Interlude IV
Bonsoir les amis!! ^-^
Voilà l'Interlude IV, il est absolument indispensable que vous le lisiez, sinon vous ne comprendrez rien à la suite!
J'ai cru comprendre qu'au chapitre précédent, la musique vous avez beaucoup plu et vous aviez aimé l'écouter durant votre lecture. Ainsi, je vous propose une autre musique que j'ai écouté pendant toute l'écriture de cet Interlude (pour mettre la musique en boucle sur ordinateur : clique droit + "lire en boucle" !) <3
Ceci est l'un des chapitres les plus longs de Suprématie, installez-vous bien avant de l'entamer ;)
Bonne lecture ~ ♥
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"Maman ?
-Quoi encore..."
Le petit garçon s'approcha un peu, ses petits pieds nus sur le sol froid. Une femme était là aussi, sa mère, assise sur la table du salon. Cette dernière portait une jupe noire qui lui arrivait juste en-dessous du genou, une chemise blanche et une veste également noire. Une montre à la main, elle ne cessait de taper sur son clavier d'ordinateur portable, ajustant parfois sa paire de lunettes rectangulaires.
"Mon... Mon copain à l'école m'a dit qu'il faisait une fête d'anniversaire samedi chez lui. Est-ce que tu..."
La femme mûre tourna un regard sévère sur son fils, visiblement agacée de se faire interrompre dans son travail. Le petit garçon se tritura les doigts, hésitant. Il sentait son coeur battre à tout rompre, mais avec tout le courage qu'il avait, il posa quand même sa question.
"Est-ce que tu accepterais que j'y aille... ? Je ferai tous mes d-devoirs avant, et-
-Non. Ce samedi j'ai une réunion très importante et très longue. Et toi, tu dois mieux travailler ton anglais, je t'ai trouvé des exercices sur internet. Maintenant retourne dans ta chambre, tu vois bien que je suis occupée."
Pas un coup d'oeil de plus vers son fils ; la femme d'affaires se remit immédiatement au travail, les sourcils froncés de concentration, les lèvres serrées entre elles, qui formaient une ligne droite parfaite.
Le petit garçon savait déjà que la réponse était non, mais il essayait encore. Du haut de ses dix ans, il essayait encore. Il se disait qu'un jour, il pourrait lui aussi faire des sorties avec ses amis, ou aller à des anniversaire, des soirées pyjamas... Si un jour sa mère acceptait, même une seule fois durant toute sa vie, il se sentirait infiniment heureux.
Mais, visiblement, ce n'était pas pour tout de suite.
Alors, lentement, les petits pieds nus firent marche arrière, et le petit garçon monta dans sa chambre, où il s'enferma jusqu'au dîner, qu'il passa également seul. Sa mère s'était contentée de faire réchauffer un plat surgelé pour le lui poser sur la petite table devant la télévision, et était retournée travailler.
Le petit brun avait alors dû subir les informations à la télévision, car jamais sa génitrice n'aurait accepté qu'il mette une chaîne de dessins animés. Elle disait qu'ils étaient abrutissants et inutiles.
Dès lors qu'il eut débarrassé son assiette tout seul, l'enfant passa derrière sa mère, qui n'avait toujours pas bougé de sa place.
"Bonne nuit maman.
-Bonne nuit." Répondit-elle d'un ton neutre, les yeux figés sur son écran.
Après s'être lavé et brossé les dents, le jeune garçon alla se coucher, attrapant sa peluche beige. Cette dernière était en forme d'ours. C'était le seul doudou que sa mère lui avait offert, il y avait de ça au moins cinq ans. Elle ne s'était même pas rendue compte que les bijoux autour de la peluche faisaient d'elle un jouet initialement destiné aux petites filles.
Autour du cou de cet ours, il y avait un collier avec, en son bout, une petite perle rose qui aurait dû être retiré pour être porté. Mais le jeune garçon ne voulait pas porter ce collier car, une fois, il avait voulu le mettre, mais on s'était moqué de lui à l'école en le traitant de fille.
Il serra dans ses bras l'ours en peluche, son seul ami, la seule chose à laquelle il pouvait se confier, avant de fermer les yeux.
Ce fut une soirée comme toutes les précédentes, et toutes les suivantes également. Le petit garçon était triste, mais, par-dessus tout...
"Bonne nuit, petite perle." Chuchota-t-il en serrant sa peluche.
Il était habitué.
**
Le jeune homme recoiffa ses cheveux bruns, en se fixant dans la glace de son armoire. Il réajusta ensuite son t-shirt de la même couleur que ses cheveux, à manches longues, puis boucla correctement la ceinture de son jean noir.
Il se figea soudainement en entendant des pas, dans l'escalier, alors il s'empressa de se cacher derrière la porte ouverte du meuble. Mais, fort heureusement, sa mère venait de s'enfermer dans la salle de bain, probablement pour faire sa toilette avant d'aller se coucher.
C'était sa chance.
Le jeune homme enfila rapidement ses chaussures, attrapa sa veste, et prit une profonde inspiration.
A seize ans, il allait fuguer pour la première fois.
Pour aller à la première soirée de sa vie.
Il savait qu'elle avait lieu car la soirée était à son lycée, c'était une sorte d'événement d'intégration, l'année ayant commencé seulement deux semaines plus tôt.
Il s'était fait la promesse, en entrant au lycée, qu'à présent il allait avoir la vie qu'il voulait, qu'il allait aller à toutes les soirées qu'il souhaitait, qu'il sortirait avec des filles, qu'il aurait une vie sociale, enfin, après toutes les interdictions de sa mère. Mais pour cela, le prix à payer était le risque. Le risque que sa génitrice découvre qu'il n'était pas dans sa chambre.
Cette idée donna à l'adolescent une désagréable montée d'adrénaline.
Non.
Il ne fallait pas qu'il se dégonfle, surtout pas, sinon il n'oserait plus jamais réessayer.
Alors, le coeur battant à tout rompre, le brun s'approcha de sa fenêtre. Il l'ouvrit au ralenti, rassuré d'entendre encore l'eau de la douche qui coulait dans la salle de bain. Heureusement, sa chambre était au rez-de-chaussée de la maison, c'est pourquoi il n'eut qu'à enjamber la fenêtre pour se retrouver les pieds dans l'herbe qui entourait sa demeure, avant de fermer la fenêtre, les mains tremblantes de peur. Il ne laissa qu'un petit centimètre d'ouvert, pour être sûr de pouvoir rentrer sans problème, après la soirée, par cette même fenêtre.
Inutile de dire qu'il s'était presque mis à courir, presque comme s'il fuyait sa maison plutôt qu'il allait à une soirée. Ou peut-être que c'était un mélange des deux.
Une fois au lycée, le jeune homme fut pris d'un drôle de sentiment de joie, un de ceux qu'il avait rarement ressenti. Il s'arrêta un moment devant les grilles énormes du bâtiment, avant d'entrer. La salle où se passait la soirée était immédiatement repérable de là où il était, car à peine arrivé, des halos de lumière l'attirèrent vers la droite. Il s'approcha de plus en plus lentement de la salle, avant de comprendre que la porte était déjà ouverte.
Il voyait des gens danser et rire, des verres à la main. Mais l'ambiance restait gentille, plutôt festive, à l'image d'une soirée d'adolescents, plutôt qu'une soirée où l'on trouvait de la drogue et d'autres choses qui auraient facilement rendues mal à l'aise le brun. Mais il fut heureux de comprendre que tout était sécurisé. Qu'il ne craignait rien.
