Il était là...il était vraiment là ! Cette affirmation chaude et rassurante tournait en boucle dans ma tête sans que je parvienne à penser à autre chose. Je me lovai dans son aura et son odeur psychique unique, m'imprégnant de...lui. Il m'avait tellement manqué.

— Christina...j'ai besoin d'aide !

La voix haletante et à la limite paniquée du docteur Banes me ramena brusquement sur terre et à la terrible situation dans laquelle nous nous trouvions. Soudain rattrapée par l'épuisement et mon brusque retour à la réalité, mes muscles tétanisés par les efforts et le froid de plus en plus pénétrant de l'eau me lâchèrent, envoyant ma tête sous la surface.

L'eau sale et glacée qui pénétra soudain dans mes oreilles et ma bouche entrouverte me fit comme un électrochoc, forçant mes jambes à me propulser vers la surface. Crachotante, je me forçai à bouger mes bras et mes jambes pour lutter contre un nouvel engourdissement, puis tout en restant connecter à Jude, j'allais passer mes bras sous le corps de Célia et aidai Rebecca à la tracter jusqu'à la planche flottante.

— Vite Christina aidez-moi ! Il faut que son dos repose sur la planche, m'ordonna Rebecca qui était instantanément repassée en mode médecin efficace. Vous allez la maintenir dessus en passant vos bras sous ses aisselles. Voilà comme ça, approuva-t-elle lorsque j'exécutai ses ordres sans même réfléchir.

— Vous croyez qu'elle a une chance ? lui demandai-je d'une voix à peine audible tellement mes lèvres tremblaient de fatigue et de froid.

— Si j'arrive à lui faire un massage cardiaque, oui ! Normalement l'eau glacée a dû maintenir ses fonctions vitales au minimum, m'expliqua-t-elle tandis qu'elle essayait avec difficultés de lui remonter son tee-shirt trempé pour avoir accès directement à sa peau. Il suffit juste de relancer la machine...enfin en théorie ! termina-t-elle d'un ton hésitant et concentré tandis qu'elle positionnait ses deux mains sur sa poitrine et commençait à appuyer en rythme en comptant à voix basse.

Elle fut contrainte de s'arrêter au bout d'à peine trois pressions, ses mains glissantes et son corps immergé ne lui apportant pas la force suffisante pour continuer.

— C'est pas vrai ! s'exclama-t-elle avec désespoir en giflant l'eau de son poing fermé. Si nous étions sur la terre ferme ça ne poserait pas de problème mais là...je n'ai pas assez de force !

— Et si je calais mon dos contre l'une des parois...on serait plus stable ? lui proposai-je en commençant à nager à reculons.

— On peut essayer, me dit-elle de ses lèvres bleuies par le froid.

Heureusement nous n'en étions pas loin et j'atteins le mur de béton en à peine quelques mouvements. Je faillis hurler lorsque mon dos entra en contact avec la surface rugueuse et surtout tellement froide que son contact sembla me bruler la peau même à travers mes vêtements.

— Allez-y, réessayez ! lui dis-je alors que je poussai du plus fort que je le pouvais contre le mur, calant Célia contre moi. Accrochez votre jambe à la mienne pour vous stabiliser, lui dis-je voyant qu'elle peinait de plus en plus à se maintenir à la surface.

Elle n'hésita pas et une fois en position, reprit ses efforts qui avaient l'air plus efficaces que la fois précédente. Au bout de dix pressions consécutives elle s'arrêta et je cru que tous nos efforts avaient été vain. Mais avant que je n'aie le temps d'ouvrir la bouche, elle prit une grande inspiration tremblante et se repositionna pour continuer le massage. J'avais de plus en plus de mal à maintenir la position, quand dans un hoquet suivit d'un violent soubresaut, le corps de Célia s'arqua soudain reprenant vie sous nos yeux tandis qu'elle expulsait l'eau présente dans ses poumons en toussant violemment.

Elle prit quelques grandes inspirations convulsives, avant d'ouvrir lentement les yeux. Visiblement désorientée, elle s'agrippa par réflexe d'une main au morceau de bois, tandis que de l'autre elle s'accrochait à mon bras d'une poigne nerveuse et tremblante. 

— Qu'est-ce qui...

— Vous étiez inconsciente...on vous a ranimer, lui expliqua Rebecca en s'agrippant à son tour au flotteur pour soulager son corps.

— Longtemps ? je suis restée...ça a duré longtemps ? Et mon bébé...est-ce qu'il...

— Vous êtes lucide et réactive, signe que vos fonctions vitales et cérébrales ont été préservées...il ne devrait pas y avoir de problème pour votre bébé. Mais nous devons sortir de là tout de suite...sauf que le niveau de l'eau n'est pas assez haut pour atteindre les échelles, lui expliqua-t-elle d'une voix rageuse et découragée.

— Il faut tenir bon, les renforts arrivent, leur dis-je lorsque je me rendis compte qu'elles ne pouvaient pas être au courant.

— C'est vrai ! Vous en êtes sûr ? Mais comment...

— Jude est là...je le sens, leur dis-je un petit sourire tendre se dessinant malgré moi sur mes lèvres.

Nous ne pouvions pas communiquer clairement comme je le faisais avec Féline, mais je sentais qu'il approchait. Je ressentais ses émotions et un mélange d'impression mentales qui ne me donnait qu'une vue d'ensemble. Par exemple, je savais qu'ils étaient plusieurs mais sans connaitre l'identité de ceux qui l'accompagnait. Par contre je ressentais son urgence à me rejoindre, mais aussi et surtout son extrême faiblesse et...sa douleur.

