31 - Recherché
L'équipe, ou plutôt, le reste de l'équipe, était assise dans les chaises de leur salle de réunion. De temps à autre, ils se lançaient un regard appuyé, mais comme aucun d'entre eux ne pouvait communiquer par la pensée, cela restait sans réel but.
Devant eux, Maryse et Gustave déblatéraient des paroles que les Supers avaient arrêté d'écouter depuis longtemps. De toute façon, le sujet était sensiblement le même ; où était Zéro ? Qui était Balthazar ? Comment Pax Omnis allait se relever après ce scandale ?
Honnêtement, seule la première question importait vraiment à l'Indestructible, au Lézard, au Voyageur et à Plume. Où était Zéro ?
Un claquement de main retendit soudainement dans la pièce. Maryse venait de se rendre compte que l'équipe n'écoutait rien.
« S'il vous plait, on vous dérange, peut-être ? demanda Maryse.
— Euh, non, désolé ! s'excusa nerveusement Plume.
— Tant mieux alors. Parce que je ne comprends pas comment vous pouvez faire les sourds d'oreilles dans de telles circonstances ! Nous vivons des moments graves et aucun d'entre vous n'a de propositions à faire pour y remédier ! Il va falloir faire une déclaration publique, et ce dans très peu de temps ! L'Indestructible, où crois-tu aller ?!
L'Indestructible venait de se lever de sa chaise. Il regarda tour à tour Maryse, Gustave, et tous les membres de son équipe, puis, il haussa les épaules.
— Je pars.
— Je t'interdis de partir dans un moment aussi critique !
— Oh, désolé, je vais reformuler ma phrase ; je démissionne.
— Quoi ?! hurla Maryse.
Son cri fit sursauter Plume. Immédiatement, les trois hommes fusillèrent Maryse du regard.
— Je ne veux plus être associé à Pax Omnis. Votre incapacité à comprendre et à aider les Supers ne fait plus de doutes, et vous avez perdu un membre important de notre équipe. Nous ne savons pas où est Zéro, et visiblement, ce n'est pas en restant avec vous que nous le retrouverons. Les autres, faites ce que vous voulez, mais moi, je démissionne. »
L'Indestructible n'attendit pas la réponse de qui que ce soit et il quitta la pièce. Son cœur battait un peu plus vite que d'habitude, et il ne se sentit bien que lorsqu'il passa les portes de Pax Omnis. Il poussa un long soupir de soulagement et immédiatement, son cerveau se mit en marche.
Il venait de démissionner de Pax Omnis. Il n'aurait plus de salaire, plus de toit, plus de repas chaud, plus de douches. Il se mordit les lèvres. C'était le retour à la case départ. Son visage se referma et il se mit à longuement réfléchir à la décision qu'il venait de prendre, avant de se frotter son visage avec ses mains.
Non, décidément, cette décision était stupide.
Il fit volte-face, mais sans s'en rendre compte, il heurta une personne bien plus petite que lui. En baissant les yeux, il remarqua Plume et il s'empressa de s'excuser.
« Non, non, ne t'excuse pas, ce n'est pas grave ! J'aurai du te prévenir avant, je ne m'attendais pas à ce que tu te retournes.
L'Indestructible marqua un temps et il regarda Plume.
— Qu'est-ce que tu fais ici ? demanda-t-il.
— Euh, on a tous démissionné, pour la faire court.
— Mais pourquoi ?
— Bah... On ne sait pas où est Zéro, Pax Omnis n'a rien fait, et on se fait tout le temps réprimander sur la moindre chose. Jusqu'à ce que tu le dises, je ne le réalisais pas, mais... J'en ai marre de me faire marcher sur les pieds.
L'Indestructible soupira et un discret sourire traversa son visage. Il ébouriffa les cheveux de Plume, et l'instant d'après, les autres membres sortaient dehors, et il regarda avec amusement le Voyageur poser sa main sur le bras du Lézard, pour qu'il arrête de faire un signe injurieux de la main.
— Bon. Bah on est tous des Supers, sans emplois, sans logement et on vient de faire un doigt d'honneur à nos anciens employeurs, déclara le Voyageur, enfin, tu viens de faire un doigt d'honneur. Qu'est-ce qu'on fait, maintenant ?
— Techniquement, Maryse veut qu'on reste dans le coin avant de nous laisser partir. Ça fera un trop gros scandale, bla bla bla, donc on a encore un endroit où dormir, provisoirement, répondit le Lézard.
— Euh... Techniquement, c'est moi qui ai déclenché tout ça. On peut en discuter chez moi, si vous voulez ? proposa l'Indestructible.
Tout le monde le regarda avec des yeux ronds.
— Quoi, c'est vrai, non ?
