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6~Le trio

- Wahou ! Vous connaissez cet endroit, les filles ? C'est trop beau ! Vous l'avez découvert quand ?

Nazar apparut à l'orée de la forêt, interrompant notre discussion sur le monstre. Le loup gris boiteux m'avait sûrement suivie. Il s'approcha de nous en observant les pierres.

- Ça y est, tu as fini ? On peut parler de choses plus importantes ? cracha Vaïlou, des éclairs dans les yeux.

- Ne vous chamaillez pas ! Si on veut attraper le monstre...

- On ne veux pas l'attraper, on veut le tuer, me coupa la louve noir.

- Je ne sais pas toi, mais moi, je veux des réponses ! Et puis qu'est-ce que tu as contre Nazar ? l'attaquai-je.

Dès que le loup gris était arrivé ici, j'avais senti Vaïlou se crisper et j'avais vu ses poils se hérisser. Mais qu'est-ce qui leur prend ?

- Ne lui en veux pas, intervint Navar. Elle a le droit de m'en vouloir.

- Peut-être, mais j'aimerais bien savoir pourquoi, grognai-je. Alors ? Je vous écoute.

- Ce n'est rien, dit précipitamment Vaïlou. On ne va plus...

- Je ne veux pas de parole en l'air, la coupai-je en appuyant sur les mots, menaçante. Expliquez-moi.

Ce fut Nazar qui me raconta :

- On est arrivé ici le même jour et comme on ne connaissait rien, deux loups face à face... ça donne un duel. Et Vaïlou dit que j'ai triché.

- Parce que tu as triché ! grogna cette dernière. J'aurai dû te tuer bien avant murmura-t-elle pour elle-même.

- Si je comprends bien, vous vous êtes battus, et depuis vous vous détestez ? Non mais vous avez quelle âge ?! m'écriai-je. Vous n'êtes plus des enfants ! Moi je dis : heureusement que vous ne vous êtes pas entre-tuer parce que j'ai besoin de vous. Et de vous deux.

Ils se jaugèrent du regard. Finalement, Vaïlou dit :

- S'il tente quoi que se soit...

- Tu me tues, termina Nazar.

- Bien. Maintenant que c'est réglé, du moins à peu près, nous pouvons parler du monstre. Je suppose que personne ne sait à quoi il ressemble ?

Mes deux amis secouèrent la tête.

- Et si on essayait d'abords de voir à quoi il ressemble ? proposa Nazar.

- Et après on se fait tuer ? Non merci, cette idée ne me plaît pas, dit la louve noir, installée à l'écart.

- Et tu en as une meilleure, peut-être ? riposta le loup gris du tac au tac.

Cette fois, Vaïlou se tut. Nazar était content d'avoir eu le dernier mot, mais leur dispute me donnait mal au crâne.

- Arrêter tous les deux ! Et réfléchissez un peu ! On veux attraper un monstre que personne n'a jamais vu. Comment on fait ? On prend un appât, on lui demande de partir, et on attrape le monstre quand il pointe le bout de son museau ?

Les deux loups me regardèrent bizarrement. Pour une fois, ils avaient l'air d'être d'accord sur une chose : j'étais prête à emmener quelqu'un à la mort ? Peut-être pas, mais en parlant de morts...

- Est-ce que vous avez trouvé les corps des loups disparus ? demandai-je d'un seul coup.

Ils mirent un temps à répondre, perdus dans leurs pensées, pour finalement avouer d'une seule voix :

- Non.

Ils avaient l'air dépité, comme s'ils redoutaient de ce qui était arrivé à leur compagnons : vivants ou morts ? Mais moi, j'étais intéressée : si les loups partaient d'ici, personne n'a retrouvé leurs corps parce qu'ils sont encore en vie ! Et dans ce cas, le cri à minuit était un coup monté !

- Imaginez. Si un loup veut partir, s'en aller. Il n'a qu'à sortir de la forêt, et voilà !

Vaïlou secoua le tête :

- Non. Nous sommes des loups, nous ne pouvons pas nous mélanger aux humains. Et à chaque fois qu'un loup veut partir, on entend ses cris, et puis plus rien.

- En quelle année le premier loup est mort ? demandai-je.

- On n'en sais rien. Cela fait longtemps que la meute a été construite, et je suppose que il y a eu des morts dès la première année, dit Nazar.

- Et le dernier loup disparu ? C'était quand ?

- C'était Djiko, il y a trois semaines. Il voulait s'en aller. Alors pendant la nuit, il est parti, on a entendu ses cris, puis plus rien, murmura Vaïlou.

Apparemment, elle aimait beaucoup ce Djiko, et sa mort l'attristait. Elle baissa la tête. Elle était devenue calme, tout à coup.

Trois semaines que le monstre n'a pas refait surface...

- Savez-vous combien de loups ont disparu ?

- Beaucoup, mais nous ne pouvons pas savoir le nombre exacte. Nous ne savons même pas à quelle année a été créée la meute.

- Parle pour toi, cracha Vaïlou, revenue à la charge. Moi, je sais. La meute a été créée en 2000. Il y a environ un disparu par mois.

- Mais ça fait plus deux-cents morts ! calculai-je. C'est énorme !

- Non, ce n'est rien, dit une voix rauque derrière nous. J'en veux encore plus.

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