CHAPITRE 38 - L'effet Salem : L'Amoureux
CASSIE
Je me réveillai en sursauts à cause d'un téléphone qui sonnait au volume maximal. Entre l'obscurité et les quelques rayons de soleil qui traversaient les volets de la fenêtre, j'attrapai à tâtons l'un des deux appareils posés sur la table de chevet et constatai que c'était celui de Luke qui faisait du bruit. Sur l'écran était affiché la notification du réveil alors qu'il était à peine 7h30 du matin. Visiblement, il n'y avait que moi que ce réveil scandaleux avait perturbé puisque Luke ne bougeait pas, il dormait à poings fermés. Pour me venger d'avoir été réveillée de si bonne heure, je mis le téléphone dans son oreille pour qu'il ouvre enfin les yeux, lui aussi.
Il ne fallut que quelques secondes pour qu'il se rende compte du bruit que je faisais exprès de mettre dans ses tympans. Il choppa brusquement le téléphone et le jeta de l'autre côté du lit après avoir éteint le fameux réveil, puis il m'entoura de ses bras, prêt à se rendormir à nouveau.
« AH NON ! l'engueulai-je, Je me suis réveillée à cause de ta sonnerie, impossible que je me rendorme, alors toi non plus, tu n'as pas le droit de te rendormir !
- Désolée Cass, c'est mon réveil pour le lycée, j'ai oublié de l'enlever... Maintenant, fais comme moi, ferme les yeux et rendors-toi, chuchota-t-il, dans les vapes,
- Je n'arrive plus à m'endormir une fois réveillée, je t'ai dit.
- Tu ne veux quand même pas descendre ? il cacha sa tête sous la couette pour me fuir, Tout le monde est encore au lit, il n'y a pas un bruit.
- Bah non, mais je fais quoi maintenant ?
- Roooh... râla-t-il, Enlève ton haut, je te fais de papouilles dans le dos. »
Les papouilles dans le dos était la réponse à toutes les questions auxquelles Luke ne pouvait pas répondre et cela me convenait très bien, c'était un très bon deal. J'enlevai mon tee-shirt et lui tournai le dos pour qu'il puisse y parcourir infiniment ses mains, c'est-à-dire jusqu'à ce que j'en ai marre, ou mieux, jamais. Et lorsqu'il daignait s'arrêter par paresse, je me plaignais.
Tout en profitant du moment, je pris mon téléphone et traînai sur mes différents réseaux sociaux. J'avais mis une photo avec mes amis en story Instagram hier soir et elle avait été vue par pas mal de monde, certains avaient même aimé ou répondu à la publication. Je parcourrai assez rapidement chaque réponse, sans vraiment lire les messages ou regarder qui les avait rédigé, je me contentai juste de les liker. Mais une personne en particulier attira mon attention, une personne que je ne pensais pas voir dans mes notifications depuis bien longtemps.
Luke arrêta les papouilles.
« LUUUUUUKE ! piaillai-je pour lui indiquer de continuer,
- Oui, j'arrive ! il recommença. »
Je me reconcentrai à nouveau sur mon écran.
Soudain, mon téléphone se mit à sonner. C'était un contact que j'avais renommé "Ne pas répondre" qui était en train de m'appeler. Prise de panique, je raccrochai. Luke releva la tête derrière mon dos comme pour vérifier ce qui s'affichait sur mon téléphone, mais il n'eût pas le temps de le voir et laissa tomber.
Mon portable se mit à sonner une deuxième fois. Ce coup-ci, je coupai directement le son, les vibrations et le reposai sur la table de chevet, face cachée.
« Qui t'appelle à cette heure-ci, Cass ? demanda Luke,
- Numéro masqué... mentis-je,
- J'ai une idée.
- De quoi !? Comment ça !? je déglutis,
- Peut-être que j'ai une solution pour t'aider à te rendormir... Mais arrête-moi si jamais tu n'es pas d'accord.
- Qu'est-ce... »
Luke disparut sous la couette avant que je n'eus le temps de finir ma phrase. Je sentis ses épaules passer sous mes cuisses et ses mains caresser ma peau. Ses lèvres parsemaient mon ventre et le tissu de ma culotte de bisous suaves. Un frisson se forma dans mon estomac et se répandit dans tout le reste de mon corps. C'était une proposition plutôt alléchante et de quoi me faire oublier "Ne pas répondre".
Hier soir nous avions couché ensemble pour la première fois. Ca faisait déjà quelques temps que nous en avions envie, mais que nous ne trouvions pas le bon moment, puis ça s'était fait tout seul. Et je dois dire que nous étions tous les deux très satisfaits de ce que nous avions fait, malgré quelques maladresses. Après tout, nous ne connaissions pas encore comme il faut le corps et les plaisirs l'un de l'autre, donc c'était normal. Mais Luke était doux, et ça, c'était quelque chose que j'aimais.
Cependant, il n'avait pas encore mis sa tête entre mes jambes, alors, pour moi, comme à toute première fois avec quelqu'un d'important, c'était perturbant. Je me posais des tas de questions : est-ce qu'il allait aimer ce qu'il allait faire ? Est-ce que j'étais assez bien épilée ? Est-ce que j'allais pas avoir mes règles comme par magie, juste au moment où ça devait arriver ?
Luke était encore au-dessus du peu de tissu qui me restait, alors je lui tapotai sur une épaule pour le faire remonter à la surface. Il vint jusqu'à mon visage, reposant le reste de son corps sur le mien, toujours sous la couette. Son nez toucha le mien et il me fit un sourire.
« Oui ? m'interrogea-t-il,
- Tu n'es pas obligé de faire ça, tu sais ?
- Je sais, mais j'en ai envie... Enfin, sauf si tu n'en as pas envie.
- Si si, mais c'est quand même super intime, alors rien ne presse, j'haussai des épaules en repensant aux questions que je me posais,
- Cassie, on a fait l'amour hier soir et c'était génial. Tu crois vraiment que te faire un cunni ça me fait peur ? il me fit un bisou rapide sur la bouche, Arrête de douter, tout est parfait.
- Mmmmh, je ris timidement, C'est vrai, c'est vrai...
- Alors ? Je peux redescendre ? il se mit à m'embrasser dans le cou,
- Oui !
- Tu me dis s'il y a des trucs que je fais mal, hein ?
- Oui oui oui ! je poussai sa tête sous la couette en rigolant. »
[...]
Luke avait raison, son idée m'avait aidée à retrouver le sommeil jusqu'à 12h.
