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CHAPITRE 43 - Visite surprise

MADDY

Mikaëla m'avait réveillée à l'aube sans aucune pitié. Nous avions pris le premier bus pour Malibu et nous voici maintenant au bord d'une plage, les pieds dans le sable, à admirer les vagues qui rythmaient les paysages de la ville. Il n'y avait personne, c'était beaucoup trop tôt pour être là. Les beaux jours étaient presque de retour, mais pas assez pour se baigner, l'Océan Pacifique était encore trop froid pour ça. Alors qu'est-ce que nous faisions là au juste ?

Ma sœur et moi nous tenions assises sur un rocher. Elle était paisible et moi aussi. Nous profitions de l'air marin dans le silence, les cheveux au vent. C'est alors qu'elle posa sa tête sur mon épaule et que je l'entourai avec un bras pour me montrer réceptive à son contact. C'était tellement rare que nous soyons aussi proches, mais quand c'était le cas, il y avait quelque chose de réconfortant dans nos gestes, comme si nous étions, l'une pour l'autre, le pilier qui avait manqué tout au long de nos vies.

Parfois les amis, les parents, les amours, n'étaient pas suffisants pour mettre du baume sur nos coeurs... Mais une sœur, ça oui.

Même avec les tempêtes que nous engendrions, elle et moi, un éclat de lumière pouvait toujours percer les nuages sombres.

« Je venais tout le temps ici quand ça n'allait pas à la maison, avoua Mikaëla, Il y avait mille choses à faire à Malibu, mais ici, c'était mon endroit préféré pour rester seule.

- Ça ne va pas aujourd'hui ? demandai-je en continuant de regarder l'horizon,

- Si, mais je voulais venir ici une dernière fois, et avec toi, pour donner un nouveau sens à cet endroit.

- Qu'est-ce-que tu veux dire ?

- Cette plage était le lieu qui me servait à fuir ma vie compliquée. Maintenant c'est juste une plage où j'ai admiré l'océan aux côtés de ma sœur, je sentis sa joue se contracter et sourire contre mon épaule,

- C'est beau ce que tu dis, murmurai-je,

- Même si je ne reviendrais plus jamais sur cette plage, cet endroit est désormais associé à quelque chose de positif, Mikaëla se redressa et me regarda, C'est le souvenir que je veux en garder. »

Je lui rendis un sourire compatissant et touché. Un silence confortable s'installa entre nous, seuls le bruit des vagues et le cri des mouettes rompaient la fin du lever de Soleil auquel nous assistions. Je me sentais sereine, en parfaite osmose avec Mikaëla et heureuse d'être là, avec elle.

Finalement, elle se leva du rocher, essuya les quelques grains de sable qui s'étaient accrochés à son pantalon, puis me tendit une main pour m'entraîner avec elle.

« Allez, viens. On va faire un petit tour à la prison de Malibu, annonça-t-elle avec légèreté,

- Tu sais comment briser l'ambiance, toi, hein ? je fis de gros yeux et secouai ma tête, désespérée. »

Mikaëla ricana, puis nous nous éloignâmes petit à petit de la plage.

Je ne lui avais posé aucune question, mais j'imaginais que ce passage en prison servirait sûrement à prendre officiellement connaissance du décès d'Ana, ainsi qu' à régler des affaires administratives.

Une fois sur place, nous fîmes notre entrée comme si nous étions tout à fait habituées à mettre les pieds dans ce genre d'endroit. Enfin, c'était surtout Mikaëla qui était à l'aise... Avait-elle déjà été contrainte à se rendre en prison pour rendre visite à sa mère ? A ses petits amis ? C'était perturbant et bizarre, mais je me contentai de l'accompagner.

Nous nous arrêtâmes au niveau d'un sombre guichet. Ma soeur appuya sur une sonnette et la petite fenêtre du cagibi s'ouvrit, dévoilant une femme en uniforme civil et armée. Elle se tenait assise devant un bureau entouré de paperasse, l'écran de son ordinateur éclairant toute la pièce avec la luminosité maximale. Elle n'avait pas l'air très commode.

« Accueil de la Prison de Malibu, en quoi puis-je vous aider ?

- On m'a annoncé que l'un de mes proches était décédé ici, j'aimerais vérifier cette information et prendre contact avec quelqu'un qui pourrait me guider au niveau des procédures qui doivent suivre si c'est bien le cas, répondit Mikaëla,

- Nom et prénom du prisonnier en question ?

- Ana Jones. »

La bonne femme se tourna vers son odinateur, tapa péniblement le nom annoncé sur son clavier et approcha sa tête de son écran pour admirer une longue liste de prénoms et essayer de trouver celui d'Ana. Elle passa d'interminables minutes à chercher. Mikaëla avait fini par croiser ses bras et lever ses yeux au ciel.

« Si ce putain de Nate m'a menti, je vais l'assassiner... marmonna-t-elle dans sa barbe,

- Qu'est-ce que tu dis ? lui demandai-je,

- Rien, rien. »

La dame de l'accueil s'adressa enfin à nous, mettant fin à cet instant de suspense.

« Effectivement, Ana Jones est décédée. Je lis ici qu'elle a été victime de meurtre, commis par... elle se tût, Quel était son lien avec vous ? elle sortit un formulaire et se mit à le remplir,

- C'était ma mère, annonça-t-elle neutralement, Et oui, elle a été tuée par son copain, je le sais.

- Et vous vous sentez bien !? se stupéfia la policière,

- Vous êtes psy ? l'interrogea Mikaëla sans attendre de réponse de sa part, Non ? Alors faites votre boulot ! »

L'agente dévisagea ma sœur et cette dernière ne manqua pas de la dévisager encore plus arrogamment, puis elle s'exécuta, continuant à poser des questions et à remplir son fameux formulaire. Lorsque cette étape fut finie, la femme passa un coup de fil, fredonna quelque chose dans son talkie walkie et un autre policier ne tarda pas à apparaître dans le hall où nous étions. Il nous salua et nous demanda de le suivre. Nous traversâmes un long couloir de cellules remplis de prisonniers les uns plus intimidants que les autres jusque dans une pièce où se trouvaient une table et quelques chaises.

Après quelques brèves présentations, nous nous installâmes autour de la table. Mikaëla posa sa main dans la mienne, sur mes genoux, et nous entrâmes dans le vif du sujet.

« Alors, Ana est décédée il y a quelques jours déjà. Nous avons archivé toutes ses ressources et biens en attendant que quelqu'un de sa famille vienne les chercher, et vous voilà ! Donc vous êtes toutes les deux ses filles ? Dans ses documents, je n'ai vu que Mikaëla, lança le policier en s'avachissant sur sa chaise et en regardant les papiers qu'il avait déposés sur la table,

- Non, c'est moi Mikaëla, je suis la fille d'Ana, et Maddy est ma sœur du même père, c'est tout. Elle est là pour m'accompagner.

- Ok, ça a l'air compliqué cette histoire, il fronça des sourcils,

- Oui, mais ce n'est pas le sujet, elle acquiesça,

- Vous avez raison... Passons au plus important... il se munit d'un stylo, Nous avons conservé le corps au mieux. Vous souhaitez la voir ?

- Non.

- Je comprends tout à fait... Quelle option conviendrait le mieux ? Incinération ou enterrement ?

- Incinération, elle répondit du tac au tac, C'est moins cher et comme ça, elle deviendra poussière en hommage à la poudre qu'elle aimait tant sniffer. »

Le policier avala sa salive et échangea un regard rempli de surprise avec moi. Même si je concevais que ses propos étaient étranges à entendre, j'haussai des épaules. C'était violent, mais je n'en attendais pas moins de la part de Mikaëla. Comment digérer la mort d'une mauvaise mère ? La réponse à cette question était complexe, elle avait donc le droit de le faire comme bon lui semblait. Et puis, j'étais contente de la voir enfin s'exprimer.

« Ok... Euh... Vous payerez comment ? reprit le policier,

- Prenez dans le compte d'Ana, affirma Mikaëla,

- C'est votre héritage, il tourna les pages de son dossier, Enfin, dans son testament il est écrit que sa fortune devrait revenir à Benjamin Smith, mais comme il est condamné à perpétuité pour son meurtre, cela vous revient, à vous.

