19. Ayden
Après le dernier rappel, j'ai le réflexe de me retourner pour chercher Noah du regard. Cet espèce de lâche aurait adoré être sur scène ce soir. Mais tout ce que je trouve, un peu à l'écart de Zack et Aiko, c'est la chevelure courte de Dawn qui se dirige vers les coulisses.
— Tu vas où ? je hurle pour couvrir le vacarme que produit la foule.
Elle se retourne, le regard las, et m'informe platement :
— J'ai fait ce que j'avais à faire. Je rentre chez moi.
— Maintenant ?
Elle a l'air mal, putain. Vraiment mal.
— Qu'est-ce qui t'attend chez toi ?
— Mon lit. Je suis morte.
Ça a pas l'air glorieux, son truc. Je sais pas si ça a un rapport avec ce qu'elle m'a dit avant le concert, mais elle a raison. Dans son regard, quelque chose est mort, et je me demande si j'avais le même quand Mel m'a dégagé, à Londres.
— C'est pas toi qui voulais me montrer de quoi t'es capable ? C'est le dernier set. Il y a une soirée, après. Reste, si tu veux.
— J'aime pas les gens, Ayden.
Sa remarque m'arrache un léger sourire. Il manquait plus que ça pour parfaire le tableau.
— Je crois que je sais de quoi tu parles.
— Dit le mec qui vient de faire planer vingt-mille personnes.
— Aucun rapport, Dawn. Et pour ta gouverne, j'ai pas fait ça tout seul.
— Heureusement que j'étais là, c'est ça ?
Ses yeux s'éclairent subitement. Une lueur fugace, discrète, mais que je repère quand même.
— Ouais. On peut dire ça.
— Tu prêches une convaincue. Mais t'es pas si mal, toi non plus, finalement.
— Allez, ramène-toi, je tente encore.
— Ça sert à rien, vraiment. T'en fais pas pour moi.
Et en plus, elle a la tête dure. Je suis aussi chiant que ça ?
— Comme tu veux. Mais je veux toujours ton texte.
— Ah oui ? sourit-elle vertement. Et pourquoi ça ?
— Parce qu'il est bon.
— C'est tout ?
— Ouais. C'est déjà pas mal, non ?
Dawn éclate d'un rire que je connais bien. Léger, cynique, mais finalement lourd de sens.
— Pas sans mon accord. Jamais sans mon accord.
— Je crois que j'ai compris.
Dawn ne me connaît pas encore ; elle apprendra bien assez tôt que j'obtiens très souvent ce que je veux.
— Je dois y aller, répète-t-elle.
Sa démarche assurée quand elle se retourne pour prendre la fuite ne trompe personne, en tout cas pas moi, et je n'en ai pas fini avec elle.
— Dawn ?
— Quoi ? éructe-t-elle en se figeant.
Mais elle mord, en plus.
— Tu remonterais sur scène ?
Je sais même pas pourquoi je lui dis ça. La tournée se termine, et j'ai envie de tout, sauf de recommencer.
— T'as aimé, c'est ça ?
— Aimé quoi ?
— Ce qui s'est passé sur ce podium. Le fait que je te suive à la lettre, le fait que je sache, le fait que je comprenne comment tu fonctionnes. Ça a marché, tu sais pas comment ni pourquoi et tu veux que ça recommence.
— T'en dis, des conneries, dis-moi.
— J'ai rien prévu de tout ça, Ayden. Salut.
— Salut.
Pour une fois, je ne trouve même pas de répartie. Je regarde Dawn s'éloigner, ses mots encore dans la tête, et je me rends compte qu'elle a raison. J'ai vraiment aimé performer avec elle. C'était fluide, naturel, et plus le concert avançait, plus je me sentais en sécurité. J'ai eu l'impression que même si je me plantais, elle me rattraperait, et c'était bon. Très bon.
Au moment où je me retourne pour rejoindre les autres, Chuck fonce droit sur elle pour l'intercepter, mais je ne cherche pas à comprendre. Je n'ai plus qu'une seule chose en tête en rejoignant Zack.
— Mel est là ?
— Aucune idée.
Il faut que je la voie. Il faut que je la serre contre moi, il faut que je la respire.
— Ayden, les journalistes, m'interpelle Chuck en revenant vers nous.
— Tout de suite ?
— Tout de suite.
Fait chier.
Alors que je m'apprête à le suivre, Mel et sa famille passent la porte des coulisses. L'adrénaline accumulée pendant le concert me monte directement au cerveau quand je l'aperçois, et subitement, il n'y a plus qu'elle. Chuck va devoir attendre une minute.
