- Scott ? Y a quelque chose qui va pas.

J'entrai dans la chambre de mon meilleur ami, la mine inquiète. Scott faisait des tractions tout en lisant un livre. En d'autres circonstances, j'aurais souris et je l'aurais félicité. En plus d'avoir pris goût pour la lecture, les notes du Loup-Garou s'étaient nettement améliorées durant les deux derniers mois de cours qu'il avait eu. Certes, Allison avait été absente, mais j'aimais me dire que c'était grâce à moi que Scott avait remonté sa moyenne. Après tout, j'avais été sur son dos pendant deux longs mois, à le suriner pour qu'il s'améliore.

- Qu'est-ce qu'il y a Lexi ?

Je revins à la réalité et tapotai machinalement sur le clavier de mon téléphone.

- Isaac ne répond à aucun de mes textos. C'est pas normal.

- Il est peut-être occupé. Je sais que vous êtes proches, mais il a peut-être d'autres choses à faire.

- Ouais, t'as peut-être raison. Bon, dépêches-toi, on va être en retard au bahut.

Isaac et moi nous étions pas mal rapprochés durant ces dernières semaines. Je le voyais pratiquement chaque jour au loft de Derek et nous avions sympathisé, malgré un mauvais départ lors de l'année précédente. De plus, il constituait mon alibi lorsque j'allais m'entraîner avec l'Alpha et que Scott voulait savoir où je me rendais. 

C'était extrêmement rare que l'on ne s'appelle pas ou qu'on ne s'envoie pas de messages. Je n'étais pas convaincue par les prétendues occupations du frisé, il avait toujours du temps pour moi. J'avais appelé Derek hier soir pour lui demander des informations, mais il avait été encore plus évasif que d'habitude et ça ne me disait rien de bon.

Une fois préparés, Scott et moi saluâmes Melissa et enfourchâmes notre nouveau moyen de locomotion : la moto que Scott s'était récemment achetée.

La première fois que j'avais vu l'état de l'engin, j'avais insisté pour prendre le bus. Ce n'était pas que je n'aimais pas les motos, mais celle de Scott me paraissait... fragile. Elle était encore plus fine qu'une moto de cross et ne semblait pas au meilleur de sa forme. Or, je ne voulais pas faire de peine à Scott alors j'avais enroulé mes bras dans son dos et on avait filé dans les rues de Beacon Hills. Maintenant, je m'étais habituée à ses soubresauts et à son pot d'échappement défaillant. Tant qu'elle supportait nos poids, ça m'allait. Comme à chaque fois, je fus heureuse de descendre du siège étroit et très inconfortable du transport et enlevai en vitesse mon casque. Tout en me recoiffant rapidement à l'aide d'un des rétroviseurs, je remarquai du coin de l'œil deux énormes motos flamboyantes. Je m'esclaffai face à la mine dépitée de Scott.

- C'est sûr que j'aurais toute la place que je voudrais sur ces engins, fis-je remarquer.

Scott me donna un coup dans le coude avant de rire à son tour. Finalement, nous pénétrâmes dans l'enceinte du lycée, prêts à affronter notre première journée de cours.

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- Tu veux que Derek t'aide, je pige pas, pourquoi ? demanda Stiles tandis que nous remontions un couloir du lycée.

Dès le premier intercours, nous avions retrouvé Stiles, adossé au casier de Scott et immédiatement, celui-ci lui avait exposé son plan farfelu.

- Il s'est fait tatouer un triskèle sur le dos. Y a forcément un moyen pour pas cicatriser.

- Je suis pas sûre que ce soit sans danger, répétai-je au Loup, sûrement pour la dixième fois depuis que j'avais pris connaissance de sa volonté de se faire tatouer par Derek.

Il s'apprêta à répliquer, mais Stiles le coupa en désignant deux affiches sur le tableau de liège.

- D'accord, je suis d'accord, mais je crois qu'il doit être occupé en ce moment non ?

Je jetai un coup d'œil triste aux affiches portés-disparus de Boyd et Erika. Cela faisait quelques semaines déjà que les deux Bêtas avaient disparu de la circulation sans raison et je voyais que Derek s'inquiétait beaucoup à leur sujet.

- Et Isaac qui ne répond pas à mes messages. Vous croyez qu'il va bien ?

- Ah... euh... vous vous envoyez des messages Isaac et toi ?, s'enquit Stiles.

- Là n'est pas la question, il n'y répond pas et ça m'inquiète.

Je tournai les talons, déjà agacée par les sous-entendus de Stiles, tant pis pour mes excès émotifs. J'avais mis du temps à me remettre de notre rupture, il n'allait pas m'interdire non plus tout contact masculin. Quand j'aperçus Lydia et Allison farfouiller dans leurs casiers, un sentiment de soulagement m'étreignit. Je les rejoignis et m'adossai à l'un des casiers en soupirant.