- Ana avait mis ça dans son testament ? Elle était vraiment trop stupide ! ricana Mikaëla, Bon parfait. Je vous paierai ce qu'il faut et je prendrai le reste. Il ne doit pas y avoir grand-chose de toute façon.

- Vous désirez faire une cérémonie ? Ici, on a une petite chapelle dédiée à...

- Non, pas de cérémonie, elle le coupa,

- D'accord.

- Une préférence pour la date de l'incinération ? Vous serez présente ?

- Non et non. Je vous laisse faire comme bon vous semble.

- Vous êtes dure avec votre mère, déclara le policier avec peine pour la défunte,

- Vous êtes-vous demandé si elle était dure avec moi ? »

Il se tût et arbora un air désolé. Pour Mikaëla c'était déjà trop de s'être déplacée pour tout ça, alors il ne fallait pas lui en demander plus, et la connaissant, je savais qu'elle aurait pu faire des choix bien pires pour sa mère. Mais le pauvre policier ne pouvait pas le deviner, alors je comprenais ses réactions.

« Est-ce que vous avez des documents relatifs à son domicile ? Mikaëla relança la conversation,

- Oui, il continua de tourner ses pages, puis pointa son stylo sur quelques lignes,

- La maison est au nom de qui ?

- Un certain Ted Perez...

- Ted ? ma soeur se retourna vers moi, le sourire aux lèvres, Je suis contente que ça ne soit pas au nom de Benjamin ! Mais tu te rends compte que Ted a acheté une maison pour ma mère, alors qu'il était en couple avec la tienne ? C'est une dinguerie !

- Mon père et sa double vie... Quel chien ! intervins-je pour lui répondre, Mais si on essaie de voir le bon côté de cette situation c'est que tu as grandi en ayant un toit sur la tête, c'était la moindre des choses.

- Et ce qui est encore mieux, c'est que je vais facilement pouvoir reprendre la maison pour en faire quelque chose.

- Vous pensez en faire quoi ? rétorqua le policier, encore perturbé par l'échange que ma soeur et moi venions d'avoir,

- Je ne sais pas trop, peut-être jeter quelques trucs, faire un peu de ménage et la mettre en location. Une maison en plein Malibu, au bord de la plage, ça peut faire fureur ! Je pourrais toucher une jolie petite somme tous les mois ! elle se frotta les mains,

- Ah... le policier réajusta le col de son uniforme, il était mal à l'aise, Vous trouvez des solutions très radicales pour quelqu'un qui vient de perdre un être cher.

- Cher ? Oui, c'est le prix que ça m'a coûté de vivre avec cette femme une bonne partie de ma vie. Alors je rentabilise maintenant ! elle fit un clin d'oeil au policier. Vous avez d'autres sujets importants à aborder avec moi ? Je suis là pour ça aujourd'hui et je ne reviendrais pas de si tôt. »

Le policier continua d'aborder des points ennuyants et administratifs, tout en faisant signer certains papiers à ma sœur. Il avait fini par s'habituer à son "je m'en foutisme" apparent.

« Est-ce qu'on peut voir Benjamin Smith ? demanda-t-elle tranquillement avant que nous puissions quitter cet endroit lugubre,

- Quoi ? Tu veux vraiment le voir ? me stupéfiai-je,

- Oui, une dernière fois, juste pour le fun !

- Suivez-moi, je vous laisserai 5 minutes avec lui, pas plus, le policier nous ouvrit la porte. »

Nous montâmes des étages et marchâmes longtemps avant d'arriver à destination. Cette prison était énorme. Le policier nous ouvrit la cellule de Benjamin et se mit à l'écart, mais assez près pour intervenir en cas de danger.

« Smith ! Debout ! Il y a de la visite ! » cria l'homme.

Benjamin était couché au fond de son lit. Il se retourna et se leva avec difficulté, après tout, il était assez vieux pour avoir des problèmes de dos et d'articulation. Sa tenue de prisonnier était sale, et sa barbe négligée témoignait d'un manque d'hygiène flagrant. Des menottes retenaient ses chevilles pour l'empêcher d'aller plus loin qu'un certain périmètre.

Il était effrayant. Et se dire qu'il avait violenté une mère et sa fille pendant des années, ainsi que tué cette même mère il y a quelques jours, cela le rendait encore plus effrayant.

Mikaëla s'avança d'un pas vers lui, mais je la pris par le bras et m'accrochai à elle pour la retenir et l'empêcher de s'approcher davantage.

Il releva son visage et ouvrit les yeux avec peine. Lorsqu'il reconnut la fille de sa défunte compagne, il écarta ses paupières comme s'il venait de voir un fantôme. Sa respiration se fit entendre de plus en plus fort, il avait une haine palpable envers ma sœur.

« Qu'est-ce que tu fais là, petite peste ? grogna-t-il de sa voix rauque,

- Petite visite surprise, comme ça, pour le plaisir ! dit-elle ironiquement,

- Tu as ramené ta jumelle maléfique ? Pour quoi faire ? Je te fais peur ?

- Non, mais avec ma sœur, je me sens plus complète et je voulais juste te cracher mon bonheur à la figure, elle mit un bras autour de mes épaules,

- Ta mère est morte et tu es heureuse ? Ingrate ! cria-t-il,

- C'est l'hôpital qui se fout de la charité là, non ? elle s'esclaffa, Bref, je n'ai plus le temps pour toi. Je tenais juste à te dire que quand j'ai appris la nouvelle, sur le coup, j'ai eu très envie de te tuer, mais je vais t'épargner.

- Hahaha, et on peut savoir pourquoi autant de générosité ?

- Parce que finalement, vu que tu es coincé ici éternellement, je me suis dit que c'était beaucoup plus drôle de te laisser en vie. Comme ça en plus de connaître l'enfer après la mort, tu le connaîtras aussi sur terre ! »

Benjamin balbutia, cherchant une répartie pour débattre avec Mikaëla, mais elle l'avait déjà exterminé.

« Allez, viens, on s'en va. » lui proposai-je avant qu'il n'arrive à continuer la conversation.

Le policier qui nous chaperonait jusqu'à présent referma la cellule derrière nous. Avant de quitter l'établissement pénitentiaire, ma sœur lui fit une requête bien particulière...

« Je ne sais pas si vous avez une communauté LGBTQ+ dans le lot des prisonniers, mais n'hésitez pas à y intégrer Benjamin. Il se sentira moins seul, expliqua-t-elle sur un faux ton sérieux,

- Smith est homosexuel ? demanda l'agent,

- Oui, mais il a beaucoup de mal à l'assumer... Ne lui dites pas que je vous l'ai dit, mentit-elle,

- C'est noté, merci pour l'information, le policier nous salua respectueusement et nous ramena jusqu'à la sortie. »

Une fois dehors, je laissai éclater le rire que j'avais retenu face au dernier coup que Mikaëla avait mis en place. Elle me regarda, essayant de s'en empêcher, puis éclata de rire à son tour.

« Oh mon Dieu, Mikaëla, tu n'es pas croyable ! m'exclamai-je,

- Eh bien, il faut bien que je mette à profit mon humour noir, n'est-ce pas ? Même s'il y a peu de chances que Benjamin tape dans l'oeil d'un gay, je mise tout sur le fait qu'il puisse être très mal à l'aise en étant entouré par la communauté. C'était un sacré homophobe. »

Nous nous appuyâmes l'une contre l'autre pour reprendre nos souffles.

« On fait quoi maintenant ? je réajustai le bandeau blanc que j'avais dans les cheveux,

- On va se trouver un restaurant avec vue sur la plage et on va déjeuner, c'est Ana qui régale ! elle accrocha allègrement son bras au mien. »

Alors que nous nous dirigeâmes vers le centre ville, auprès des commerces et restaurants qui animaient les rues, je me sentis partagée entre soulagement et malaise. Certes, d'un côté, j'étais soulagée de la voir agir avec une telle force et résolution face à ses problèmes. Il était évident qu'elle avait pris une décision consciente et réfléchie de la manière dont elle voulait gérer cette situation difficile. D'un autre côté, son comportement provocateur et détaché, même dans des circonstances aussi graves, me troublait. J'avais l'impression qu'elle dissociait. Elle était passée de la fille muette, névrosée et renfermée à la fille super positive, ambitieuse et de bonne humeur en un claquement de doigts. C'était trop extrême, cela dépassait les limites même de sa propre personnalité.

