Je déballais mon dernier carton dans lequel se trouvaient des vêtements. Ce jour-là je pouvais enfin dire que j'avais emménagé, même si j'étais dans mon appartement depuis une bonne dizaine de semaines.

Les choses se sont précipitées dès le moment où j'ai voulu quitter le domicile familial. J'ai en effet trouvé rapidement un appartement qui me correspondait, j'ai récupéré mes meubles au garde-meuble puis j'ai emménagé. Évidemment je n'avais pas acheté cet appartement mais je le louais. Je voulais le payer grâce à mon salaire mais mes parents ont énormément insisté pour m'aider. Leur aide nous a permis, à eux et à moi, de retrouver une vraie relation entre nous.

Grâce à mon nouvel appartement, à mon job, au fait d'avoir retrouvé mes anciens amis, je pouvais enfin me reconstruire. Cependant, quelque chose me tracassait... J'avais pardonné à mes parents mais pas à cette personne qui me tenait beaucoup à coeur.

Elle avait été là pour moi depuis le début. Nous nous sommes toujours bien entendus, nous avons partagé un certain nombre de bons moments ensemble. Est-ce que je devais vraiment lui en vouloir ? Après tout, cette personne m'avait caché la vérité. En y réfléchissant, je me suis dit que je devais rappeler cette personne et m'excuser, je devais revoir Chuck.

*

Lors de mon appel, il n'avait pas hésité. Il voulait qu'on se voit au plus vite. Je lui ai donc dit de venir chez moi, mon nouveau chez moi.

Rentre, fais comme chez toi.

C'est sympa chez toi, j'aime beaucoup le style loft.

Merci. Chuck ? Il faut qu'on parle.

Ouais je sais. Je suis désolé.

Non c'est moi qui le suis, le coupai-je.

J'aurais pas dû... enfin... je...

Mec, c'était con de ma part de t'en vouloir. Tu n'y es pour rien dans tout ça. C'était pas à toi de m'avouer que Ana était coupable, c'était à elle de le faire. Elle l'a fait et voilà, ça s'arrête là.

Tu comptes lui reparler un jour ?

Bien sûr que non, enfin... je sais pas.

Sérieux ? Même avec le temps ?

Chuck, mets-toi deux secondes à ma place. Imagine Mia qui tue accidentellement un membre de ta famille et...

Accidentellement Liam. Tu sais ce que ça veut dire ? Ce n'est pas voulu, ce n'est pas vraiment contrôlé, et c'est pardonnable.

Tu ne peux pas pardonner une personne qui commet ce genre de choses.

Tu aurais dû la voir le soir après qu'elle t'ait tout dit. Elle est venue chez moi, le visage blanc, les yeux rouges, des larmes partout. Elle voulait en finir, la seule chose qu'elle voulait faire après la mort de sa meilleure amie et de ta sœur, c'était de réparer le mal qu'elle avait fait. Elle a réussi à lier une relation avec ta famille et probablement avec quelques membres de ton entourage. Mais le plus compliqué était de réparer le mal auprès de toi. Mais elle a échoué car tu as eu la pire des réactions. Tu as été plutôt lâche je trouve. Tu as essayé de se mettre à sa place ? Tu t'es demandé ce que tu aurais fait à sa place ?

Chuck venait de tout remettre en question après ce qu'il venait de dire. Je restai bouche bée lorsqu'il termina. Je ne savais pas quoi répondre, tout simplement. Je savais que Chuck avait raison mais c'était plus fort que moi, je suis quelqu'un de très rancunier et je n'allais pas oublier de si tôt ce que Ana avait fait.

Je devais te le dire et t'ouvrir les yeux. Tu t'es renfermé sur toi-même dès le moment où tu as su.

Je sais, mais je suis comme ça et ce sera toujours le cas.

*

Nous étions assis à une table dans une pizzeria. En réalité nous faisions que attendre nos commandes pour aller ensuite les manger sur le port.

Les pizzas chaudes étaient sur mes genoux et Chuck faisait une marche arrière pour se garer. Le soleil était en train de se coucher et les gens commençaient à arriver pour dîner au restaurant.

Les pieds dans le vide, le regard au loin, nous dégustions nos pizzas. Le soleil n'était pas encore couché mais les immeubles nous empêchaient de le voir se coucher.

Après avoir mangé plus de pizza que moi, Chuck se laissa tomber derrière moi. Il s'allongea et ne dit plus un mot. Quant à moi, je restai assis, les pieds toujours dans le vide. Je vis au loin un grand bateau rentrer dans le port.

Quelle était la probabilité pour que ce bateau soit celui du père de Ana ? Zéro...
Je n'en croyais pas mes yeux. Je n'arrivais pas à voir qui se trouvait à l'intérieur mais cela m'importait peu. Cependant je n'arrivais pas à regarder autre chose...