- Salut Alexia, ça va ? demanda Allison de son habituelle bonne humeur

Je me contentai de soupirer de nouveau et Lydia me jeta un regard oblique.

- Encore Stiles, n'est-ce pas ? Il faut que t'arrêtes avec lui.

- Merci Lydia, je n'étais pas au courant. Tes conseils sont toujours si précieux ! ironisai-je.

Allison gloussa en attrapant un manuel dans son casier.

- Vous avez vu les petits nouveaux ? enchaîna Lydia. Des tas d'hommes tout frais.

- Ils sont un peu jeunes tes hommes, fit remarquer Allison. Ils ont quatorze ans.

- Oh, certains sont plus mûrs que d'autres.

- C'est pas si mal d'être célibataire. Tu te concentres sur toi, ça te permet d'être meilleure.

J'opinai de manière exagérée tandis que Lydia ricanait.

- Allison, j't'adore. Alors si t'as besoin de jouer cette comédie en faisant semblant de parler de moi alors qu'il s'agit de toi, t'en fais pas ça me va. Mais je veux pas un petit copain. Je veux une distraction.

- Ça me ferait du bien à moi aussi, avouai-je.

Allison me jeta un regard effaré et j'haussai les épaules avec nonchalance.

- Je pourrais peut-être enfin oublier une certaine personne, ajoutai-je, les dents serrées.

Quelque chose attira alors notre attention. Deux jeunes hommes au visage identique au moindre trait firent leur apparition, un casque de moto à la main. Leur allure assurée m'interloqua. Ils respiraient un certain charisme, mais mon flair surnaturel était en alerte. 

- Des frères ? s'enquit Allison.

- Des jumeaux, se délecta de préciser Lydia.

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J'entrai dans la salle de classe juste devant mes deux amies. Je posai une main amicale sur l'épaule de Scott en tentant de lui faire ressentir un certain sentiment de culpabilité quant à ma réaction de tout à l'heure. Scott sourit, signe qu'il avait reçu mon message. Depuis que Scott et moi en savions un peu plus sur le lien qui nous unissait, l'Entrave, nous avions tenté de le développer au cas où il se révélerait utile. Ainsi, nous avions appris à nous ouvrir l'un à l'autre afin de faire passer nos émotions, faute de pouvoir transmettre nos pensées. Je ressentis d'ailleurs les battements du cœur du jeune McCall quand Allison Argent lui adressa la parole pour s'asseoir devant lui.

Même si ce lien surnaturel était encore un peu inexploré, je savais qu'il pouvait être aussi contraignant que bénéfique. Scott savait tout de mes sentiments - notamment à l'égard de son meilleur ami - et moi, je savais qu'il aimait toujours Allison. Mais cela nous contraignait à mentir à nos amis respectifs et à garder nos langues dans nos poches quand ceux-ci posaient des questions. Même si je suis certaine que Stiles ne pose aucune question à mon sujet... 

Je fus à peine installée à ma table que mon téléphone sonna. Etrangement, des dizaines de sonneries retentirent ensuite dans la salle de classe. Un texte avait été envoyé par un numéro masqué et, pendant une seconde, je me demandai qui pouvait bien envoyer un texte de littérature. Je ne tardai pas à avoir la réponse.

- "L'horizon, masqué par un banc de nuages noirs et cette eau, qui comme un chemin tranquille mène aux confins de la terre, coulée sombre sous un ciel chargé, semblait mener vers le cœur même d'infinis ténèbres." Voici la dernière phrase du premier livre que nous allons étudier.

Toute la classe dévisagea la nouvelle arrivante. C'était une femme assez élégante dont les cheveux bruns étaient habilement coiffés et qui ne semblait pas le moins du monde intimidée par la classe d'adolescents qui lui faisait face.

- Et je vous signale que c'est aussi le dernier texto que vous recevrez dans ce cours. On éteint son téléphone, maintenant.

Ok, ça avait le mérite d'être clair.

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- Monsieur McCall, Mademoiselle Miller ?

Je relevai le nez de mon travail de Littérature pour regarder le professeur Blake qui nous intimait, Scott et moi, de la rejoindre. Nous rangeâmes hâtivement nos affaires et nous retrouvâmes hors de la classe.

- Scott, Alexia, nous interpella une nouvelle fois le professeur. Je suis persuadée que c'est urgent si votre mère veut que vous quittiez le cours mais, je tiens à vous prévenir, et je le dis très gentiment, je suis au courant de vos absences répétées l'an dernier. Je ne veux pas que vous repreniez vos mauvaises habitudes.

- Ce ne sera pas le cas, assura Scott. Ce sera différent cette année.

- Oui professeur, différent, répétai-je.

- Les résolutions ne sont bonnes que si on les tient.