Nous trouvâmes un restaurant qui nous mit toutes deux d'accord, et la serveuse nous plaça en terrasse, en plein soleil, avec vue sur l'océan, comme elle le souhaitait. Malgré les rayons de l'astre qui brûlait dans le ciel, les températures étaient encore un peu froides, alors je fermai ma veste et sortit une cigarette pour me réchauffer. Mikaëla ajouta ses lunettes de soleil au bout de son nez, et voilà, nous ressemblions à deux parfaites pétasses en terrasse, prêtes à juger tous les passants.

« Est-ce que je vous sers quelque chose en apéritif, mesdames ? suggéra la serveuse,

- Un verre de blanc pour moi, s'il vous plaît, répondit Mikaëla,

- Pour moi aussi. »

La serveuse prit nos commandes et disparut.

J'en profitai pour revenir à mes pensées initiales et observai ma soeur. Elle ferma ses yeux derrière ses lunettes et profita de la brise qui soufflait légèrement sur son visage. Elle avait l'air en paix avec elle-même.

« Mikaëla, ça va ? demandai-je calmement,

- Ça va mieux que jamais, Maddy, elle se tourna vers moi, un doux sourire aux les lèvres,

- Pour être tout à fait honnête avec toi, je suis confuse par rapport à tes changements d'humeur, j'aspirai la fumée de ma cigarette,

- Je comprends et j'en suis désolée... elle marqua une pause avant de se confier, En fait, j'étais révoltée contre moi-même parce que j'avais honte de ne pas être triste pour Ana. Puis j'ai compris que je n'arriverais jamais à l'être, alors j'ai décidé d'assumer mon deuil inexistant. J'ai des problèmes plus importants que ça, comme ma santé mentale, par exemple. Je suis déjà un peu dérangée psychologiquement, alors pourquoi me tracasser avec un souci en plus ? C'est un souci qui n'a pas lieu d'être, alors je préfère le prendre à la légère, parce que je n'arrive tout simplement pas à le prendre autrement que comme ça.

- Je vois... Mais tu peux toujours te confier à moi, ok ? Même si tu penses que tes problèmes ne sont pas aussi graves que ceux que tu as déjà.

- Je le sais, Maddy, elle hocha de la tête, Mais pour l'instant, je veux juste profiter de ce moment ensemble, ici, maintenant. On pourra parler des problèmes une autre fois, si tu veux. »

La serveuse arriva avec nos verres de vin et prit notre commande pour le déjeuner. Nous trinquâmes en levant nos verres.

« Au point final, à la page qui se tourne, aux nouveaux chapitres ! » affirma Mikaëla.

"Aux nouveaux chapitres". C'était probablement ça la partie la plus importante pour elle. Cette mort faisait place à un nouveau départ. Un VRAI nouveau départ. Ses mots résonnaient dans mon esprit, et je réalisais à quel point elle avait raison. Parfois, il était nécessaire de laisser certaines choses derrière soi pour avancer.

Et pour une fois, elle avait maintenu un discours sage sur sa santé mentale. Elle m'avait donc laissée penser qu'elle serait ouverte à consulter des spécialistes pour soigner ses blessures intérieures. Espérons que lorsque le moment viendrait d'aborder ce sujet, cela serait toujours le cas.

La serveuse refit son apparition et déposa nos assiettes de lasagne sous nos yeux. Une petite photo pour nos stories Instagram et le tour était joué !

Je décidai de parler de tout autre chose pour être en harmonie avec la devise du jour : "Au point final, à la page qui se tourne, aux nouveaux chapitres !".

« Tu fais la gueule à Cassie au fait ? je pris une bouchée de ma nourriture,

- Non, j'ai juste agi sur le coup de mes émotions. Elle sait très bien que j'étais dépassée par les événements, mais je reviendrais quand même bientôt vers elle pour lui expliquer que tout va bien entre nous.

- Le fait qu'elle parle toujours à Nate m'échappe encore.

- On ne peut pas lui en vouloir pour ça, ça ne regarde qu'elle, j'ai fait ce que j'ai pu, elle soupira, Mais tout compte fait, juste pour cette fois, Nate était utile dans l'équation.

- J'espère que Luke se raisonnera.

- Mais oui ! elle but une gorgée de son vin. »

Nous continuâmes de manger tranquillement. Ma sœur vola un bout de ma lasagne pour m'embêter et nous commençâmes une mini bataille de fourchettes pour nous empêcher de piquer dans l'assiette l'une de l'autre. Malgré les raisons plutôt hostiles de notre escapade à Malibu, je devais admettre que cette journée était l'une des meilleures que j'avais passées en sa compagnie. Il y avait quelque chose de libérateur dans l'air.

Je lui lançai un regard complice.

« Au fait, Evan baise bien ? fis-je sous un air espiègle,

- Si tu n'étais pas entrée dans la chambre à chaque fois qu'il se passait quelque chose entre lui et moi, peut-être que je le saurais !

- Ah donc vous étiez bien en train de faire des trucs ! je bougeai mes sourcils pour la taquiner et elle haussa ses épaules pour ne pas me répondre, Quand est-ce que vous vous parlerez sérieusement ?

- De quoi ?

- De vous deux.

- Je ne vois pas ce qu'il y aurait à rien à dire.

- Il y aurait plein de choses à dire. Evan m'en a dit plein quand tu n'étais pas là.

- Il a dit quoi ?

- Demande lui, je gardai le mystère,

- Seulement si tu donnes une chance à Lévy.

- Comment ça !? je m'étouffai avec un bout de salade,

- Vous vous plaisez.

- Euh, non.

- Euh, si, elle m'imita,

- D'accord, il est mignon, mais il est chiant, je pris un air exaspéré,

- Tu adores ça, Maddy. S'il arrêtait de te faire chier, ça te manquerait. Puis, le dernier mec que tu as géré c'est Nate ! Il faut faire une mise à jour, ma belle.

- C'est vrai que dit comme ça... je croisai mes bras,

- Tu invites Lévy à sortir, et moi, je vais parler à Evan, proposa Mikaëla,

- Je ne suis pas comme ça !

- Alors moi non plus ! »

Au fond, c'était tentant. Il y avait une toute petite part de vérité dans cela : même si je ne le dirais jamais à haute voix, je prenais du plaisir à laisser Lévy courir après moi. Mais de là à lui proposer une sorte de date ? Ce n'était pas dans mes habitudes de faire ça. Mais... Si ça pouvait aider Mikaëla et Evan...

« Bien, mais je le ferai juste pour toi ! annonçai-je avec fierté,

- Juste pour moi, mmmh ? elle pouffa de rire,

- Arrête de te moquer de moi ou je laisse tomber !

- Envois-lui un message maintenant !

- Maintenant !? C'est pas un peu trop précipité ? »

Mikaëla attrapa mon téléphone dans la poche de ma veste et menaça d'écrire le message elle-même. J'essayai désespérément de récupérer mon portable.

« Tu fais quoi ce soir, abruti ? J'ai envie de boire un verre au Blue Pub, disait-elle à voix haute au fur et à mesure qu'elle écrivait le message,

- Ce soir !? Mikaëla ! Rend-moi ce téléphone !

- Ça va ? Avec ce langage on dirait bien que c'est toi qui l'a écrit ? J'envois ? elle garda le téléphone hors de ma portée,

- Oui, c'est bien écrit, mais ne l'envois pas... la suppliai-je,

- Tu vas le faire ?

- Euuuuuuuuuh... hésitai-je,

- C'est envoyé ! elle appuya sur le bouton d'envoi puis regarda l'écran, OH ! Il vient de le voir ! Il n'attendait que ça ! Il est en train d'écrire !

- REND-MOI CE TÉLÉPHONE ! »

Je sentis mes joues chauffer et rougir de gêne. La situation était drôle et embarrassante à la fois. Mon refus d'envoyer ce message était faux. Si ma sœur ne l'avait pas fait, je ne l'aurais jamais fait.

