Chapitre 32-2
La première chose que je sentis ce fut le matelas dur sous mon dos, puis la sensation rêche et désagréable de la couverture sur mes bras nus. J'étais de retour au centre dans cette horrible cellule ? Non...ce n'était pas possible ?
Je sentis le désespoir déferler sur moi comme une lame sans fond. Comment cela était-il possible ? Je m'étais évanouie dans les bras de Jude. J'avais encore la sensation de sa chaleur sur mon corps et de sa bonne odeur qui m'enveloppait...tout cela n'avait pas pu être qu'un rêve ? Mon inconscient ne pouvait pas être aussi cruel ? Une boule se formait dans ma gorge tandis que la panique et la désolation s'emparaient de moi. J'entendis bientôt de petits sanglots incontrôlables s'échapper de mes lèvres serrées tandis que les larmes libératrices, elles, refusaient de couler. J'étais tellement certaine de ce qui allait se trouver devant mon regard que je n'osais pas ouvrir les yeux. Tant que je n'avais pas la preuve visuelle...il y avait encore un infime espoir que cela ne soit qu'un horrible cauchemar.
— Christina...Christina, il faut vous réveiller !
La voix du Docteur Banes, raviva mes pires craintes. Ils l'avaient eu elle aussi ? À moins que nous n'ayons jamais réellement réussi à nous enfuir...
— Christina...vous faites un cauchemar...réveillez-vous...vous n'avez plus rien à craindre.
C'est ça, c'était bien un cauchemar, c'était...
— On est toujours là-bas ?
Ma voix paniquée et coassante eut du mal à sortir de ma bouche, tellement la peur et le stress me serraient la gorge.
— Non, bien sûr que non ! Christina ce n'est qu'un mauvais rêve...ouvrez les yeux.
Avec une horrible appréhension mais me fiant toute fois à la voix rassurante de mon amie, je commençai doucement à ouvrir les paupières.
Là, sous mon regard encore flou et embué, pas d'horrible mur de béton nu, ni de blanche et froide lumière artificielle, bien au contraire. Le pâle soleil automnal brillait à l'horizon, déversant ses maigres mais réconfortants rayons à travers la fenêtre située directement à ma gauche et baignaient mon visage de leurs douces clartés réconfortante.
Presque instantanément mon stress se dissipa tandis que j'analysais mon environnement. Le lit dans lequel je me trouvais était en bois et le matelas sous mon corps était moelleux juste comme il fallait. La couette en coton qui me recouvrait était chaude et douce, totalement à l'opposé de ce que mes sens me dictaient il y avait à peine quelques minutes. Tout cela était si déroutant que pendant un bref instant j'eus du mal à discerner le rêve de la réalité.
— Où sommes-nous ? Comment sommes-nous arrivé là ? Comment va Jude ?
Mes questions fusèrent avec le débit d'une mitraillette tandis que je m'asseyais, peut-être un peu trop rapidement, avant de porter pour la première fois mon regard sur Rebecca.
Je ne savais pas depuis combien de temps nous étions là mais vu sa tête, cela ne devait pas faire plus d'un jour ou deux. Elle avait changé de vêtements et ses cheveux humides qui sentaient bon la fougère prouvait qu'elle sortait de la douche. Mais ses traits étaient toujours tirés et les tremblements de ses mains, prouvaient qu'elles n'avaient pas encore totalement récupéré.
— Jude va bien, s'empressa-t-elle de me dire, comprenant qu'au final c'était la réponse la plus importante pour moi. Il n'est pas encore réveillé mais d'après vos amis...
— ...métamorphes, complétai-je à sa place en constatant son trouble et son hésitation.
— ...vos amis métamorphes, c'est ça, reprit-elle d'une voix gênée et incertaine, il est tiré d'affaire.
— Pourquoi ne sommes-nous pas dans la même chambre ?
— Parce qu'on a pensé que vous récupèreriez mieux séparément. Mais si tu veux aller le rejoindre, aucun problème ! me dit Hannah qui venait de pénétrer dans la pièce sans frapper.
— Bien sûr que je veux y aller ! lui rétorquai-je tandis que je balançai déjà mes jambes sur le côté du lit.
— Tu ferais peut-être mieux de planquer ça, si tu ne veux pas que tout le monde s'en aperçoive ! me dit-elle d'une petite voix tintée d'ironie en indiquant mon ventre d'un signe de tête.
C'est à l'instant où elle me fit la remarque que je portais enfin attention sur ma personne. Mes vêtements déchirés et crasseux avaient disparu, remplacés par un pantalon de survêtement gris informe et détendu et un tee-shirt vert pisseux d'au moins deux tailles trop petite pour moi. Ce dernier était remonté et laissait voir un petit ventre arrondit qui n'était pas là la dernière fois que j'avais regardé ! Je m'empressai d'essayer de rabattre le pauvre tissu élimé sur ma peau...sans grand succès.
