CHAPITRE SIX

La routine. Avant j'avais peur d'elle. Puis après mon agression elle s'est installée, s'est insinuée en moi comme un réconfort dans cette tempête.

Cela fait deux semaines qu'elle est là. Une routine dans laquelle je me conforte. Mais contrairement à ces deux dernières années cette routine est bénéfique à ma santé. Chaque jour est différent et pourtant ressemblant. Je continue de travailler pour la fac même si je sais que je le fais seulement pour faire plaisir à mes parents. Les études me plaisent mais je ne veux pas continuer dans ce que je fais. Mes parents ont pensés bon de m'inscrire dans une fac de commerce parce que c'était assez valorisant mais pas trop dur pour l'idiote que j'étais. J'adore apprendre mais pas des chiffres et des méthodes de manipulations commerciales. En terminale je rêvais de faire des lettres ou du droit. J'ai vite abandonné le droit quand j'ai vu comment la justice se comportait face à de vrais problèmes. Me restait les lettres, voie que mes parents n'aurait jamais accepté pour un Parker.

Le travail au bar me plait. Bien plus que je n'aurais imaginé. J'ai fait plus d'avancées ces deux dernières semaines que j'en ai fait en deux ans. Je n'ai pas encore dû me coltiner de clients insistants et j'arrive très bien à gérer les lourds. Anna, Tim et Gary sont géniaux avec moi et grâce à eux, l'estime que j'ai pour les humains remonte en flèche. J'avais oublié que les interactions entre personne civilisée pouvait être autre chose qu'une corvée. J'ai eu l'occasion d'enguirlander ma meilleure amie pour son coup fourrée mais je l'ai vite laissé tranquille car au fond elle avait raison. J'avais besoin de ça pour avancer. Et je crois que je suis en bonne voie pour brûler la dernière parcelle. Peut-être, qu'effectivement, bientôt je pourrais me séparer de Mme Jonas. Je sais que le but final est de pouvoir vivre sans la voir une fois par semaine. Mais rien que d'y penser j'ai la nausée. Je me suis attachée à ma psychologue. Elle fait partie intégrante de mon quotidien et est devenue quelqu'un de mon cercle familier. Même plus que mes propres parents, qui eux sont des presque inconnus.

- Ce soir est une grosse soirée, Nova. Tu sais déjà que les vendredi soirs sont les jours les plus bondés mais c'est une soirée à thème ce soir et nos horaires s'allongent spécialement. Tu sera certainement claqué demain mais c'est ça la vie de barmaid. J'adore ça, s'exclame surexcité la petite brune devant moi.

Anna a très vite pris une place dans mon coeur. De toute façon il est pratiquement vide alors la place ce n'est pas ce qui manque. C'est le genre de personne, comme Ella, qui savent vous donner le sourire juste en les voyant. Elles sont solaires, enjouées et très expressives. Je crois que je trouve un certain confort a fréquenté mes opposés. Du moins mes opposés à l'heure actuelle. Avant j'étais comme ça aussi et je sais que quelque part au fond de moi, enfuis dans les profondeur de mon âme, j'arriverais un jour à retrouver cette partir de moi. En tout cas j'en ai envie, contrairement à il y a encore quelques semaines. J'en ai fait du chemin.

- Tu seras certainement amené à danser, chanter avec les clients. C'est super conviviale comme ambiance, tu n'as même pas l'impression de travailler. C'est géniiiiiial, tu va voir !

Je souris face à son engouement pour l'évènement. J'espère qu'effectivement c'est aussi bien qu'elle le dit. Parce que danser et chanter c'est déjà une épreuve pour moi mais en plus avec des inconnus. Oh mon dieu.

Tout va bien se passer, Nova ! C'est simplement une petite soirée entourée d'inconnus.

Ce n'est pas comme si ça faisait deux ans que je n'avais pas fait ! Mais je dois me reprendre. Ça fait déjà quelques semaines que je travaille dans ce bar et je commence à m'habituer à l'ambiance et même aux gens.

- J'espère que tu va pouvoir trouver de quoi t'habiller parce que le thème c'est Sexy Ciné ! Cat Woman, Harley Quinn, Jessica Rabbit..., elle rêvasse quelques instants en tournant sur elle, enfin toutes ces icônes qu'on a tous rêver d'incarner quoi.

Je ne suis pas certaine de vouloir incarner Jessica Rabbit bien que l'ancienne Nova n'aurait pas hésité une seule seconde. J'aurais préféré garder mon jean noir et mon sweat trop grand mais je dois faire un effort. « M'intégrer » à la société, tout ça, tout ça.

Mon placard est encore plein d'anciens vêtements à moi alors je ne me fais pas de bile pour trouver la tenue parfait. Cependant j'ai tout de même appelé Ella à l'aide. Certes j'ai les vêtements mais le plus important c'est les idées. Et ça, ça me manque, terriblement, côté mode.

- Mmh peut-être Black Widow ? se questionne ma meilleure amie en fouinant dans mes affaires.

Ça fait déjà plus de vingts minutes qu'elle tourne incessamment dans ma chambre à la recherche d'un déguisement. J'avoue que je cherche aussi, l'idée m'excite un petit peu au fond. Mais je ne pense à rien. Soit je tombe sur des personnages farfelues qui n'ont rien de sexy soit je tombe sur des bombasses intergalactique avec très peu de tissu couvrant leur peau. Le juste milieu est compliqué à trouver. J'ai envie d'être sexy ce soir, ce qui ne m'est pas arrivé depuis très longtemps, mais je ne veux pas non plus dépasser mes limites.

