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EFFET PLACEBO
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"STACEY, RAMÈNE TON CUL au garage, où est-ce que t'es ?" Le message de Em-Jay s'affiche à l'écran du téléphone de la blonde, et Gwen décide de l'ignorer. Elle s'entasse dans le métro de New-York, pressée de rentrer chez elle. Depuis que l'araignée lui a enfoncé les crocs dans sa peau, elle a l'impression d'être au bord du gouffre. Elle ne sait plus discerner le haut du bas et a l'impression d'être tombée du onzième étage d'un building. Dans un coin de sa tête, elle se dit que c'est complètement insensé de se sentir de cette manière après s'être fait mordre par une araignée de maison : sa panique y est surement pour quelque chose. Elle tente de se reprendre, et murmure pour elle-même, dans le col de sa large veste :
— Tu vas pas mourrir, ma vieille, tu vas pas mourir...
Une femme se retourne vers elle, visiblement alarmée et gênée par les mots de la jeune fille. Gwen soupire et lève les yeux au ciel, sans prendre la peine de répondre. Sur sa liste des choses à faire, après "trouver quelle est la merde qui joue avec son système immunitaire", elle inscrit "arrêter de se faire remarquer tout le putain de temps parce qu'on est pas Oprah Winfrey".
Elle descend trois arrêts plus tard, renverse deux poubelles qui prennent trop de place dans sa rue et rate à plusieurs reprise les marches qui montent jusqu'à son appartement. Quand elle arrive devant sa porte, elle doit reprendre plusieurs fois sa respiration pour ne pas avoir l'air de faire une crise cardiaque. Elle rentre en furie, et sachant que son père est surement dans la cuisine, elle fonce vers sa chambre, en lâchant de sa voix rauque :
— Bonsoir papa y'a pas eu de répèt' ce soir j'suis rentrée j'vais dormir bonne nuit !
Sans lui accorder un seul regard, elle trace à travers l'appartement et ferme sa porte à double tour. Son père, lui, qui était encore dans son uniforme de travail, fronce les sourcils, visiblement concerné par le comportement de sa fille.
— Gwen ?
Il décide d'aller jusque devant sa porte, et sans vraiment savoir quoi dire, il passe sa grosse main sur sa barbe, avant de répéter, en collant son oreille contre la porte de la chambre de sa fille :
— Gwen ? Tout va bien ?
La jeune fille tente de contrôler sa respiration quand elle enlève délicatement sa veste, pour dévoiler la piqure - qui a encore enflée. Elle ferme les yeux et ravale un sanglot.
— Laisse-moi !
George Stacey piétine, visiblement ne sachant pas trop quoi faire.
— Gwen, j-
— Je vais bien, je te demande juste de... laisse-moi, s'il-te-plait.
Derrière la porte, son père hoche doucement la tête. Il fait demi-tour vers le salon, visiblement inquiet par la situation de sa fille. Même si il ne comprenait pas ce qu'il se passait, il était assez tolérant et confiant envers Gwen pour la laisser gérer ses problèmes seule. Il passe quelques secondes à contempler le vide, avant de murmurer, pour lui-même :
— Helen, regarde dans quel état tu nous as laissé. Tout serait tellement plus facile si t'étais encore avec nous...
Il souffle, en fermant ses yeux bleus. Capitaine Stacey avait beau être à la tête de toute une équipe de police, quand ça concernait sa fille, il perdait complètement la main. Elle était devenue tellement indépendante ces derniers temps, que les seuls moments qu'ils partageaient étaient ces quatre soirs par semaine où ils avaient l'occasion de diner ensemble. Elle lui demandait avec de grands yeux de lui parler de ses missions et des criminels que lui et son équipe arrivait à attraper pendant la semaine - et c'était les plus beaux souvenirs qu'ils arrivaient à forger à deux.
GWEN SE DÉSHABILLE. Lorsqu'il ne lui reste plus que son soutien-gorge sombre, elle se précipite vers son ordinateur, en tentant tant bien que mal de gérer son angoisse.
— Tout va bien, Gwen, dans le pire des cas, tu meurs, c'est pas si grave que ça...
Elle souffle, et reprend, après deux bouffés d'air :
— Mon cul c'est pas grave, Em-jay va me tuer si je crève sans prévenir.
Ses doigts glissent sur le clavier lorsqu'elle tape dans la barre de recherche : "que faire en cas de morsure d'araignée".
— "Laver la morsure avec de l'eau et du savon", génial, si on la lave avec la fumée de toutes les cigarettes des clodos qui crèchent dans le métro de New-York ça marche aussi, j'espère.