Je réussis enfin à choper l'appareil de ses mains et je le rangeai immédiatement dans mon sac. Je n'avais pas envie de regarder la réponse de Lévy tout de suite, c'était stressant.

Mikaëla continua sa crise de fou rire, mais je la calmai de suite.

« Et toi, tu ne vas pas t'échapper, tu vas parler à Evan ce soir aussi ! ordonnai-je,

- Mais oui, madame, ça fait partie de notre accord ! elle acquiesça sans aucune crainte,

- Je ne te crois pas !

- Tu verras, on finit notre journée à Malibu et en rentrant en bus, je descendrais à l'arrêt qui me laissera au plus près de chez Evan et j'irais lui parler. Je te donne ma parole, elle me tendit sa main,

- Marché conclu ! je serrai sa main en affichant un large sourire satisfait. »

EVAN

A peine rentré à de mes vacances, je devais déjà supporter les dîners d'affaires de mes parents. Ils n'étaient presque jamais là d'habitude, mais quand ils l'étaient, ils ne s'arrêtaient quand même pas de parler, respirer, manger et vivre business. En somme, je n'avais pas vraiment de vie de famille et ça m'allait bien, parce que mon père était une personne particulièrement détestable et ma mère n'osait jamais le contredire, même si elle n'était pas toujours d'accord avec lui. Mon frère l'avait échappé belle pour ce soir, il avait été invité à un événement professionnel. Mais en temps normal, les parents aimaient bien que leurs deux enfants soient présents pour les repas à la maison, histoire de passer quelques minutes ensemble, mais surtout de faire bonne figure devant les autres individus de leur milieu. Ils aimaient bien prouver que nous étions une famille unie et parfaite, alors que ce n'était clairement pas le cas.

Il était 18h, j'étais tranquillement posé dans mon lit, le téléphone dans les mains. Je comptais me préparer à la dernière minute, ça agaçait mes parents.

Je repensais sans cesse à Mika, je me demandais comment elle allait. J'avais voulu lui laisser de l'espace, alors je ne l'avais plus recontactée depuis notre dernier baiser à l'aéroport. Heureusement que Maddy était coopérative et m'envoyait de ses nouvelles par message assez régulièrement. Mais, depuis ce matin, je n'en avais plus eu. La dernière chose que je savais était qu'elles étaient parties passer la journée à Malibu.

Ça me travaillait. Je tapotai sur l'écran verrouillé de mon téléphone du bout des doigts. L'envie d'entendre la voix de Mika me démangeait terriblement.

Je me demandais ce qu'elle faisait. Je me demandais si elle pensait à moi aussi. Si elle avait envie de me voir.

Elle me manquait alors que nous nous étions vus il n'y avait pas si longtemps que ça.

Ok. J'allais envoyer un message à Maddy.

« Eh bonhomme ! Habille-toi, les Langford vont arriver dans une heure et je te veux prêt ! » ma mère passa sa tête à travers ma porte entrouverte.

Je sursautai et lâchai mon téléphone dans mes draps. J'étais beaucoup trop distrait, je ne m'attendais pas à ce que ma mère vienne dans ma chambre.

« Maman, je t'en supplie, pour une fois, épargne-moi, je râlai en cachant ma tête derrière mes mains, Je ne suis pas du tout d'humeur à participer à ce genre de dîner, et surtout pas avec les Langford...

- Evan, on t'a laissé aller à Salem avec tes amis pour les vacances, tu pourrais faire un petit effort pour nous remercier, non ? elle rassembla délicatement ses deux mains,

- Je te préviens, je quitterais la table dès que j'aurais fini mon dessert, je ne resterais pas pour assister à vos mondanités ridicules, je soufflai,

- Merci mon bonhomme ! Fais-toi beau ! »

Elle s'approcha de mon lit, me fit un bisou sur le front et disparut.

Je soufflai encore et encore. Je soufflai à l'idée de devoir me préparer. Je soufflai à l'idée de devoir manger à la même table que des gens superficiels. Je soufflai à l'idée même de ne pas avoir Mika avec moi.

Je me levai de mon lit avec une sensation de lassitude anticipée. Je me rendis dans mon dressing et laissai mon regard parcourir les vêtements et chaussures qui s'y trouvaient : j'allais faire simple. Je choisis une chemise noire satinée impeccable, bien repassée, que je laissai assez déboutonnée pour qu'on voit mes colliers en or. Je mis également ma boucle d'oreille, ma montre et ajoutai quelques bagues à mes doigts. J'accompagnai le tout d'un pantalon noir à fines rayures grises que maman m'avait acheté chez un couturier Italien et "hautement renommé" comme elle aimait si bien le dire.

Je me sentais étrangement étriqué dans ces vêtements formels, comme si ma propre personnalité était étouffée sous des couches de conformité, mais il était indéniable que cela me donnait une certaine prestance.

Un coup d'œil dans le miroir et je recoiffai rapidement mes cheveux. Je m'aspergeai avec un peu de parfum et voilà. C'était fini, je ne ferais pas plus d'efforts que ça. Il était hors de question de sortir la cravate ce soir.

Prochaine étape : descendre dans le salon, m'affaler dans le canapé jusqu'à ce que les Langford débarquent et que je doive me comporter tellement à carreaux qu'on pourrait croire que j'ai un balai dans le cul.

Je croisai ma mère dans les couloirs de la maison.

« Qu'il est élégant, mon prince ! elle pinça ma joue, Il ne manque plus que le sourire !

- Oh lâche-moi la grappe, maman ! je repoussai sa main. »

Je descendis les escaliers et avant de me morfondre dans le salon tel un zombie, j'eus l'idée de m'offrir un moment de détente avant que la soirée ne devienne trop pénible.

Je m'éclipsai dans la cuisine, me fondant dans la masse du personnel qui s'affolait dans tous les sens pour préparer je ne sais quel plat, mais ça sentait très bon. Ils avaient l'habitude que je fasse ça, alors ils ne me posaient pas de questions. Je m'arrêtai sur un petit coin de table pour ne déranger personne et sortit de ma poche, mes feuilles, mon tabac, mon herbe et mon grinder pour hacher et mélanger les deux substances et me faire un joint. Ensuite, je calai le pétard derrière une oreille et me dirigeai vers la fenêtre au fond de la cuisine pour m'y percher et fumer en paix. Mes parents n'auraient jamais l'idée de me chercher ici, ils n'étaient pas assez présents pour savoir que je faisais souvent ça.

J'ouvris la fenêtre, m'assis à son bord, mes jambes suspendues, se balançant à l'extérieur de la maison. J'allumai ma cigarette et les vapeurs d'herbe se mirent lentement à se disperser dans mes poumons. Les bruits de casseroles et des conversations entre cuisiniers n'étaient devenus plus qu'un crépitement lointain, un bruit de fond. Mes nerfs se décontractèrent petit à petit.

Je fermai les yeux, laissant mes pensées vagabonder dans mon esprit. Des images de Mika surgissaient : son sourire, ses yeux, ses cheveux, sa nuque. Je crus presque sentir sa présence à mes côtés. Puis j'ouvris les yeux et constatai que j'avais déjà fumé la moitié du joint sans m'en rendre compte.

Malheureusement, on vint briser mon délire.

Mon père m'avait retrouvé et avait décidé de me ramener brutalement à la réalité. Il m'arracha brusquement le joint de la bouche et le jeta à travers la fenêtre, quelque part dans notre jardin. Je le regardai perplexe. En même temps, j'étais en train de planer et même si ce qu'il venait de faire m'énervait, je n'arrivais pas à réagir en tant que tel.

« Putain, mon joint ! m'exclamai-je en le regardant tomber dans les pivoines,

- Ce n'est pas le moment, Evan ! me réprimanda mon père,

- Je vais m'en rouler un autre, dis-je sur un ton provocateur et je commençai à sortir mon matériel à nouveau,

- NON ! il me confisqua le tout, Tu feras ça plus tard. Je te te veux en pleine forme à l'arrivée des Langford.

- Mais qu'est-ce que j'en ai à battre ? Ce sont vos affaires de business, ça ne me concerne pas.