Mon cerveau tourne en boucle mais rien ne me vient, ça commence à sacrément m'énerver. Si j'en crois le tic nerveux d'Ella, elle aussi perd patience.

- Et si tu te déguise en Nova Parker ! Quoi, après tout tu es une star alors autant le faire découvrir aux autres.

J'explose de rire, elle est si sérieuse. Elle me regarde interloquée puis hausse les épaules résignée par l'absurdité de sa requête. Soudain mon cerveau s'éclaire.

- Trinity !

Pourquoi je n'y avais pas pensé plus tôt ? C'est le juste milieu entre sexy mais raisonnable. Un personnage emblématique et iconique que j'admire depuis si longtemps. En fan de Matrix qui se respecte j'aurais dû y penser directement. L'idée de Padmé Amidala lors de son combat dans le troisième volet de Star Wars, me traverse aussi l'esprit. Mais je ne suis pas sûre d'avoir tout le matériel requis. Alors que Trinity...

- Mais parfait ! Bordel on aurait dû y penser plus tôt.

Elle sautille jusqu'à moi et je la rejoins me surprenant moi-même à réagir ainsi. Je voix une lueur scintiller dans son regard et je suis contente de la rendre fière. Ce sont de petits gestes mais qui suffisent à me redonner espoir en tout ça.

- Ok, alors trouvons toutes les pièces nécessaires maintenant.

Elle s'affaire dans mon placard à la recherche du rayon latex. Elle sort mon slim en vinyle que je n'ai pas remis depuis des années et trouve rapidement le débardeur latex moulant qui fait la paire. J'attrape le tout et accours dans la salle de bain. Je me déshabille avec hâte et reste quelques instants nue en contemplant mon reflet. Ce que je vois ne me dégoute plus autant qu'avant. Je prends le temps de m'observer comme si c'était la première fois que je le faisais. Et j'apprécie. Je finis par enfiler la tenue et tourne sur moi-même. Malgré la « dépressions » dans laquelle j'ai plongé je n'ai pas perdu les kilos que j'avais avant. Je fais partie de ceux qui mangent pour passer leur émotion alors le cliché de « j'ai perdu vingt kilos, je suis en dépression » pas pour moi. J'ai les mêmes cuisses épaisses qu'avant, les mêmes bras musclés par mes heures de cheerleading, le même ventre rebondi. Rien n'a réellement changé. Et pour la première fois depuis deux ans je me trouve jolie, désirable, sexy.

Lorsque ma contemplation prend fin je rejoins Ella dans ma chambre où elle s'empresse de me coiffer et me maquiller. Loin des cheveux courts et bruns du personnage j'opte pour une tresse large en mode Lara Croft. Le parfait mélange de personnages de fiction. Ella observe son travail attentivement, visiblement fière d'elle. Et de moi au passage. Elle, a opté pour une Indiana Jones des temps modernes, très sexy. Tout lui va à merveille, elle est magnifique.

Nous nous rendons ensemble jusqu'au bar et je suis presque ravie de voir autant de monde s'y précipité. J'entre par la porte arrière réservée au personnel et laisse Ella rejoindre son groupe d'ami.

- Woah, t'es super canon bordel ! s'exclame Anna lorsque j'arrive devant elle.

Elle attache les dernières mèches de cheveux dans ses couettes hautes d'Harley Quinn et me prend dans ses bras. Nous nous observons mutuellement quelques instants avant de se détacher.

- Attend mais..., elle marque une pause réfléchissant une main sur mon bras l'autre sous son menton, t'es pas le personnage dans...

- Matrix, finit quelqu'un d'autre dans mon dos.

Je sursaute et me retourne vers Tim qui plante ses iris noirs dans les miennes. L'ironie fait que je me retrouve face à un Neo vêtu de latex comme dans...attention tambours...Matrix. Le destin a vraiment décidé de me jouer des tours. Je ris doucement en observant sa longue cape noir brillante qui recouvre un marcel noir et un bas en vinyle. Il en fait de même se rendant compte que nos déguisements concordent. Un fan de Matrix, bordel. Il fallait que je tombe sur une fan de Matrix.

- Trinity, chuchote-t-il me faisant une référence tendant une main vers moi.

- Neo, je réponds lui donnant ma main sans hésiter.

Il dépose un léger baiser sur cette dernière et un doux frisson me parcours. Ce n'est pas un frisson de peur comme je peux en ressentir en présence d'hommes inconnus. Non, là c'est délectable, sincère, enivrant. Depuis que j'ai commencé à travailler ici cette sensation ne m'a pas quitté. Je ne suis pas certaine de ce que ça peut vouloir dire mais grâce à ça j'arrive à créer un contact avec un homme sans en avoir peur. Et ça c'est quelque chose de grand.

- Ok, vous vous êtes concertés avant ou...

- Non, il réponds doucement riant tout bas.

Je ne ris plus vraiment. Une sensation nouvelle s'est installé en moi et pour le coup elle m'effraie. Je ne me suis pas plus attardée que ça sur le sujet Tim avec Mme Jonas mais je n'en ai pas besoin pour comprendre que quelque chose se passe entre nous. Les relations amoureuses ou simplement sexuelles remontent à loin pour moi alors je ne sais plus vraiment comment reconnaitre le désir quand il y en a. Mais je sais toujours quand je suis attirée par quelqu'un, enfin je crois.