Chapitre 13-2
Je gémis et ne pus qu'attendre en haletant que le terrible spasme qui me tétanisait le ventre cesse, me permettant de respirer de nouveau normalement. Le bébé ! J'étais certainement en train de perdre le bébé ! Mais ne serait-ce pas la meilleure chose qui pourrait lui arriver ? À peine cette pensée m'avait-elle effleuré l'esprit que je sus que je ne le pensais pas vraiment. Surtout quand un deuxième spasme encore plus important que le premier m'obligea à me laisser glisser jusqu'au sol, où je ne pus que rester assise les mains crispées sur mon ventre et le cœur prit dans un étau.
— Christina ! Vous devez déplier les jambes et respirer le plus profondément possible ! Vous m'entendez ?
La voix du docteur Banes me sortit de ma spirale de peurs et de douleurs et j'essayai de faire ce qu'elle me demandait, tandis qu'elle s'éloignait en courant et farfouillait fébrilement dans le capharnaüm qu'était à présent devenu l'infirmerie. Elle revint au bout de quelques secondes, tenant une seringue dans une main et tirant le chariot d'écho derrière elle de l'autre.
Sans prononcer le moindre mot et en évitant toujours de me regarder dans les yeux, elle me prit le bras et sans désinfection préalable, ni avertissement, me planta vivement l'aiguille dans le pli du coude avant d'appuyer sur le piston.
— C'est pour stopper les contractions, me dit-elle tandis qu'elle allumait la machine qui émit un biiip strident de protestation.
— Est-ce...je suis en train de perdre le bébé ? lui demandai-je d'une voix saccadée et essoufflée mais audible, à présent que la douleur et les spasmes s'atténuaient doucement.
— On va tout faire pour que ça n'arrive pas, mais...je ne comprends rien à votre grossesse ! Et...au final je ne sais même pas ce que vous êtes ! Pour ce que j'en sais, ce que je trouve impossible est peut-être normal pour vous ?!
— Je ne comprends pas ! De quoi parlez-vous ? Et qu'avez-vous vu à la première écho ?
— D'après vos analyses de sang, vous seriez enceinte de deux semaines environs.
Des souvenirs des deux fois où Jude et moi avions fait l'amour, me revinrent subitement, inondant mon cœur d'amour et de regret, tandis qu'une tristesse profonde remplissait mes yeux de larmes.
— Oui, c'est cohérent, acquiesçai-je d'une voix serrée en soulevant mon t-shirt alors qu'elle s'apprêtait à me faire un second examen.
— Le problème, c'est qu'à l'image, les embryons ont la tailles et l'apparence de fœtus de trois mois !
— Attendez ! Je serais enceinte de trois mois alors ? Mais c'est impossible, je...
Ce n'est qu'à cet instant que je réalisai l'emploi du pluriel. Je senti un mélange de peur, d'angoisse et de...d'incrédulité m'envahir, tandis que Féline percevant mon trouble, tentait de m'envoyer des pensées apaisantes.
— Vous avez bien dit « les » ? demandai-je d'une voix tremblante et mal assurée.
— Oui, me répondit-elle d'une voix plus douce. Il y en a deux. Des faux jumeaux, qui pour le moment, se portent très bien ! conclut-elle en fixant son écran avec attention.
Deux...des jumeaux...déjà trois mois de grossesse...Non...C'était impossible ! Comment allais-je faire pour m'enfuir d'ici, si j'avais des contractions tous les deux pas ? Et comment se développait une grossesse métamorphe ? Combien de temps me restait-il jusqu'à l'accouchement ? Oh mon dieu...c'était une véritable catastrophe !
— Les contractions que vous venez d'avoir n'étaient qu'une alerte. Ce qu'il vous faut à présent c'est du repos, continua-t-elle, tandis qu'elle essuyait le surplus de gel resté sur ma peau, apparemment ignorante de la tempête émotionnelle qui se déchainait sous mon crâne.
— Du repos ?! Du repos ! répétai-je incrédule, sentant même une pointe de rire s'insinuer dans ma voix. Vous plaisantez j'espère ? Il faut que je sorte d'ici tout de suite, je...je ne peux pas rester là. Les renforts vont arriver d'une minute à l'autre, lui-dis-je tandis que je commençai à me relever en prenant appui sur le mur.
— Vous n'êtes pas en état de vous enfuir, vous devez...
— Mais vous ne comprenez pas ! m'exclamai-je en faisant quelques pas prudents dans la pièce. Vous aussi êtes en danger à présent ! Quand ils verront...quand ils le trouveront mort, ils comprendront que vous avez assistée à toute la scène et que vous êtes au courant de...ma vraie nature. Après ça, ils ne vous laisseront plus jamais partir d'ici !