Quand elle pose les yeux sur moi, l'émotion que je lis sur son visage me soulage. Le besoin que j'ai de l'avoir près de moi m'étonne toujours autant, mais je supporte mal son absence, depuis son accident et Brittany. Elle seule sait ce que je traverse, elle seule comprend exactement ce que me fait tout ce bordel. Et comme d'habitude quand elle plonge son regard dans le mien, le reste du monde disparaît. Je ne sais pas ce qui s'est passé pendant le concert, mais on dirait qu'elle a beaucoup de choses à dire. Aimanté par la douceur qui se dégage d'elle, je traverse les quelques mètres qui nous séparent sans plus penser à rien.
— Viens ici.
Je prends sa main pour l'entraîner dans le couloir des vestiaires, à l'écart de l'agitation ambiante.
— C'était incroyable. Tu n'as même pas idée... commence-t-elle, survoltée.
— Je crois que j'ai compris.
— Comment ça ?
— Ça se voit dans ton regard. Et je l'ai ressenti.
— Ressenti ?
— C'était... je sais pas.
— Surréaliste ? tente-t-elle.
— Un truc comme ça.
— Tu penses que c'est lié au fait que c'était le dernier ?
— Sûrement. Je sais pas. Je crois.
Mel esquisse une moue taquine.
— Ton expansivité se limite à la scène, c'est ça ?
— Ma quoi ?
— Rien, rigole Mel. Laisse tomber.
Elle lève les yeux au ciel, attrape mes mains dans les siennes et observe les alentours, inquiète.
— Tu as peur qu'on nous voie ?
— Oui, lâche-t-elle sans la moindre hésitation. Moi aussi, j'ai trouvé ce concert surréaliste.
— Qu'est-ce que ça veut dire ?
— Ça veut dire que je ne m'attendais pas à ce que la personne que j'aime mette vingt-mille personnes en transe.
— On s'en fout. C'est juste de la musique.
— C'est pas juste de la musique, Ayden. C'est la tienne.
Je vois pas ce que ça change, mais si elle y tient, ça n'a pas d'importance.
— Ouais. Et ? Tu as peur de ces gens ?
— Pas d'eux. De la folie qu'il y a autour.
— Je laisserai personne t'en faire subir les conséquences. Même si c'est à cause de toi qu'on en est là, je la taquine.
— N'importe quoi, se défend-elle.
Une main dans ses cheveux bruns, elle darde ses yeux sur moi.
— Tu as fait ça tout seul. Je n'étais pas là.
Au moment où j'ai écrit cet album, elle était là partout, tout le temps. Dans chaque ligne, chaque lettre, chaque note. Elle n'a aucune idée de tout ce qu'elle fait pour moi. De tout ce que je lui dois, de tout ce que je serai capable de faire pour elle.
— Ça va ? me questionne-t-elle avec sollicitude. Tu as l'air...
Incapable de tenir plus longtemps, je pose mes lèvres sur les siennes et la serre de toutes mes forces. Les mains sur ses joues, je l'embrasse comme si ma vie en dépendait. Dans une espèce d'état second, je me rends compte qu'il n'y a qu'auprès d'elle que je respire vraiment.
Mel éclate d'un rire aussi gai que satisfait en s'écartant de moi.
— Qu'est-ce qui se passe, Ayden ?
— Je sais pas. Je sais pas et je m'en fous, je veux pas savoir. Je sais juste que j'ai besoin de toi. J'ai besoin de nous.
Mon front contre le sien, je résiste à l'envie de l'embrasser encore, mais cette fois, c'est Mel qui semble ouvrir les vannes. Ses mains se posent sous mon tee-shirt humide, et leur fraîcheur sur ma peau brûlante m'arrache un frisson douloureux. Son regard se plante dans le mien, les coins de sa bouche se relèvent doucement, et il ne m'en faut pas plus pour vriller.
(les petits chatons, on arrête de lire, là)
— Qu'est-ce que tu veux, Mélanie ? je souffle.
— Toi. Tout de suite.
Sa voix se voile à peine, mais je comprends immédiatement que ni elle ni moi ne serons capable de résister à cette force qui nous pousse l'un contre l'autre. Pourtant, je décide de m'amuser un peu.
— Tu es sûre que c'est ce que tu veux ? Le Madison Square ?
— Oui.
Déterminé à faire monter la tension, je frôle de mes doigts l'intérieur de sa cuisse. L'espace d'une seconde, les yeux de Mel papillonnent, et elle mordille imperceptiblement sa lèvre inférieure.
— Maintenant ?
— Maintenant.
