• Prologue •
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Collision Music ~ Touch The Sky
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• 3 janvier 2009 – Paris •
Le froid est à son comble. Depuis quelques jours, la France est touchée par une immense vague qui ne semble pas prête de s'arrêter. Dans la capitale plutôt calme, un jeune homme s'approche d'une boîte aux lettres jaune, emmitouflé sous une épaisse écharpe terne, le visage caché par une capuche bien trop grande. Il avance et recule d'un pas à plusieurs reprises, hésitant à laisser glisser la lettre dans l'embrasure. Sa main tremblante se lève puis s'abaisse continuellement. Il semble ruminer. Ne sachant pas quoi faire, il soupire un grand coup, créant ainsi une fine brume dans l'air, causée par un amas de fines gouttelettes, qui disparaît aussitôt, et laisse tomber son bras droit contre lui, comme perturbé par la conséquence qu'aura son choix.
Soudain, comme par magie, un grand coup de vent souffle faisant, ainsi, s'envoler l'étoffe qui le protégeait tantôt, tandis qu'une cloche résonne dans la nuit étoilée, sonnant les sept coups du soir. Il n'arbore aucune expression, préférant se dire que c'est ce que veut la nature et qu'il n'a d'autres choix que d'accepter son sort. Il ne peut pas s'enfuir et il ne le pourra jamais, il l'a toujours su. Il recule de quelques mètres, prêt à faire demi-tour. Il détourne le regard afin de fixer l'objet de son indécision qui le trouble tant. Et enfin, plutôt sûr de lui, contrairement à quelques secondes auparavant, il s'approche jusqu'à pouvoir toucher la boîte jaune. C'est la dernière ligne droite avant de ne plus pouvoir faire marche arrière. La lettre touche le battant de la fenêtre d'introduction du courrier.
— Le petit blond obèse restera la risée quoiqu'il en coûte, murmure-t-il.
Il soupire, puis tourne les talons en rangeant, finalement, l'enveloppe dans sa veste. Un échec de plus pour lui, qui depuis une semaine, tente de passer ce cap après avoir écouté les conseils de sa psychologue qui semble le prendre pour un gamin de huit ans à peine. Il jette un œil rapidement au ciel blanc et prend la route en essayant d'éviter la foule, qui claque des dents à chaque occasion qui se présente. Il navigue aisément, toujours tout droit, tel un habitué de la fuite, pour, quelques pâtés d'immeubles plus loin, prendre la ruelle sur sa droite et entrer dans un bâtiment. Il frotte ses baskets humides sur le paillasson tout en observant l'entrée éclairée par une lumière jaunâtre, puis se dirige vers le bloc de boîtes rouillées sur sa droite.
— Encore un tas de pubs inutiles, ça ne devrait plus exister... Bon, tant pis, ça me fera une raison d'aller jeter les poubelles demain ou plus tard, songe-t-il avant de refermer violemment la case à son nom et d'entamer sa course dans l'escalier.
• 5 janvier 2009 – Paris •
Même endroit, même heure, le jeune homme se tient face à ce qui pourrait peut-être changer sa vie, plus que déterminer. La fraîcheur du mois le fait trembler, son regard, lui, reste dur. Aujourd'hui, ça sera la bonne, il en est persuadé, il le sait. Pendant ces deux derniers jours, il a tout fait pour se convaincre qu'il n'y a aucune solution meilleure que celle-là. Il veut y croire, il faut tenter. Et puis ce n'est qu'une lettre après tout, rien de plus ni de moins. Il n'a pas à se torturer autant, peut-être qu'elle finira par se perdre, parmi des centaines d'autres, pour dans le meilleur des cas revenir à sa porte. Une chose est sûre, elle voyagera comme il ne l'a jamais vraiment fait, si on exclut les sorties de classe verte de primaire, qui transportent encore maintenant des mauvais souvenirs.
— Vous comptez la poster cette lettre ? Après tout, vous pouvez bien attendre jusqu'à dix-heures pour la relève de demain, mais moi, j'ai un chat à nourrir. Ça sert à rien d'hésiter. Vous pouvez toujours espérer qu'elle disparaisse, comme moi quand je vois les factures arriver, déclare une dame aux cheveux gris et au visage ridé en déposant son courrier après l'avoir légèrement bousculé.
Il la regarde sourire avec bienveillance, puis se lance avant de tourner le dos et de souffler un grand coup faisant ainsi partir le stress accumulé. Il n'a plus qu'à se dire que c'est fini, qu'il n'y a plus de raison de réfléchir. De toute façon, il est trop tard pour regretter. Il va pouvoir enfin se concentrer sur son quotidien, particulièrement sa vie estudiantine, et attendre à reculons le prochain mois. Il remercia d'un hochement de tête la vieille femme tout en esquissant une risette, avant de l'observer partir. Il n'oubliera pas, il se le promet, il se souviendra pendant longtemps de sa sagesse. Grâce à elle, ses tourments prendraient une route qu'il connaissait si bien au petit matin. Pour la première fois, depuis longtemps, il a eu foi en l'humanité, espérant que ça puisse durer.
— Aller ! Pour fêter ça, un bon kebab devrait faire l'affaire, se dit-il avant d'enfoncer son menton dans son manteau au col montant.
Ses yeux grisâtres se sont illuminés d'une lueur particulière derrière la paire de verre de basse qualité, lorsqu'il s'est mis à fixer le faible éclairage du lampadaire situé de l'autre côté de la rue. Il replace vite fait son bonnet couleur moutarde, cachant ainsi ses mèches blondes, puis se met en route histoire de ne pas finir congeler avant de pouvoir déguster le prix de sa réussite. Il doit se dépêcher s'il ne veut pas attendre une éternité, il en a fortement conscience, même s'il est probable que personne ne sorte par ce temps pour un repas si peu sain. Pour lui, ce n'est plus si grave, il aime se dire que son corps ne changera jamais et qu'il peut donc en faire ce qu'il veut. Il se plonge le temps du trajet dans ses pensées se demandant comment cette histoire, qui vient de commencer, prendrait fin.
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