- Nous nous y tiendrons. Promis, ce ne sera pas éphémère.

Je jetai un regard interrogateur à Scott. Lui et sa mauvaise manie d'utiliser un nouveau mot chaque jour...

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Nous ne tardâmes pas à arriver à l'hôpital, comme Melissa nous l'avait demandé. Quand je vis son visage inquiet, une drôle de sensation s'empara de mon estomac. Quelque chose était arrivé.

- Pourquoi tu me l'as pas dit avant ? s'enquit Scott.

- Franchement, j'espérais ne pas avoir à le faire...

J'accélérai le pas. Melissa venait de nous annoncer qu'Isaac était à l'hôpital et qu'il ne guérissait pas comme il le fallait. Il semblait avoir été attaqué par quelque chose.

- Comment ça ?

- Quand je vois tout ce que t'as fait, les tonnes de livres que tu as lu, les cours d'été que t'as suivi, les économies que t'as fait pour t'acheter cette moto, même si je suis morte de peur. Je voudrais pas casser ton rythme.

Scott stoppa sa mère au milieu du couloir.

- Ça s'arrêtera pas, la rassura-t-il. Je serai meilleur cette année. Meilleur élève, meilleur fils, meilleur frère, meilleur ami, meilleur en tout. Je te le promets.

- D'accord, s'il est pas déjà au bloc, il est dans la chambre 215.

Je serrai Melissa dans mes bras et la remerciai furtivement avant de me ruer dans le prochain couloir aux murs blancs.

- Je te remercie, répéta Scott en déposant un baiser sur la joue de l'infirmière avant de me suivre.

Nous nous engouffrâmes dans le premier ascenseur que nous croisâmes. Un aveugle retint les portes avec sa canne et nous rejoignit à l'intérieur avant d'intimer Scott d'appuyer sur le deuxième. Les portes s'ouvrirent quelques secondes après et je fus la première à m'en extraire.

- Vous voulez bien m'aider à sortir si ça ne vous dérange pas ?

Je me retournai, impatiente. Ce n'était pas le moment de prendre Scott pour un chien d'aveugle ! Pourtant, l'homme posa sa main sur son épaule et se laissa guider. Scott me lança un regard dépité. Finalement, nous nous débarrassâmes de l'aveugle et sillonnâmes les couloirs de l'hôpital. Au détour de l'un d'eux, Scott et moi repérâmes le bouclé, assis dans un fauteuil roulant, inconscient. L'infirmier appuya sur un bouton en dévoilant ses griffes acérées. Mes yeux virèrent immédiatement à une des nombreuses couleurs qui les caractérisaient et Scott montra les crocs. Il courut vers l'ascenseur tandis que je retenais les portes avec des filets d'eau. Scott réussit à entrer, mais pas moi. Je frappai sur les portes en acier, mais l'ascenseur montait déjà. Je jurai entre mes dents et me ruai dans les escaliers que je remontai quatre à quatre. Dans quoi Isaac s'était-il fourré ?

Au troisième escalier que j'empruntais, je ressentis le premier coup que Scott prenait et la douleur s'insinua dans mes os. Pourtant, elle était supportable et malgré les nombreuses attaques que Scott subissait et qui se répercutaient sur moi, j'arrivai à atteindre l'étage supérieur. 

Alors que je remontai le couloir, ma trachée se comprima d'elle-même et je me mis à suffoquer. Cette fois, je ne pouvais plus avancer, l'air ne passait plus dans mes poumons et je crus que ma tête allait exploser. Avant que je m'effondre au sol, une silhouette massive me rattrapa et me déposa sur le sol. Je rencontrai les yeux vert-eau de Derek et tentai de lui dire quelque chose, mais les mots restaient bloqués dans ma gorge. Je sentais mes yeux changer de couleur et vu la façon dont il les scrutait, ils devaient être devenus jaune vif.

L'Alpha tourna le regard vers les portes de l'ascenseur qui venaient de s'ouvrir. Scott apparut, soulevé dans les airs par l'infirmier maintenant changé en loup. Derek se rua sur eux et planta ses griffes dans le dos de l'assaillant de Scott qui relâcha se dernier.

J'inspirai une grande goulée d'air et plaquai mes mains au sol, heureuse de pouvoir de nouveau respirer. Derek balança l'Alpha hors de l'ascenseur et celui-ci glissa sur le sol jusqu'à moi. Paniquée, je me relevai d'un bond.

Je ne regardai pas plus longtemps le Loup inconscient et rejoignis Scott pour vérifia son état avant de m'approcher d'Isaac, toujours endormi. Sa peau était pâle, mais il respirait.

Derek se tourna alors vers nous, le sourcil arqué :

- Vous êtes pas censés être en cours ?

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Ecrit le 24 Octobre 2017 et corrigé le 21 Septembre 2019