Tu regardes quoi ?, me demanda Chuck.

Euh... le ciel.

Y'a rien à voir dans le ciel mec...

Bon ok, je regarde le bateau qui rentre.

Chuck se redressa pour voir de quel bateau je parlais. Il connaissait ce bateau autant que moi puisque il était là lors de la soirée. Il me regarda puis sourit.

Tu vois, tu penses encore à elle.

Comment tu veux que je l'oublie ?, demandai-je.

C'est vrai... Tu l'aimes encore ?

J'en sais rien mec. Ça fait presque trois mois qu'on s'est pas vus. Elle avait essayé de m'appeler mais je n'avais pas voulu répondre.

En tout cas je suis sûr qu'elle t'aime encore.

Je regardai Chuck du coin des yeux. Est-ce qu'il était au courant de quelque chose ? Que ce soit le cas ou non je ne voulais pas savoir... J'avais réussi à faire abstraction de Ana pendant presque trois mois et je pense que je pouvais continuer sur cette lancée.

*

J'étais à présent couché dans mon lit. Chuck m'avait ramené après notre petite sortie entre mecs.

Je regardais mon plafond car je n'arrivais pas à dormir. Je savais parfaitement pourquoi je n'arrêtais pas de tourner dans mon lit. Je savais pertinemment que je n'arriverais pas à dormir tant que je n'aurais rien fait.

J'ai donc tendu la main pour attraper mon téléphone qui était sur ma table de nuit. Je plissai mes yeux lorsque l'écran de mon téléphone s'alluma. Il était tard et je savais que j'allais la déranger...

Allô ?

Liam ?, demanda-t-elle.

Ouais, c'est bien moi.

Je... Qu'est-ce que tu veux ?

Te voir.

Maintenant ?

Non non. Demain ?

Euh... d'accord.

Je raccrochai assez rapidement sans ne rien rajouter. Je posai mon téléphone après l'avoir éteint puis fermai aussitôt les yeux. Je savais que j'allais dormir cependant j'appréhendais le lendemain...

*

Après avoir échangé quelques messages, nous avions décidé de nous retrouver dans un café. Il n'était que dix heures passées alors j'allais prendre mon petit-déjeuner là-bas.

Ce matin là j'avais décidé de prendre le bus pour me rendre en centre-ville. Cela faisait
longtemps que j'avais pas pris le bus et à vrai je trouvais ça encore plus ennuyant qu'avant.

Je poussai la porte puis entrai doucement. Je regardai autour de moi et vis Ana. Elle ne m'avait probablement pas encore vu puisque qu'elle était scotchée à son téléphone.

Je m'approchai doucement de la table et me raclai la gorge pour lui signaler ma présence. Elle sursauta aussitôt et laissa échapper un petit rire, probablement un rire nerveux.

Liam... Salut.

Salut, Anastasia.

Elle s'était levée pour faire je ne sais quoi. Je ne savais pas si c'était une formule de politesse ou si elle voulait me prendre dans ses bras. Je me suis donc assis, en face d'elle.

Ça fait longtemps..., avoua-t-elle.

En effet. Et ça fait trop longtemps.

À quoi tu penses en disant ça Liam ?

Je pense que j'ai été con...

Soudainement la main de Ana se posa sur la mienne. Je la regardai en fronçant mes sourcils avant de retirer ma main le plus rapidement possible. Je vis la déception dans ses yeux, mais à vrai dire... cela m'était égal. Quand je disais que j'avais été con, c'était pas dans le sens où j'avais été con avec elle, mais dans le sens où j'avais été con de ne rien avoir compris.

J'ai été con de ne rien voir arriver. Je m'étais attaché à toi, je tenais à toi, je suis tombé amoureux de toi. Et toi tu as fait quoi ?...

Liam...

Je vais te dire ce que tu as fait. On a construit quelque chose ensemble, on a construit une histoire. Tu vois, je vois ça comme une tour. Et puis ensuite tu arrives, en pleine construction et tu détruis les fondations. Les fondations de notre histoire c'était la confiance. Et aujourd'hui il n'y a plus rien entre nous puisqu'il n'y a plus aucune fondation.

Ana s'écroula en larme devant moi. Je venais d'extérioriser devant elle toute la colère et la haine qui étaient enfouies au plus profond de moi depuis plusieurs mois déjà.

Très bien, j'ai compris. C'est pour me dire ça que tu m'as demandé de venir ?

Non. Si je t'ai demandé de venir c'est parce que je veux savoir. Mes parents ne m'ont pas vraiment tout raconté alors je t'ai contacté pour que tu me dises tout. Je veux savoir, je veux tout savoir.