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Chapitre 43-2




           

Après ça, nous restâmes tous silencieux, perdus dans nos pensées ou tentant de nous reposer un minimum. Pour ma part, un tas de choses se bousculait dans ma tête. Qu'allions-nous trouver exactement là-bas ? L'endroit serait-il gardé ? Devrions-nous nous battre pour y accéder ? Faire du mal à des gens innocents ?

Car se défendre pour sauver sa vie où celles des personnes auxquelles nous tenions, c'était instinctif, du moins pour moi. Mais le faire volontairement...c'était autre chose. Je savais pertinemment que ce que nous tentions était notre dernière chance de changer les horribles évènements à venir. D'empêcher un massacre silencieux, qui resterait inconnu et oublié de tous si nous ne faisions rien. Une chance de construire un monde plus sûr pour nos futurs enfants. J'en avais la certitude mais au fond de moi un léger doute subsistait...et si ce que nous allions faire faisait pire que mieux et nous conduisait droit dans une guerre ouverte ? Ou dans une répression totale des métamorphes qui alors n'aurait plus le luxe de se cacher ?

Toutes ses questions et tous ces doutes tournaient en boucle dans ma tête, m'empêchant de me détendre et de me reposer. Je savais que Jude partageait toutes mes pensées et le fait qu'il ne s'y immisce pas et ne tente pas de me rassurer voulait dire qu'il partageait certainement mes craintes. J'aurais pu facilement le savoir...j'aurais dû le savoir d'ailleurs réalisai-je soudain en me rendant compte que je n'avais plus accès aux pensés de Jude.

— Tu y as toujours accès...tu as juste peur qu'elles ne fassent échos aux tiennes. Tu les as donc bloquées inconsciemment.

La voix de Jude était douce et explicative, bien qu'il doive certainement crier pour que je puisse l'entendre par-dessus le tumulte du vieux moteur poussif. Je l'avais bloqué sans m'en rendre compte ? À la seconde où je me posais la question, la barrière céda et nos pensées se mélangèrent de nouveau. J'essayai de reproduire ma protection improvisée mais malgré tous mes efforts, je n'arrivai à rien.

— Ne te fatigue pas pour rien, me dit-il. Tout cela est nouveau et presque...inédit ! Tu es parvenue à le faire une fois, c'est que tu en es capable. Tu t'entraîneras le moment venu.

Je vis et je sentis sa main se poser sur la mienne et la serrer fort, alors que son regard restait fixé sur la route tortueuse qui s'assombrissait de plus en plus.

— Tu crois que nous faisons le bon choix ? ne pus-je m'empêcher de lui demander.

— Oui. C'est toujours mieux pour tout le monde d'avoir toutes les informations en main, quelques soit les doutes légitimes qui peuvent subsister...j'y crois.

Pendant un court instant je me laissai aller sur son épaule, m'imprégnant de son contact et de son odeur. Un petit moment de réconfort que je ne prolongeai pas trop pour ne pas le gêner dans sa conduite, ni lui faire mal.

— Nous nous sommes cachés trop longtemps, ce n'était bon pour personne ! Regarde où ça nous a mené ! dit soudain Hannah d'une voix acide, pleine de colère.

— C'est vrai, mais tu sais aussi que nous ne pouvions pas nous révéler comme ça. Il y avait trop de...

— ...laissez-moi deviner ? De problèmes d'égo ! intervint Worth, en entrebâillant la petite vitre latérale présente dans la lunette arrière, s'invitant ainsi dans la conversation.

— Je vois que tu commences à nous connaître ! persifla Hannah, visiblement d'une humeur de dogue.

— Tu sais très bien que c'était plus compliqué que ça ! répondit Jude d'un ton agacé en lâchant ma main pour reposer cette dernière sur le volant qu'il serra avec force. Nous sommes nombreux et répartis sur tous le globe. Nous sommes fédérés en clan...imagez le casse-tête pour mettre tout le monde d'accord ! Pourtant nous avons essayé, nous expliqua Jude, une pointe de regret dans la voix.

— Maintenant...ils n'auront plus le choix !

— Si, on a toujours le choix. En fonction de l'accueil que vont nous faire les humains, les clans pourront se révéler ou pas. Rien ni personne ne les obligera à se montrer s'ils ne le veulent pas.

— Pour Hannah, en revanche...

— J'ai fait mon choix ! le coupa cette dernière avec véhémence. Je sais pertinemment à quels risques je m'expose et je les accepte. Je n'ai pas grand-chose à perdre de toute façon. J'aurais juste aimé que cela se fasse dans d'autres circonstances.

