Arrivée dans une clairière, je m'arrêtai. Je pensais être enfin au calme pour réfléchir, mais cette clairière n'était pas comme les autres, et elle attira ma curiosité. Elle était entourée de grands arbres très feuillus, en cercle parfait. À deux mettre de ces arbres était planté des gros rochers lissent, des menhirs, tous de deux mètres, eux aussi en cercle. Au milieu de la clairière, deux rivière se rejoignaient perpendiculairement pour former un étang. Je marchai doucement vers l'eau, écoutant les rivières, les oiseaux et le vent dans les feuilles.

En regardant de plus près, je vis différents symboles sur les douze pierres. Je reconnu le symbole du mal parmi eux, l'étoile dans un cercle. Il était gravé dans la pierre, de couleur rouge. Il y avait aussi celui du bien, lui aussi gravé, deux triangles, l'un à l'envers l'autre à l'endroit, dorée. Pourquoi avoir gravé des symboles sur ces pierres ? De plus, il est impossible de les colorer !

Je continuai de marcher autour des pierres, sans bruit, mais je ne reconnu aucun autres symboles. Finalement, je me rapprochai du centre. L'étang ne paraissait pas profond, mais lorsque je m'approchai, je glissai sur la vase. J'essayai de ma raccrocher grâce à mes griffes, mais je ne faisais que m'enfoncer dans l'eau, un peu plus. Je commençai à paniquer. Pourquoi est-ce que tu t'es approchée de l'eau ! me reprochai-je à moi même. Tu sais que tu as peur de ça, mais tu n'as pas pu t'empêcher de regarder ton reflet !

Comme je bougeai dans tous les sens, l'eau m'aspirait vers le fond. J'allais crier « à l'aide » lorsque je trouvai un cailloux sous ma patte arrière. Je m'en servi pour me propulser à l'avant et sortir de cette prison mouillé.

En appuyant ma patte sur la pierre, je m'étais coupée le coussinet et mon sang coulait, mais j'étais heureuse d'être sortie de l'eau. Je m'occupai de soigner ma blessure après m'être allongée loin de cette étang glacé, dans l'herbe verte et sèche. Le goût du sang me fit faire la grimace mais je continuait de lécher la plaie, en laissant mon esprit se rappeler de mon passé.

Un jour, j'avais failli me noyer. C'était seulement grâce à lui que j'étais encore de ce monde. Seulement grâce à ce jeune homme... J'espérais qu'il se rappelait de moi, qu'il me cherchait. Mais comment pourrait-il me retrouver ? Moi-même je m'étais perdue ! Même si j'avais le temps de chercher, je ne pensais pas pouvoir partir d'ici... Je me secouais pour ne plus y penser. Trop de souvenir était remonté à la surface, mais j'avais décidé de vivre une autre vie... Et on ne pouvait pas dire que ces pensées me rendaient heureuse... Cela signifiait plutôt une vie perdue...

Je me levais pour arrêter que mon esprit vagabonde partout et m'approcha de l'eau. Je ne savais pas pourquoi je m'y risquai alors que j'avais failli me noyer. Mais c'est comme si mes pattes bougeaient toutes seules.

C'est à ce moment-là que je vis un autre symbole scintiller au fond de l'eau. Je remarquai que l'étang n'était pas si profond : un mètre cinquante environ. Mais un loup était plus petit qu'un humain.

Je m'approchai du bord en plantant bien mes griffes dans l'herbe, malheureusement mouillée, pour ne pas glisser et tendais le cou pour mieux détailler le symbole. De petites ondes caressaient encore la surface de l'eau, mais je réussis sans difficulté à voir que c'était un triskèle. Le seul symbole que j'aimais dessiner. Il pouvait représenter le lever, le zénith et le coucher du soleil ; le négatif, central ou positif ; mais aussi l'eau, l'air et le feu. Pour moi, c'était la joie, la tristesse et la peur. Les trois piliers de l'humanité.

- Je vois que tu as trouvé mon endroit préféré, a dit une voix féminine derrière moi.

Je me retournai brusquement. Une louve noir aux yeux vert saisissants et aux pattes grises foncés s'était rapprochée sans bruit, si bien que nos deux museaux se touchaient presque. Je fis un pas sur le côté pour ne pas être trop proche de la nouvelle inconnue, mais aussi pour m'éloigner de l'eau.

- Je m'appelle Vaïlou, se présenta-t-elle.

- Et je suppose que tu sais déjà comment je m'appelle ?

- Tout le monde le sais. Tu es la seule qui n'ait pas peur du monstre.

- Et toi ? Tu en as peur ?

- Je ne sais pas. Je n'ai pas envie de mourir, pas tout de suite. Mais dans seulement deux ans, je ne serais plus de ce monde...

- Tu as dix-sept ans ?

Elle hocha la tête.

- Et tu veux te battre pour être libre ? continuai-je.

- Oui. Tu recrutes pour mener une enquête ?

- Eh bien... oui. Pour l'instant, nous sommes trois. Nazar est avec nous.

- Si on a pas Daylo et qu'on se fait choper, tu sais qu'on risque tous de mourir.

- Qui ne tente rien n'a rien. Tu ne m'avais pas dit que tu aimais cette endroit ? C'est quoi tout ça ? demandai-je en montrant tous les symboles.

- C'est un endroit où le monstre ne peut pas venir. Le seul endroit. Tous ces symboles servent à repousser les âmes impures.

- Les âmes impures... répétai-je. Et ils représentent quoi ?

- Il y a le bien et le mal, la loyauté, le savoir, la sagesse, l'amour, le pouvoir, la justice et les quatre éléments : eau, terre, feu, vent.

- Et... et ça ? dis-je en montrant le fond de l'eau, où le triskèle brillait toujours.

- Il n'y a rien...

Elle interrompit en voyant le dernier symbole caché.

- Wahou ! Je ne l'avais jamais vu !

Elle rentra dans l'eau froide et y plongea la tête. Mais comment peut-elle rentrer là-dedans sans frissonner ?

Après quelques secondes sous l'eau, elle remonta à la surface.

- Il s'est éteint, je n'arrive plus à savoir où il est.

Elle nagea vers la rive pour souffler. Je m'approchai doucement pour voir qu'effectivement, on ne voyait plus le triskèle briller. Je fronçai les sourcils. Une clairière qui repoussait les âmes impures étaient déjà irréel, mais un symbole au fond de l'eau qui brillait puis s'éteignait, c'était plus que bizarre. Cet endroit était un lieu magique, sans aucun doute. Mais plusieurs questions restaient en suspens, dont celle-ci : Comment un lieu pareil, venant tout droit du paradis, avait-il atterri ici ? Et quelle rapport avec le monstre, puisqu'il ne pouvait pas venir dans cette clairière ?