Derek et Scott vidèrent leurs sacs de glace dans la baignoire en fer que Deaton avait entreposée au milieu de sa salle d'auscultation. Je me rongeais les ongles en les regardant faire. Sans même toucher l'élément qui était le mien, je ressentais sa température. Cette eau était froide, très froide. Du coin de l'œil, je vis Alan Deaton parler à Isaac. Tout comme moi, le jeune loup ne semblait pas dans son assiette et c'était compréhensible.

Quand Scott, Stiles, Isaac et moi nous étions rendus chez le vétérinaire afin de trouver une solution, il avait proposé une sorte d'hypnose par refroidissement pour qu'Isaac accède à son subconscient et nous livre de précieuses informations. Derek nous avait rejoint quelques minutes après et ils s'étaient empressés de préparer le nécessaire.

- Tu seras partiellement transformé, ce qui nous permettra d'accéder à ton subconscient, expliqua Deaton à Isaac.

Le jeune Lahey s'accroupit près du bassin. Je le rejoignis et posai une main qui se voulait réconfortante sur son épaule.

Isaac posa sa propre main par-dessus la mienne dans un soupir.

- Il faut que ses battements de cœur soient lents comment ? demanda Scott.

- Très très lents.

- Oui mais quand vous dites très très lents, ça veut dire lents comment ? insista Derek.

- Proche de la mort.

- Pardon ? m'écriai-je.

Isaac posa la main dans l'eau et la retira aussitôt, comme brûlé.

- Hors de question que tu plonges là-dedans Isaac ! ajoutai-je.

- Hé, ça va aller, dit le frisé en se relevant.

Il me serra contre son torse puissant. J'aperçus Stiles détourner le visage, un rictus sur les lèvres. Derek nous fixa d'un œil surpris tandis que Scott souriait.

- Je dois le faire Alexia, il faut retrouver Boyd et Erica.

J'acquiesçai à contrecœur et Isaac se tourna vers Deaton.

- Rassurez-moi ça risque rien si...

- Tu veux que je te réponde sincèrement ?

- Non, non merci ça ira.

Un bruit de latex retentit, tout le monde se tourna vers le jeune Stilinski qui avait enfilé un gant blanc jusqu'à son coude.

- Bah quoi encore ?

Je grognai, c'était bien le moment de faire le mariole. Agacé, Stiles enleva le gant et le jeta plus loin. Isaac souffla.

- Ecoute si tu te sens pas, personne te force à le faire.

- Isaac, s'il te plaît, murmurai-je.

Pour toute réponse, l'adolescent enleva son t-shirt et me le tendit. Je le serrai contre moi tandis qu'il entrait dans la baignoire pour s'y asseoir complètement. Isaac expira longuement pour supporter la température, j'hésitai plusieurs fois à réchauffer l'eau d'un simple coup de main, mais je me ravisai. Derek et Scott se placèrent de chaque côté du jeune loup et le plongèrent dans l'eau glacée.

Sa tête ressortit quelques secondes après, des crocs acérés à la place des dents et les yeux flamboyants.

- Remettez-le sous l'eau, ordonna Deaton.

N'en pouvant plus, je plongeai la main dans l'eau. Les glaçons qui entouraient mon poignet se mirent à fondre.

- Alexia ! s'exclama Deaton.

Stiles fut plus rapide que lui. Il me fit reculer et me coinça contre lui quand je commençai à me débattre. Etre si proche de Stiles me faisait l'effet de milliards d'aiguilles que l'on me plantait dans la peau.

Si je l'avais voulu, je me serais débarrassée de lui, mais je savais au fond de moi que cette opération était nécessaire pour retrouver les membres de la meute de Derek. Une larme roula sur ma joue et, malgré notre relation, je nichai mon nez dans le col de Stiles, la main toujours refermée sur le t-shirt d'Isaac.

- Attention, tenez-le bien.

- Oui, on essaie, fit remarquer Derek.

Isaac se débattit comme un diable pendant de longues minutes puis finalement, il tomba dans l'inconscience.

- Surtout souvenez-vous : je dois être le seul à lui parler. S'il entend d'autres voix, il sera troublé et sortira de l'hypnose.

Je m'éloignai soudain de Stiles pour m'accroupir près de la tête d'Isaac. Crispée, je laissai Deaton menait son enquête dans les tréfonds de la mémoire de mon petit ami.

- Isaac, est-ce que tu m'entends ?

- Oui, je vous entends.

- C'est le docteur Deaton, j'aurais quelques questions à te poser. Est-ce que tu me le permets ?

- Oui.

- Je veux que tu me parles de la nuit où tu as trouvé Erica et Boyd et je veux que tu me racontes ce que tu as vu aussi précisément que possible. Comme si tu y retournais.

- Non, je veux pas le faire, non je veux pas.

Le frisé s'agita doucement, il semblait terrifié à l'idée de retourner dans cet endroit, quel qu'il soit.

- Isaac tout va bien, détends-toi. Tu ne risques rien. Ce ne sont que des souvenirs, un souvenir ne peut pas te faire de mal.

- Je veux pas faire ça, répéta-t-il.