Je vis Worth esquisser un geste de réconfort vers Hannah mais celle-ci lui jeta un des regards glacial d'ont elle avait le secret et il se retira sans un mot, nous laissant tous les trois dans un silence pesant. Qui était toujours présent lorsque Jude tourna dans un chemin forestier quelques minutes plus tard, avant de stopper la voiture trois mètres plus loin.

— Tout le monde descend ! On va continuer à pieds à partir de là. Le barrage ne se trouve qu'à quelques centaines de mètres derrière ces arbres. Féline est déjà partie en éclaireuse, précisa-t-il quand il vit que River s'apprêtait à lui poser une question.

Nous récupérâmes les deux sacs à dos remplis de matériel et d'armes de poings que nous avions pris dans la première voiture et Hannah et Worth les mirent sur leur dos. Nous avions convenu qu'ils partiraient tous les deux en avant et essaieraient de se faire passer pour des touristes égarés cherchant un refuge contre le froid de la nuit. Une fois à l'intérieur, ils devaient neutraliser les gardes s'il y en avait et nous faire entrer.

Le plan était simple mais normalement efficace. Surtout à les voir tous les deux l'un à côté de l'autre dans leurs vêtements de randonnés, ils étaient parfaits, un vrai petit couple d'humains lambda inoffensifs. Seule ombre au tableau...Khyn et son éventuel sabotage ! Sans compter que Shaw et Krüller étaient toujours dans la nature, bien que je ne les pense pas assez bêtes ni suicidaires pour être resté dans le coin.

Ils partirent donc quelques minutes avant nous et nous les suivîmes à distance respectueuse. Féline nous rejoignit à mi-chemin et la voir me fit un bien fou. Je n'avais plus qu'une hâte, que toute cette histoire se termine. Pour arrêter d'avoir peur, d'avoir froid et surtout...d'avoir faim ! Ce devait être dû à ma grossesse mais je mourrais de faim.

« Je peux te chasser quelque chose si tu veux, petite sœur ?! »

À l'idée d'un lapin ou d'une autre bestiole à moitié mâchouillé, mon estomac protesta vivement.

« Je te remercie beaucoup...mais ça va aller ! » m'empressai-je de lui répondre, tout de même touchée par son attention.

J'entendis Jude s'esclaffer dans ma tête, ce qui vexa légèrement la panthère susceptible.

— Si tu étais sous ta forme animal, ça ne te dérangerait pas, me chuchota-t-il à l'oreille. Mais là, demande plutôt à River. Cet estomac sur pattes à certainement prit des trucs à grignoter !

Ce dernier, qui nous avait bien sûr entendu même à plusieurs mètres de distance, nous rejoignis et me tandis une barre chocolatée un peu aplatie.

— Désolé, elle était dans ma poche ! me dit-il dans un murmure prudent, avant de vite retourner surveiller nos arrières.

La friandise avait un aspect peu ragoutant, mais je la mangeai quand-même et me senti tout de suite mieux à la seconde où le sucre et les calories pénétrèrent dans mon organisme en manque. J'étais en train de terminer ma dernière bouchée quand Jude nous fit signe de nous arrêter et de nous accroupir. Ensuite nous le suivîmes précautionneusement jusqu'à un tronc à demi couché et recouvert de mousse, derrière lequel nous nous accroupîmes.

De là où nous nous trouvions, nous distinguions les contours d'un bâtiment semi-circulaire en béton. Nous vîmes Worth et Hannah qui s'avançaient vers la seule porte visible sur la façade aveugle. L'endroit devait-être sous vidéo-surveillance car avant même qu'ils n'aient le temps de frapper, le battant s'ouvrait à la volée sur un homme à l'air inoffensif portant un uniforme beige. À notre grande surprise, ils n'échangèrent que quelques mots, avant qu'il ne les laisse pénétrer à l'intérieur.

— C'est pas un peu facile ? s'étonna River.

— Je trouve aussi. En même temps, ce n'est qu'un barrage, pas une installation militaire ! lui répondit Jude. Approchons-nous, vu le niveau de sécurité des lieux, ils ne devraient pas mettre longtemps à nous ouvrir.

Et en effet, nous n'avions même pas encore atteint la bande de terrain dégagée séparant la forêt du bâtiment, que la porte s'ouvrait de nouveau sur Hannah qui nous fit signe de nous dépêcher.

— Venez-vite ! nous héla-t-elle. Un tel niveau d'amateurisme ne me dit rien qu'y vaille ! Nous n'avons certainement pas beaucoup de temps devant nous.

Un mauvais pressentiment m'envahit à l'entente de ses paroles et alors que j'entrai dans le bâtiment, il me sembla apercevoir une ombre sur la façade éclairée par la lune.

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La fin est proche, plus que deux ou trois chapitres avant de connaître le dénouement des aventures de Jude et Christina ^.^

Kissss *o*

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