Il fut réellement satisfait de poser un premier pied dans la pièce. Les différentes lumières venaient d'un petit stroboscope à trois couleurs, dirigé vers le plafond. Il reconnaissait quelques visages, mais plusieurs classes de seconde étaient mélangées. Et puis, de toute manière, il n'avait pas encore d'amis.
"Salut mec, tu veux un verre ?"
Un sursaut le secoua lorsqu'un des garçons de sa classe lui tendit un gobelet, qu'il accepta avec un léger sourire.
"T'inquiète, y'a pas d'alcool dedans, ça fait chier mais y'a le directeur qui passe toutes les heures pour voir si tout est réglo, donc bon.
-Oh, je vois...
-T'es dans ma classe d'ailleurs, non ?"
Le jeune homme acquiesça.
"Ok ! Je suis celui qui a eu l'idée de la soirée, je suis un délégué, donc je sers les verres. Allez amuses-toi bien, et vole pas toutes les filles avec tes fringues classes, là. Rigola-t-il.
-Je- Non non, t'en fais pas." Sourit le brun, gêné.
Le garçon qui lui avait adressé la parole se tourna vers de nouveaux arrivants, avant de répéter plus ou moins le même discours. Visiblement, lui s'occupait de servir les autres. Mais il avait l'air de vouloir sympathiser avec tout le monde, aussi.
L'adolescent se sentit envieux de ça. D'être aussi ouvert et chaleureux, à accueillir plein de personnes, à organiser des soirées où tout le monde viendrait avec le sourire.
Secrètement, il se demanda si, un jour, lui aussi organiserait des soirées. S'il arriverait à s'arracher des griffes de sa mère sévère, s'il pourrait être la source du bonheur des autres, du sourire de dizaines de personnes, non, de centaines de personnes.
Au début, il fut plus ou moins embarrassé. Il restait de côté, sirotant son verre en observant les autres.
Il se rendit compte à ce moment-là, du contraste évident entre ces gens, et sa mère.
Entre la sociabilité, et la prison.
Entre la jeunesse, et l'âge adulte.
Une pensée ne le quitta plus, à partir de ce soir-là.
Les adultes sont si ennuyeux.
"Hey ! Pourquoi tu restes tout seul, dans ton coin ?" S'exclama une fille aux cheveux noirs, très longs.
Le brun paniqua intérieurement. A vrai dire, pour de ce qui était des filles, il n'avait jamais eu de copine. Il n'avait que seize ans, rien n'était pressé, mais il ne connaissait même pas le flirt, les jeux de regards, tenir une main. Les filles, au collège, le fuyaient car il se renfermait sans cesse sur lui-même.
Mais, à cet instant, cette jeune fille aux yeux lumineux l'abordait, comme s'il était un garçon tout-à-fait banal.
"Je..."
Il ne fallait pas paniquer, le jeune homme se le répétait en boucle. Rester calme, être cool, être normal.
"En fait je ne connais personne." Avoua-t-il, la voix faible.
Elle eut un sourire.
"Bah, tu sais, ici personne ne connaît personne. Mais je me suis fait un petit groupe d'amis et on cherche des gens pour venir avec nous dans la forêt à côté. On va faire un loup-garou.
-Mais... Et cette soirée ?
-Y'a trop de musique pour faire connaissance. Allez viens, ce sera bien mieux avec nous."
Il hésita un instant, jetant un oeil autour de lui.
Il était vrai qu'avec des gens qui dansaient, criaient dans tous les sens ou rigolaient à plein poumons, il serait bien difficile de faire de nouvelles rencontres, sans s'échapper de la soirée à un moment ou à un autre.
"Mais c'est à peine le début de la soirée, c'est pas grave ? Tenta-t-il encore, peu sûr de la décision à prendre.
-Des soirées, on pourra en faire plein. Mais pour ça, il faut faire des connaissances." Fit-elle, accompagnant ses paroles d'un clin d'oeil.
Quelque chose, dans les yeux de cette jeune fille, donna une sorte de force à l'adolescent.
Cette sociabilité, ce pétillement, cette énergie...
Tout le contraire de sa mère. Elle qui était si éteinte, linéaire, ennuyeuse. Le brun ne put refuser plus longtemps. Rien que de parler avec cette fille le fit se sentir de nouveau rempli d'énergie, un sentiment si agréable, si doux.
"Ok." Souffla-t-il alors, un sourire aux lèvres.
La jeune fille aux longs cheveux noirs acquiesça, heureuse, avant de lui tendre la main. Le brun la saisit sans plus hésiter, et se fit tirer hors de la grande salle.
"Au fait, comment tu t'appelles ? Questionna-t-elle, tout en emmenant le jeune homme vers d'autres jeunes, près de la grille du lycée.
-Ah, parfait, il nous manquait un joueur !" S'exclama un autre garçon, en voyant son amie amener un inconnu.
Puis ils se mirent tous en marche, certains ayant encore des verres à la main, discutant joyeusement.
"Kang-Dae. Je m'appelle Kang-Dae." Répondit le brun, un sourire aux lèvres.
**
"Mais puisque je te dis que je ne suis pas loup-garou ! Cria la jeune fille.
-T'es une fille, donc on doit dire loup-garoute ?
-Très drôle. Et pour une fille c'est "louve", abruti."
Le jeune homme se mit à rire une énième fois, tout en gardant bien sa carte cachée contre lui. Il observait ses nouveaux amis se chamailler pour savoir qui étaient les deux traîtres de la partie. De son côté, lui ne faisait que rire, ce soir. Son sourire ne quittait plus ses lèvres, son coeur tambourinait de bonheur et de liberté dans sa poitrine, même à maintenant quatre heures du matin, il ne ressentait aucune fatigue.
Il était en train de passer la meilleure soirée de toute sa vie. La première, et la meilleure, pour sûr.
Il se sentait vivre, aussi simplement que ça. Vivant, libéré, heureux. Il n'avait jamais connu cette sensation avant, celle de sentir son coeur crépiter de bonheur. Et, à chaque fois qu'il riait, tout le monde le suivait. Son rire était communicatif, beau et sincère. Ses autres amis semblaient déjà beaucoup l'apprécier, et le jeune homme ne pouvait qu'être reconnaissant de cela, qu'ils lui aient donné une chance. Une chance inattendue.
"Kang-Dae, au lieu d'te fendre la poire, tu nous bernerais pas, par hasard ?
-C'est vrai que tu dis pas grand chose, cette partie. Etrange. Sourit malicieusement un autre garçon.
-Je vous jure que ce n'est pas moi ! S'offusqua faussement le jeune homme.
-C'est pas typiquement la phrase d'un loup-garou ça ?"
Kang-Dae rit encore, en se défendant comme il le put.
Mais vint l'heure où il fallait rentrer. Le brun se sentit soudain bien plus inquiet, comme s'il redescendait sur terre.
Ils se saluèrent tous, un à un, presque en se prenant dans les bras, chacun ayant en lui la sensation d'avoir trouvé un nouveau groupe d'amis formidable, digne d'un coup de foudre amical.
Ils s'échangèrent des numéros de téléphone, puis, petit-à-petit, se quittèrent.
A chaque pas que Kang-Dae posait sur le béton du trottoir, son sourire s'effaçait un peu plus, se faisait gommer par la peur qui commença doucement à le ronger, celle que sa mère s'était réveillée tôt, assez tôt pour qu'elle s'aperçoive de l'absence de son fils.
Il tenta de se rassurer de mille et unes manières, se répétant que son réveil habituel était de sept heures, et qu'il était à peine six heures dix. Il serait chez lui dans cinq minutes à peine, il avait laissé sa fenêtre ouverte... Non, rien ne pouvait prouver que cette nuit magique se transformerait en un cauchemar éveillé.