- Tout va bien, détends-toi. Voilà, bien... Maintenant nous allons revenir à cette nuit-là. Souviens-toi de l'endroit où tu as trouvé Erica et Boyd. Est-ce que tu peux me décrire ce que tu vois ? Où es-tu ? Est-ce que tu vois un bâtiment ? Une maison ?

- Non, c'est pas une maison. Ça ressemble à... on dirait de la pierre. Du marbre je crois.

- C'est parfait, tu peux continuer à me décrire ce que tu vois ?

- C'est vide et c'est poussiéreux.

- Un bâtiment désaffecté ? Isaac ?

Le loup-garou recommença à s'agiter. Il attrapa le bras de Scott et gémit :

- Y a quelqu'un, je suis pas tout seul. Y a quelqu'un !

- Isaac, tout va bien, détends-toi.

- Non, ils sont là, ils me voient !

Je jetai un regard larmoyant au vétérinaire qui ne se laissa pas démonter. Voir Isaac dans cet état-là me brisait le cœur. S'il lui arrivait quelque chose, Deaton aurait du souci à se faire.

- Ce ne sont que des souvenirs, rien de plus. Des souvenirs ça ne peut pas faire de mal, détends-toi.

Les paroles du vétérinaire semblèrent faire effet puisque Isaac se calma.

- C'est bien, maintenant dis-nous ce que tu vois, tout ce que tu vois.

Soudain, lentement, les yeux du frisé s'ouvrirent.

- Je l'entends. Il parle de la pleine lune parce qu'il a peur, peur d'être incontrôlable quand la pleine lune sera là.

- Est-ce qu'il parle à Erica ?

- Je crois, j'en sais rien. J'arrive pas à la discerner. Aucun des deux. J'arrive pas à les voir.

- Tu entends autre chose, qu'est-ce qu'il se disent ?

- Ils sont très inquiets. Ils ont peur de ce qui pourrait se passer à la pleine lune. Ils ont peur de devenir une menace l'un pour l'autre.

- S'ils les ont enfermés ensemble pendant la pleine lune, ils vont s'entretuer, comprit Derek.

- Isaac, on n'a plus une minute à perdre. Il faut qu'on les trouve, tu m'entends ? Est-ce que tu les vois ? Dans quel genre de pièce sont-ils enfermés ? Est-ce qu'il y a un indice n'importe lequel ? Un numéro sur une porte, un symbole ?

Le jeune Lahey se redressa d'un coup, faisant sursauter tout le monde. Assis dans la baignoire, il chuchota :

- Ils sont là. Ils sont là, il sont là.

- Tout va bien.

- Non, ils sont là.

- Dis nous où tu es.

- Ils me voient, ils m'ont trouvé.

- Faites quelque chose, criai-je. Il va faire une attaque !

- Ils sont là, c'est eux.

- Ça marche pas, dit Derek. Isaac dis-moi où tu es.

- Je les vois pas, il fait trop sombre.

Derek demanda une nouvelle fois à son Bêta où il était tandis que Deaton assurait que deux voix plutôt qu'une allaient le perturber.

- Derek, réveille-le ! ordonnai-je, mes yeux commençant à changer de couleur.

- Son pouls est trop rapide, il va entrer en état de choc. 

- Derek ça suffit lâche-le.

- Dis-moi où tu es, qu'est-ce que tu as vu ?

Je plongeai alors ma main dans le bain glacé, les glaçons se mirent à fondre un par un. L'Alpha tenta de me repousser, mais j'arrivais toujours à replonger la main, l'eau se réchauffait considérablement.

- C'est quoi ton problème ? grogna Derek.

- Il va mourir !

- Ils sont dans une banque, dans une salle des coffres, poursuivit Isaac.

Presque tous les glaçons étaient maintenant fondus. Isaac dit encore autre chose et je m'écartai, la main plaquée sur ma bouche. Isaac sortit alors de sa transe et se redressa dans la baignoire.

- Ça y est j'ai vu le nom de la banque.

Le frisé sortit de la baignoire avec l'aide de Scott et Deaton l'entoura d'une serviette. Je le rejoignis, au bord des larmes, et frictionnai ses bras.

- C'est la Première Banque Nationale de Beacon Hills, dit-il tandis que je repoussais une mèche de cheveux de devant ses yeux. Mais elle est désaffectée. Erica et Boyd sont enfermés dans la salle des coffres.

Le silence se fit. Isaac regarda chaque visage, interloqué.

- Quoi ?

Je posai ma tête sur l'épaule du jeune homme, désemparée. Isaac me jeta un regard empli d'incompréhension avant de se tourner vers Stiles.

- Tu te souviens pas de ce que t'as dit juste avant de sortir de l'hypnose ? demanda celui-ci.

- Non.

- Euh, t'as dit qu'après t'avoir capturé, ils t'ont emmené dans une pièce sombre et que y avait un corps à l'intérieur.

- Le corps de qui ?

Refoulant un sanglot, je passai mes bras autour du cou d'Isaac tandis que Stiles énonçait le nom du cadavre.

- Erica. T'as dit que c'était Erica.