Scène 2: il faut être civilisé
I need to spend every day busily
You will think that I'm always strong
(but) I'm a woman too, baby
【I'm a woman too➸Minah】
❂
Tout comme l'ancienne maison, la nouvelle était somptueuse mais clairement moins grandiose. Il s'agissait d'un immense appartement situé dans l'un des plus chics quartiers de la capitale. À vrai dire, tu ne connaissais rien de cet environnement mais tu avais eu au moins l'occasion de saisir le nom de cet arrondissement par-ci par-là, prononcé par les invités, censés être de haute importance, de feue Madame. L'ascenseur et ses constants signaux sonores t'avaient guidée jusqu'à la porte légèrement entrebâillée de la demeure. En y pénétrant, tes pas résonnèrent contre le sol carrelé blanc, pendant que ton regard se promenait furtivement sur les murs du même ton. Les meubles les accompagnant, quant à eux, étaient dans des teintes très douces et chaleureuses, te rappelant presque l'automne et ses feuilles colorées de mille feux. Ton regard approbateur, après avoir fini d'étudier la salle de séjour, se posta devant les escaliers menant vers les autres pièces qui devaient, comme celle-ci, être sorties tout droit d'un magazine.
Comparée au manoir, la maison de Monsieur et Madame Byun était démunie d'extravagance mais bel et bien imprégnée par cette essence moderne.
Essence moderne ?
Mais qui tentais-tu de berner ? Que sais-tu donc de la modernité ?
Te sentant devenir un élément étranger au décor, tu te retournas vers la porte encore grande ouverte et remarquas que le chauffeur qui t'avait accompagnée jusque-là , avait finalement rebrousser chemin. Malgré le fait que tu sois habituée au caractère luxueux de l'ancienne maison, tu éprouvas cet amer sentiment de salir la pièce. Tu baissas alors la tête, ne sachant où te mettre entre ces céladons, ces canapés en daim, ces fresques chinoises, ces grands lustres, et ces meubles sûrement en bois d'acajou.
Pendant ce temps, Madame Taeyeon était, quant à elle, plantée sur la balustrade, occupée à t'observer avec attention. Souriante, elle mit tout de même fin à sa contemplation et se décida à descendre les fameux escaliers pour te rejoindre.
Un pas succédant l'autre, elle avançait doucement, non sans grâce.
Contrairement à toi, la nouvelle Madame avait les cheveux parfaitement coiffés, impeccablement maintenus en place, alors que les tiens étaient vulgairement retenus par un élastique pris dans un carton d'œufs. Son tailleur soulignait admirablement sa taille, tout comme ton tablier le faisait.
Mais qui cherchais-tu à tromper en te comparant à elle ?
- Bonjour, tu dois sûrement être Haewon, n'est-ce pas ? Te demanda-t-elle, enfin à ta hauteur.
Malgré ses hauts talons, Madame restait tout de même minuscule face à toi.
- Bonjour Madame. Tu dis juste, non sans t'incliner.
Au lieu de rentamer la discussion, Madame se mît alors à te reluquer de plus bel, sans être aucunement gênée. Ses yeux se promenaient de haut en bas et parfois s'attardaient sur certains de tes aspects, comme tentant de connaître judicieusement ta valeur. À ses yeux, tu avais l'impression d'être tel un produit sur le marché, ou encore cet objet qui, plus tôt, te semblait si étrange face à ce décor. Cédant une nouvelle fois à la défaite, tu baissas la tête en te répétant qu'il n'était pas assurément bon de te garder.
- Appelle-moi Taeyeon. Reprit-elle enfin, avec un sourire qui, cette fois, semblait loin d'être franc.
- J'ai appris que tu n'avais aucune famille, et oh comme cette nouvelle m'a attristée ! Mais tout de même, tu as réussi à bien vivre jusque-là, grâce à notre défunte Miss Byun.
- Oui, Madame.
- Taeyeon. Pas Madame, juste Taeyeon. J'ai horreur que l'on m'appelle comme ça, j'ai l'impression de prendre dix ans de plus. Soupira-t-elle ennuyeusement.
Tu acquiesças alors sans ajouter mot.
- Tout comme miss Byun, j'ai voulu te venir en aide. J'ai entendu dire qu'elle t'appréciait...comme c'est charmant ! Non, vraiment il fallait que je te sauve. Te retrouver dehors serait une terrible chose, tu imagines ? Orpheline et sans-abris, bon sang cela serait horrible ! Ajouta-t-elle sinistrement, mais riant tout de même.