- Il faut que tout soit parfait. Et leur fille sera là aussi, alors si tu pouvais bien te comporter avec elle également, ça pourait nous aider !

- Oh non, pas elle ! je grimaçai, Et puis, je ne comprends pas où tu veux en venir avec ça.

- Sois un gentleman, ça pourrait faire pencher la balance en notre faveur. Je veux absolument qu'on signe ce contrat avec les Langford, ils pourraient être nos plus gros clients.

- Ca me passe vraiment au-dessus tout ça, je me relevai de la fenêtre pour revenir à l'intérieur de la cuisine,

- Evan Cole, me menaça-t-il en pointant un doigt sous mon nez, Tu fais ce que je te dis et c'est tout ! »

La sonette de la maison retentit. Je soupirai et regardai mon père de travers, bien déterminé à lui tenir tête.

« Je...

- Ferme-la et va leur ouvrir la porte en faisant un beau sourire ! me coupa-t-il la parole en me criant dessus. »

Je cédai. Cela ne servait à rien de débattre, il gagnait toujours.

Je me dirigeai vers la porte d'entrée en tapant du pied pour démontrer mon mécontentement. Mon père râla, mais je fis semblant de ne rien entendre. Si ça ne tenait qu'à lui, ma vie, à moi aussi, ne tournerait uniquement qu'autour de ses affaires.

Mais alors que j'ouvris la porte, prêt à affronter la famille Langford avec un sourire crispé sur les lèvres, mon cœur rata un battement.

Ce n'était pas les Langford qui se tenaient sur le seuil de notre maison. C'était Mika.

Elle se tenait là, le visage éclairé par un doux et timide sourire, ses yeux brillaient d'une lueur familière. Son regard rencontra le mien, et pendant un instant, tout sembla suspendu dans le temps. Elle portait des vêtements élégants et noirs de la tête aux pieds, seule ses lèvres rouge carmin et sa veste en jeans over-size fourrée cassaient le look. Je m'attendais à tout, sauf à la voir là, comme ça.

Ma stupeur et mon silence furent finalement interrompus par Mika.

« Salut, murmura-t-elle, un léger rougissement teintant ses joues et une note d'embarras dans sa voix,

- Je... Je... Salut ! je rougis aussi, Je ne m'attendais pas à ce que tu viennes ici... Tu m'as laissé un message ? Je n'ai pas regardé mon téléphone.

- Non, disons que c'est une visite surprise, elle baissa timidement la tête, tenant son sac devant ses jambes,

- Une visite surprise ? un sourire en coin involontaire se dessina sur ma joue,

- Je peux entrer ? ses yeux parcoururent mes vêtements et j'eus la sensation qu'elle me matait. »

Mon sourire béat, qui au départ était un faux sourire, s'effaça lorsque je réalisai que ce n'était pas du tout une bonne idée que Mika soit là ce soir. Mais avant que je puisse lui expliquer quoi que ce soit, ma mère s'incrusta derrière moi et la regarda de haut en bas.

« Bonjour, vous êtes ? lui demanda-t-elle,

- Mmmmmmh... Mika constata la tenue de soirée de ma mère, Je suis Mikaëla, Mika, enchantée ! J'étais passée pour parler avec Evan, mais je vois que vous êtes occupés ce soir, alors je ferais mieux de rentrer chez moi, elle fit un sourire poli,

- Non, attendez, vous n'avez qu'à rester pour le dîner, vous aussi ! ma mère me scruta, Evan, c'est une amie du lycée ? Ne la laisse pas partir comme ça, ce ne sont pas de bonnes manières !

- Non, ce n'est pas... Enfin... Si ! Mais... répondis-je, très embarrassé car je ne savais pas si je c'était mieux de demander à Mika de partir ou rester,

- Restez Mika ! conclut ma mère, Je n'ai pas souvent l'occasion de voir les amis de mon fils, alors ça me fait plaisir d'ajouter un couvert pour vous. »

Ma mère me poussa un peu et inclina davantage la porte pour inviter Mika à entrer, puis elle s'empressa d'aller ailleurs pour continuer de se préparer pour le dîner. Je claquai la porte pour la fermer et Mika me regarda, tout aussi perdue que moi.

« Bon, je crois que je n'ai pas le choix, je vais rester dîner... avec toi... et tes parents... C'est très bizarre... Je ne savais pas qu'ils étaient là, ils ne sont jamais là d'habitude.

- Les aléas des visites surprise, hélas ! je commençai à stresser, je pris ses affaires pour les poser sur le porte manteaux. »

Je pris Mika par la main avant que mon père ne vienne l'attaquer à son tour et nous nous isolâmes dans une pièce à part. Elle s'approcha de moi, me plaquant presque contre le mur, me regarda d'en bas et attrapa mes colliers entre ses doigts pour approcher mon visage du sien. Je ne l'avais jamais connue aussi explicitement entreprenante, mais c'était craquant. Que s'était-il passé entre le moment où elle était sous le choc à cause de la mort de sa mère et maintenant ?

« Tu ne m'as même pas dit bonjour, elle dévora mes lèvres du regard,

- Si si... ma voix trembla, mon stress se mêla à de l'intimidation,

- Pas comme ça... ses lèvres vinrent chercher les miennes. »

Mika s'accrocha à mon cou pour m'embrasser. La chaleur de sa bouche contre la mienne et la pression de ses doigts sur ma nuque me firent fondre le temps d'un instant. Une sensation agréable envahit mon ventre et je la pris par la taille pour l'approcher un peu plus de moi. Lorsqu'elle se détacha, j'avançai instinctivement ma tête, les yeux fermés, pour en demander encore. Mais ce n'était pas le bon moment pour s'adonner à ce genre d'activités, alors je la pris par ses deux épaules pour l'éloigner de moi et ne pas céder à la tentation. Elle ricana pour se moquer et je me raclai la gorge pour regagner en crédibilité.

« Tu as le goût du cannabis aujourd'hui, et je dois avouer que c'est bien plus appétissant que les space cookies, Mika plaisanta,

- Ah, oui ?... Ouais... J'ai fumé tout à l'heure... Merci... je sentis mes joues chauffer à nouveau,

- C'est drôle de te voir dans tous tes états !

- Comment tu vas ? Comment tu te sens ? lui demandai-je pour basculer sur autre chose,

- Je vais bien, je me sens bien, elle hocha de la tête sans relâche, Je voulais te raconter ma journée et te parler.

- Ecoute, je donnerais tout pour ne faire que ça de ma soirée, parler avec toi et t'écouter, je pris ses mains dans les miennes, Mais tu tombes très mal et je pense que ce n'est pas une bonne idée que tu restes.

- Pourquoi ? elle leva un sourcil, méfiante,

- C'est un dîner d'affaires et... »

A quelques pas de là, la voix de ma mère me coupa dans mon élan :

« Evan ! Les Langford sont arrivés ! Viens les saluer et présenter ton amie ! »

Je fermai mes yeux face à la boulette que ma mère venait de faire sans le vouloir. Mika mit ses mains sur ses hanches et leva les yeux au ciel comme elle savait si bien le faire quand elle commençait à comprendre que quelqu'un essayait de la rouler dans la farine.

« Les Langford !? Un dîner d'affaires avec les Langford !? » chuchota Mika.

Elle n'attendit pas ma réponse et s'en alla pour rejoindre le monde qui se trouvait à l'entrée de la maison. Je la suivis, plus gêné que jamais. C'était désormais mort pour éviter toute situation complexe.

« Evan, ne trouves-tu pas que Nina est sublime dans cette robe ? lança mon père en me jetant un regard noir pour que je réponde positivement à sa remarque,

- En effet, papa... Tu es superbe, Nina ! la complimentai-je hypocritement avant de la saluer, elle, ainsi que ses deux pères,

- Oh, merci Evan ! répondit Nina en balançant ses longs cheveux. »

Mika me dévisagea assez rapidement, puis se reconcentra sur les invités avec un sourire forcé. Tout comme dans certains films clichés sur les riches, ce scénario et les dialogues que nous avions portaient à croire qu'il s'agissait en fait d'un dîner entre parents pour négocier et marier leurs enfants.

Cette idée me donnait la gerbe, mais c'était clairement à ça qu'allait ressembler la suite de la soirée.