Mais, lorsqu'il atteignit sa fenêtre, il la découvrit fermée. Il avait pourtant bien fait attention à la laisser entrouverte, n'est-ce pas ? Son coeur s'emballa lorsqu'il se rendit compte qu'il était en effet impossible de la rouvrir.
Alors, le pas lent, les yeux s'écarquillant lentement à mesure qu'il comprenait, Kang-Dae s'approcha de sa porte d'entrée. Il sortit ses clés de sa poche. Il ouvrit la porte. Il entra.
Sa mère était là.
Assise sur une chaise, droite, les mains à plat sur la table, les yeux sévères figés sur son fils.
Mais il ne fut pas surpris.
Car, après-tout, pour Kang-Dae, le cauchemar était synonyme de quotidien. Que sa mère ne découvre rien aurait relevé du miracle.
"Je vais te changer d'établissement dans la semaine. Il est hors de question que tu commences avec de mauvaises influences."
Ce fut l'unique phrase qu'elle prononça. Pas de cris, pas de morale de deux heures, pas d'inquiétude audible dans sa voix calme.
Kang-Dae ne répondit rien. Son visage était figé dans une expression d'effroi, mélangé à une étrange neutralité. Alors il fit la meilleure chose qu'il pouvait faire, en cet instant.
Filer dans sa chambre.
Une fois enfermé, il s'allongea dans son lit. Son visage était glacé et, pourtant, de ses yeux ouverts sur le vide, coulaient des larmes à peine perceptibles.
Il se redressa, tendit sa main vers son tiroir, et en sortit une peluche beige, qu'il posa devant lui, en se rallongeant.
Un drôle de sourire prit forme sur ses lèvres. Ses larmes contrastaient avec ce sourire lumineux et apaisé, alors que ses pupilles étaient figées dans celles de son ours en peluche.
"Tu sais quoi, petite perle ?" Chuchota-t-il.
Il renifla, gardant son sourire énorme, son expression joyeuse.
Son masque heureux.
"...J'ai passé la meilleure nuit de toute ma vie."
**
"Monsieur, s'il vous plaît, vous ne pouvez pas entrer...
-Mais dites-moi ce qui se passe ! Pourquoi personne ne me dit rien !"
Les deux chirurgiens se regardèrent, en restant devant la porte.
"Votre femme perd beaucoup de sang, monsieur Lee. Mais on ne comprend pas encore ce qui se passe, laissez-nous travailler, s'il vous plaît, allez vous asseoir. Vous aurez des nouvelles toutes les heures."
Kang-Dae resta figé un instant, comme s'il ne comprenait pas ce que les médecins disaient, mais finit par céder. La bouche entrouverte de choc, de stupeur, il recula, lentement, pas par pas, avant de s'asseoir sur une des trois chaises noires devant la porte blanche.
Il pressa sa veste dans ses mains, en regardant à gauche, à droite, comme si quelqu'un allait déjà venir lui donner des nouvelles.
"Oh m-mon Dieu..." Souffla-t-il en se prenant la tête dans les mains, l'angoisse le rongeant.
Aujourd'hui était le grand jour. Sa femme allait accoucher, enfin, Kang-Dae allait pouvoir être papa, il allait pouvoir prendre son fils dans les bras. Jamais, tout au long de sa vie, il n'avait connu pareille excitation. Quand sa femme, qui l'ennuyait depuis des années, lui avait annoncé neuf mois plus tôt sa grossesse, c'était comme un nouveau souffle dans leur vie monotone. Lui était professeur de sciences économiques en université, et elle, était enseignante également, d'histoire-géographie, mais en lycée. Ils s'étaient rencontrés sept ans plus tôt, un soir où ils avaient tous les deux été invités par un ami qu'ils avaient en commun.
Seules les deux premières années avaient été heureuses. Au bout de ces deux ans, Kang-Dae s'était rendu compte qu'il s'était encore lassé de cette personne, car cette dernière mûrissait, comme lui, et devenait ennuyeuse. Il n'avait plus trouvé ce qu'il cherchait chez quelqu'un : son énergie, sa joie de vivre, sa motivation. Elle s'était éteinte comme toutes les autres, alors le brun, découragé mais amoureux malgré tout, avait décidé de la demander en mariage. Il s'était dit que ça allait faire renaître leur couple, qu'il serait de nouveau heureux avec elle.
Grosse erreur. La flamme s'était rallumée deux mois, tout au plus, et s'était éteinte à nouveau. Kang-Dae en avait été désespéré, mais l'amour qu'il ressentait pour elle l'avait empêché de la quitter.
Alors il avait commencé à accepter cette vie, il s'était dit que ce serait pareil, à chaque fois, qu'il était inutile de tenter encore avec quelqu'un d'autre.
De plus, sa mère était décédée l'année dernière, d'un cancer.
L'héritage qu'il reçut fut assez énorme.
Il n'avait pas souffert de sa mort. Il s'y attendait, depuis le temps que cette dernière était à l'hôpital. A vrai dire, ils ne se parlaient plus vraiment. Elle était venue à son mariage mais était restée muette.
Mais quelle surprise, quel bonheur, quelle joie avaient pris Kang-Dae, lorsque sa femme était tombée enceinte.
Il allait avoir un enfant. Son enfant. Un petit bout d'être toujours joyeux, toujours désireux de vivre, d'apprendre, de découvrir. Il n'avait jamais pensé à faire un enfant, et pourtant, il avait vu cela comme la réelle clé du bonheur.
Mais aujourd'hui, jour J de l'accouchement, il ne comprenait pas pourquoi les médecins s'affolaient. Pourquoi ils entraient et sortaient sans cesse de la chambre de sa femme, presque en courant, en évitant le regard du futur père.
Puis, en moins de cinq minutes, le brun avait finalement réalisé que quelque chose n'allait pas. Que l'accouchement ne se passait pas comme prévu.
Les secondes devinrent minutes, les minutes formèrent un quart d'heure, une demi-heure, une heure, et une heure et demi.
Un énième médecin sortant de la pièce se fit attraper par la poigne ferme de Kang-Dae qui, cette fois, n'en pouvait plus d'attendre.
"Dites-moi ce qui se passe." Articula-t-il, presque menaçant, désireux d'avoir une réponse.
Le médecin, après avoir pris une grande inspiration, fixa le futur père.
"On est en train de pratiquer une césarienne, monsieur."
Le professeur écarquilla les yeux.
"Quoi... ?
-C'est courant de nos jours, vous savez. Mais votre femme s'est évanouie plusieurs fois. Malgré la péridurale, son corps n'a pas supporté la douleur. Puis elle a commencé à faire une hémorragie, donc nous tentons de sauver votre enfant, monsieur.
-Oui. Pitié. Sauvez mon enfant. C'est mon bébé. Sauvez-le." Supplia Kang-Dae, serrant le bras du médecin.
Ce dernier acquiesça, se courba et s'en alla. L'homme retourna alors s'asseoir.
Et ce fut cette fois court. Si court que Kang-Dae aurait voulu que cela dure encore, qu'on lui laisse encore cet espoir que tout allait s'arranger.
Car lorsqu'un médecin sortit, du sang sur l'uniforme, les yeux désolés, le brun sut que sa vie allait encore prendre ce tournant dramatique, horrible, cauchemardesque qu'il connaissait si bien.
"Votre femme a survécu, monsieur Lee, c'est un soulagement, mais-
-Mais quoi? Mais quoi ?! Pitié, ne me dites pas que..."