— On n'est jamais allé chez toi, c'est tout, expliqua le Voyageur. »
———————
L'appartement de l'Indestructible était singulier. Contrairement à tous les autres, il n'avait jamais touché à la décoration de son logement. Tout y était comme au premier jour, aucun meuble n'ait été déplacé, aucun poster n'avait été affiché.
« La déco c'est pas ton truc, visiblement, siffla le Lézard en inspectant toutes les pièces.
L'Indestructible ne fit aucun commentaire et il invita les Supers à s'installer dans le canapé.
— Quelqu'un a la moindre info sur Zéro, où est-ce qu'il pourrait être ? demanda l'Indestructible.
— Pas vraiment. Tu sais comment il était, avant que ce Balthazar ne se pointe à l'appartement, on ignorait son existence.
— Et sur le Super qui a mit le feu, est-ce qu'on sait quelque chose à son propos ?
— Juste qu'il avait la même tête que Balthazar. C'était peut-être son frère ? proposa Plume. »
Les Supers restèrent songeurs quelques instants avant de recommencer à proposer des solutions. L'Indestructible, quant à lui, avait un visage bien précis en tête ; celui du jeune homme qui était en train de discuter avec lui, la fois où il était allé chercher Zéro.
La soirée continua quelques heures, puis, tour à tour, ils rentrèrent chez eux. L'Indestructible les regarda partir, et il referma la porte derrière lui. Il attendit que la nuit soit bien avancée, puis il revêtit son manteau et il sortit de son appartement.
Il marcha longuement, jusqu'à arriver devant l'ancien bâtiment où vivait Zéro avant. Quasiment toutes les lumières étaient allumées, sans grande surprise, mais celle qui l'intéressait le plus était éteinte. Soupirant, il tourna ses talons.
Il s'apprêtait à franchir le grillage lorsqu'il entendit une voix derrière lui.
« Attend !
L'Indestructible se retourna. Il y avait une personne dans l'ombre, qui le fixait sans ciller. En temps normal, il aurait eu peur, mais étant donné qu'aucune chose ne pouvait transpercer sa peau, il fit un pas en avant. De plus, cette voix était familière.
— Hughie, c'est ça ? demanda-t-il en murmurant et en se rapprochant doucement.
Le jeune Super hocha la tête. Il lui fit signe de se rapprocher. Lorsqu'il arrive un peu dans la lumière, il put remarquer à quel point il avait l'air épuisé.
— Je... Désolé, j'ai fait des choses vraiment horribles, mais je ne pensais pas que ça aurait de telles conséquences.
— Et tu ne veux pas rentrer chez toi ? demanda l'Indestructible.
— Non, je suis recherché.
Le plus âgé fronça les sourcils.
— On va aller chez moi, d'accord ? Tu y seras en sécurité pour quelques jours au moins. »
Hughie hocha la tête. Il rabattit sur sa tête la capuche du sweat bien trop grand qu'il portait, puis les deux Supers se mirent en route.
———————
Une fois arrivés, l'Indestructible s'activa à fermer tous les rideaux, puis enfin, il alluma la lumière. Hughie se tenait au milieu du salon, sale, tremblant et marqué de cernes violacés sous ses yeux.
« La salle de bain est juste à gauche, prend le temps qu'il te faut.
Hughie hocha la tête avant de partir dans la direction indiquée. L'Indestructible le regarda partir, puis il se laissa tomber sur son canapé, essoufflé.
Il se passa quelques minutes puis Hughie fit de nouveau son apparition, vêtu d'un t-shirt et d'un short appartenant à l'Indestructible. Ce dernier l'invita à s'assoir sur le canapé à ses côtés.
— Qu'est-ce que tu faisais dehors dans le noir ? demanda l'Indestructible.
— Je pourrais te poser la même question, répondit Hughie au tac-au-tac.
— J'étais en train de te chercher.
Hughie marqua un temps.
— Comme beaucoup d'autres, ça ne change pas grand chose, répondit-il en haussant les épaules.
— Et pourquoi tu es recherché ?
Hughie se mordit la lèvre.
— Je... Je sais pas si je peux t'en parler.
— On est entre Supers. Je n'ai plus rien à voir avec Pax Omnis. Mais Hughie, si tu sais où est Zéro, ou Balthazar, il faut que tu me le dises.
— Je... Non, je n'ai aucune idée d'où ils sont. Je croyais que Maxence serait rentré dans son ancien appartement, mais il n'était pas là.
— C'est qui, Maxence ?
— Euh... Bah Maxence, quoi. L'albinos, tu sais ?
— Le vrai prénom de Zéro est donc Maxence ?
— Bah ouais. Enfin, il ne vous l'avait pas dit ?
— Ce n'est pas vraiment de ça qu'on parlait, lorsqu'on se voyait. Ce qui ne change pas ma question, pourquoi tu es recherché ?