Elle tente de se serrer contre moi, mais je ne la laisse pas faire. Au lieu de ça, j'approche mon visage de son cou. Comme je m'y attendais, mon souffle contre sa peau la provoque un peu plus. Elle se raidit à peine, mais suffisamment pour que je sache dans quel état elle se trouve. Sa respiration s'accélère, sa main remonte sur mon épaule, et quand ma bouche s'attaque à sa peau à cet endroit précis, le soupir qu'elle exhale en dit long sur le désir puissant qui l'enchaîne à l'instant présent. Je connais ses faiblesses, maintenant. Pour autant, je n'ai pas fini de jouer. Je m'écarte d'elle avec douceur et reprends sa main dans la mienne.
— Chuck m'attend, Mel, je lance avec indifférence.
Déjà partie ailleurs, elle semble soudain percuter le sens de mes mots, et son regard se charge d'une intense frustration.
— Il ne peut pas attendre quelques minutes de plus ?
— Je ne crois pas. Les journalistes sont là.
Elle reste sans voix quelques instants, dépitée, mais se reprend très vite.
— Ils veulent te voir, c'est ça ? dit-elle d'une voix traînante. Ils veulent connaître tes impressions sur le Madison ?
— Un truc dans ce genre, oui, je rétorque.
Son regard a changé. Pas grand-chose, mais assez pour que je comprenne qu'elle a déjà repris le dessus.
— Dommage pour eux.
— Quoi ?
— J'ai dit : dommage pour eux.
Sans me laisser le temps de réagir, Mel passe ses bras derrière ma nuque. L'une de ses mains remonte à l'arrière de mon crâne et s'agrippe avec force dans mes cheveux. Son corps serré contre le mien m'envoie de puissantes décharges dans le ventre, et je sais déjà que je ne pourrais pas lutter. Cette fille va me rendre fou, et la puissance de son désir aussi.
— J'ai aussi dit maintenant, Ayden.
— Tu as un problème d'autorité, Mel.
— Fallait pas me chercher. Fallait pas me réveiller, fallait pas être aussi bon sur scène, fallait pas m'aimer. Ne viens pas te plaindre, en plus.
Sa bouche trouve la mienne, et les ongles de son autre main se plantent dans le haut de mon dos. Avec une lenteur calculée, elle éraffle ma chair jusqu'au creux de mes reins, m'arrachant de lourds frissons. Les paupières closes, j'arrête de respirer quand sa langue trouve la mienne, et le mélange de douleur et de désir qui m'étreint me semble soudain insupportable. Je n'ai plus aucune limite, plus aucune barrière, plus aucune raison de garder mes obligations en tête. À mon tour, j'empoigne la masse brune qui tombe dans son dos pour qu'elle ouvre les yeux.
— C'est ce que tu veux ? Tu veux me faire péter les plombs ?
Le sourire lascif qu'elle me renvoie annihile pour de bon tout ce qui me restait de volonté. J'attrape sa main tremblante et ouvre la première porte qui me tombe sous la main pour la refermer aussitôt. La loge du staff technique. Très bien. Je verrouille derrière moi, et fixe mon regard sur le canapé noir qui me fait face.
La donne a changé, l'atmosphère aussi. J'ai atteint une limite que Mel connaît très bien : celle qui dit qu'on ne reviendra pas en arrière. Le mélange de questions et de feu dans son regard déterminé me fait perdre toute notion du temps, et le reste de l'univers disparaît.
Les joues rougies, elle m'observe d'un œil provoquant.
— Et maintenant, Ayden ?
Sans répondre, je me rapproche d'elle pour la serrer contre moi.
— Maintenant, je vais te montrer ce que je fais de ton autorité.
J'attrape les poignets de Mel dans chacune de mes mains pour écarter nos bras. Sa poitrine se soulève et s'abaisse au rythme des battements de son cœur, dans le plus grand des silences. Ses yeux se ferment, et son visage se détend complètement.
— Ne te gêne surtout pas, me rétorque-t-elle dans un sourire.
Sans plus attendre, je lâche ses mains pour déboutonner son haut à manches courtes et l'envoyer au sol. J'en profite pour enlever mon tee-shirt, puis prends le temps d'observer sa peau nue. Je crois que je ne pourrais jamais me lasser d'elle, de son corps, de toutes les pensées indécentes qu'elle me procure à chaque fois qu'elle est là, et même à chaque fois qu'elle n'y est pas. J'aime cette fille plus que tout, mais il ne s'agit pas que ça. Je voudrais me repaître de son corps autant que de son âme, et chaque fois que je me dis que je finirai par m'y habituer, quelques chose de plus fort encore me pousse vers elle.
— C'est toi qui m'a dit qu'on n'avait pas toute la journée, souffle-t-elle avec malice.
Perdu dans ma contemplation des fins traits sombres qui courent sous sa peau, je n'ai même pas la présence d'esprit de lui répondre.
— Ayden ?