Je cherchai à capter son regard, de nouveau hypnotiser par le cadavre de Krüller.
— Docteur Banes, regardez-moi ! Je n'ai fait que me défendre...que nous défendre en utilisant les seuls moyens à ma disposition. C'était lui le monstre...pas moi ! Vous devez me faire confiance, lui dis-je d'une voix plus douce alors qu'elle consentait enfin à me regarder dans les yeux. J'ai besoin de vous autant que vous avez besoin de moi...
Des coups forts donnés contre la porte retentir soudain nous faisant sursauter, suivit de tentatives musclées et répétées pour tenter de faire pivoter le battant, qui pour le moment, tenait bon.
« Docteur Banes, vous êtes là ? Que se passe-t-il là-dedans ? Pourquoi la porte est-elle fermée ? »
— Ne répondez pas ! lui mimai-je frénétiquement, tandis que je m'éloignai de la porte le plus silencieusement possible.
« Docteur Banes ? Krüller ?! »
À ma grande horreur, elle resta là figée, les yeux rivés sur la porte, apparemment indécise. Lorsque je la vis ouvrir la bouche, je compris qu'elle avait choisi son camp et c'est avec un petit pincement au cœur que je tournai les talons pour me ruer sur l'autre sortie. J'allai en ouvrir la porte, quand une main se posa sur mon bras, faisant bondir mon cœur jusque dans ma gorge.
— Pas par-là ! me murmura la doctoresse qui avait visiblement changé d'avis, avant de donner un tour de clef dans la serrure pile au moment où la poignée se mettait à tourner, nous faisant toutes deux reculer précipitamment.
Elle me fit signe d'attendre, puis rapidement et sans un bruit, elle alla récupérer plusieurs choses qu'elle fourra dans les poches de sa blouse, avant d'en attraper une nouvelle accrochée au mur à côté de son bureau. Elle me rejoignit et se dirigea vers une porte presque invisible dans un renfoncement de la pièce qu'elle ouvrit, m'invitant à l'y suivre. L'endroit qui tenait plus du cagibi que de la pièce, servait de toute évidence de réserve, vu les étagères pleines à ras-bord qui ornaient tous les murs disponibles.
— Et maintenant on fait quoi ? On ne peut pas rester cacher ici...ils vont nous trouver ! lui dis-je dans un chuchotement inquiet alors que des bruits de plus en plus fort en provenance de la salle principale, indiquaient qu'ils étaient sur le point d'entrer.
— Non...attendez...me répondit-elle, tandis qu'elle tirait vers elle l'une des étagères métalliques, avant de se glisser derrière et de...traverser le mur !
Avant que je n'aie eu le temps de me remettre de ma surprise, elle réapparu et m'attira vers elle d'un geste vif. Ce que dans la pénombre j'avais pris pour un mur était en fait un rideau, qui séparait la pièce en deux, coincé entre deux rangées d'étagères.
— Peu de personnes savent que ces deux pièces n'en font en fait qu'une. Ils ne viendront pas nous chercher ici. Me dit-elle, alors que nous respirions enfin un peu plus librement. Mais nous ne pouvons pas rester là, c'est le local d'entretien, il y a donc beaucoup de passage...
— Il faut que nous sortions de ce complexe.
— Il faut d'abord que vous vous reposiez ! me répondit-elle aussitôt d'un ton borné. Si nous tentons de fuir maintenant...vous allez faire une fausse-couche ! C'est ce que vous voulez ?
Pendant une fraction de seconde, l'idée m'effleura, avant de repartir aussitôt en remplissant mon cœur de honte et de remords. Non...ces petits êtres faisaient déjà parti de moi. Même si j'étais terrifiée, pour moi, pour nous, pour eux...cela prouvait justement qu'ils étaient déjà importants et que je ne supporterai pas de les perdre.
— Que suggérez-vous dans ce cas ? lui demandai-je, alors qu'une nouvelle contraction, moins forte que les précédentes, me tordait le ventre, appuyant les propos de la doctoresse.
— Nous devons trouver un endroit sûr où nous cacher, le temps que vous preniez un peu de repos. Le problème...c'est que je ne sais pas où ! me dit-elle d'une vois anxieuse en me jetant un regard désolé.
C'est alors qu'un bruit de petites pattes courant sur du métal résonna soudain dans la petite pièce. Le docteur Banes fit un bond en arrière en se retenant in-extremis de hurler, une main plaquer sur la bouche.
« Squiit...moi savoir où trouver endroit calme pour bébés...Squiit...deux jambes gentille suivre moi ! ».
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