L'expression du médecin fut comme un coup de poignard en plein coeur du futur papa, qui venait de comprendre qu'il n'en était plus un.
"C'est un cas rare, monsieur, je vous présente toutes mes excuses. Toute notre équipe vous présente ses plus sincères excuses, monsieur Lee. Nous avons tout tenté, mais ça n'a pas été..."
Les paroles du médecin devinrent inaudibles, Kang-Dae sentit cette sensation typique du rêve, celle où tout est flou, où l'on entend les choses mais elles se déforment, si bien que plus rien n'est compréhensible, que seule la douleur dans notre poitrine semble réelle. Que plus rien n'est vrai, à part la sensation que l'on va tomber dans un gouffre sans fin.
Son bébé était mort-né.
Son petit garçon.
Jungkook était mort,
avant même de pouvoir comprendre ce qu'était la vie.
**
"Bien. Ce sera tout pour aujourd'hui."
Les élèves de Kang-Dae rangèrent leurs affaires, alors que lui s'asseyait sur son bureau, soupirant en voyant un message de sa femme. Si seulement elle savait à quel point il se fichait qu'elle puisse rentrer plus tard.
Voilà quelques années supplémentaires qui s'étaient écoulées.
Ennuyeuses, comme toutes les autres.
Le brun était devenu un homme mûr, toujours enseignant dans la même université, toujours marié à la même femme, toujours vivant dans ce quotidien linéaire et monotone.
Il n'en pouvait plus, mais plus rien ne lui donnait la force de se battre pour une vie meilleure. Tout ce qu'il entreprenait échouait lamentablement.
Il allait jusqu'à espérer que sa vie soit brève, qu'on arrête de le faire souffrir de cette profonde solitude qu'il connaissait depuis sa plus tendre enfance.
En rentrant chez lui ce soir-là, il embrassa à peine sa femme. Il la remercia simplement pour le repas, et ignora le regard triste qu'elle portait sur lui, alors qu'il avalait son plat avant de débarrasser. Il fit la vaisselle, les pensées vides, les yeux figés sur ses mains qui s'affairaient à nettoyer. Puis, comme chaque soir, il monta les escaliers en spirale, et ignora cette porte blanche, sur laquelle un panneau figurait, avant.
"Chambre de Jungkook"
Cette petite pancarte que le couple avait placé, au bout de sept mois de grossesse, heureux d'avoir trouvé le prénom de leur petit garçon. Petit garçon qui n'était plus, qui n'existait pas.
Qui n'avait jamais existé.
Car c'était comme ça qu'ils agissaient à présent, depuis plusieurs années ; ils faisaient comme si rien n'était arrivé, comme si sa femme n'était jamais tombée enceinte. En réalité, cette dernière aurait voulu en parler, mais Kang-Dae lui avait fait comprendre que ce sujet était mort le même jour que son enfant.
Il serra les poings en y repensant.
Mais que savait-il de l'avenir, finalement ?
Le lendemain matin, en ce deuxième mois d'une toute nouvelle année scolaire, Kang-Dae fixa chaque élève entrer dans son cours, tentant de réciter les noms dans sa tête.
Mais un en particulier ne lui revenait pas. Un jeune homme aux cheveux châtains, à la mâchoire carrée, à l'expression neutre, s'installant aux côtés de SeokJin. Lui, il se souvenait de son nom, car il avait déjà participé deux ou trois fois. Mais son ami était bien plus discret.
"Nous allons commencer." Souffla-t-il, en gardant son regard sur le jeune homme aux cheveux châtains.
C'était comme si, soudainement, il avait remarqué l'étudiant. Comme s'il venait d'arriver. Kang-Dae ne sut pourquoi, mais il voulait en savoir plus. Il était attiré par ce jeune homme, son expression était si différente. Il aimait les jeunes qui pétillaient, qui riaient, qui étaient juste débordants d'énergie, il avait toujours admiré cela. Mais lui, c'était autre chose.
Il se démarquait des autres, de sa joie inexistante. Habituellement, l'adulte n'aimait pas ça. Mais cette fois, ce fut différent.
Son expression n'était pas surjouée, il ne tentait pas de se masquer, il semblait concentré. Comme si toutes ses pensées étaient focalisées sur une seule et même chose.
Kang-Dae en eut des frissons.
A la fin du cours, le professeur aperçut Jin se lever, suivi de son ami, et tous deux passèrent devant son bureau pour sortir. Le brun tendit l'oreille.
"Tu viens chez moi, ce soir, Tae ?
-Non, pas ce soir, j'ai à faire."
Puis ils s'en allèrent en continuant leur conversation, qui devint inaudible pour l'adulte.
Tae.
Kang-Dae attrapa vivement sa liste d'élèves, faisant glisser son doigt sur les lignes de haut en bas. Il cherchait le seul nom sur lequel il n'arrivait pas à mettre de visage.
Son doigt s'immobilisa.
Le voilà.
Kim Taehyung.
Ce simple nom fit sourire le brun. Il eut envie d'en savoir plus. Ce regard, ce visage, ce garçon... Tout était si différent des autres. Il semblait dans une autre réalité, la sienne. Il le comprenait. Kang-Dae aussi vivait dans une autre réalité. Mais sa réalité était celle de la solitude.
Et toi, Taehyung, dans quel monde vis-tu ? Quelle est ta réalité ?
Ce fut ces deux questions que l'enseignant se posa en boucle. De jours en jours, de semaines en semaines, il s'était mis à regarder le châtain.
A être fasciné par sa personne. A être admiratif de ses capacités ; ce dernier ne prenait jamais le cours, et, pourtant, il avait les meilleures notes de toute sa promo. C'était presque incroyable. Il réussissait tous les tests avec une facilité déconcertante.
Kang-Dae s'était même mis à fouiller dans son dossier pour trouver d'autres bulletins, d'autres notes, pour essayer de comprendre comment il faisait pour réussir sa scolarité avec si peu d'efforts. Mais ses notes étaient excellentes, partout.
Ce soir-là, l'adulte resta plus longtemps dans la salle des professeurs, à éplucher le dossier du châtain. Il savait que c'était malsain, qu'il ne devrait pas faire cela, mais c'était comme si, enfin, il avait trouvé un but, aussi infime soit-il.
Celui de comprendre cet élève, de comprendre à quoi ressemblait sa vie, ce qu'il manigançait.
Car, au fur et à mesure des mois, il avait développé l'étrange idée que son avenir était lié à Taehyung.
"Qu'est-ce que vous faites ?"
Kang-Dae sursauta, avant de soupirer de soulagement en apercevant une de ses collègues.
"Oh, rien. Je regardais dans le dossier de Kim Taehyung.
-Kim Taehyung ? Pourquoi ça ?"
Le professeur de sciences-économique referma ledit dossier.
"Tu sais qu'il ne prend aucun cours ? Et qu'il a les meilleures notes de sa promo ?
-Ouaip, je l'ai en mathématiques. Il a ni ordinateur, ni feuilles. Et il brille à chaque examen.
-Tu trouves pas ça bizarre ?" Renchérit Kang-Dae.
Elle haussa des épaules, avant de se servir un café.
"Bah, tu sais, il est tout le temps avec son ami, SeokJin. Lui aussi il est doué. Peut-être qu'ils s'entraident. Je les vois très souvent à la bibliothèque, ils travaillent ensemble, je crois." Répondit-elle nonchalemment.
Kang-Dae plissa les yeux, pensif, avant de se lever.
