12 • Qui sait ?
- Courage, Ingrid, un dernier effort et tu auras fini ! m'encourage la doyenne.
J'envoie mes dernières forces dans un geste de la main.
- Azalea, prononçai-je en même temps.
- Bravo Ingrid, c'est bon !
J'ouvre les yeux, jusqu'alors fermés par soucis de concentration. Une azalée a poussé. Comme depuis les trois dernières heures. J'en ai fait pousser une petite centaine, de tailles et de couleurs différentes et plus ou moins réalistes.
J'avais craint que la magie soit dure à apprendre, mais finalement ça va. C'est mille fois plus facile que les fouets, ça, c'est sûr.
- Merci Tatianna, tu es un excellent professeur. Et vous aussi bien évidement, ajoutai-je en faisant un clin d'oeil aux jumeaux.
Ils sont là depuis à peu près une heure. Ils ont sûrement senti ma magie vibrer dans l'air. Vic et Lya me regardent en souriant. Je leur renvoie, trop attendrie. Surtout quand je vois Lya avec mon bonnet sur la tête. C'est celui que j'avais perdu en les rencontrant pour la première fois. J'ai retourné la maison entière pour le retrouver. Jamais j'aurais cru le revoir, et certainement pas sur la tête d'une Furie.
- C'est incroyable, chuchote la doyenne, je ne les avait jamais vu si... enfantins ?
Elle les contemple avec émerveillement, les yeux grands ouverts, comme si elle ne voulait pas en rater une seule miette.
Je suis son regard. Les jumeaux se chamaillent comme des vrais enfants. Enfin presque, me dis-je en voyant Vic envoyer un jet de feu vers Lya.
- Je ne suis pas certaine.
- Comment ça ?
J'entends dans le ton de sa voix qu'elle est confuse. Et à vrai dire, moi aussi. Je ne suis pas vraiment sûre de comprendre ce que je ressens à cet instant.
- Je ne suis pas certaine qu'ils soient enfantins. Enfin si quelque part, mais c'est parce que... Je ne sais pas, regardez les, m'exclamai-je en tentant de m'exprimer.
Elle suit mes gestes incohérents qui désignent les deux Furies.
- Regardez les, répétai-je plus doucement en les couvant moi-même du regard. Je les apprécies beaucoup, et ce, depuis le début. Enfin presque, gloussai-je en me souvenant de leurs dents effrayantes. Parce que... Je ne sais pas, ils prennent les choses tellement...simplement. Ils ne réfléchissent pas des jours aux conséquences de leurs actes, ne s'angoissent pas des semaines à quelque chose qui pourrait potentiellement, j'insiste sur le potentiellement, arriver et je ne sais pas... Je crois qu'ils prennent juste la vie comme elle est. Ou du moins comment elle devrait être. Oui, je les admire cela c'est certain. J'aimerais avoir la facilité qu'ils ont de lâcher prise et de faire ce qu'ils ont envie de faire. Sans tergiverser, sans se nouer le cerveau du peut-être au comment du pourquoi. Avec eux je me sens bien, apaisée, et quelque part, oui, peut-être plus enfantine, terminai-je dans un doux sourire.
Tatianna me scrute, les yeux remplis d'une étrange lueur. J'ai l'impression qu'elle me voit comme une bizarrerie, à mi-chemin entre la 8ème merveille du monde et la plus grosse enquête de Sherlock Holmes. En même temps, avec deux furies collées à moi comme un chewing-gum sur une chaussure...
Attends quoi ? Depuis quand ils me câlinent ?
- Moi qui fêtera pourtant bientôt mes 207 ans, je ne crois pas avoir eu autant de sagesse que toi en cet instant. Je ne sais pas si je dois être jalouse ou vexée, me taquine-t-elle dans un sourire malicieux.
- Hum, j-je, je... bredouillai-je tout de même gênée.
- J'espère que tu n'allais pas t'excuser ? rit-elle.
