- Oui, avouai-je. Un jour, j'ai failli me noyer. Depuis, aller dans l'eau, mais si ce n'est pas profond, me fait peur. Et il est hors de question que je rentre là dedans, dis-je en désignant le lac de la patte.

- Et si je restais à côté de toi pour te faire remonter si tu as besoin d'aide ?

- Non ! La dernière fois, ça c'est passé très mal. Je ne veux pas recommencer.

- Bon bah... dans ce cas-là...

D'un seul coup, Vaïlou me poussa dans l'étang. Je n'eus pas le temps de placer mes pattes avant devant moi pour me rattraper : l'eau ralentissait mes mouvements, ce qui fit que je m'étalai la tête la première. Comme je n'avais pas eu le temps d'inspirer de l'air avant que Vaîlou me pousse, j'eus vite besoin d'air. Cependant, c'était l'eau que j'aspirais.

Mes narines me brûlèrent et je recrachai l'eau, sauf que cela aggravait mon cas : j'avais besoin d'air pour tousser, et je n'en avais plus.

Paniquée, j'essayai par tous les moyens de m'extirper de l'eau, mais mes pattes étaient prises au pièges par la vase. Et plus je bougeais, plus l'eau m'entraînait en son fond. Plus j'avais les poils trempé et plus je tombais sans pouvoir me relever.

J'avais peur, je ne voyais plus rien, et je manquais cruellement d'air.

J'étais en train de suffoquer, en train de partir loin d'ici que quelqu'un, ou quelque chose, eut assez de force pour me réveiller. Sauf que ce quelque chose qui parlait dans ma tête ne pouvait pas être réelle.

- N'aie pas peur de moi, le triskèle. Je suis là pour te guider, pour t'aider à convaincre Noah de récupérer son corps, et en même temps de bannir Daïkan à tout jamais.

Le... le triskèle ? C'est là que je le vis, non loin de moi. Le symbole brillait d'une lueur blanche, mais si vive que je ne pouvais pas garder me yeux fixés dessus.

Tout à coup, j'eus un regain de force, et je m'aperçus que je ne manquais plus d'air. Je pus donc me concentrer sur les paroles du triskèle.

- Co-comment ça ? bredouillai-je dans ma tête

- Quand tu sera devant lui, expliqua le symbole, je te donnerai ma force, mon courage. Seulement, ce sera à toi de parler. Je ne te dicterai pas tes paroles. Je t'aiderai juste à surmonter ta peur, et tes sentiments, quelles qu'ils soient.

Le triskèle scintilla avant de disparaître, un peu comme l'avait fait Daïkan, en plus rapide et en moins hypnotisant. Les paroles du symbole tournaient dans ma tête : « Je suis là pour te guider, pour t'aider à convaincre Noah de récupérer son corps, et en même temps de bannir Daïkan à tout jamais. ». Était-il possible de sauver Noah tout en détruisant le démon ?

Je me dépêchai de remonter à la surface, où je pris une énorme inspiration.

- Tu vois, je t'avais bien dit qu'elle allait revenir ! entendis-je derrière-moi, malgré mes oreilles pleines d'eau.

Je me regagnai la rive sans mal où je m'aperçus - avec un certain bonheur - que je n'avais plus peur de l'eau. Miracle !

Je me secouai et arrosai mes amis, dont celle que m'avait poussée dans l'eau.

- Pourquoi t'as fait ça ? grondai-je.

- Avant que tu ne me sautes dessus, j'aimerais que tu attendes que je finisse de tout te raconter. Tout ça était prévu. Il y a quelques jours, j'ai rêvé. J'ai rêvé de toi et Daïkan... et il a dit tout ce que tu nous avais dit... sauf que tu as omis quelque trucs. Comme qu'il a dit que tu était une louve-renarde.

- Parce que je ne suis pas une louve-renarde !

- Si ! A ton avis, pourquoi le triskèle t'a parlée ?

Je la regardai d'un air ébahi.

- Comment tu le sais ?

- Je l'ai rêvé. Parce que, après Daïkan, c'est le triskèle qui m'est apparue. Il m'a dit que tu avais peur de l'eau, mais qu'il fallait que tu ailles le voir. C'est pour ça que j'étais distante ces derniers jours. Je voulais voir si le triskèle avait dit vrai. Quand je l'ai su, je n'ai pas hésité : je t'ai poussée dans l'eau. Mais je ne sais pas ce qu'il a dit...

Je n'ai pas réussi à me retenir. Je lui ai sauté dessus. Personne n'a réussi à comprendre ce qui se passait. Du moins, pas jusqu'à ce que je me retrouve au-dessus de Vaïlou, les griffes au niveau de sa gorge.

- Herrya, non, ne fais pas ça ! s'exclama Nazar, sans pour autant se mettre entre nous.

- Pourquoi pas ? Elle aurait pu me tuer. Elle a gardé tous ses secrets à elle, mais elle a balancé mes secrets, ma vie passée. Et moi, je veux que le passé soit oublié !

- Mais il va devoir remonter un jour ou l'autre, Jay.

Je lâchai précipitamment Vaïlou. C'était elle qui avait parlé, c'était de sa bouche qu'étaient sortis les mots. Mais c'était la voix de Noah qui avait résonné entre les pierres.

Et pas celle de Daïkan. Celle de mon ancien ami.