Lorsque je me levai, il était déjà descendu pour rejoindre les autres. Je pouvais entendre des voix au rez-de-chaussée, mais aussi une musique entraînante, et sentir une bonne odeur d'omelettes mêlée à celle de pancakes qui envahissait toute la maison. Je me sentais d'une bonne humeur incroyable. La nuit et la matinée avaient été très bonnes, et l'après-midi s'annonçait encore meilleure.
Je me mis assise dans le lit et avant de me décider à rejoindre mes amis et je repris mon téléphone. Tout le monde faisait ça au réveil, ce n'était qu'un réflexe.
A ma surprise, j'avais encore plusieurs appels manqués de "Ne pas répondre" et des messages laissés sur ma boîte vocale. En voyant ces notifications mon cœur s'accéléra et mon sourire s'effaça, c'était un peu angoissant de voir tous ces essais pour me joindre. Je n'avais aucune envie de rappeler ou d'écouter les messages vocaux, mais c'était peut-être grave... Je soufflai un coup et composai d'abord le numéro de ma boîte vocale pour avoir un avant goût de ce qui était en train de se passer.
J'approchai mon téléphone de mon oreille tandis que la voix énervante de la dame de la boîte vocale m'annonçait que j'avais un nouveau message. Et juste au moment où j'allais le découvrir, quelqu'un toqua énergiquement à la porte de ma chambre, me faisant sursauter et raccrocher de suite. Prise de panique, je reposai mon portable au même endroit.
« Tu comptes venir manger avec nous en bas ou quoi, la Belle au Bois Dormant ? On a préparé un gros brunch pendant que tu faisais tes meilleurs rêves ! je reconnus la voix de Mika,
- Euh... Oui ! J'arrive ! j'enfilai rapidement mes vêtements. »
C'était peut-être un signe du destin. Je ne devais pas chercher à savoir ce qui était en train de se passer ailleurs. Je devais me concentrer sur l'instant présent et profiter des vacances avec la bande. On était là pour ça.
J'ouvris la porte et tombai sur ma meilleure amie, un visage familier qui ne pouvait que me faire retrouver le sourire et me rappeler que, non, je ne devais pas rappeler "Ne pas répondre".
Mika passa un bras autour de mes épaules et me fit un bisou sur la joue pour me dire bonjour. Nous descendîmes les escaliers ensemble et nous dirigeâmes directement dans la cuisine où Dreams de Fleetwood Mac rendait le scénario encore plus féerique, comme si nous étions dans un film.
Peach se tenait assise sur l'une des chaises autour de la table et Maddy se tenait derrière elle, elle lui tressait les cheveux. Lévy était assis là aussi, devant une partie de cartes et avait l'air d'attendre que Mika revienne pour continuer de jouer avec lui. Evan remplissait soigneusement les sept assiettes qui étaient posées devant lui, sur le plan de travail. Et Luke, il faisait sauter des pancakes dans une poêle. En me voyant, il se retourna vers moi et me fit un sourire charmeur, ce genre de sourire qui voulait dire "T'as bien dormi, hein ?".
Après avoir dit bonjour à tout le monde, je m'assis aux côtés de Peach. Evan avait déjà commencé à poser quelques plats, dressant une table digne d'un restaurant d'hôtel cinq étoiles.
« Tiens, un smoothie aux fruits rouges ! Ca va t'aider à retrouver l'énergie que tu as dépensé hier soir et ce matin, Maddy posa un verre tout rose devant moi,
- Quoi ? dis-je confuse, puis je goûtai le smoothie,
- Oui, tu as bien entendu... Et nous aussi, on a bien entendu, ajouta Lévy en hochant de la tête en même temps qu'il jouait avec Mika,
- De quoi vous parlez ? demanda Evan de l'autre côté de la cuisine,
- Je crois bien que Lévy et Maddy ont des voisins de chambre bruyants, répondit Peach nonchalamment. »
Tous les autres se mirent à rire.
En réalisant de quoi ils parlaient, Luke fit semblant de ne rien entendre, et j'avalai mon smoothie de travers, m'étouffant à moitié. Mika arrêta sa partie de cartes pour venir frapper trois petits coups dans mon dos, puis me prendre dans ses bras, par derrière.
« Nous, on a rien entendu du tout ! chuchota-t-elle au creux de mon oreille pour me rassurer, Mais j'espère que tu t'es bien amusée, elle me fit un clin d'œil. »
Je me contentai de lui répondre par un sourire timide pour ne pas continuer sur ce sujet de conversation. Les plaisanteries des autres ne me gênaient pas énormément, mais j'étais contente que Mika essaie de me mettre à l'aise avec ça. Je ne savais pas toujours comment réagir lorsqu'il s'agissait de ma vie sexuelle, j'avais encore des aprioris sur ce que les gens pouvaient penser de moi étant donné que j'avais une mauvaise réputation par rapport à ça au lycée. Mais avec ce groupe d'amis-là, au fond, je savais que je n'avais rien à craindre.
Evan finit de mettre la table avec l'aide de Luke, puis nous nous installâmes tous comme il faut pour bruncher. Il y avait autant de nourriture salée que sucrée, en gros c'était comme un un petit-déjeuner bien copieux qui nous remplirait le ventre pour le reste de la journée.
Tandis que les autres discutaient, je ne pouvais m'empêcher d'être distraite par la pensée des notifications de "Ne pas répondre" dans mon téléphone. Est-ce qu'il allait continuer de m'appeler tout le temps ? Qu'est-ce qu'il voulait ? Et si Luke le découvrait ? Et si les autres le découvraient ? Ca allait être la catastrophe assurée. Il fallait que je sois le plus discrète possible ou que je trouve une solution pour mettre "Ne pas répondre" en silencieux pendant ces vacances, au moins le temps que nous restions à Salem.
Luke posa une main sur ma cuisse, sous la table, me chassant de mes propres pensées.
« Tu penses à quoi, Cass ? me demanda-t-il en essayant de parler assez bas,
- Rien, rien du tout ! je cachai mes mains dans les manches de mon sweat,
- Alors tu pourrais peut-être nous répondre quand on te demande si les plans pour la journée te conviennent aussi ? expliqua Peach,
- Oui oui, bien-sûr, c'est ok pour moi ! acquiesçai-je,
- Alors c'est quoi le planning de la journée ? me piégea Evan,
- Bah... Ce que vous venez de dire là, il y a deux minutes... j'essayai de me rattraper,
- Un coup de BAGUETTE MAGIQUE et t'es complètement à l'ouest, Cassie ! se moqua perversement Maddy,
- Ferme ta grosse bouche, Maddy ! Mika frappa un coup derrière la tête de sa sœur tout en éclatant de rire, puis elle se retourna vers moi, Musée de la sorcellerie et visite guidée dans une maison hantée, ça te tente ?