Je secoue vivement la tête, mais mon corps me trahit. Je me sens rougir et mon visage se déformer pour afficher une grimace
À vue de nez, je dirais que j'ai la parfaite tête de coupable. Et son regard ne semble pas vouloir me contredire.
- Bon laissons tomber vous voulez ?
- Non, non, non, minute papillon ! J'ai moi aussi à partager un peu de ma sagesse. Écoute et apprend, m'annonce-telle d'un air terriblement sérieux.
Prise par son ton d'outre tombe, je stoppe tous mes mouvements, prête à boire ses paroles qui semblent regorger de savoir.
- Si j'ai bien appris quelque chose de ma vie mon enfant, c'est qu'il faut plutôt dire merci que pardon. Ne t'excuse pas d'être ce que tu es, mais plutôt remercie les autres de t'accepter telle que tu es.
Un grand silence plane autour de nous. Même la nature semble s'être tue. Je cligne des yeux. Une fois. Deux fois. Rien n'a bougé. Toujours aucun bruit. On se fixe dans le plus grand des calmes, mais l'air est encore plein de gravité.
Je cligne des yeux une troisième fois.
Puis, j'explose de rire. Un fou rire puissant, qui jaillit de moi très profondément. Un fou rire qui me laisse pliée par terre, les larmes aux yeux.
- On dirait... tentai-je de dire entre deux éclats. On dirait... dic.. no..el!!! On di-dirait les di-dictons, articulai-je tant bien que mal, les dictions des papillotes en chocolat de Noël, gloussai-je plus calmement.
Je m'essuie les yeux, en riant encore un peu.
- Honnêtement ma chère, je suis vexée, grommelle-t-elle.
Mon rire s'arrête net, merde ! Je suis vraiment horrible la pauvre, comment j'ai pu me moquer d'elle comme ça alors qu'elle voulait m'aider !
- Oh, pardon je...
- Je suis vexée, m'interrompt-elle, parce que c'est exactement là où j'ai trouvé ça !
Je la regarde exploser de rire à son tour. Et c'est le temps qu'il me faut pour que je comprenne. Oui, l'information prend parfois un peu de temps à monter.
Je ris alors en secouant la tête, elle m'a bien eu.
- Vilaine, gloussai-je, je n'y ai vu que du feu.
- C'était tout l'intérêt, glisse-t-elle avec un clin d'oeil.
Je ris et me moque de moi-même avec elle. Mais au fond de moi, quelque chose se met à réfléchir. Quelque chose qui se dit, qu'en faite la papillote n'a peut-être pas tort. Peut-être même que c'est plutôt vrai.
- Demain même heure ? demandai-je finalement.
- Oui, on fait comme ça.
Je lui rends son sourire et la salue avant de partir. À ma plus grande surprise, les jumeaux reproduisent mes gestes et me suivent.
Dix minutes plus tard, ils sont toujours là. Et plus que ça, j'ai comme l'impression qu'ils essaient de me convaincre de les suivre. Je me trompe peut-être, mais quand on me grogne dessus avec des dents affreusement tranchantes quand je vais à droite plutôt qu'à gauche, je réfléchis à deux fois.
- Je ne peux pas, je gémis, Leindel m'attend. J'ai promis de rentrer le voir tout de suite après l'entraînement, on doit parler lui et moi.
Je fais la moue et les supplie du regard. Mais ils n'en n'ont absolument rien à faire. Ils s'en contre carrent. Ils s'en tape le coquillage. Ils s'en... Bref, je crois que c'est assez clair.
- Arrêtez, je dois y aller...
J'essaie de lutter, mais si l'un ne me pousse pas, ou me le tire le bras, c'est l'autre. Ça fait dix minutes que je lutte contre ces deux tornades, c'est épuisant.
- Très bien, tonnai-je au comble du désespoir, je vous défie ! Si je gagne, je pars. Sinon, je vous suis.
