JE SUIS comme un pot de miel : attirant, lisse, celui que l'on s'arrache. Néanmoins, je suis surtout celui que l'on jette lorsqu'il n'a plus rien à offrir.

   Je suis aussi un champs de tulipe qu'on adore, dont on aime l'odeur, dont on admire la beauté, mais que l'on raserait bien pour se construire une demeure luxueuse.

   Longtemps, je me suis demandé s'il existait un être semblable à moi. S'il pouvait émerger devant mes yeux un personnage aux caractéristiques semblables aux miennes, aussi coloré. Aussi inutile.

   Je ne vis pas, je ne fais qu'exister. Je dirai même que je ne fais que survivre.

   Je compte parce que je joue mon rôle. Je m'efforce de montrer le chemin, voilà pourquoi je n'ai pas encore disparu.

   Je suis le seul à pouvoir faire ce que je fais, celui qui devrait être irremplaçable, indispensable. Et, pourtant, je n'arrive pas à purger le sentiment d'être tellement à part...

   J'envie ces princesses de conte de fées enfermées dans des donjons... Elle ne représentent que néant et fragilité et, pourtant, de pauvres types s'entretueraient pour leur mouchoir. Elle ne représentent qu'un titre sur pattes, un corps dans une robe, et pourtant, elles seraient enfermées parce qu'elles vaudraient quelque chose.

   Qui connait mon vrai prénom, à moi ? Ma vraie identité ? Qui s'est jamais posé la question de savoir pourquoi, comment ? « A-t-il mal ? » « Se sent-il seul ? » Non. Le plus important est qu'il fasse son job, qu'il ferme son bec et endosse son rôle.

   Comment le leur reprocher ? Moi aussi j'ai oublié qui j'étais.

   Je réponds simplement aux voix qui hurlent ce qui est écrit sur ma couronne d'or : 0001.