute façon.
L'homme complimenté riait doucement en secouant la tête alors qu'Obito espérait que le sol s'ouvre pour l'engloutir tant il avait honte. Tout ce qu'il voulait était que la nuit passe vite et que l'ambulancier parte, même s'il était un vrai plaisir pour les yeux.
Derrière, il entendait les autres rire. Ses joues étaient rouges de gêne, il n'osait plus regarder personne.
- Alors dites-moi, comment est-ce arrivé ? Demanda le médecin en se penchant sur lui pour observer la plaie.
Mamie commença les explications. Ils étaient trop proches pour qu'Obito capte son regard mais les effluves de son parfum et de son odeur corporelle lui chatouillaient le nez. C'était doux et le déodorant semblait frais, comme s'il venait de prendre son service.
Suite à l'observation détaillée de la blessure, le jeune homme aux cheveux clairs lui colla des pansements sur la tête et lui fit passer plusieurs tests rapides pour évaluer son état. Il était parfaitement sérieux et professionnel mais son visage restait doux, seulement tendu par la concentration. Honnêtement, Obito effectuait ces petits exercices sans vraiment y porter attention. Il était trop occupé à graver son visage dans sa mémoire.
- Tout à l'air normal, dit-il enfin en s'éloignant pour ranger son matériel, on va aller à l'hôpital pour vérifier qu'il n'y ait pas de dommage interne mais d'après ce que j'ai vu, ça devrait aller.
Le sourire apaisant qu'il lui envoya détendit légèrement Obito, qui détestait aller à l'hôpital. Ce type avait un don pour calmer les gens. Il l'imaginait bien devant un enfant blessé qui appellerait sa mère à l'aide.
- On va vous aider à monter dans le camion, à vous déshabiller pour vous maintenir au chaud sous la couverture et on pourra y aller.
- Attendez, le brun sortit de sa torpeur, se réveillant soudainement, comment ça, me déshabiller ?
- Eh bien, il faut retirer vos vêtements trempés, n'est-ce pas ? Je vous promets que je ne vous jugerai pas, vous serez bien mieux sous une couverture, au chaud.
Le mec souriait. Sa grand-mère ricanait et sa mère, un peu soulagée, riait doucement. Quant aux hommes, ils se moquaient ouvertement de lui. Il n'avait pas eu aussi honte depuis des années.
- Ce n'est vraiment pas nécessaire, essaya-t-il de se détendre alors qu'un autre ambulancier essayait déjà de le débarrasser de sa chemise.
- Vous n'êtes pas le premier que nous déshabillons et vous ne serez pas le dernier. S'il vous plaît, je ne tiens vraiment pas à ce que vous tombiez malade, le raisonna le bel homme.
Après plusieurs essais, de nombreux encouragements et beaucoup de patience, Obito était enfin dans l'ambulance, en route pour l'hôpital.
Assis près de lui, Kakashi, l'homme qui s'était finalement présenté pour le calmer et lui retirer son pantalon, écrivait tranquillement dans un dossier. Le silence entre eux était apaisant, gardant sa migraine sous contrôle. S'exciter pour garder ses habits sur lui avait provoqué une forte montée de sang à la tête, aggravant la douleur.
- On va bientôt arriver, l'informa l'homme en laissant le dossier de côté, une équipe de médecins nous attend déjà. Dès qu'on arrive, vous filerez directement en salle d'examen.
- Est-ce que... Obito se racla la gorge. Est-ce que je vous verrai ensuite ?
L'autre fut légèrement surpris mais acquiesça. Les gens lui posaient certainement la question régulièrement pour se rassurer. L'hôpital n'était pas un endroit accueillant à cause des malades et des blessés, voire de la mort, alors y rester seul en attendant ses résultats d'examens était totalement angoissant.
Comme promis, la prise en charge fut rapide à leur arrivée et Obito subit tous les examens sans un mot. Il y eut beaucoup d'attente, que ce soit entre deux batteries de tests ou avant de recevoir le verdict. Comme ils l'avaient drogué pour atténuer la douleur à la tête, il ne s'en rendait pas vraiment compte.
Kakashi le rejoignait dès qu'une infirmière abandonnait son lit dans un couloir, une salle d'attente ou une chambre. Il faisait un très bon travail pour le divertir. Il n'avait pas besoin d'être en pleine capacité de ses moyens pour comprendre que l'homme ne vivait que pour ça : aider les gens. Tant de générosité lui redonnait du baume au cœur.
Pour la plus grande partie de la nuit, Obito était incapable de se souvenir de quoi que ce soit. Kakashi souriait souvent, donc il ne l'ennuyait peut-être pas, sauf s'il était extrêmement poli et qu'il ne voulait pas le froisser.
Quand les médecins décidèrent enfin de le lâcher, il faisait déjà jour et Obito se sentait fatigué et étrange avec les effets de la drogue qui diminuaient. Il préférait cela. L'ambulancier lui tendit ses vêtements parfaitement pliés et secs avant de le saluer une dernière fois et de laisser place à sa mère, qui venait seulement d'arriver.
- Tu vas devoir suivre les règles des médecins à la lettre, le réprimandait-elle déjà.
Le brun, lui, pensait surtout au moment agréable passé en compagnie de Kakashi et à son lit qui l'attendait à la maison. Il luttait pour ne pas s'endormir dans la voiture. Le lit de l'hôpital dans lequel il avait été allongé des heures était assez tentant pour lui faire regretter de l'avoir abandonné.
Une fois à la maison, il fila dans sa chambre sans se regarder dans un miroir. Une bande stérile protégeait les points de suture frais à l'arrière de la tête. Il valait mieux qu'il ne dorme pas sur le dos : il ne retournerait pas à l'hôpital, même si le personnel avait été très gentil. Sauf si c'était ce Kakashi qui venait le chercher à nouveau.
Il glissa la main dans ses poches de pantalon en se déshabillant pour s'assurer qu'elles étaient vides avant de le mettre à laver. Il fronça les sourcils en sentant un petit bout de papier lui caresser la pulpe des doigts. Il ne se souvenait pas d'y avoir cafouillé de la soirée.
Curieux, il le sortit, le déplia et vérifia ce que c'était avant de se figer. Kakashi lui avait laissé son numéro de téléphone ainsi qu'une phrase rédigée avec une jolie écriture.
"Tu es vraiment une personne drôle et intéressante. Je ne sais pas si l'on se mariera le mois prochain comme tu le désires mais rien ne nous empêche d'essayer."
Un petit smiley borgne terminait la phrase.
Obito ne savait pas quelle réaction prenait le dessus sur l'autre. D'un côté, il était aussi excité qu'un chien devant une friandise à l'idée de pouvoir revoir le bel homme mais, en même temps, quelque chose n'allait pas.
Qu'avait-il pu dire cette nuit !?
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