Je souris victorieusement face à leur soudaine immobilité. Je leur ai bien cloué le bec ! Je ricane, fière de moi. Ils se jettent un coup d'oeil, échangent deux trois mots d'une rapidité et d'une intonation toujours aussi étonnante et acquiescent vigoureusement.
- Très bien, alors à trois. Un, deux, trois !
Que le combat commence !
Je m'élance en l'air. Enfin j'essaie. À peine à deux mètres du sol, je suis stoppé nette dans mon mouvement par un lassot de lave froid qui me ramène violemment au sol. Je n'ai même pas le temps de réfléchir que déjà, je suis figée de la tête au pied dans un énorme bloc de glace.
Je les regarde, bouche bée. Ils n'ont même pas bougé ! Ma dignité s'est pris un sacré coup. Ce fût le combat le plus bref et ridicule de l'Histoire entière. Passé et futur compris. Aïe.
- Eh bien, t'as encore beaucoup de boulot ! rit à gorge déployé un intrus soudain.
Je soupire. Leindel. Il a tout vu.
- Arrête de rire, je grommelle, je te signale que c'est toi mon entraîneur. Tu ris de ton incompétence en pédagogie là !
Il s'arrête de rire, analyse mon raisonnement, mais ma tête désespérée interrompt le processus. Il explose à nouveau en riant à gorge déployée.
Toujours aussi immobile que l'Everest lui-même, je gémis et essaye désespérément de me dégager.
Ça ne rend que le lion plus hilare. Je jette un coup d'œil aux jumeaux qui ne sont pas en reste niveau moquerie. Ils ricanent en échangeant quelques mots. À ma plus grande surprise, j'arrive à en capter quelques uns. Je comprends " victoire " et " attendent".
Tatianna avait raison, plus j'entraîne ma magie, mieux je comprends la langue lunaire.
- Qui nous attend ? demandai-je innocemment à Lya.
Ils s'immobilise puis sourient comme si on leur avait fait un beau cadeau.
Le frère s'approche, dégèle mon cercueil de glace, et m'aide à me relever avec un lasso de lave froide, sûrement gelé par sa sœur.
Leindel, qui a arrêté de rire depuis ma question, s'approche de moi.
- Désolée, on va devoir reporter notre conversation, encore...
- Ce n'est pas grave, me sourit-il.
Il replace soudain une mèche de cheveux derrière mon oreille. Et caresse ma joue en partant. Mon cœur fait un bond pas possible. Je pose même ma main par sécurité sur mon torse. On ne sait jamais, j'en ai encore besoin. Je me mord la lèvre pour ne pas dire une bêtise qui gâcherait le moment. À la place, je lui renvoie un petit sourire hésitant et attrape sa main.
C'est ainsi que main dans la main, on suit les jumeaux. Avant de partir, je jette un coup d'oeil derrière moi. Un petit tas de fleurs jonche le sol. Je ne crois pas qu'il s'en soit rendu compte. Je soupire discrètement de soulagement. Je ne veux pas qu'il voit que je n'arrive pas à me contrôler juste avec un ridicule frôlement.
Je soupire une seconde fois, cette fois un peu résignée. Je ne suis pas sûre qu'un jour j'y arriverai avec lui. Il me déstabilise... Mais, je crois que j'aime ça.
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Et recoucou !
J'entre tout de suite dans le vif du sujet, ultra important, qui garde les petits mots des papillotes de Noël ? 🤣
Et qui finit par les retrouver deux trois ans plus tard, oubliés dans un vieux placard ?
J'avoue, moi. Oui, oui, vous avez bien entendu, je plaide coupable.
Soyez indulgents ;)
Ps: L'absence de cardio/sport et maintenant les chocolats... Non, ne me prenez pas pour ce que je ne suis pas :p
Gros bisous chocolaté 😚 Oupsi, musclé je voulais dire.
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