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I

 — Tu n'essaies même pas de comprendre mon point de vue, Alexane.

Le reproche véhément de Raphaëlle me brûle. C'est une torche incandescente qui irradie mon corps alors que nous avançons vers le palais des études.

— Je te l'ai dit mille fois, c'est dur pour moi de m'assumer, même huit ans après. Plus je garde cela pour moi et mieux ma famille se porte.

— Sauf que tu n'as jamais tenté de passer au-dessus de leur avis. En retour, je t'ai toujours fait comprendre que mon but n'était pas de t'écraser sous le poids de ma visibilité. J'en parle et j'éduque, j'aime donner des conférences dans les collèges sur notre communauté. C'est mon combat. Je n'ai jamais dit que tu devais en faire autant et ça ne prouve pas que je suis meilleure que toi, lui renvoyé-je, toujours plus peinée par cette querelle qui dure depuis des jours.

La grandeur de l'école des Beaux-Arts n'a d'égal que celle du cœur de Raphaëlle, mais j'ai compris trop tard qu'elle porte ce fardeau depuis le premier jour. Aujourd'hui, elle titube sur une corde rouge. Sauf que la veille, elle a abandonné, juste une fraction de seconde. Elle m'a appelé et m'a fait comprendre qu'elle et moi, ça ne peut plus fonctionner. Pour elle, être dans mon ombre ne lui allait plus, alors qu'il n'en a jamais été question.

— Je prends ta décision comme une fatalité, alors, dis-je en ouvrant l'accès au bâtiment. Il n'y a rien de pire que de penser que je te fais souffrir depuis huit ans. Tu aurais pu me prévenir avant pour ne pas que je perde mon temps.

— J'ai été une perte de temps ?

Je la dévisage lorsqu'elle passe le seuil. Elle me pose la question comme si j'avais essayé de la tuer. Sa chevelure brune attachée en un chignon fouillis n'est que le reflet de cette discussion. Elle n'a ni sens, ni but. La ramener à moi est impossible. Raphaëlle a sa fierté et comme l'a déjà dit tant de fois mon frère jumeau Esteban ; « on ne ravale pas son vomi ».

— Maintenant qu'on en parle, oui.

Ma déclaration me brise le cœur.

Nous arrivons devant la porte de notre atelier, une salle que nous avons réservée des mois à l'avance pour ne pas se la faire voler.

— J'ai besoin que tu me détestes pour aller mieux.

— Je ne te déteste pas, Alexane. En réalité, c'est plutôt moi qui me répugne.

— Tu devrais essayer alors, parce qu'il n'y a que comme ça que je pourrais l'annoncer à mes parents.

Je me rends compte que mes paroles sont brutales lorsque j'entre et que je croise un regard effaré au fond de la pièce. Ses cheveux blonds, autant que les miens, sont pareils à des vagues. Les perles grises qui remplacent les prunelles de ses yeux n'expriment que la surprise. Je triture le nez concave au centre de mon visage et m'empourpre, prise la main dans le sac. J'ai presque envie de m'en décrocher le pansement présent sur mon cartilage nasal pour me réveiller de ce phantasme.

— Je vois que vous savez mettre l'ambiance. Le silence m'angoisse, plaisante-t-il, pas vous ?

— Tu nous as entendues ? chevrote la voix de Raphaëlle à ma droite.

— Vous entendre est un bien faible mot. Même un sourd aurait pu vous remarquer.

Le temps s'est arrêté au moment où j'ai posé les yeux sur sa mâchoire anguleuse, la fine barbe dorée qui recouvre sa peau et la magnificence de son timbre. Je me racle la gorge, éperdument troublée par ce que je ressens. Raphaëlle m'observe avec une exquise attention que je ne sais lui détacher tant j'ai pu voir cette expression sur son visage.

— Je suppose que tu es l'étudiant qui nous vient de l'école d'art de Strasbourg, affirmé-je en redressant mon dos de tout son long.

— Tu supposes à merveille.

Il se lève de son tabouret, contourne les divers chevalets nus de la salle – au nombre de cinq et nous tend le bras, un tantinet orgueilleux.

— Giovanni.

— Raphaëlle et Alexane.

Un léger sourire s'insinue sur ses lèvres pleines.

— Je sais. Notre professeur m'a informé que vous seriez en mesure de me présenter le projet noté pour ce second semestre.

— Alexane a fait en sorte que nous ayons cette salle à disposition tous les jeudis de quatre à dix-huit heures. C'était le seul créneau disponible.

Comme à mon habitude, je prends le devant sur Raphaëlle et l'invisibilise :

— Il s'agit d'une exposition que l'on fera dans le bâtiment Perret à la fin de l'année. On nous a donné comme thème le pop'art, est-ce que ça t'inspire ?

— Je pense saisir, oui. Vous souhaitez commencer dès maintenant ?

Sur ma droite, Raphaëlle hausse les épaules. Je reconnais cette attitude d'abattue à chaque fois qu'il s'empare de son corps et il ne le lâche pas pendant des jours. Giovanni ne fait aucune remarque quant à notre discussion et nous laisse prendre place.

— Monsieur Schlier nous accorde une seule condition pour réaliser ce travail en groupe. Chacun doit servir de modèle à un autre pour réaliser un portrait. Il ne pratique pas cet art, mais étant donné qu'il est plus moderne et dans l'air du temps, nous avons carte blanche pour le reste, ajoute Raphaëlle avec froideur.

Elle prend ses distances. C'est ma seule certitude depuis qu'elle m'a largué la veille.

— Tu seras mon modèle, Giovanni.

L'affirmation de la brune me fait frémir.

Il me sonde, incapable de répondre à cette subtile attaque de la part de Raphaëlle.

— J'aimerais être le tien, dans ce cas.

— Je n'y vois aucun inconvénient.

Je vais devoir peindre Raphaëlle comme si aucun malheur ne nous était arrivé. Comme si l'amour n'avait jamais existé entre nous alors qu'il a vécu plus que n'importe qui ces dernières années. Debout en face de moi, elle me toise, à l'instar d'un jeu malsain. Même les tableaux se prosternent en constatant son ingénieuse technique. J'aimerais connaître le plus sombre secret de Giovanni, explorer son être comme j'ai réussi à le faire avec Raphaëlle. Pourtant, je ne comprends pas l'essence de ce qui me traverse, la douleur alléchante que j'éprouve en observant ce jeune homme, pas plus vieux que nous.  

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