- Oui oui, évidemment ! je secouai ma tête pour me réveiller et avoir l'air crédible. »
Luke et Peach me scrutèrent tour à tout avec une expression suspicieuse et j'évitai leur regard, remplissant mon assiette avec des toasts et des fruits pour faire mine de passer à autre chose. Les autres ne semblaient pas aussi préoccupés qu'eux par mon comportement : Mika et Maddy se mirent à parler de vêtements qu'elles voudraient acheter sur internet pendant les soldes, Evan continua de boire tranquillement son café et de braquer ses yeux sur mon amie pour l'admirer, et Lévy décida de chercher la prochaine musique à mettre sur son téléphone.
Une fois le temps du repas fini, je repris fort heureusement mes esprits et nous nous empressâmes de nous habiller pour sortir. Personne ne me posa plus de questions sur mon moment d'absence à table. J'avais décidé de laisser mon téléphone à la maison pour ne pas être secouée à nouveau par des appels et des messages que je n'avais pas envie de recevoir.
MADDY
Le Musée de la sorcellerie reprenait l'histoire de la chasse aux sorcières qui avait eu lieu à Salem il y avait des siècles de cela. Apparemment, il y avait quelques hommes dans le lot, mais c'étaient surtout les femmes qui étaient accusées de sorcellerie et passaient au bucher dès qu'elles levaient le petit doigt. Disons que de nos jours, ça n'avait pas énormément changé, les méthodes pour nous punir étaient juste différentes et plus variées.
Entre les vieilles gravures représentant des procès, les scènes de reconstitution d'exécutions et de rituels mystérieux, chaque pièce du musée baignait dans une ambiance plutôt sombre et hostile, ce qui donnait une touche authentique à chaque chose que nous apprenions au fur et à mesure de la visite. Ca faisait un peu peur par moments, mais nous restions tous ensemble, alors ça allait.
Nous passions dans un long couloir à lumière tamisée, dans le silence, nous suivant les uns les autres. Des œuvres d'art ornaient les murs.
Je m'arrêtai devant un énorme tableau qui me prit à la gorge de par son caractère violent et fort. Trois femmes étaient attachés à un même bûcher et malgré les cordes qui les gardaient prisonnières, elles se tenaient mutuellement les mains. Elles étaient belles et avaient de longs cheveux envoûtants, mais portaient des robes déchiquetées et salies par de la terre et le sang. Chacune avait également un collier avec un pendentif lié à une phase lunaire : croissante, pleine et décroissante. L'une d'entre elles avait les larmes aux yeux, l'autre semblait en colère, et la dernière souriait malicieusement en regardant en direction du ciel. Le ciel était un dégradé de rouge et noir, affichant une lune brillante au milieu de la pénombre. Un grand homme musclé portait une torche enflammée et criait sur la dernière femme avec une haine profonde, comme s'il n'était pas content de la voir avec cette expression au visage. Il menaçait de bruler son visage. Une foule de personnes regardait la scène, elles semblaient effrayées et pointaient des doigts accusateurs vers les trois femmes ou vers la Lune.
Je m'assis sur la banquette devant l'œuvre d'art. Certains de mes amis s'arrêtèrent pour la regarder un instant aussi, puis s'éparpillèrent dans le couloir pour en observer d'autres. Mon regard croisa celui de Mikaëla et elle me fit un sourire confiant. Cassie était sous les ailes de Luke, ils discutaient attentivement sur un autre tableau.
Je ne savais pas pourquoi, même si la scène représentée sur ce tableau-là me parlait énormément pour une raison quelconque, elle me faisait aussi froid dans le dos. Elle était remplie de rage et d'espoir à la fois, avec une aura que je ne saurais définir de bonne ou mauvaise. Dans tous les cas, c'était inspirant.
Je me mis à lire la petite pancarte pour mieux comprendre ce que représentait le tableau. Il s'appelait "Le Rituel de la Triade Lunaire", c'était une œuvre réalisée par un artiste moderne et donnée au musée par cette même personne. Dans mes souvenirs, la Triade Lunaire était associée à Séléné, Artémis et Hécate, toutes des déesses de la Lune, et Hécate en particulier, était la déesse de la sorcellerie. Il n'y avait pas plus d'informations que ça, j'imaginais que c'était à interprétation libre. Mais avec le peu que je savais et le tout que je voyais, j'arrivais à donner un certain sens à cette peinture... La puissance féminine, sous toutes ses facettes, contre le reste du monde.
Alors que j'étais tranquillement plongée dans mes pensées, un bourrin s'assit à côté de moi sur la banquette. Je le fusillai du regard.
« Qu'est-ce que t'as ? lançai-je,
- Tu sais, Maddy, si tu vivais à l'époque de la chasse aux sorcières, je suis sûr que tu aurais fini sur le bûcher toi aussi, plaisanta Lévy en regardant le tableau,
- Très drôle, Lévy. Continue à rire, mais j'espère que tu te souviendras de ce que je suis capable de faire quand tu seras transformé en vieux crapaud baveux.
- Oh, une menace de sorcellerie ! Ça devient sérieux maintenant ! il se mit à rire,
- Tu devrais vraiment faire attention, Lévy, répondis-je sur un ton sévère pour lui faire peur,
- Peut-être que c'est toi qui devrais faire gaffe... Peut-être que je suis un sorcier aussi, et que je suis ici pour te jeter un sort d'amour éternel, il me fit un clin d'œil,
- Ça ressemble plus à une malédiction qu'à un sort d'amour, je secouai la tête en riant ironiquement,
- Ah, mais l'amour est une malédiction déguisée, tu ne crois pas ? il se rapprocha et mit un bras autour de mes épaules. »
Je dévisageai un instant avec dégoût sa main que je voyais dépasser sur mon épaule, puis je la poussai doucement pour la faire tomber. Sans lui donner de réponse, je me levai, regardai une dernière fois "Le Rituel de la Triade Lunaire" et continuai ma visite, en l'abandonnant sur la banquette. En secret, je ne pus s'empêcher de sourire malgré moi, je me demandai combien de temps Lévy allait continuer avec ses tentatives de drague vouées à l'échec.
Et en quelques secondes, il me rattrapa, me bousculant pour venir marcher à côté de moi.