Hughie se releva et fit les cents pas dans la pièce.
— C'est... C'est moi qui ai foutu le feu.
L'Indestructible se releva lui aussi et fondit sur Hughie. Il l'attrapa par les bras et plongea son regard dans le sien.
— Mais pourquoi tu as fait ça ?! Et comment ?!
Les yeux de Hughie se remplirent de larmes.
— Je suis un Super caméléon ! Je peux prendre l'apparence de qui je veux !
— Mais pourquoi le faire avec l'apparence de Balthazar ?
— Parce qu'il était d'accord !
Il essaya de dire autre chose, mais ses paroles se noyèrent dans un flot continu. L'Indestructible soupira et l'amena dans sa chambre. Il le força à s'allonger et rabattit les couvertures sur lui. Le plus jeune sembla enfin se clamer puis il observa l'Indestructible avec attention.
— Tu vas me dénoncer ?
— Pas vraiment. Si tu es vraiment l'homme derrière tous ces incendies, alors tu dois avoir une explication logique.
Il s'assit sur le matelas.
— Le premier bâtiment que tu as incendié, c'était la banque. Pourquoi ?
— Ils avaient retiré beaucoup d'argent de nos payes. Il fallait qu'ils se rendent compte de ce que cela faisait de ne plus en avoir.
— Et un cambriolage ?
— Trop évident.
— D'accord. Le deuxième bâtiment, ça a été l'hôtel de police. Pourquoi ?
— Je... Je m'en souviens pas, répondit-il en fuyant son regard.
L'Indestructible l'attrapa par le menton pour tourner son visage vers le sien.
— Si tu ne veux pas m'en parler maintenant, libre à toi, mais j'ai besoin d'une raison pour Pax Omnis. Et pourquoi tu as prit l'apparence de Balthazar. C'est un Super fort, pas un Super de feu.
— Euh, en fait, pas vraiment. Balthazar n'est pas un Super fort.
— Mais Zéro a dit que...
— Maxence a vu ce que Balthazar l'avait laissé voir. Balthazar est un Super multiple, c'est différent.
— Un Super multiple... répéta l'Indestructible.
— Avec une goutte de sang, il peut acquérir le Super des autres. C'est ce qu'il a fait pour avoir son Super de feu, et quand j'ai prit son apparence, j'ai pu l'utiliser, moi aussi.
Le visage de l'Indestructible se ferma. Ce que venait de dire Hughie changeait la donne.
— Et pour les incendies ? Tu as failli brûler Zéro, cette nuit-là. Si je n'avais pas été là...
— Je ne voulais pas blesser Maxence. J'ai réagit par erreur, et je ne voulais pas vous faire de mal. Pardon...
— Hughie, je sais que tu avais une bonne raison de mettre le feu à tout cela. Mais si tu ne me le dis pas, je ne pourrais pas t'aider, et encore moins te cacher indéfiniment. Je sais que tu viens de traverser l'enfer, mais tu n'es pas obligé de tout me raconter d'un coup. Alors, essaye de te reposer, on en discutera plus tard.
Hughie hocha la tête doucement, penaud. L'Indestructible se releva, et le jeune homme attrapa sa manche.
— Je l'ai fait parce que les Normaux sont des monstres. Tu sais quel métier je faisais ? J'étais prostitué. J'étais une pute.
— Hughie...
— Les Normaux en avaient rien à faire, tout ce qu'ils voulaient, c'était un trou et plus d'une fois je me suis retrouvé à poil dans une cave lugubre, avec des dizaines de mecs en chaleur autour de moi, qui me prenaient tour à tour en se marrant et en me filmant. Je voulais juste que ça s'arrête, et Balthazar m'a comprit. C'est tout. Si on était passé par un tribunal, j'aurai perdu de l'argent. Le seul moyen, c'était ça.
L'Indestructible passa sa main sur la joue de Hughie, avant de se relever. Il ne trouvait pas les mots pour le plus jeune. Il n'y avait aucun mots qui auraient pu le faire se sentir mieux.
— Va dormir, d'accord ? On en reparle quand tu te sens mieux.
— D'accord.
Le plus âgé se leva, il laissa la lampe de chevet allumé et il se dirigea doucement vers la porte.
— Au fait, Hughie, dit-il au plus jeune, je m'appelle Donovan. Fait-moi confiance, d'accord ? »
Le plus jeune lui sourit avant de définitivement s'endormir.
———————
Bonjour, bonsoir ! C'est avec beaucoup d'appréhension que je poste le dernier chapitre de ce livre...
On se retrouve dans très peu de temps pour l'épilogue, et comme d'habitude, pour le petit mot de la fin.
♥︎
— Nano.
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