Ses mains se mettent à tressaillir. Les images qu'elle trouve montrent toutes des membres bleus, jaune, de couleurs complètement improbables, défigurés, gonflés. Aucun ne ressemble à la morsure qu'elle a sur le poignet. Quand elle lit que dans certains cas, un amputation est nécessaire, elle manque de déglutir.
— J'suis foutue.
Une douleur lui lance le bras, et elle gémit, sans savoir ce qui est en train de se passer dans son corps. Elle s'étale dans son lit, sous sa couette épaisse, alors que cinq heures de l'après-midi n'a même pas encore sonné. La fièvre lui monte aux joues, et son drap est bientôt trempé par sa propre sueur. Étendue sur son matelas, Gwen abandonne son corps au sommeil, sans tenter de comprendre quel poison prend peu à peu possession de son corps.
LE SOLEIL DE NOVEMBRE fait briller les tours de Manhattan. Gwen renifle, encore endormie, alors que les rayons viennent doucement balayer sa peau. Son réveil se met à vibrer sur sa table de nuit, et la jeune fille grogne en sachant ce que ça signifie.
— Ta gueule ! dit-elle à l'intention de la machine, et d'un geste mécanique, elle l'attrape et l'envoie contre le mur d'en face, pour qu'il se taise.
Encore endormie, elle ne réalise pas qu'elle vient littéralement de l'exploser. Elle se redresse, les cheveux en bataille, et prend, machinalement, le chemin de la salle de bain. En baillant, les souvenirs de la veille lui reviennent peu à peu, et quand elle est enfin devant le miroir, elle sursaute en voyant que son poignet n'est plus rouge et effrayant. Il ne lui reste que deux petites marques noires, presque invisibles sous sa peau. C'est comme si elle ne s'était jamais fais piquer.
— Eh bien Gwen Stacey, ce que tu peux être une fiotte, parfois.
Elle baille à nouveau, et se regarde devant la glace. Après douze grimaces et des imitations très mal réussies, elle attrape sa brosse a dent et presse son dentifrice sur les poils - surement trop violemment, parce que la moitié du tube fini par terre.
— C'est une blague ? se dit-elle à elle-même quand elle jette le tube dans le lavabo, devant le bazar qu'elle vient de faire.
Elle s'agenouille, ramasse le dentifrice tombée piteusement avec ses doigts en soupirant comme une enfant mécontente. Au moment où tout est presque propre, son oreille la chatouille, et elle a soudainement l'impression que ses cinq sens sont multipliés par douze. Elle sursaute, consciente d'une présence dans le coin de la salle de bain, et par réflexe, elle attrape sa brosse à dent et l'envoie vers la menace - et elle finit plantée dans le carrelage comme un javelot, à côté d'une araignée qui essaye juste de vivre sa vie comme elle peut.
Gwen tremble, terrifiée par ce qui lui arrive. Elle s'approche de la dalle de carrelage qu'elle a brisé en envoyant sa brosse à dent, et braque ses deux yeux sur l'araignée qui s'est arrêtée et qui semble l'observer.
— Connasse, tu m'as piqué avec quelle drogue, hein ?
L'arachnide lève les pattes avant, comme si elle s'apprêtait à dire quelque chose.
— Ouais c'est ça, fais la pute ! Vraaaaaaaaiment très marrant, ce que vous avez fait, toi et ta petite famille.
L'araignée reprend son chemin, et Gwen soupire, en récupérant sa brosse a dent. Il y a un gros trou dans le carrelage de la salle de bain, à présent. Elle décide de plus y penser, retourne en furie dans sa chambre, et s'arrête, sans comprendre, devant le cadavre écartelé de son réveil. Elle soupire, à la fois agacée et terrifiée.
Son père est déjà parti au boulot, et elle trouve une note sur le frigo qui lui demande de ramener une bouteille de lait. Elle rassemble ses affaires, attache ses cheveux roses, et sort.
GWEN COMPREND À peine les mots de Em-Jay, alors qu'elle est devant son plateau repas, à la cafétéria de son lycée. Elle doit surement être en train de lui gueuler dessus, à propos d'hier soir. C'était bien Mary-Jane ça, toujours à essayer de prendre les choses en mains - souvent en gueulant. Il n'y avait qu'avec Glory qu'elle trouvait un soupçon de paix. Gwen, les mains dans les poches de sa veste, n'était plus capable de se concentrer sur une seule chose.
Les pas des autres élèves, les langues qui claquent lors des discutions, les souffles un peu plus affolés quand une ou deux personnes se mettent à rire, le battement de leurs cils, les moutons de poussières qui glissent dans le fond des cuisines, les raclements de gorges des serveuses. Tout se mélange dans la tête de Gwen, qui peu à peu, à l'impression de devenir folle.
— Gwen ! Tu m'écoutes ?