Il souffrait, profondément et intensément. Je ne parlais pas d'une douleur psychique parce qu'il s'inquiétait pour moi, même si cette dernière était bien présente et extrêmement forte. Mais d'une douleur physique, diffuse et profonde qui lui sapait toutes ses forces et le mettait en danger. A la seconde où je pris conscience de cela, je sentis la connexion basculer...emportant mon cœur dans sa chute.

« On arrive petite sœur ! Tu es toujours là ? »

« Féline ! Comment va Jude ? » fut la seule pensée qui parvint à fuser de mon cerveau paralysé par le stress.

« ça va. J'ai pris le relai car il s'inquiétait pour toi »

« On va bien mais...on est bloquées dans l'eau...on ne peut pas en sortir ! »

« On est là ! mais...vous êtes dans quel rectangle de pierre ? » m'envoya la panthère apparemment perdue.

« Il y en a plusieurs ? »

« Oui et ils sont immenses »

C'est à cet instant que je l'entendis...ténue d'abord puis de plus en plus forte à mesure qu'il se rapprochait.

— Christina ! Christina où es-tu ?

— Ici ! On est ici ! criai-je en retour en pleurant de soulagement alors que mes compagnes mêlaient leurs voix à la mienne pour les guider jusqu'à nous.

Celle que j'aperçue en premier fut Féline, qui sauta avec souplesse sur le regard de béton entourant la cuve, juste au-dessus de nous. Puis il apparut enfin. Son beau visage ravagé par l'inquiétude était à moitié masqué par ses cheveux qui lui tombèrent devant les yeux lorsqu'il se pencha dangereusement au-dessus de l'eau. Son regard se riva au mien et il tendit le bras vers moi dans l'espoir de m'atteindre mais nous ne réussîmes qu'à nous effleurer le bout des doigts.

Aucun mot ne s'échappait de nos bouches mais nous n'en avions pas besoin. Nous étions vivants et enfin ensemble et c'était tout ce qui importait. Jusqu'à ce qu'il réalise que je n'étais pas seule et que son regard ne dérive sur Célia, toujours agrippée à moi.

Ses yeux s'écarquillèrent sous l'effet de la surprise et une fois le choc initial passé, je vis des larmes perler aux coins de ses paupières, alors que ses yeux tendre et embués restaient rivé à ceux de son premier amour.

Mon cœur me fit l'effet de s'arrêter net, avant de sombrer tout doucement, se fondant à mon désespoir. Ce que je redoutais tant était arrivé...le pire était que je ne pouvais même pas leur en vouloir...

« Christina...regarde-moi !» le message mental qui me parvint était brouillon mais tellement impératif que j'obéis sans réfléchir pour me perdre de nouveau dans son beau regard sombre et ce que j'y lu...me fit comprendre que j'avais été idiote de douter de lui, ne serait-ce qu'un instant.

Il était choqué, surpris et heureux que Célia soit en vie...mais ce n'était rien en comparaison du soulagement et du bonheur qu'il avait de me retrouver. Sans moi sa vie n'avait plus de sens...sans moi il n'était rien.

Tous ces sentiments à la fois bruts et complexes déferlèrent en moi, comme si une barrière venait brusquement de céder entre nous, me donnant accès à toutes ses émotions. À contrecœur et non sans m'avoir rassuré d'un dernier regard, il coupa le contact visuel avant de se redresser et de regarder une dernière fois Célia, comme pour vérifier qu'il ne rêvait pas.

— Tenez bon, on va vous aidez à sortir de là !

Il essaya de nous le cacher mais je vis la grimace qu'il ne put réprimer lorsqu'il se retourna d'un mouvement un peu vif avant de commencer à appeler les autres d'une voix légèrement altérée.

— River ! Charles ! Par ici.

— Charles...mon père ? Mon père est ici ? demanda Célia d'une petite voix paniquée que Jude, d'où il se trouvait, ne pouvait pas entendre.

— Sûrement, lui répondis-je d'une voix lasse et inquiète, sentant qu'il y avait vraiment quelque chose qui clochait avec Jude.

— Il ne faut pas qu'il sache...pour le bébé. Je vous en supplie...il ne faut pas lui en parler, nous murmura Célia d'un ton anxieux et précipité.

— D'accord ne...

Un bruit sourd mais puissant ce fit soudain entendre en provenance de la paroi en verre du bassin, me coupant très efficacement la parole. C'est avec une appréhension sourde que nous levâmes toutes les trois les yeux vers la source du vacarme, alors que deux nouveaux coups plus puissants que les précédents résonnaient, faisant vibrer la surface de l'eau.

C'est alors que le son caractéristique du verre qui se brise retentit, très vite perdu dans le grondement effrayant de l'eau s'engouffrant dans la brèche, à la suite du mutant qui venait d'exploser la vitre.

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Voilà ! Le chapitre tant attendu est enfin là et avec un jour d'avance en plus ;-) Comme j'ai manqué un peu de calme sur la fin de l'écriture du chapitre, certaines choses seront à reprendre ! J'espère quand même qu'il vous a plu ?! ^.^

Je tenais à vous dire que "Féline", "Chimère" et "Symbiose" sont respectivement #1, #3 et #5 du classement Fantastique et ça c'est...entièrement grâce à vous *o* Alors tous pleins de bisous et de mercis *-*

Kisssssssss*o*