« Mais t'es insupportable ! chuchotai-je pour ne pas déranger les autres visiteurs, Qu'est-ce que tu me veux encore ?
- Oh, rien de spécial, juste faire mon tour aux côtés de la personne la plus aimable et charmante du musée ! répondit-il sur un ton légèrement sarcastique,
- Sauve tes phrases toutes faites, Lévy. Tu ne me séduiras pas avec ça, je roulai des yeux,
- Moi ? Te séduire ? il ricana en silence, Bon, je peux quand même marcher à côté de toi, non ? Comme ça on apprécie les tableaux ensemble.
- Je peux très bien apprécier les tableaux toute seule ! répliquai-je en croisant mes bras,
- Mais tu ne le fais pas. Tu veux juste te donner un air cool et indépendant. C'est mignon, il leva un sourcil,
- Qu'est-ce que tu en sais ? Tais-toi, bon sang ! Tu dis que de la merde ! me défendis-je irritée,
- Ok, alors dis-moi ce que t'as pensé sur le tableau avec les trois sorcières, là-bas, me défia-t-il,
- C'est intense, j'inspirai profondément pour me calmer, Ça raconte une histoire puissante, une lutte contre l'oppression, peut-être...
- C'est ce que j'adore chez toi, Maddy. Toujours cette façade froide, mais en dessous, une fille qui a sa propre façon de voir le monde, il sourit comme s'il avait réussi à déceler un secret,
- Tu lis trop de romans, idiot ! Ce n'est qu'une peinture ! m'agaçai-je,
- Non, j'ai vu comment tu étais obnubilée par ce tableau, il s'arrêta en face de moi, me barrant le passage, Tu t'es immergée dedans, t'as observé chaque détail comme si tes yeux suivaient le moindre geste du pinceau de l'artiste. J'ai compris que tu étais à la fois bouleversée et fascinée par ce que tu voyais quand je tu as mis tes cheveux derrière tes oreilles et que tu as croisé tes bras pour cacher tes frissons. Ce tableau t'as pris aux tripes, alors non, ce n'est pas qu'une simple peinture.
- Arrête de m'analyser, c'est bidon ce que tu racontes ! T'es juste gênant là ! bégayai-je plus sèchement que je ne l'aurais voulu. »
Lévy me regarda de la tête au pieds, un rictus satisfait et supérieur se dessina au coin de ses lèvres. Puis, il tourna les talons, décidant qu'il ne voulait plus me tenir compagnie finalement. Il alla emmerder sa sœur, d'avance agacée parce qu'elle était paisible avant qu'il ne lui saute dessus pour la surprendre.
Je détestais quand quelqu'un essayait de lire en moi et y arrivait de manière si... si... réaliste.
Pour ne pas laisser mes pensées être dévorées par les paroles de Lévy, je me dépêchai de rejoindre Mikaëla et Evan dans une salle obscure dédiée aux rémèdes et potions prétendument utilisée par les sorcières. C'était la dernière salle avant la boutique souvenirs et la fin de la visite.
Ayant sa maison de campagne à Salem depuis des années déjà, Evan connaissait le Musée de la sorcellerie de fond en comble. Il se mit donc à nous expliquer en détails, à ma sœur et moi, l'histoire et la fonction de chaque petit flacon d'élixir qui était exposé dans l'une des vitrines. En fait, avec Evan, Mikaëla avait eu le droit à des explications complètes sur tout ce qu'il y avait dans le musée, depuis le début de la visite. C'était adorable de le voir se donner autant de mal pour elle et pour l'impressionner. Cela me rappelait à quel point il avait souffert lorsqu'elle n'était pas là, et que maintenant, il faisait de tout pour apprécier chaque seconde passée avec elle. Je me demandais juste quand est-ce qu'il allait lui faire la déclaration d'amour qu'il m'avait faite lorsqu'il était défoncé, en croyant que j'étais elle.
J'étais embarquée dans une discussion avec eux, mais au bout d'un moment je me tus parce que j'étais subjuguée par leur capacité à mener des débats intelligents tout en maintenant l'alchimie qui existait entre eux. Quand je regardais en arrière, je me demandais encore comment j'avais pu croire une seconde que Mikaëla aurait pu vouloir de Nate alors qu'elle avait mille fois mieux juste à côté d'elle.
Les couples heureux me semblaient inatteignables. Enfin, les "couples"...
« Je ne peux m'empêcher de penser que, même si les temps ont changé, Mikaëla mima des guillements, il y a toujours une forme de persécution envers ce qui est considéré comme différent.
- Mais totalement d'accord ! affirma Evan, Même si les chasses aux sorcières n'existent plus vraiment, la peur de l'inconnu, le rejet de ce qui est différent persiste d'une manière ou d'une autre.
- C'est quand même incroyable que toutes ces femmes aient pu être mal jugées et persécutées parce qu'elles avaient des connaissances sur les plantes et la guérison, ou simplement parce qu'elles étaient indépendantes, ajouta-t-elle,
- Vraiment, l'histoire de la sorcellerie est très complexe... »
Ils finirent leur discussion et le reste du groupe entra dans la pièce. Nous nous mîmes tous à parler entre nous. En voyant Lévy se diriger vers moi, je quittai les lieux pour me rendre directement dans la boutique souvenirs. Ma sœur se rendit compte que je prenais la fuite et me suivit.
Je me cachai entre les étagères de la boutique pour éviter qu'elle vienne me poser des questions sur Lévy. Il était clair qu'elle avait compris quelque chose.
« BOUH ! » s'écria Mikaëla en arrivant par l'autre côté sans que je la voit.
Je sursautai et fis tomber des peluches qui étaient soigneusement disposées sur les étagères. Heureusement que ce n'étaient que des peluches. Ma sœur se moqua de moi, mais m'aida quand même à ramasser les dégâts.
« T'as l'air tendue depuis que Lévy t'as parlé tout à l'heure, remarqua-t-elle,
- C'est un fait, ce mec me tend. Il est insupportable avec ses blagues stupides et ses tentatives de drague inutiles, marmonai-je,
- C'est exactement ce qu'il cherche à faire et ça marche à fond !
- Et moi ? Je devrais faire quoi alors ? je mis mes mains sur mes hanches,
- Écoute-moi bien Madeleine, elle mit une main sur mon bras, Peut-être qu'il essaie de te taquiner parce qu'il veut attirer ton attention. Tu sais, les garçons peuvent être maladroits quand ils sont intéressés. Et puis, n'oublions pas que c'est le frère de Peach, il a un humour décalé.