- Je ne vous remercierai jamais assez. Reconnaissante, Tu lui offris ces quelques mots de gratitude, avant de t'incliner respectueusement devant elle.
Orpheline, qu'une vulgaire orpheline.
C'est ce que tout le monde pensait, alors que tu avais bel et bien des parents.
Ta mère était vivante, c'était chose certaine. Mais où était-elle passée ? Parvenais-tu au moins à te redessiner son visage alors que tu n'avais que cinq ans lorsqu'elle vous avait abandonnés ? Et ton père alors ? Fière alcoolique, il n'avait, à la fin, réussi qu'à t'offrir des coups en signe de récompense. A peine sortie de ton enfance, tu t'étais mise à travailler sans relâche pour cet homme, qui ignorait le sens du terme affection. A ton tour, tu l'avais quitté, et ainsi tu n'étais pas orpheline mais sans famille.
Te remémorer le passé avait toujours tendance à rouvrir la plaie, à te faire subir des souffrances bien plus terribles que celles dues à ton présent. Car en vérité, il n'était pas impossible de changer ce dernier, ou du moins tendre à le faire dans l'espoir d'avoir un avenir propice. Néanmoins, le passé était cette malheureuse chose qui refusait de nous voir s'en débarrasser, elle restait plantée là, ancrée, agglutinée dans nos cœurs et nos inconscients pour faire de nous ce que nous sommes, des hommes tout aussi malheureux.
Il était impossible de le changer, encore moins de l'oublier.
- Suis-moi, je vais te montrer ta chambre. Tu pourras y déposer tes petites affaires. Te sortit Madame de ta torpeur.
- Ta chambre est à côté de la cuisine. La nôtre est en haut des escaliers. Reprit-elle à nouveau, en pointant fièrement du doigt sa fameuse chambre.
Pour une personne modeste comme toi, ta chambre te paraissait contrairement à toute la demeure, petite mais convenable. Les murs étaient d'un blanc terne. l'unique armoire te servirait à ranger le peu d'affaires que tu possédais, le lit te permettrait de te reposer, et la croix suspendue en haut de ce dernier devait sûrement servir à décorer cette pièce en apportant aux murs une autre couleur que ce blanc sans éclat.
- Alors, elle te plait ? Demanda presque excitée Madame, comme si tu étais cet enfant recevant, pour la première fois, un cadeau de noël.
- Beaucoup, Madame.
Cette pièce n'avait rien de chaleureux, elle était froide, si froide que même l'éclairage blafard pouvait nous mener à déprimer. Elle rappelait presque les hôpitaux et leur lit de mort.
- Oh, comme tu dois être heureuse d'avoir une pièce rien que pour toi ! Quel beau rêve ! Allez viens, je vais te montrer une autre pièce qui saura te correspondre. Je parle bien sûr de la cuisine. Tu y passeras beaucoup de temps à nous préparer de bonnes choses, j'en suis certaine. Mais bien évidemment, tu auras d'autres tâches ménagères à faire comme la lessive, le repassage, ranger les chambres, nettoyer les salles de bains, passer la serpillière. C'est très important ça, la serpillière. Bref, je ne t'apprends rien de nouveau, du moins je l'espère.
- Oui, Madame. Dis-tu sans faire attention à son regard devenu noir.
- Aussi, l'une des choses les plus importantes chez nous est le thé. Baekhyun aime boire son thé tôt le matin et l'après-midi vers les coups de dix-huit heures. Il ne va sûrement pas tarder à rentrer. Sinon, nous n'aimons prendre que du thé de qualité. Pour moi, c'est des perles de jade au jasmin et Baekhyun n'aime prendre que du thé Jukro. Tâche de t'en souvenir.
- Bien, Madame. Acquiesças-tu une dernière fois.
- Ah, j'oubliais ! Tu auras bien sûr une petite somme à chaque fin de mois. Comme je te l'ai dit, je veux bien t'aider et en retour je veux que tu fasses de même. D'ailleurs, nous recevons souvent des invités, et bien entendu, nous aimons recevoir de manière convenable. Il faut que sois présente auprès de nous mais en restant la plus discrète possible. Haewon-ah, il faut être civilisé, ne nous fais pas honte.
Son annonce ne reçut alors aucune réponse, hormis quelques grincements des dents.
❂
Il était dix-sept heures et quelques minutes quand tu entendis, depuis la cuisine, la porte d'entrée se refermer.
- Chérie, tu es là ? Une voix rauque résonna dans toute la maison.
M. Byun Baekhyun venait de rentrer.
†
A/N : Perso, mon thé à moi c'est du Lipton menthe-réglisse, acheté à Auchan.
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