Nina était la chouchoute de ses pères, et le mien se servait de moi pour la traîter comme une princesse et graisser la patte des Langford. En clair, plus Nina était bichonnée, plus ses parents étaient contents et faciles à manipuler pour parler business. Cela faisait des années que les choses fonctionnaient ainsi. Quand j'étais petit, on me forçait à jouer avec elle, et maintenant, on me forçait à flirter avec elle.

Je n'avais aucune envie de me comporter comme ça devant Mika, elle n'allait rien comprendre, et surtout très mal interpréter les faits. C'était pour cette raison que j'étais sous pression et que je voulais qu'elle parte.

Ma mère prit l'initiative de la présenter puisque j'avais l'air plus que perdu.

« Voici Mika, une amie d'Evan. Elle mangera avec nous ce soir ! dit ma mère fièrement,

- Oh, on se connaît, on est dans la même classe ! affirma Nina, Mais c'est clair que je ne m'attendais pas à la croiser ici, surtout pour un dîner aussi privé et important, elle regarda Mikaëla de haut en bas avec un un air supérieur,

- Oh, tu sais... Mika appliqua le même ton condescendant que Nina et un joli sourire, Je suis présente dans cette maison bien plus souvent que tu ne le crois, alors ce n'est pas si surprenant que je sois là finalement.

- Vraiment ? C'est étonnant. Mais bon, peu importe, je suis ravie que tu te joignes à nous ce soir, même si ce n'était pas prévu ! répliqua-t-elle en faisant semblant d'être chaleureuse. »

Mika lui rendit un sourire qui s'effaça aussitôt qu'elle tourna le dos. Mon père proposa à ses invités de s'installer à table pour l'apéritif et nous nous exécutâmes.

On m'avait bien évidemment placé à côté de Nina, tandis que le couvert de Mika se trouvait en face de nous. Quel horrible tableau.

Je m'efforçais de garder mon calme malgré l'atmosphère tendue qui s'était tout à coup installée entre Mika et moi. Elle m'ignorait complètement, ce qui ne faisait qu'aggraver ma frustration. Je savais qu'elle me soupçonnait désormais d'avoir voulu la mettre dehors pour passer du temps avec Nina. Mais je ne pouvais pas y faire grande chose pour le moment. Mon père me tuerait si je gâchais ce dîner.

A table, les discussions commencèrent par des futilités, puis tombèrent vite dans la superficialité. Le spectacle viendrait plus tard. D'abord les coupes de champagne, ou de cocktail, et des petits canapés. Puis, quelque chose de probablement beaucoup trop cher et sophistiqué pour les personnes que nous accueillions. Ma mère mettait toujours la barre très haute pour impressionner les autres.

Les minutes s'éternisaient et je tentai de capter l'attention de Mika, mais elle restait obstinément focalisée sur son assiette ou sur des échanges avec ma mère, évitant soigneusement tout contact visuel avec moi. Au bout d'un moment, sous la table, je cherchai ses jambes avec les miennes et lui fis du pied. Je voulais juste un sourire, un petit coup d'œil, le moindre signe qui voudrait dire qu'elle ne m'en voulait pas tant que ça pour toute cette mascarade. Cependant, lorsqu'elle ressentit mon contact sous la table, elle leva la tête vers moi, mais ne manifesta rien de ce que je recherchais. A la place, elle me fusilla du regard et écrasa délicatement, mais avec une force prononcée, le talon de ses Wolfe boots contre le bout de mes orteils.

Je posai bruyamment un coude sur la table et serrai mon poing que je mis devant ma bouche pour ne pas crier de douleur. Mon attitude attira l'attention de tout le monde.

« Qu'est-ce que tu as, Evan ? demanda mon père,

- Oh, rien, je crois que j'ai croqué dans un morceau de poivre ! je fis semblant de tousser, un rictus satisfait se dessina sur le visage de Mika et elle enleva enfin ses chaussures de mes pieds,

- Tiens, bois un coup, Nina me servit un verre d'eau et glissa sa main sur ma cuisse au passage. »

Elle me toucha si naturellement, comme si c'était une coutume que nous soyons aussi proches. Je frémis d'inconfort et nos parents se mirent à jubiler. Mika finit son verre de rouge pour exprimer son malaise. Je tentai de repousser discrètement la main de Nina, mais elle enfonça ses doigts dans ma chair pour me forcer à accepter ce contact.

« Regardez comment ces deux-là prennent soin l'un de l'autre ! lança mon père sur un ton fier,

- Oh oui, ils se sont toujours entendus à merveilles, depuis tout petits, ça fait plaisir de les voir aussi unis, même à leur grand âge ! répondit l'un des Langford,

- C'est fou ça ! ma mère en rajouta une couche, Je n'aurais jamais pensé que ça aurait autant duré !

- C'est charmant de les voir si proches et ça ne peut qu'être bénéfique pour nos affaires, si leurs relations se développent encore davantage, insista mon père,

- Oh, arrêtez de parler comme si nous n'étions pas là haha... Nous sommes là ! Hahah... je serrai des dents pour rester poli,

- Exactement. Les alliances entre nos familles pourraient s'avérer fructueuses, à bien des égards, dit l'autre père Langford comme s'il ne m'avait pas entendu,

- Je suis certaine qu'ils seront inséparables avant que nous nous en rendions compte. C'est toujours ainsi avec les jeunes, n'est-ce pas ? ma mère leva son verre, comme pour bénir ma relation avec Nina,

- Absolument. Et puis, ils sont si beaux ensemble ! exagéra mon père, En tout cas, ça ne fait aucun doute, Nina apporte une touche de fraîcheur à la famille. Et avec Evan à ses côtés, ils forment un duo formidable.

- C'est sûr, intervint Nina, Tout le monde remarque toujours à quel point nous nous complétons bien ! »

Toute la table se mit à glousser. Même Mika se prêta au jeu pour se fondre dans la masse, mais je savais pertinemment que c'était ironique de sa part.

Je sentis la colère monter en moi face à ces échanges hypocrites et manipulateurs. Mes sentiments et ma volonté passaient après tout pour mes parents, et pour les Langford aussi de toute évidence. J'essayais tant bien que mal de garder mon calme et de dissimuler ma frustration. Mais à l'intérieur, j'étais en ébullition. Chaque mot, chaque geste de Nina me révulsait. Chaque compliment sur notre "relation" me donnait envie de vomir.

Pendant ce temps, Mika restait dangereusement en silence et s'adaptait à l'ambiance. Je redoutais sa réaction lorsque nous serions seuls.

Les conversations autour de ce même sujet continuèrent encore et encore, jusqu'à ce que leurs regards insistants se posent sur moi, attendant que je confirme leurs dires par une phrase tout aussi mielleuse que leur discussion.

Mon père brisa ce moment de battement par une remarque qui dépassa les limites.

« Evan, je pense qu'il serait temps d'officialiser les choses, tu ne crois pas ? il posa son regard sur Nina, puis sur moi, puis sur Nina, puis... Je sais que cela devait rester confidentiel, que c'était un sujet que nous abordions seulement entre nous, mais je pense que tu es prêt, et que Nina est également prête, à passer ce cap que vous attendez tous les deux depuis si longtemps. Pense à votre bonheur.

- De quoi tu parles ? Je n'arrive plus à te suivre là, j'ouvris de gros yeux surpris, ayant peur d'avoir très bien compris ce que mon père voulait insinuer,

- De Nina et toi. De votre envie d'être ensemble, affirma-t-il avec un sourire satisfait. »

Était-il sérieux ? Etait-il sérieux d'inventer un truc pareil ? Etait-il sérieux de me prendre au piège comme ça ?

Les yeux des Langford se mirent à pétiller. Nina, à côté de moi, semblait ravie à l'idée de former un couple avec moi et ne tenait pas en place sur sa chaise.

Mika reposa ses couverts, elle avait perdu l'appétit.

Mais moi, je savais une chose : je ne pouvais pas laisser passer ça.

« Mais qu'est-ce que tu racontes, papa ? demandai-je d'une voix serrée, Tu sais très bien que Nina et moi sommes juste des amis vite fait. Rien de plus.