- Intéressé par moi ? Franchement, je n'y crois pas une seconde. C'est plus probable qu'il cherche juste à s'amuser à mes dépens.
- Depuis quand Maddy Perez se sous-estime comme ça ? Ew, elle fit semblant de me regarder de travers, Bref, pourquoi tu te laisses autant affecter par son comportement ? Sois indifférente et il finira peut-être par lâcher l'affaire si c'est vraiment ce que tu veux.
- Ouais... j'hésitai, Tu as peut-être raison.
- J'ai toujours raison, elle me lança une peluche,
- Et la prochaine fois que tu m'appelles Madeleine, je te fais bouffer la peluche, je la lui relançai. »
Mikaëla se mit à rire, puis s'en alla faire son tour dans la boutique tandis que je continuai le mien.
En parcourant les allées, mes yeux furent attirés par un lot de trois colliers exposés sur un présentoir. Au bout de chacun d'entre eux pendait l'une des trois lunes que j'avais observées sur le tableau qui m'avait tant intriguée. Ma sœur et Cassie me vinrent tout de suite à l'esprit.
C'étaient quoi ces conneries ? Je n'étais pas du genre à être affective au point de vouloir acheter un cadeau commun pour nous trois.
Je pris quand même les colliers entre mes doigts, observant chaque détail. Ils étaient délicats. Au dos de chaque lune, le nom d'une déesse.
Et puis merde.
Je les chopai sans réfléchir et passai de suite en caisse. Une fois payés, la vendeuse me les mit chacun dans un petit emballage et je les cachai dans mon sac. Je ne savais pas quand je les offrirais aux filles, mais je ferais.
MIKA
Direction la maison hantée pour une visite guidée.
Evan nous avait expliqué qu'il n'avait jamais fait la visite de cette maison. C'était une nouvelle attraction, alors il ne savait pas trop à quoi il fallait s'attendre. Mais apparemment, tout ce qui allait nous être raconté sur cette demeure était inspiré de faits réels.
En arrivant, nous vîmes une imposante et charmante bâtisse de style victorien datant des années 1920. La maison avait des tourelles, des balcons, des fenêtres en vitrail et était faite de briques couleur cuivrée. Les autres détails étaient d'un blanc impeccable. Le jardin tout autour était vert et taillé de façon très carrée. Tout était parfait, ça n'avait rien d'une maison hantée.
« Vous savez à quoi ça me fait penser ? intervint Peach,
- Non ? Dis-nous ? répondis Luke,
- La Murder House, la maison de la Saison 1 d'American Horror Story.
- Oh non, ça y est, j'ai peur, Cassie croisa ses bras,
- Si Tate Langdon ou Violet Harmon sont là-dedans, je veux bien qu'ils m'emmènent faire un tour dans la cave ! plaisantai-je, puis je fus la première à m'avancer pour entrer dans la maison, les autres me suivirent,
- C'est qui Tate et Violet ? chuchota Evan en demandant aux garçons,
- Les personnages les plus hot de la S1 d'American Horror Story, répondit Peach en le jugeant du regard,
- Oh, excusez-moi madame ! Evan leva ses sourcils d'un geste arrogant. »
La comparaison entre cette maison et celle de la série American Horror Story m'avait donné espoir que l'intérieur soit aussi inspiré de la Murder House. Mais grosse déception lorsque je vis que c'était le cas contraire. L'intérieur était beaucoup plus glauque que l'extérieur.
Lorsque nous franchîmes le seuil de la maison, une atmosphère étrange et pesante m'enveloppa immédiatement, et pourtant, je n'étais pas du genre à craindre l'horreur.
Les lustres antiques ne faisaient que clignoter et projeter des ombres inquiétantes sur les murs tapissés de motifs vieillots. Les planchers grinçaient sous nos pas. Les pièces semblaient figées dans le temps, avec des meubles couverts de draps blancs poussiéreux, comme si personne n'avait osé y toucher depuis des décennies. Des portraits de personnes inconnues ornaient les murs, leurs regards étaient vides, mais suivaient chacun de nos mouvements. Tout était plus ou moins délabré. A tout moment, une porte pouvait claquer ou un objet pouvait tomber sans que personne n'y ait touché.
Il y faisait encore plus froid que dans la rue.
Peach, qui était à côté de moi, brisa le silence que nous avions involontairement instauré.
« Malheureusement, je crois que ce n'est pas aujourd'hui que tu vas te faire soulever par Tate et Violet.
- Tant pis pour moi, j'haussai des épaules,
- Moi ce qui m'inquiète vraiment c'est qu'on a l'air d'être seuls dans cette barraque, alors qu'on était sensés avoir un guide, non ? Cassie se lova dans son manteau, le nez tout rouge. »
Soudain, une ombre traversa d'une pièce à l'autre au bout d'un couloir et les quelques bougies posées sur certains meubles s'allumèrent toutes seules. Certains d'entre nous poussèrent des petits cris d'effroi encore plus effrayants que l'ambiance en elle-même.
Je n'avais pas vraiment peur, j'étais consciente que c'était probablement de la mise en scène, mais c'était sinistre. Je reculai d'un pas et mon dos se heurta au torse d'Evan. Je me retournai pour vérifier que c'était bien lui. Il avait une expression tout aussi anxieuse que le reste de la bande, mais en croisant mon regard, il se détendit.
Il attrapa discrètement mon petit doigt, comme le jour où il était venu me récupérer chez Ana.
Des portes se mirent à claquer de manière aléatoire et celle de l'entrée se ferma derrière nous. Des chuchotements indistincts de voix fantomatiques flottaient dans l'air, nous ne savions plus dans quelle direction regarder. La visite qui semblait innocente à l'extérieur de la maison se transformait en une aventure terrifiante à l'intérieur.
C'était bien fait.
Quelque chose bougea encore au fond du couloir. Une lueur faible et mystérieuse s'échappa d'une pièce sombre. Une silhouette lugubre émergea lentement de l'ombre, c'était un homme tout de noir vêtu et au visage extrêmement pâle. Ses yeux semblaient dépourvus de toute lumière et un sourire malsain était scotché sur son visage.
« Bienvenue, intrépides visiteurs, à la demeure des âmes égarées ! sa voix grave résonna, réveillant des échos dans toute la maison, Je suis Eclipsius, je serais votre guide à travers les méandres de l'au-delà, là où l'histoire et l'horreur s'entrelacent... MAIS ! Avant de commencer cette visite macabre, il se racla la gorge, Je vous laisse en compagnie de Ténébria, notre voyante !