"Je sais pas. C'est possible. Fit-il comme s'il s'en fichait, alors que ce que venait de dire sa collègue l'intriguait davantage.
-Quoi qu'il en soit, c'est pas très légal de fouiller dans les dossiers des élèves. Fais gaffe.
-Je faisais juste ma petite enquête.
-Abandonne. Taehyung est le genre de personne trop mystérieuse à comprendre."
Kang-Dae tressaillit après cette phrase. Le fait que quelqu'un l'affirme aussi sembla être un moteur pour lui.
Ca l'avait rendu plus excité encore, plus désireux de comprendre Taehyung. Il savait qu'il le pouvait. Il se jura, ce soir-là, de faire son possible pour entrer en contact avec ce jeune homme.
Il avait l'impression qu'il devait le faire.
Que, d'une façon ou d'une autre, avoir une conversation avec Taehyung changerait sa vie.
**
Kang-Dae n'avait pas perdu de temps. Dès le lendemain après-midi, il s'était rendu à la bibliothèque, en espérant y trouver Taehyung et Jin, comme sa collègue l'avait dit.
Ce jour-ci, il ne savait pas trop où il se dirigeait, ni s'il arriverait du premier coup à trouver les deux étudiants. Mais il était là, et il allait venir autant de fois qu'il le fallait si-
Oh.
Kang-Dae se dépêcha de se glisser derrière un rayon.
C'était rapide. Mais, en effet, ils étaient juste là, près de l'entrée de la bibliothèque, sur une table plus ou moins isolée, juste à côté d'un rayon. Jin était en train de parler à Taehyung, en faisant quelques petits gestes avec ses mains, et le châtain, lui, était attentif.
L'adulte pencha le visage sur le côté, intrigué. Il fallait qu'il aille derrière ce rayon. Il les entendrait facilement, car la table où ils étaient installés était réellement collée à ce même rayon de livres d'anglais.
Le professeur ne tarda pas et, veillant à passer derrière d'autres étagères immenses, il finit enfin par se retrouver tout près, juste derrière les deux garçons. Il s'approcha et feignit de chercher un livre pour ne pas que d'autres personnes ne se doutent de quoi que ce soit, tout en écoutant la conversation.
"Ils payent bien, au moins ? Questionna la voix de Taehyung, basse mais audible.
-Je sais pas trop. Mais c'est le seul moyen pour qu'on essaie de se faire de l'argent. Le problème, c'est qu'il nous faut un point de départ, pour acheter les armes."
Kang-Dae fronça les sourcils. Il s'était attendu à tout, sauf à ça.
Discrètement, il décala une rangée de livres pour tenter d'apercevoir l'écran d'ordinateur. Il était presque entièrement noir, avec une petite fenêtre sur le côté, visiblement, c'était une conversation.
Il ne pouvait pas la lire de là où il était, mais c'était étrange... Il ne connaissait aucun site internet avec ce type d'affichage. Pourtant, internet, ça le connaissait plutôt bien.
"Donc c'est le seul moyen ? Demanda le châtain.
-Je crois bien, oui. On travaille pour d'autres réseaux, ils nous payent, et on grandit. Chuchota Jin.
-Sauf qu'il nous faut les armes.
-Voilà. Et elles coûtent une fortune, il nous en faut pas mal, en plus de ça, si on veut mener nos premiers agissements à bien. D'ailleurs, il y a des gens qui acceptent de nous financer un peu, à condition qu'ils aient leur part quand notre réseau sera formé."
Le choc. Total.
Ces gamins étaient sur le darkweb. Il n'en fallut pas plus à Kang-Dae pour le comprendre, et dire qu'il était choqué était un euphémisme. Surtout de la part de Jin. Mais Taehyung... Bordel, ça collait. Oui, ça collait. Il avait cette allure, ce charisme, digne d'un entrepreneur de l'ombre.
Il aurait dû s'en douter.
"Hors de question. Aucune part ne sera donnée à personne. Surtout pas à des gens que je ne connais pas. On trouvera un autre moyen de se faire financer nos armes.
-Mais Tae-
-J'ai dit non, fin de la discussion." Trancha le châtain.
Kang-Dae tressaillit. Cette autorité, cette motivation, ce pouvoir... Taehyung possédait déjà tout.
Et toi, Taehyung, dans quel monde vis-tu ? Quelle est ta réalité ? Il avait enfin la réponse à cette question.
Taehyung ne vivait pas dans une autre réalité...
"On a encore du chemin." Murmura Jin, inquiet.
...Il était en train de créer la sienne.
**
"Kim Taehyung, n'allez-vous donc jamais noter mon cours ?"
Maintenant qu'il savait, il n'y avait plus de temps à perdre, n'est-ce pas ? Depuis la conversation qu'il avait surpris entre Jin et Taehyung, le professeur de sciences-économique avait trouvé en leur projet, une porte de sortie. Sa porte de sortie.
Il y avait réfléchi, quelques jours, c'était vrai. Mais, au fond, sa décision était déjà prise. Alors il n'avait pas pu se retenir, aujourd'hui, durant son cours, d'interpeller son étudiant de cette manière. Il voulait attirer son attention. Et, si ça fonctionnait, il lui dirait tout. Il allait tout tenter, il allait tout miser sur lui, quitte à se mettre en danger.
Car Taehyung, au-delà d'être un simple étudiant ambitieux, avait cet aspect dangereux, inquiétant, sévère, qui faisait trembler Kang-Dae. Mais pas forcément de la mauvaise manière. Ce jeune homme lui faisait ressentir des émotions nouvelles, une excitation propre à cette soirée-là, cette nuit-là, dans la forêt, quand il avait joué au loup-garou avec ses nouveaux amis. Et il savait que quelqu'un comme Taehyung ne pouvait pas être décevant, jamais.
"J'ai pas d'ordinateur sur moi."
Ce fut la toute première phrase que Kim Taehyung lui adressa. Le brun s'en sentait plus que jamais heureux, et impatient. Impatient d'avoir plus, plus de lui.
"Vous allez me dire qu'à dix-neuf ans, vous n'avez pas un ordinateur portable dans votre chambre que vous pouvez prendre ici ?"
Le provoquer n'était pas forcément ce que Kang-Dae souhaitait, mais il voulait, plus que tout, faire réagir son élève.
Le regard que Taehyung lui lança le rendit pantelant. Il en était certain à présent ; il devait lui parler.
Et c'est cette certitude qui le poussa à prononcer la phrase suivante :
"Vous viendrez me voir à la fin de l'heure."
Que dire de l'impatience avec laquelle Kang-Dae avait terminé son cours ? Il avait eu l'impression que cette heure en avait duré dix, et avait senti les nombreux coups d'oeil de Taehyung sur sa personne. Il avait enfin attiré son attention, il savait que tout allait être différent, à présent.
Quand enfin l'heure s'acheva, que les élèves sortirent et que le brun vit, avec une immense joie, les pieds de Taehyung devant son bureau, il prit une petite inspiration.
Il ne fallait pas qu'il se foire. Convaincre le châtain allait probablement être difficile.
"Taehyung. Il faut qu'on parle."
Il haussa un sourcil, et le brun ne put s'empêcher de sourire. Son visage arbora alors une expression interdite. Il se méfiait. Et son aîné pouvait le comprendre.
"Je ne vais pas passer par quatre chemins. Je t'ai entendu discuter avec ton ami Jin, récemment."
Kang-Dae vit à son visage qu'il se retenait de réagir, qu'il empêchait ne serait-ce qu'une micro expression de le trahir.
Il décida de tenter le tout pour le tout. Taehyung n'avait pas l'air d'être quelqu'un doté d'une grande patience.