— Excuse-moi, je rétorque. Je mate outrageusement, là. Je ne peux pas tout faire.
Mel ouvre les yeux, soudain taquine. Sans me lâcher du regard, elle déboutonne son jean pour le retirer.
— Je continue, je suppose ?
Elle a tellement changé. Quand je l'ai rencontrée, c'est à peine si elle osait me regarder en face.
— Tu peux, en effet.
Son assurance la rend encore plus belle que d'habitude, au point que j'en ai presque mal. Quand elle se retrouve dans le plus simple appareil et avance de deux pas pour que nos corps se rejoignent, je sais que je ne vais pas pouvoir rester de marbre encore longtemps, mais je profite encore un peu des sensations violentes que me procure sa poitrine contre mon torse. Elle se rend pas compte, putain. Elle se rend pas compte de ce qu'elle me fait.
— Viens là.
Sans cesser de l'embrasser, je l'entraîne sur le canapé que j'ai repéré en arrivant et lui intime de s'asseoir dessus. Debout devant elle, je profite de son regard assoiffé, mais ne me laisse pas dominer par mes réactions. Mel comprend rapidement mes intentions, et s'installe à genoux sur le canapé, face à moi. Au fur et à mesure de mes caresses, ses jambes s'écartent doucement, et elle prend appui sur ses bras contre le dossier. Encore une fois, je ne me prive pas de graver dans ma mémoire l'intimité de l'instant qu'elle m'offre, pour être sûr de ne pas l'oublier.
Quelques secondes plus tard, j'enfouis mon visage contre son ventre et parsème son épiderme de baisers légers. Son odeur, sa douceur, les frissons sur sa peau ne me donnent envie que d'une chose, la faire jouir. J'ai toujours été fasciné par ce moment précis où je la perds, ce moment où elle quitte ce monde pour partir dans le sien, avec moi. Ce moment où elle ne contrôle plus rien, où ses yeux se révulsent, où seul son corps parle. Ma plus grande putain de satisfaction dans ce monde, en dehors de celle de partager tout ce que j'ai avec elle.
Mes mains se posent sur ses hanches, puis passent derrière ses cuisses pour les maintenir immobiles. Juste avant d'atteindre l'un des endroits les plus sensibles de son corps, je relève la tête un instant pour observer son visage. Concentrée sur mes gestes, Mel me fixe avec attention, sa lèvre inférieure entre ses dents. Sans la lâcher du regard, je pose mes lèvres entre ses cuisses, et le gémissement qu'elle retient à peine me brûle jusque dans mes os. Au fur et à mesure des caresses de ma langue, les tremblements de ses jambes m'indiquent à quel point la pression dans son ventre est en train de l'emporter. Une vague d'adrénaline me transperce, et j'enfouis deux doigts dans son intimité trempée. Les va-et-vient que j'entame semblent déborder Mel, qui pose une main dans mes cheveux et s'y accroche désespérément.
— Continue. S'il te plaît, je t'en supplie, ne t'arrête pas.
Je ne vais pas m'en priver. Savoir que c'est moi, et moi seul qui la met dans cet état me procure des sensations indescriptibles, et je redouble d'attention pour elle. Quand son corps se tend enfin, je passe un bras autour de sa taille pour la retenir. Dévastée par la puissance de son orgasme, elle repose contre moi, le souffle court.
— Je...
— Je sais. Tais toi.
— Comme tu veux.
À bout de forces, elle caresse distraitement mes cheveux, une main sur mon épaule.
(et on peut relire, là.)
— Il faut qu'on y aille. Chuck m'attend vraiment, Mel. C'était pas qu'un jeu.
— Tu veux vraiment que je me rhabille, là ?
— Sauf si tu veux sortir dans cette tenue.
— Heu... d'accord.
— Je t'aime. Et j'ai besoin de rien d'autre. D'accord ?
Quand elle sort dans le couloir, enfin habillée, je peux pas m'empêcher de sourire. Ses cheveux sont emmêlés, sa chemise est en vrac, et moi, je l'aime. Putain ce que je l'aime.
— Je vais balancer à Chuck ce que tu fais sur sa tournée, Mel.
— Je n'ai rien fait du tout, moi. C'est toi qui a tout fait. À ce propos, Chuck a une surprise pour toi.
— Une surprise ? J'aime pas les surprises.
— Tu vas aimer celle-là. Je t'assure.
Hi tout le monde,
Ce chapitre est un peu long, il n'était pas censé partir dans cette direction, mais... les personnages décident, et à priori ils étaient décidés, donc je les ai laissés faire.
J'espère que vous allez bien, et que la lecture était agréable. Normalement, je vous dis à demain, le chapitre sera moins long, mais il devrait être là.
Plein d'amour.
<3.
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