- Hein ? Pourquoi ? Ce n'était pas prévu ça que je sache, s'imposa Maddy, intrépide,
- Eh bien, il nous faut plus de clients pour commencer la visite, le guide sortit un instant de son rôle, Désolé... Alors voilà, en attendant, vous pouvez aller voir la voyante, au fond à gauche du couloir. Elle est très forte ! Je viendrais vous chercher quand ça sera bon pour la visite.
- Alors tout ce cirque pour ça ? répondit Maddy stupéfaite, Vous auriez pu attendre un peu... Ca casse tout le délire parce que quand vous le referez tout à l'heure, on n'aura plus peur du tout...
- Bon, je coupai la parole à Maddy, Ce n'est pas grave, Eclipsius, on va aller consulter Ténébria la voyante ! je lui fis un sourire ironique. »
Le guide acquiesça gentiment et nous montra le couloir que nous devions prendre pour rejoindre la voyante. Avant d'entrer dans la pièce, nous discutions un instant sur le pas de la porte qui affichait une grosse pancarte avec son nom.
« Qui veut y aller en premier ? demanda Evan,
- On y va tous ensemble, non ? Ca sera plus drôle ! répondit Peach,
- C'est possible les tirages de tarot pour tout un groupe de personnes ? souleva Lévy,
- Mais et si j'ai envie de poser une question super intime sur mon avenir ? ajouta Maddy,
- De toute manière c'est du bullshit, ce n'est pas une vraie voyante, ça fait partie de leur mise en scène, dit Luke,
- Euh, la visite est quand même basée sur des faits réels, je te rappelle ! débâtit Cassie en secouant ses mains,
- On s'en fout de tout ça, on est là pour s'amuser ! Venez ! je pris la décision pour tout le monde et toquai sur la porte de la voyante avant que quelqu'un essaie de me contredire. »
La porte grinça légèrement quand je la poussai, dévoilant une pièce plongée dans une semi-obscurité, éclairée seulement par quelques bougies disposées autour d'une table en bois vieilli. Au fond de la pièce, une vieille femme était assise derrière la table, les mains posées sur une boule de cristal. Cette image me fit sourire, on aurait dit une blague. Je croyais en ces choses-là, mais c'était beaucoup trop cliché pour que cette femme puisse nous dire quoi que ce soit de vrai.
« Entrez, mes chers visiteurs. » dit-elle d'une voix douce et mystérieuse.
Ténébria était vêtue de longs vêtements sombres, comme son collègue Eclipsius. Ses cheveux étaient blancs et ses yeux verts semblaient capables de percer les secrets les plus profonds de nos âmes.
Nous nous installâmes autour de la table, créant un demi-cercle autour d'elle dont j'étais le centre. Elle nous scruta un à un, puis me fixa.
« Bienvenue, intrépide jeunesse. Vous avez franchi le seuil de cette demeure avec courage. Je suis Ténébria, la gardienne des mystères cachés. Je vois que vous êtes nombreux... Comment procède-t-on ? Une question par personne ou un tirage général ?
- Un tirage général ! s'exclama Peach,
- Oui, dites-nous, par exemple, ce que l'avenir réserve à notre amitié, complétai-je,
- Très bien, Ténébria ferma ses yeux un instant. »
Elle frappa trois coups sur le dos de son tarot, puis le mélangea frénétiquement. Elle le coupa ensuite en trois paquets et nous demanda de positionner nos mains au-dessus des tas de cartes pour y centrer nos énergies et intentions. J'échangeai un regard avec Maddy qui roula des yeux pour me faire comprendre qu'elle était sceptique, puis avec Cassie qui était plus neutre et plutôt curieuse. Evan, à côté de moi, ne semblait pas avoir d'avis spécifique, il se concentrait sur mon visage avec une expression sérieuse, et j'en fis de même. La lumière chaude des bougies mettait sa peau et ses yeux en valeur. Je ne savais pas pour combien de temps la voyante voulait que nous centrions nos énergies sur les cartes, mais si ça durait encore, je n'allais pas pouvoir retenir mon envie d'embrasser ce garçon plus longtemps.
Je soupirai sans m'en rendre compte, Evan fit un sourire en coin, il avait compris ce qui se passait dans ma tête. Je me repris en main pour essayer de dissimuler cette impression.
Ténébria ouvrit enfin les yeux, capturant notre attention collective. Elle remélangea ses cartes, les étala sur la table et commença le tirage, révélant lentement quatre cartes.
Nous nous penchâmes au-dessus de la table pour les observer, mais nous ne connaissions rien du tout au tarot, alors le doute planait encore de notre côté.
« Voyons ce que l'avenir vous réserve ! » s'écria Ténébria avant de se concentrer sur les cartes avec une force invisible.
J'ouvris de gros yeux. Cette femme prenait décidemment son rôle de voyante trop à cœur.
« Le passé, le présent et le futur s'entremêlent, murmura-t-elle comme si nous ne pouvions pas l'entendre,
- Et du coup ? lança Peach, sans gêne,
- Ici, nous avons L'Amoureux, La Tour, L'Etoile et La Mort, la voyante indiqua chaque carte par le bout de son ongle pointu pour nous annoncer leurs noms,
- LA MORT !? paniqua Cassie,
- Patience mon enfant, La Mort n'est pas forcément une mauvaise chose.
- Donc vous interprétez chacune de ses cartes comment ? demanda Evan,
- A travers L'Amoureux, je vois plusieurs couples qui se forment. Au moins deux ! Un qui se forme petit à petit malgré les turbulences passées, mais qui doit faire attention à ne pas précipiter les choses car entre le bonheur et la peur, la ligne est fine. Un autre qui va être confronté à des dilemmes liés à la confiance, elle plaça deux doigts sur sa tempe et fronça ses sourcils comme si elle était dans une réflexion profonde, Les images sont brouillées, mais j'entrevois un troisième couple, un couple pas solide du tout.
- Je ne sais pas vous, mais je suis sûr qu'elle parle de Maddy et moi en ce qui concerne le couple qui se forme ! dit fièrement Lévy,
- Tais-toi, abruti ! l'engueulèrent Peach et Maddy en cœur,
- De toute façon, je ne peux pas vous dire exactement lesquels d'entre vous sont concernés par chaque cas. Il y a trop d'énergies mélangées, s'excusa la voyante,
- Ok, ce n'est pas grave, continuez ! l'encouragea Luke. »
Je n'avais aucune idée de si ce qu'elle disait était vrai ou faux, mais au fond, une petite partie de moi voulait être concerné par l'un des trois couples qu'elle avait évoqués.