"Je veux en faire partie."
Le châtain ne put, cette fois-ci, cacher ses traits surpris.
"C'est un réseau que tu créés, n'est-ce pas ?"
Dire que Kang-Dae n'avait pas peur de se faire rejeter était un mensonge. L'adulte avait vraiment peur que cela échoue, que Taehyung ne l'envoie paître, ce qui était d'ailleurs fort probable.
"Comment... Souffla-t-il, les poings serrés.
-J'étais intrigué, depuis le début de l'année. Je te voyais là, dans mes cours, à ne jamais prendre de notes, à simplement écouter mais à briller pendant les contrôles sans tricher. Alors j'ai fait ma petite enquête ; j'ai voulu savoir si ton ami Jin ne faisait pas tout pour toi, s'il ne faisait pas les devoirs maisons à ta place, s'il ne te faisait pas réviser lui-même. Je voulais comprendre, tu m'intriguais vraiment."
En le voyant aussi perdu, le brun décida de continuer.
"Et un jour, à la bibliothèque, je t'ai vu avec Jin. Tu étais à la table à côté d'un rayon derrière lequel je me suis caché. Et j'ai tout vu. Tout ce que Jin te montrait sur son ordinateur, à propos de ses agissements sur le darkweb."
Le voir serrer les mâchoires ainsi commençait doucement à inquiéter Kang-Dae. Après tout, ce qu'il faisait actuellement relevait du suicide, dans le sens où Taehyung avait à présent deux choix : accepter l'adulte, ou l'éliminer d'une quelconque façon, car ce dernier en savait trop. Et ça, le brun en était bien conscient, mais après tout, qu'avait-il à perdre ?
Sa femme ?
Il retint un sourire amer.
"Je préfère t'en parler directement pour te demander quelque chose, pour te proposer un marché. Libre à toi d'accepter ou non."
Kang-Dae s'appuya sur son bureau, curieux et impatient que son élève ne reprenne la parole.
"Qu'est-ce que vous voulez ?
-Qu'on s'entraide. Je suppose que tu as beaucoup d'ambition pour ton réseau, mais que quelque chose d'important manque à l'appel, n'est-ce pas ?"
Le professeur savait qu'il marquait un point, au vu de l'expression du cadet. Un début de sourire incontrôlable envahit ses lèvres à la seule pensée que Taehyung pourrait accepter son offre.
Oh, ce que sa vie en changerait.
"Et cette chose, c'est de l'argent."
Il sentit à quel point il venait de piquer le châtain, qui renifla dédaigneusement. L'adulte admira une fois encore ce caractère, cette volonté de ne pas être rabaissé. A aucun niveau.
Ce qu'il devait être intéressant. C'était ce que se répétait le plus vieux, ses yeux figés sur lui.
"J'ai de l'argent Taehyung. Je ne suis pas riche, mais j'ai des économies. Je ne sais pas quoi en faire depuis un moment. Ma vie est d'un ennui, si tu savais. J'ai une femme que je n'aime plus et elle n'est pas capable de me donner d'enfants."
Ses économies venaient de sa défunte mère. Il avait si peu de goût pour les choses de la vie qu'il n'avait rien dépensé depuis l'aménagement de la chambre de son fils. A ce souvenir, l'adulte voila son expression.
"Pourquoi ne pas créer un réseau vous-même, si vous avez l'argent pour ?" Rétorqua-t-il immédiatement.
Parce que je te veux auprès de moi, Taehyung. Kang-Dae pensa cela instantanément. Il le voulait, oui. Pour lui seul. Il voulait être son partenaire de jeu, il voulait qu'ils soient tous les deux sur la même case de l'échiquier.
"Parce que tu as développé l'idée, et moi j'ai le moyen de la concrétiser. De plus, aussi étrange que cela puisse te paraître, j'ai confiance en toi. Chaque semaine, quand je te vois dans mon cours..."
Le brun se leva, marchant lentement vers son élève immobilisé. Il ne put s'empêcher de caresser cette joue hâlée, cette peau parfaite, comme une poupée que l'on rêverait de posséder, juste pour ne plus qu'elle nous quitte, plus jamais. Une poupée de porcelaine, que l'on zieutait dans la même vitrine chaque jour depuis des semaines, et que l'on pouvait enfin approcher.
"... je peux voir cette détermination, cette envie de dominer, cette envie de supériorité, dans tes yeux. Ca me donne envie de vivre, de prendre le risque de quitter mon travail et ma femme pour ton réseau. Tu m'inspires, Kim Taehyung. Les jeunes dans ton genre m'inspirent. Laisse-moi te rejoindre.
-C'est insensé, comment est-ce que je peux vous faire confiance ?" Grogna-t-il en repoussant brusquement sa main.
Kang-Dae recula de quelques pas, s'appuyant sur son bureau, sans pouvoir faire disparaître ce léger rictus qui ornait ses lèvres depuis le début de leur divertissante conversation. Il tendit le bras vers l'arrière pour attraper son sac à l'aveugle, fouilla quelques maigres secondes à l'intérieur de ce dernier, et en sortit ce bout de papier, qu'il espérait être l'élément clé pour que le châtain accepte.
L'adulte vit aux yeux surpris de son élève qu'il avait compris que ceci était un chèque, qui prouvait sa bonne volonté.
"Accepte-le. Fais-moi confiance. Il n'est pas en bois, Taehyung. Ce sont mes économies.
-Je... Merde..." Souffla-t-il, nerveux.
Il fut perdu un instant, comme s'il réfléchissait à toute vitesse. Kang-Dae attendit patiemment, lui laissant quelques secondes, de l'espace, ces choses dont il avait besoin pour ne pas se sentir pressé de donner une réponse à cette proposition.
"C'est quoi, les conditions ?"
La perspicacité de son élève fit sourire davantage le plus vieux.
"Pas grand chose. Répondit-il.
-Je veux savoir les conditions." Insista-t-il durement.
Face à ce ton sec et autoritaire, Kang-Dae ne put retenir son rire ; ce dernier fut doux. En réalité, ce n'était juste que la libération de l'appréhension de cette conversation, car petit-à-petit, l'adulte commençait à comprendre une chose.
Taehyung était en train de s'intéresser à cette proposition, bien malgré lui.
Il était temps de jouer sa carte la plus risquée. Lui exposer le compromis.
"Jin, ton ami doué en informatique... Je veux qu'il me crée un réseau et une couverture sur le darkweb. Quelque chose de solide, qui brouillera toutes les pistes et qui empêchera quiconque de découvrir mes agissements sur ce même darkweb."
Car oui, avant de discuter avec le châtain, l'adulte avait réfléchi à un plan, à quelque chose qui obligerait le plus jeune à rester accroché à lui. Avoir un acolyte était chose lassante, au bout d'un moment. Kang-Dae voulait s'assurer qu'au-delà d'avoir Taehyung dans sa vie, ce dernier aurait besoin de lui, d'une manière ou d'une autre, de sorte à ce qu'il ne le quitte jamais.
"Pourquoi faire, exactement ?
-Ca, ça ne te regarde pas. Je t'en parlerai plus tard."
A vrai dire, il n'avait pas encore d'idée fixe. Créer son propre réseau, comme un miroir à celui de Taehyung ? Peu importait ce qu'il allait bâtir, mais il devait se faire de l'argent de son côté. Plus que le châtain, bien plus, pour le financer. C'était son plan, et il espérait ne pas être trop ambitieux là-dessus.
"Pardon ?
-On aura du travail en commun, mais nous aurons aussi chacun notre liberté.