Elle sursaute, et renverse sa bouteille d'eau sur la table.
— Oh merde.
Elle soupire, la reprend en main pour la redresser, mais elle n'arrive pas à la reposer. Elle ouvre la paume, mais la bouteille en plastique ne veux juste pas quitter sa main - comme si elle était accrochée dessus avec un adhésif inapparent. Elle referme ses doigts tremblants dessus, pour éviter que la situation ne devienne trop bizarre. Elle se lève, et quitte la cafétéria en courant, ayant désespérément besoin de prendre l'air.
Dans sa course, elle fait tomber le plateau repas d'un élève. Elle ne se retourne pas pour s'excuser, ne pensant qu'à retrouver l'air extérieur, mais un main vient agripper sa veste.
— Eh, c'est pas très poli de saloper le déjeuner des gens !
Elle se dégage d'un mouvement d'épaule, et tombe nez à nez avec le visage serré d'une garçon qui est surement dans sa classe. Elle soupire, maudissant son cerveau qui ne se souvient jamais de rien ni personne, et répond, en passant ses yeux sur le visage énervé de l'adolescent.
— J'ai pas le temps, excuse-moi, faut que-
— Tu as pas le temps ? Tu te fous de ma gueule ?
Gwen, l'esprit toujours confus, se met à ricaner. Incapable de se concentrer sur une seule chose à la fois, elle laisse ses lèvres répondre à sa place, sans contrôler les syllabes qui sortent de sa gorge.
— C'est dur de te prendre au sérieux avec ta face de sous-merde, vieux.
Il se crispe, et le public, qui s'est rassemblé autour, et commence à lâcher des exclamations et des murmures. Gwen se frappe le front, se rendant compte de sa bêtise, et grogne. Ce n'était vraiment pas le moment de se mettre à dos les inconnus de sa classe qu'elle ignorait depuis le primaire. Déjà qu'on ne l'appréciait pas trop dans le coin, elle avait beau s'en contre-foutre, des ennemis n'étaient jamais agréables à gérer.
— Voilà de grands mots pour une fillette de douze ans, réplique-t-il en s'approchant, voulant se faire menaçant.
Son nez pointu se plisse sous son agacement. Il porte une grosse veste en cuir, les manches légèrement remontées au niveau des coudes, comme s'il était toujours prêt à donner des coups de poings.
La voix de Em-Jay couvre les autres, lorsqu'elle annonce :
— Laisse la tranquille, Flash, tu vois bien qu'elle est malade !
— J'suis pas malade ! réplique Gwen, et Em-Jay quant à elle, décide de fermer sa gueule et de l'abandonnant à son sort.
Si elle cherche la merde, elle l'a trouvé, cette fois-ci. La foule s'épaissit, et Gwen décide de ne plus rien dire, pour éviter de remettre de l'huile sur le feu. Elle cherche une manière de sortir d'ici, mais le dénommé "Flash" - bien qu'elle doute qu'il s'agisse de son véritable prénom - semble ne pas en avoir fini avec elle.
— Tu sais quoi, je vais être gentil, si tu nettoies mes baskets de la merde que TU as foutu dessus, je te pardonne.
— Plutôt crever ! répond Gwen, qui n'avait aucune envie de se mettre à genoux devant qui que ce soit pour lui faire luire les chaussures.
— Regardez-moi ça, les gars ! Le sous-peuple se rebelle.
Flash s'approche, et au moment où il tend la main pour l'attraper, les oreilles de Gwen se remettent à bourdonner. Elle a l'impression que le monde entier lui cri d'où vient le danger, et que tout les poils de sa nuque se dressent. D'un geste calculé, elle balaye la main menaçante de son agresseur, qui semblait vouloir la lui mettre sur l'épaule. Celui-ci esquisse une grimace et se tient discrètement le poignet, comme si elle l'avait frappé plus fort que prévu.
— Laisse-moi partir.
— En voilà, des manières ! Ce n'est pas très convenable, venant d'une gamine comme toi.
Gwen choisit la fuite. S'enfoncer dans ce genre de situation n'était franchement pas en sa faveur. Elle hausse mollement les épaules, en reculant doucement.
— Abruti.
Elle fait enfin demi-tour, laissant la foule perplexe. Gwen rentre sa tête dans les épaules, et sort de la cafétéria sans rien demander de plus.
Assis à sa table, accompagné de Harry, Peter Parker a observé toute la scène. Ses oreilles bourdonnent aussi, aujourd'hui, et tout ses sens se sont mis à l'affut dès que Gwen est rentrée dans son champ de vision. À présent, il ne peut pas s'empêcher de penser que quelque chose ne va pas, avec cette fille. C'est une véritable fauteuse de trouble.
A/N : cliché, mais bow
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