Evan attrapa mon petit doigt à nouveau.
« La Tour, Ténébria reprit la parole, annonce un événement dramatique, voire des conflits ! Et pour vous, cela va se manifester autour de la jalousie car quelqu'un va essayer de jouer avec vos sentiments à tous dans ce but précis. Et cette personne fera cela pour satisfaire son égo et obtenir ce qu'elle veut. Prenez garde, elle n'a pas de pitié.
- Pourquoi on dirait qu'elle parle de Nate Jacobs !? Il n'est même pas ici ! Maddy fit du vent sur son visage ave ses mains,
- Ne prononce pas ce nom, Maddy ! je frappai trois coups sur le bois de la table pour éloigner la malchance,
- Je continue ? demanda Ténébria,
- Oui oui ! répondit Peach,
- L'Etoile est symbole d'espoir, d'inspiration et de guidance spirituelle ! elle sourit, C'est la fête, il faut s'amuser et profiter de la vie ! Mais gardez vos doutes en tête, ils peuvent finir par se confirmer... Croyez en votre intuition, la trahison n'est jamais très loin... elle regarda dans mes pupilles,
- AH !? C'est à dire !? Cassie en perdait presque son souffle,
- Et c'est là que la transition entre L'Etoile et La Mort est cohérente ! Ténébria tapota sur la carte de La Mort, Dans votre cas, chers amis, la trahison sera belle et bien présente. Et cette trahison annoncera un revirement majeur dans la vie de l'un, voire plusieurs d'entre vous, marquant la fin d'une phase pour laisser place à une autre.
- Euh... Il n'y a pas moyen d'être plus précise ? demanda poliment Cassie en levant un doigt en l'air,
- Non, désolée, c'est comme ça que se passe un tirage général. »
J'étais perplexe. Tout semblait possible et impossible à la fois. Je ne savais pas si je devais vraiment faire attention à ce la voyante avait raconté, mais un point s'était formé dans ma poitrine et c'était rare que je me sente aussi perturbée sans raisons. Evan serra mon petit doigt pour attirer mon attention et savoir si tout allait bien. J'hochai simplement de la tête pour le rassurer.
Ténébria conclut son interprétation des cartes en faisant un geste de la main. Mes amis, et même les plus suspicieux, étaient dans un mélange de fascination et d'inquiétude. Les cartes semblaient dépeindre un tableau mitigé de notre avenir, mêlant amours naissants, conflits imminents, espoir et trahison. Je pouvais comprendre qu'ils soient en mode WTF.
« Donc, pour résumer, il y a de l'amour, des disputes, de la fiesta, et éventuellement une trahison qui marquera un tournant majeur dans nos vies. C'est ça ? résuma Peach, adoptant une attitude détendue,
- Oui, affirma Ténébria, ses yeux verts perçants fixés sur le groupe, N'oubliez pas ce que vous avez découvert ici, mes chers visiteurs. Les esprits sont capricieux, et l'avenir peut se dérober comme l'ombre au lever du soleil.
- Ok euh... Merci du coup hein... conclut maladroitement Lévy,
- Que les énergies vous guident dans cette demeure et au-delà ! »
Nous quittâmes la pièce, laissant Ténébria et ses cartes derrière nous. L'ambiance était devenue pensante lorsque nous avancions dans le couloir pour rejoindre notre autre hôte.
Pour éviter que cela continue, j'essayai de rassurer mes amis, malgré le fait que moi-même je ne le sois pas, et que Lévy ne fasse pas vraiment partie intégrante de notre groupe. Il avait sûrement entendu des choses par lesquelles il n'était pas concerné.
« A votre place, je n'y penserais pas trop, ok ? J'ai envie de dire que tout ce qu'elle a révélé ne change pas vraiment de ce qu'on vit depuis qu'on se connait. Et on s'en est toujours très bien sortis !
- Puis on est à Salem, rappelez-vous qu'il y a des voyantes dans tous les coins de rue prêtes à raconter n'importe quoi juste pour faire leur pub et maintenir l'ambiance de sorcellerie dans la ville, ajouta Evan pour me soutenir,
- Ils ont raison... Ils ont toujours raison ! Maddy me fit un clin d'œil,
- Exactement, et on a une maison hantée à visiter, alors on ferait mieux de focus sur ça maintenant, Luke attrapa la main de Cassie. »
Nous retrouvâmes Eclipsius sur le hall d'entrée avec d'autres visiteurs, prêt à reprendre son rôle de guide.
« Excusez-moi, avant de commencer la visite, j'aimerais passer aux toilettes ? dis-je,
- Aucun problème, c'est là-bas, indiqua Eclipsius en montrant une porte du doigt,
- Merci ! »
Je me dirigeai dans la pièce indiquée. Je n'avais pas vraiment besoin d'aller aux toilettes, j'avais besoin de me raffraîchir. Je m'attachai les cheveux, posai mes deux mains sur les rebords du lavabo et observai mon visage dans le miroir. Je suais.
Pourquoi t'es bousculée comme ça par une femme qui vient de tirer des cartes au hasard et qui n'y connaît probablement que dalle au tarot !? Tu ferais mieux de te reprendre, ma grande. T'es pas là pour taper des crises d'angoisse. Tu es heureuse maintenant, plus rien ne peut t'atteindre. Ne laisse pas ton passé affecter ton présent et encore moins ton futur.
Alors que je me répétais ces mots mentalement, je sentis une présence. C'était Evan, il venait pour s'assurer que j'allais bien. Sans un mot, il se plaça derrière moi, alluma le robinet, mouilla ses mains avec de l'eau froide, puis il me mouilla tour à tour le front, les joues et la nuque. Je fermai les yeux pour le laisser faire et tenter de calmer mes tourments.
La fraîcheur de l'eau et la présence apaisante d'Evan eurent un effet immédiat sur mes sensations. Est-ce qu'il savait ce se passait dans ma tête ?
Lorsque j'ouvris les yeux, croisant son regard dans le miroir, je sentis une connexion profonde entre nous.
« Ça va mieux ? » demanda-t-il doucement.
J'acquiesçai en lui offrant un sourire apaisé.
« Beaucoup mieux, merci Evan.
- On est là pour s'amuser, ne laisse pas une simple prédiction gâcher notre soirée. C'est juste une mise en scène, rien de plus. »
Je me retournai et me retrouvai en face à face avec lui.