-C'est moi qui ai créé ce projet, il m'appartient. Grogna-t-il, faisant sourire une énième fois l'enseignant.
-Ce projet qui n'aboutira jamais sans mon chèque. Tu le sais, Taehyung."
La conversation touchait à sa fin. Kang-Dae arbora un visage plus concerné après sa dernière phrase, pour montrer au châtain que tout ceci était tout sauf une blague et une proposition en l'air. C'était une demande très sérieuse, et il fallait que l'étudiant le comprenne.
"Collaborons."
Taehyung baissa le regard sur le chèque un instant. Mais l'adulte le savait...
...C'était dans la poche.
"Non."
Kang-Dae pencha le visage sur le côté. Avait-il mal compris ?
"Taehyung ?
-C'est non. Personne ne partagera ma part. C'est mon réseau, à moi seul."
L'étudiant s'approcha, le regard menaçant.
"Le mien."
Se tenant bien droit, le plus jeune fit presque frôler son nez avec celui de son aîné. Il fut soudain très impressionnant, le professeur en fut presque intimidé, mais il était surtout en train de sentir son corps s'alourdir, ses pensées se vider, comme si on venait de lui annoncer la pire des nouvelles.
Il se rendit compte que c'était plus ou moins le même sentiment qui l'avait submergé lorsqu'on lui avait annoncé la mort de son fils.
"Je n'ai besoin de personne. L'argent, je le trouverai."
Quelques secondes suffirent ensuite pour que Taehyung ne sorte de la pièce, silencieusement, les mains enfoncées dans les poches, le regard droit devant lui.
**
L'état de Kang-Dae s'était empiré après le refus de Taehyung, si bien qu'il en était devenu irritable, désagréable. Sa femme en faisait les frais très souvent, depuis très exactement une semaine et quatre jours après le refus du châtain. Elle osait à peine adresser la parole à son mari qui, presque immédiatement, l'envoyait paître violemment. Il ne voulait parler à personne, il s'obligeait à aller travailler mais était tout aussi irrité en classe.
Le pire dans tout ceci, était que depuis cette conversation avec son élève, ce dernier ne venait plus. L'adulte en devenait presque fou. Il avait lourdement échoué, et voilà que Taehyung séchait tous ses cours.
Tout ce qu'il avait sous la dent pour approcher ce dernier, c'était Jin. Il n'avait que lui à présent, mais il n'avait aucune idée de comment faire, de comment se servir de l'ami de l'étudiant pour qu'il revienne sur sa décision.
Ce soir-là, dans son lit, ignorant sa femme endormie et délaissée depuis des jours, Kang-Dae cogitait, allongé sur le dos, les mains croisées sur son ventre plat, malgré son âge mûr. Comment faire ? Comment retrouver Taehyung ? Comment devait-il s'y prendre pour que son élève accepte son foutu chèque ?
Il devait entrer en contact avec Jin. Il n'avait pas le choix. Mais rien que de ne plus avoir de nouvelles du châtain depuis une semaine et demi le rendait dingue.
Agacé au plus haut point, l'enseignant s'extirpa de son lit, et se dirigea vers le salon. Il allait tenter le tout pour le tout à partir de ce soir, tant pis s'il passait pour un fou auprès de qui que ce soit. C'était injuste.
Hors de question qu'après tout ce qu'on lui avait retiré, Kang-Dae n'accepte la disparition définitive de Taehyung. Il ne l'avait même pas encore qu'il ressentait la sensation de l'avoir, en effet, perdu.
Peut-être allait-il trouver quelque chose sur les réseaux sociaux, les jeunes utilisaient beaucoup ces derniers.
Evidemment, il ne trouva rien à propos de Taehyung. Aucun profil sur aucun réseau social. Ca le rendait encore plus attirant, encore plus intriguant, Kang-Dae s'en mordait les ongles de détresse.
Il tapa les deux autres mots suivants : Kim Seokjin.
Il fut infiniment heureux de tomber sur son profil. C'était un miracle d'avoir un début de piste.
Mais, tout-à-coup, l'enseignant se mit à froncer les sourcils.
Il y avait, en fait, pas mal de photos de Taehyung, aussi étonnant que cela puisse paraître. Il ne souriait jamais, mais semblait souvent être pris sur le vif. C'était Jin qui prenait toutes ces photos, il le comprit bien rapidement. Et il les postait probablement sur ce réseau social pour montrer quelque chose.
Mais montrer quoi ?
Kang-Dae explora ces quelques photos, il devait y en avoir cinq ou six de Taehyung. Autant de photos d'une seule personne sur son profil, c'était étrange, n'est-ce pas ? Pourquoi Jin ne postait des photos d'aucune autre personne que lui-même et Taehyung ?
Et soudain, ce fut comme un déclic.
Kang-Dae ferma son ordinateur, les yeux figés sur le mur en face de lui.
Là, dans la pénombre, il sentit son coeur s'agiter, comme si ce dernier battait à nouveau d'excitation, car il venait de trouver sa solution, aussi simplement que cela.
Jin était amoureux de Taehyung. Comment n'avait-il pas pu s'en rendre compte avant, après toutes les fois où Jin le fixait en cours, toutes les fois où Jin l'attendait, tentait d'attirer son attention, le suivait partout où le châtain allait ? A chaque fois que Kang-Dae voyait Taehyung, il voyait Jin.
C'était évident, depuis le début.
Un sourire fou naquit sur le bas de son visage, quelque chose de nouveau.
Kang-Dae arbora pour la première fois, ce soir-là, le visage de quelqu'un qui ferait n'importe quoi pour avoir ce qu'il voulait.
Quitte à tout perdre.
Son éthique. Son bon-sens. Sa dignité.
Peu importe,
Je veux Taehyung.
**
"... Pardon ?" Souffla-t-il, incrédule.
Le professeur de sciences-économique eut un sourire, presque bienveillant.
"Tu m'as bien compris, Jin. Je suis au courant de tout. Taehyung le sait, ne t'en fais pas."
Le jeune homme commença à regarder autour de lui, le visage déformé par l'inquiétude. Il était clair qu'il n'arrivait pas, comme son ami, à garder son calme et à masquer ses émotions. Ces dernières explosaient toutes autour de lui, et l'enseignant ne pouvait que s'adapter en fonction de ces réactions-là, ce qui était un jeu d'enfant.
"Je... Qu'est-ce que vous voulez ?" Bégaya-t-il, les mains serrant les lanières de son sac avec force, comme pour garder contenance.
Kang-Dae s'approcha un peu, faisant se raidir le corps de son élève. Une main chaude sur son épaule, un sourire faussement concerné, un air amical hypocrite à souhait... La recette parfaite face à quelqu'un de manipulable.
"Je veux seulement vous aider, tu comprends ? Ce qu'il vous manque, c'est de l'argent. Et j'en ai. J'ai proposé à Taehyung un chèque avec une très grosse somme. Ce sont mes économies, Jin. Et il y a bien assez pour l'achat d'armes que vous voulez faire."
Jin, sous le choc, secoua doucement la tête, complètement perdu face à ce qu'il entendait. Comment un professeur pouvait-il autant être au courant de ces choses-là ? Depuis quand ?
"J'ai déjà tout expliqué à Taehyung, mais ce dernier a refusé. Il veut garder la fierté de trouver cet argent seul."
Jin détourna le regard, alarmé et inquiet d'entendre ceci. Kang-Dae sauta sur l'occasion.
"Jin... Toi et moi on veut la même chose. J'admire beaucoup ton ami, et toi tu l'aimes, n'est-ce pas ?