- Je comprends que tu veuilles garder les choses privées, Evan, mais à un certain moment, il faut être réaliste. Nina est une excellente candidate pour toi. Elle vient d'une famille solide, elle est belle, intelligente, et elle partage les mêmes intérêts que toi, il afficha un sourire crispé, il ne s'attendait pas à cette réponse de ma part,

- Mais t'en as pas marre d'essayer de me vendre à une fille pour laquelle je n'ai aucun sentiment, juste pour ton propre intérêt ? lançai-je,

- Evan... essaya de s'interposer ma mère,

- Evan ! s'écria encore plus fort mon père, Il est temps de penser au futur de l'entreprise familiale ! Un jour, ça sera toi qui sera aux commandes de cette boîte, je ne peux pas te laisser faire n'importe quoi ! »

C'en était trop. Je me levai brusquement de table, faisant reculer ma chaise avec un bruit sourd. Je m'apprêtais à faire tout et n'importe quoi pour me sortir de cette situation.

« Si je ne peux pas être avec Nina, ce n'est pas seulement parce que je ne le veux pas. C'est aussi parce que cette fille, là, assise en face de moi, je pointai un doigt en direction de Mika, Elle n'est pas juste une amie du lycée. Mais ça, vous ne pouvez pas le savoir parce que vous n'avez pas le temps de vous intéresser à ma vie !

- Evan, ne dis pas n'importe quoi... Nina essaya de me calmer, Rassied-toi...

- Putain, tais-toi, Nina ! Je sais que tu meurs d'envie de me forcer à être en couple avec toi, mais c'est un grand non ! répliquai-je puis je me retournai vers mes parents, Alors voilà, papa, maman, je vous présente Mikaëla Perez ! Ma copine ! C'est elle que j'aime et personne d'autre ! mon cœur s'emporta lorsque ces mots sortirent de ma bouche. »

Un silence pesant s'abattit sur la table, seulement interrompu par le léger tintement des couverts. Les regards outrés et incrédules de mes parents, ainsi que ceux des Langford, se posèrent tour à tour sur Mika et moi. Mika, quant à elle, s'étouffa avec sa propre salive, puis me fixa avec une expression mêlée d'étonnement et de gêne, comme si elle n'arrivait pas à croire ce que je venais de dire.

Je m'étais servi de cette information pour me sauver de cette situation. Mais la partie où je disais que j'aimais Mika était réelle, ce n'était pas une excuse. J'aurais voulu le lui dire autrement.

Mon père se redressa dans sa chaise et tapa sur la table pour attirer l'attention sur lui à nouveau.

« Evan, ce n'est pas le moment pour des blagues de mauvais goût ! répliqua-t-il d'un ton furieux,

- Mais ce n'est pas une blague, papa, insistai-je avec détermination, Mika et moi sommes ensemble.

- Evan, mon chéri, je comprends que tu puisses être contrarié par les pressions familiales, mais ce n'est pas une raison pour inventer des histoires, ma mère fit un sourire forcé aux Langford,

- Ecoutez, je pense que nous devrions vous laisser... tenta d'intervenir l'un des pères de Nina,

- NON ! C'est inacceptable, Evan ! s'écria mon père, Tu ne peux pas prendre de telles décisions sans consulter ta famille.

- Je suis assez grand pour décider avec qui je veux être, non !? répondis-je, bouillonnant. »

Mika, qui était restée bouche cousue jusque-là, se leva à son tour, soutenant mon regard avec intensité.

« Je pense qu'il est temps pour moi de partir. Merci pour l'invitation, mais ce repas est en train de prendre une tournure absurde et je me sens de trop. » déclara-t-elle calmement.

Sans attendre la réaction ou la réponse de qui que ce soit, Mika se dirigea vers l'entrée pour prendre ses affaires et partir pour de bon.

Je n'en avais plus rien à faire de ce repas, des invités, des magouilles de mes parents. J'avais déjà tout gâché, tout était foutu, alors je n'avais plus rien à perdre avec eux. Je poussai brusquement mon assiette pour signifier que je ne reviendrais plus à table et quittai la pièce à mon tour pour rattraper Mika.

Elle était déjà dehors, en train de traverser le jardin pour rejoindre la rue. J'enfilai la première veste qui me tombai sous la main et courrai après elle. Il pleuvait des cordes.

« Mika ! Arrête-toi ! Maintenant ! criai-je,

- Pourquoi !? elle se retourna, sans s'arrêter de se diriger vers le portail, Pour que tu m'expliques que t'as un pseudo-mariage arrangé avec Nina et que tu t'es servi de moi comme excuse pour t'en échapper !? Tu aurais pu me prévenir !

- Non, ce n'est pas du tout ça et tu as très bien compris ce qui était en train de se passer ! je continuai de la suivre, Je ne voulais pas que tu assistes à ça... C'était un massacre.

- Et tu allais me le cacher combien de temps encore, hein ? elle s'arrêta soudainement et je me heurtai à elle,

- Je ne te l'ai pas caché, mais je ne pensais pas avoir à te le dire un jour, pas comme ça en tous cas, je l'attrapai par ses épaules pour l'empêcher de partir, C'est une partie répugnante de ma vie et tu es venue me rendre visite sans me prévenir, je ne pouvais pas anticiper ce qui allait se passer.

- Par contre, tu pouvais balancer que toi et moi sommes ensemble et que tu m'aimes ? Comme ça ? Comme si c'était normal ? dit-elle sur un ton stupéfait, Comme si c'était une excuse banale ?

- Ca n'avait rien d'une excuse, soupirai-je en la regardant dans les yeux, Parce que si tu n'avais pas été là, j'aurais dit la même chose : que je t'aime et que je suis avec toi. »

Elle détacha ses épaules de mes mains, fit un tour désespéré sur elle-même, ferma ses yeux et jeta sa tête en arrière, comme pour laisser la pluie couler librementvsur son visage. Nous étions déjà trempés.

« C'est faux, ce n'est pas ce qu'on avait convenu, Evan, déclara-t-elle, Ne dis pas des trucs comme ça dans le vent.

- Les choses changent et nous ne pouvons pas les contrôler. On a pas signé de contrat que je sache !? dis-je ironiquement, Combien de temps allons-nous encore jouer à faire semblant que ce n'est pas réel ?

- Tu sais quoi ? elle changea de sujet pour échapper à la conversation dont il était question, Tu devrais écouter tes parents. Ils savent ce qui est mieux pour toi. Si je n'avais pas été là, tu ne leur aurais pas tenu tête comme ça, alors vas-y, fonce. Puis, Nina est une personne saine, elle saura te rendre heureux. Vous allez TEEEEEEEEELLEMENT bien ensemble !

- PUTAIN MIKA ! Tu le fais exprès ou quoi ? je la repris entre mes mains pour la secouer et la fixai, Non... Attends, mais... Mais... Tu es jalouse en fait, c'est ça ? »

Ses yeux partirent en arrière et elle détourna son visage pour dissimuler son ressenti. Ses cheveux mouillés collant ses joues cachaient le teint rosé qui commençait à décorer ses pommettes. Elle garda le silence.

L'absence de réponse était quand même une réponse.

Tout était une bonne excuse pour éviter le sujet de l'amour, mais son comportement à table, ses discours contradictoires, ses paroles emmêlées, ce n'était rien que de la jalousie.

Elle m'aimait.

Je pris son menton entre mes doigts pour la forcer à me regarder. Elle hésita un instant, puis ses yeux rebelles rencontrèrent les miens. L'adrénaline de la confrontation me poussa à continuer de hausser le ton.

« Tu es jalouse, avoue-le !

- Arrête, Evan ! Tu interprètes très mal les choses. Ce n'est pas de la jalousie, c'est... C'est simplement de la colère, de la frustration, elle secoua la tête avec conviction,

- De la colère ? De la frustration ? répétai-je, incrédule, Mais pourquoi ? Pourquoi réagirais-tu ainsi s'il n'y avait rien entre nous ?

- Parce que... Parce que je ne supporte pas de te voir te faire manipuler ! Voilà ! Parce que... Parce que tu mérites mieux que ça ! ses paupières se baissèrent vers le sol,

- Mieux que ça ? Mieux que ça quoi !? je relevai encore son menton, Mieux que Nina, tu veux dire ?