Il déposa un baiser sur mon front pour prolonger mon réconfort. Le contact de ses lèvres sur ma peau provoqua un frisson agréable, effaçant les dernières traces de tension qui se promenaient encore en moi. Puis, toujours dans le silence, je ne sus pas ce qui me prit sur le moment, mais je me mis légèrement sur la pointe des pieds pour capturer ses lèvres et l'embrasser lentement. Nous nous perdîmes quelques secondes dans cette douce et chaude étreinte.
Finalement, je nous séparai, mais la sérénité qui régnait dans la pièce persista. Je ressentis l'étrange besoin de m'excuser pour le baiser parce qu'en fait, je l'avait juste fait pour me sentir mieux. Parce que lui, c'étaient celui qui me faisait me sentir mieux. Mais je ne pouvais pas me servir de lui comme ça.
« Pardon, Evan. Ce n'était pas volontaire... Tu viens me soutenir et moi, je t'embrasse, je soupirai, Je ne suis vraiment pas nette comme personne.
- Pas besoin de t'excuser, Mikaëla. Parfois, un baiser peut être plus réconfortant que des mots. Et je suis prêt à être celui qui te donne du réconfort dès que tu en as besoin. »
Je souris et levai les yeux au ciel. Il caressa délicatement ma joue du bout des doigts.
« On devrait rejoindre les autres. T'es prête ? » proposa-t-il, m'offrant sa main.
Je saisis sa main en guise de réponse.
EVAN
« Bienvenue dans la demeure des Blackwood, une famille qui vécut ici il y a plusieurs générations. Au début, ils étaient heureux, prospères et aimants. Mais comme toute histoire, la leur a pris un tournant sombre! Je vous prie de bien vouloir me suivre. » annonça Eclipsius d'une voix grave.
Nous avançâmes tous ensemble. Chaque pièce allait raconter une anecdote.
Je gardai un œil attentif sur Mika pour m'assurer qu'elle ne pensait plus à cette tarée de voyante. Elle était dans les premières à suivre le guide. Les autres et moi nous étions un peu éparpillés, et je me retrouvai au fond du groupe. Je ne voulais pas étouffer Mika, je préférais donc rester loin, mais assez près quand même en cas de besoin.
D'abord le salon.
« Les Blackwood étaient autrefois la quintessence du bonheur. Un père aimant travaillant jour et nuit, une mère attentionnée toujours présente, et une petite fille qui jouaient allègrement à la poupée dans ce salon, tous les jours. Cependant, comme le veut souvent le destin, toutes les bonnes choses ont une fin. Surtout lorsqu'elles sont beaucoup trop bien. »
Il se passait des choses dans ces pièces. Des bruits, des jeux de lumières, des objets qui bougeaient, etc... Mais je n'arrivais pas à me concentrer sur tout ça. Comme je l'avais déjà prédit, c'était de la mise en scène, alors il n'y avait plus aucune magie à mes yeux. Puis aussi réaliste que cela pouvait paraître, je n'en avais rien à faire, j'étais plutôt inquiet pour Mika.
Puis nous entrâmes dans la cuisine, où de la nourriture pourrissait sur la table comme si le temps s'était arrêté brusquement. Ca puait la mort.
« La mère, femme charmante et dévouée au départ, sombra dans la toxicomanie lorsqu'elle commença à fréquenter son amant en secret. Il était dealer. Son mari, lui, ne lui donnait pas assez d'amour, il était souvent au travail. L'obsession dévorante de la cocaïne et de la meth a conduit cette mère à une perte progressive de la raison ! Elle a arrêté de s'occuper de sa gamine, de faire les courses, de prendre soin d'elle-même, et j'en passe ! Elle entendait des voix, parlait dans le vide et ne dormait plus. » expliqua Eclipsius.
Maddy se plaça à ma droite et avança avec moi au fur et à mesure de la visite. Elle avait capté que quelque chose ne tournait pas rond.
Nous passâmes à la chambre de la petite fille, où des jouets abandonnés jonchaient le sol. L'histoire prenait une tournure de plus en plus sombre.
« La petite, autrefois innocente et pleine de vie, devint témoin du déclin de sa mère. Les cris, les pleurs et les échos de la folie hantaient ces murs ! Et savez-vous pourquoi ? Parce que le dealer avait remplacé le père, qui lui, avait pris la fuite. Et le dealer était aussi atteint et fou furieux que la mère ! Ensemble, ils mèneront la vie dure à cette petite. Ils l'enfermeront, la maltraiteront et l'utiliseront comme larbin. »
Maddy attrapa mon bras dans une main et le serra fort. Elle aussi, ne pouvait s'empêcher de surveiller sa sœur. Je compris de suite pourquoi.
Cette histoire, qu'elle ait été vraie ou fausse, comprenait quelques détails qui ne devaient pas laisser Mika indifférente. On aurait dit une putain de métaphore exagérée de sa vie avec sa mère.
Pourtant cette dernière ne réagissait pas d'une manière particulière à ce que racontait le guide. Ca devenait un peu trop étrange à mon goût.
Avec Mika, le silence ou la stoïcité n'étaient pas souvent bon signe.
Après avoir parcouru d'autres coins de la maison et avoir eu des détails encore plus suggestifs, nous arrivâmes enfin à la dernière pièce. Le massacre serait bientôt terminé.
Je n'arrivais pas à cerner ce que ressentait Mika, elle était très neutre. Maddy secouait la tête, jurant que ce n'était pas normal.
Donc, pour finir, la chambre des parents. Eclipsius marqua une pause dramatique.
« Et voici la chambre où tout a basculé une bonne fois pour toutes ! Le couple, perdu dans leur monde de dépendance et d'hallucinations, ne reconnaissaient plus la petite en tant qu'être humain fragile et vulnérable. Ils ont alors décidé qu'ils voulaient faire d'elle leur repas ! Mais hélas, cette petite avait plus d'un tour dans son sac... Car dans la poche de sa robe, elle gardait toujours un couteau bien aiguisé pour se défendre, et... »
Un malaise palpable s'empara de Maddy et moi lorsque nous vîmes les yeux de Mikaëla se fermer et son corps s'affaisser lentement jusqu'au sol. Elle s'était évanouie.
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J'aime bien finir sur du suspense comme ça, oui oui :P
Une ambiance bien différente du chapitre précédent et la voyante a annoncé la couleur pour la suite... ou pas ? Mystère !
Des remarques sur un passage ? Un gentil mot ?
En tous cas, je me suis bien amusée à écrire ce chapitre. Et j'espère que vous, vous vous êtes bien amusés à le lire ;)
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