— Désolé pour les vêtements mais nous avons paré au plus pressé, me dit soudain Khyn en passant la tête par la porte entrebâillée. Des habits plus adaptés vous attendent dans la salle de bain, ajouta-t-il avant de disparaître aussi rapidement qu'il était arrivé.
— Qu'est-ce qu'il fait là lui ? m'exclamai-je d'une voix un peu plus forte que je ne l'aurais voulu.
— On se trouve chez lui ! Enfin dans sa communauté pour être plus précise, me répondit Hannah. C'est un groupe mixte comme le nôtre. Lui est imbuvable mais les autres sont plutôt sympa !
— Attend ! Toi tu arrives à trouver des gens sympas ? ne pus-je m'empêcher de persifler. J'ai dormis combien de temps au juste ?
— A peine une journée, je te rassure, me répondit-elle en ricanant ! Bon si tu veux aller voir ton Roméo pour lui annoncer l'heureuse nouvelle, ne tarde pas trop. Mais je te suggère une petite douche avant...tu pues, ajouta-t-elle en fronçant exagérément le nez, avant de sortir de la chambre en rigolant.
— Eh bien, le moins que l'on puisse dire est qu'elle a un humour...particulier ! commenta le docteur Banes, visiblement interloquée par le comportement d'Hannah.
Alors ça, elle n'avait même pas idée ! Mais le plus étrange c'est qu'il y avait encore quelques jours...elle n'avait pas d'humour du tout ! Même si son ton restait sarcastique et moqueur, on ne sentait plus la méchanceté et l'aigreur sous-jacente que l'on y percevait avant. Se pouvait-il que son don de sang à Worth ait aussi modifié sa personnalité à elle ? Si c'était le cas ce n'était pas pour me déplaire bien que cela soit assez déroutant quand même.
— Où est la salle de bain ? demandai-je à Rebecca qui était en train de piquer du nez, avachie sur sa chaise.
— Dans le couloir, première porte à droite ! C'est l'aile des jeunes d'après Khyn, bien que je ne sache pas du tout ce que ça veut dire, ni le rapport avec une salle de bain commune, ajouta-t-elle en baillant discrètement.
— Si vous avez vraiment envie de le savoir je vous expliquerai mais pour le moment...vous devriez faire une sieste.
Elle approuva d'un signe de tête en se laissant lourdement tomber sur le matelas que je venais de quitter. Je n'attendis pas plus longtemps et allais prendre ma douche d'une démarche raide et douloureuse. J'étais tellement pressé de retrouver Jude que je ne m'attardai pas sous le jet brulant malgré l'envie que j'en avais et c'est fébrile et la peau encore humide que j'enfilai rapidement mes nouveaux vêtements d'emprunt avant de sortir de la pièce embuée.
Je fis deux pas sur le parquet brut du couloir avant de me rendre compte que je ne savais pas où aller ! Ne voyant personne aux alentours je décidai de tenter d'ouvrir la porte se situant de l'autre côté de la salle de bain. Puisque cet endroit était visiblement un dortoir pour les jeunes métamorphes nouvellement transformé, il devait y avoir un dortoir pour fille et un pour garçon ?
Je sus que mon raisonnement était juste à l'instant où j'ouvris la porte sur une pièce identique à celle que je venais de quitter. Et là, sur un lit semblable au mien se trouvait Jude endormi.
Mon dieu ce qu'il était beau ! Je m'approchai de lui et ne pus m'empêcher de poser doucement ma main sur son visage en une caresse tendre et légère. Il ne devait plus dormir profondément car mon faible effleurement suffit à faire frémir ses paupières. Il s'agita légèrement puis prit une grande inspiration avant de tourner la tête dans ma direction et d'ouvrir ses yeux encore ensommeillés sur moi.
— Christina, murmura-t-il d'une voix sourde et incrédule en se saisissant doucement de ma main avant de m'attirer vers lui. Je croyais avoir rêver.
— Moi aussi, lui avouai-je dans un chuchotement alors qu'il me faisait taire en posant ses lèvres sur les miennes.
Il les effleura en un doux baiser tendre et limite hésitant, avant de se reculer légèrement. Le regard qu'il planta dans le mien était intense et étrange à la fois.
— C'est vrai ? me demanda-t-il soudain d'une voix fébrile.
— Qu'est-ce qui est vrai ? lui demandai-je, sentant l'appréhension monter en moi.
— Ce que j'ai cru sentir lorsque nous étions connectés ?
— Oui, lui répondis-je simplement d'une voix hésitante, craignant quand même un peu sa réaction.
Plusieurs sentiments contradictoires traversèrent son visage simultanément. À tel point que je me demandai, pendant quelques secondes, si nous parlions bien de la même chose.
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