- Oui, mieux que Nina ! Mieux que quiconque ! elle me repoussa en arrière et dégagea ses cheveux humides de son visage, Tu mérites d'être avec quelqu'un qui te traite comme tu le mérites, quelqu'un qui t'aime vraiment.

- Bordel ! Et si c'était toi, Mika ? Et si c'était toi cette personne ? »

Mika se raidit à mes mots, ses yeux me lancèrent des éclairs. Elle recula d'un pas, mettant un peu plus de distance entre nous.

« Arrête ! Arrête de dire des choses que tu ne penses pas vraiment ! hurla-t-elle d'une voix tremblante, ses mains serrées en poings le long de son corps, Tu ne comprends pas, tu ne peux pas comprendre !

- Mais je m'en branle ! Fais-moi comprendre, merde ! insistai-je, mon visage dégoulinant de pluie,

- Tu vas me pousser à bout ! cracha-t-elle, Ca ne peut pas être moi, Evan ! Tu mérites tellement mieux que tout ce cirque, tellement mieux que moi et mes complications ! elle soupira puis se reprit, Tu dis toutes ces conneries maintenant, mais demain, tu pourrais regretter ces paroles. Tu ne sais pas ce que tu veux, tu es juste confus.

- Mika, regarde-moi, dis-je haletant, J'ai foutu ce dîner de merde en l'air, je vais probablement être déshérité pour ça, et mes fringues sont trempées de la tête aux pieds. Dis-moi ? Est-ce que j'ai l'air d'être confus là ? ma voix devint involontairement plus grave, Non. Je ne suis pas confus. Je sais ce que je veux. Et c'est toi. »

Un nouvel instant de silence tendu passa entre nous, le battement de la pluie contre nos corps résonnant dans l'air. Encore une absence de réponse. A tout instant, elle tournerait le dos pour partir et me laisser flotter dans toute cette confusion seul.

Mais à ma grande surprise, d'une voix tremblante et chargée de détermination, elle prit la parole.

« Tu ne comprends pas. Tu ne peux pas comprendre. Tu es là, à me dire que tu veux être avec moi, mais tu ne réalises même pas ce que ça implique. Tu n'as aucune idée de ce que ça signifie d'être avec moi, d'accepter tout ce qui vient avec. Je suis un foutu désastre ambulant, Evan. J'ai des bagages que tu ne pourrais même pas imaginer, des démons qui n'ont pas fini de me hanter chaque nuit. Je suis brisée au-delà de toute réparation. Tu sais ce qui s'est passé aujourd'hui ? Ouvre grand tes oreilles. C'est terrifiant, elle marqua une pause, J'ai décidé de réduire ma mère en cendres sans même lui dédier une cérémonie et je m'en fout royalement. C'est ça que tu veux ? Une malade mentale ? Non. Tu penses que tu me veux, mais ce n'est qu'une illusion, tu ne sais pas ce que ça veut dire. Ça veut dire des nuits blanches à essayer de te protéger de tout ce qui pourrait te faire du mal. Ça veut dire te voir souffrir à cause de moi, parce que je suis incapable de m'empêcher de détruire tout ce qui est bon dans ma vie. Et tu ne mérites pas ça. Tu mérites quelqu'un de normal. Alors, non, Evan. Je ne suis pas celle que tu devrais vouloir. Je ne suis pas celle dont tu as besoin, sa voix se brisa sur ces derniers mots,

- Ça ne change rien. Rien du tout, j'haussai mes épaules avec insolence, Je ne cherche pas la perfection et encore moins quelqu'un de "normal". A vrai dire, je n'ai jamais cherché personne jusqu'à ce que je tombe sur toi. Et depuis... Qu'est-ce que la normalité de toute façon ? Ma normalité à moi, c'est toi. C'est toi avec tes défauts, tes blessures, tes cicatrices, ton courage, ta force, ta beauté. Peu importe ce que tu penses de toi-même, Mika. Sache que pour moi, tu es tout, et tu n'arriveras jamais à changer ça. Jamais.

- PUTAIN ! J'ai beau t'expliquer les choses mille fois, ça me rend folle de te voir aussi obstiné ! elle perdit le contrôle, grogna bruyamment et tapa du pied dans une flaque d'eau qui m'éclaboussa également, Je déteste le fait que tu sois aussi idiot ! elle fit un aller-retour, contrariée, Je te déteste de ne pas voir à quel point je suis toxique ! Je te déteste de me dire que tu m'aimes ! Je te déteste pour ce que tu me fais ressentir, pour la façon dont tu me rends vulnérable ! Je te déteste pour la façon dont tu me fais croire en quelque chose d'impossible ! Je te déteste pour la façon dont tu es en train de foutre en l'air tout ce que j'ai essayé de construire pour moi-même et pour protéger ceux qui m'entourent, tout simplement parce que... Parce que je... Je te déteste, Evan ! s'exclama-t-elle à bout de souffle, Je te déteste tellement... Parce que... »

Mikaëla se tût.

« Dis-le, petite emmerdeuse ! Dis-le haut et fort ! » l'encourageai-je sous le ton de la provocation et j'avançai d'un pas vers elle.

Malgré la pluie qui devenait de plus en plus forte, nous nous fixâmes longuement droit dans les yeux. Cet échange était chargé de tension, chacun refusant de céder à l'autre. Mika, révoltée, se retint de parler, comme si je ne pouvais pas deviner les mots qui étaient censés sortir de sa bouche. Elle serra des poings, la mâchoire contractée, prête à tourner les talons et s'éloigner de tout ça.

L'adrénaline monta davantage dans mes veines, je la retint violemment par le poignet et la retournai.

« Dis-le, dis-moi à quel point tu me détestes. Je veux boire tes mots. » susurrai-je tout près de son visage pour la faire céder.

Mika se figea, surprise par ma force, mais également par l'expression déterminée sur ma face. Elle tenta de se libérer de mon emprise, mais ne fit pas longtemps d'efforts pour s'échapper.

Ensuite, dans un geste impulsif et totalement inattendu, en même temps que nous entendîmes un grondement dans le ciel et vîmes un éclair se dessiner entre les étoiles et la pleine lune, Mika se jeta dans mes bras. Elle heurta sauvagement ses lèvres aux miennes, entre passion et haine. Qui avait tort ? Qui avait raison ? Nous nous battions à travers ce baiser brutal, presque violent, chacun cherchant à dominer l'autre pour avoir le dernier mot.

Il n'y avait plus de tempête qui tienne. Nous étions la tempête.

C'était un baiser similaire à celui que nous avions échangé dans les vestiaires du lycée après une dispute. A la seule différence que, sous cette façade de rage, je pouvais ressentir un élan de désir encore plus profond qu'avant, une connexion brûlante qui nous reliait indéniablement l'un à l'autre.

Je répondais à son étreinte avec une intensité égale, mes mains se perdant dans ses mèches humides, caressant sa nuque et ses hanches avec une tendresse féroce. Chaque souffle entre nos langues était chargé d'électricité, chaque contact de nos peaux déclenchait des étincelles qui se propageaient dans tout notre être. Nos corps ne tremblaient plus à cause du froid et de la pluie, ils tremblaient pour une toute autre raison.

Nous nous séparâmes à contrecœur pour reprendre nos respirations. Mika plongea ses pupilles dans les miennes et dans ses yeux sombres, je pus voir qu'elle essayait de réfléchir à ce qui était raisonnable, à ce qu'il fallait faire désormais. Partir ou rester ? Parler ou se taire ? Continuer ou tout arrêter ? Elle se mordit la lèvre inférieure jusqu'à laisser une légère trace de ses canines, une manie qui, je l'avais déjà noté à quelques reprises, semblait trahir son envie de luxure.

Je me mis à sourire comme un imbécile sous coke.

Tout ce que je voulais, c'était elle.

J'étais désespérément amoureux, la poitrine et le ventre douloureux, mais amoureux.

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Hey you :)

Maddy et Mika ensemble, ça me donne envie d'avoir une sœur bahahah

Mika et Evan... Ca va s'enchaîner comment tout ça ? Leur scène vous a plu ? :P

Nina qui débarque telle une fleur, c'est n'imp XD

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