-Pardon ?! Comment osez-vous me-
-Du calme, je ne suis pas ton ennemi, Jin."
Son élève commençait à s'affoler, alors le plus vieux joua immédiatement le tout pour le tout.
"Imagine à quel point Taehyung serait fier de toi, si tu trouvais l'argent... Imagine, Jin."
Le plus jeune se figea. Le brun s'approcha encore, et se pencha vers l'oreille de son cadet, masquant son sourire.
"Imagine. Tu lui annoncerais comment ? Par téléphone ? En face ? Imagine lui dire que tu as acheté les armes, que tu as réussi. Imagine-le si fier de toi, car grâce à toi, le réseau serait lancé. Penses-y. Il te prendrait comme bras droit, c'est certain. Tu serais son acolyte, il te respecterait pour ça, Jin."
Le jeune brun écoutait, la bouche entrouverte, les yeux fixés sur la tableau derrière son professeur. Inutile de dire à quel point les larmes avaient roulé sur ses joues en si peu de temps, à l'entente de ces simples mots.
Le plus vieux se recula, et observa le visage de l'étudiant.
"Tout ce que tu dois faire, c'est de convaincre Taehyung qu'il a besoin de cet argent, de mon argent. Nous savons tous les deux que ça prendra encore un temps interminable pour qu'il trouve l'argent s'il n'accepte pas mon chèque, et je sais que malgré son refus, il cogite là-dessus. Va le voir, et explique lui pourquoi il doit accepter, fais en sorte qu'il finisse convaincu."
Le cadet renifla, méfiant.
"Vous a-allez... Qu'est-ce que vous allez me demander en r-retour... Quel est votre but..." Sanglota-t-il légèrement, torturé.
Kang-Dae se fit la réflexion que Taehyung avait tort de prendre Jin dans son réseau et de lui faire confiance. Il n'y connaissait pas grand chose, pour l'instant, mais une chose était sûre ; l'amour que lui portait Jin était une chose susceptible de nuire fortement au bon développement de ce projet. Mais, pour l'instant, cet amour à sens unique aidait le professeur à mener à bien son plan.
"Je veux simplement qu'on échange les rôles." Sourit-il.
Jin le regarda sans comprendre, essuyant de sa manche une dernière larme qui menaçait de s'écraser sur le sol.
"A ton tour d'être mon professeur, Jin."
Un sourire faisait face à un regard perdu.
"Crée-moi un réseau. Apprend-moi à me servir du darkweb, et je te promets de me faire assez d'argent pour financer Taehyung à chaque fois qu'il en aura besoin."
**
"Allô ?
-Kang-Dae."
Le quarantenaire se redressa sur sa chaise, un sourire aux lèvres immédiat après avoir entendu cette voix grave et calme.
"Taehyung, bonjour. Comment est-ce que ça va ?
-Bien, merci. J'appelle juste pour t'annoncer quelque chose."
Le plus vieux leva un sourcil, intrigué.
"Je t'écoute.
-Je viens d'engager une nouvelle recrue, je te le signale simplement." Expliqua-t-il, le ton neutre.
Surpris, l'ancien professeur s'enfonça dans son siège luxueux, tapotant ses doigts libres contre son bureau. Cette pièce du manoir était tellement grande, pour une simple salle de travail, que sa voix résonnait malgré les nombreux meubles hors de prix disposés un peu partout.
"Eh bien, tu fais bien de me le signaler.
-Oui. Il est très jeune, est-ce que c'est nécessaire de faire des recherches approfondies comme on le fait d'habitude avec nos nouveaux employés ?
-Taehyung, ne manque pas de vigilance, voyons." Sourit l'hôte du manoir.
Un silence éloquent ; le plus jeune ne répondait jamais aux provocations de Kang-Dae, il en était bien trop habitué. L'aîné reprit avec une voix plus sérieuse.
"Fais toutes les recherches possibles sur lui. On n'est jamais trop prudent. Jeune ou pas, n'oublie pas que nos ennemis pourraient envoyer n'importe qui pour qu'on morde à l'hameçon.
-Au vu de son regard, je doute fort qu'il soit envoyé par un réseau ennemi. Mais très bien, je te ferai parvenir les informations les plus importantes.
-Voilà. Ne te casse pas trop la tête. Où il habite, ses parents, son école, ça me suffit. Au fait, comment s'appelle-t-il ?"
Kang-Dae but une gorgée de son verre d'alcool après avoir posé sa question, avant de le reposer sur le meuble.
"De ce qu'il vient de me dire, Jungkook. Il a dix-sept ans."
Un horrible frisson secoua le corps du plus vieux, qui s'immobilisa sur sa chaise.
"Comment tu dis... ?
-Jungkook." Répéta Taehyung, d'un ton de plus en plus agacé, visiblement désireux de terminer l'appel au plus vite.
L'ancien professeur ne croyait pas ce qu'il venait d'entendre. De toutes les coïncidences possibles, qu'une nouvelle jeune recrue du nom de Jungkook ne soit engagée dans le réseau de Taehyung était la plus improbable.
"Je n'ai rien à ajouter.
-Oui, oui. Bonne journée à toi, Taehyung." Articula, d'une voix éberluée, le brun.
Pour une fois, il raccrocha le premier. Ses mains restèrent figées sur le bureau, ses yeux jonglaient entre quelques objets qui y figuraient.
Mais c'est le son de trois coups à sa porte qui le firent sortir de sa torpeur. Un jeune homme entra, une bouteille à la main.
"Ah, Dongwoon, entre." Toussota le possesseur du manoir, en se levant de son siège pour reprendre contenance.
Dongwoon ne fit aucune remarque, déposa la bouteille d'un énième alcool, et s'éclipsa. Kang-Dae fixa cette même bouteille, les pensées ailleurs, toujours debout et bien droit.
Il secoua la tête, irrité d'être si troublé à l'entente de ce prénom, et se dirigea d'un pas lent derrière lui, vers l'une des grandes fenêtres qui faisaient entrer la lumière naturelle dans son bureau aux couleurs sombres.
Les mains dans les poches de son pantalon à pinces, l'homme mûr laissa ses yeux traîner sur son jardin gigantesque, grâce à cette fenêtre qui lui en donnait une vue splendide.
Il prit une grande inspiration, et retint, du mieux qu'il put, l'unique larme qui aurait voulu s'échapper.
Un passé si torsadé et complexe, qui unissait chacun des souffrants, ne pouvait laisser place, à tous, au bonheur.
Qui souffrait le plus ?
Qui était le plus heureux ?
Mais, par-dessus tout...
Qui sera le premier à retirer son masque ?
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Voilà beauuucoup d'informations, beaucoup de réponses (mais pas toutes, c'est normal ;) ) ^-^
Qu'avez-vous pensé de cet Interlude ? Mais surtout : que pensez-vous de Kang-Dae ? Comment, selon vous, est-il arrivé à diriger un trafic d'adolescents ? ;)
Je le dis tout de suite pour éviter la confusion (même si je pense avoir été assez claire là-dessus mais on ne sait jamais) : Jungkook n'est pas le fils de Kang-Dae! C'est juste une (tragique) coïncidence que le fils de K-D devait également s'appeler Jungkook!
MERCI MILLE FOIS pour les 1.8M de vues!!! C'est incroyable, on approche des 2M je ne pensais réellement pas ça possible!! Merci pour tous vos messages, ici ou sur Twitter/Instagram !! ♥
Je vous aime de tout mon coeur, merci pour tout, prenez grand soin de vous les amis, et à bientôt pour la suite!! ♥♥
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