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Chapitre 2

    Quelques jours étaient passés depuis que nous avions rendu visite à Victoria, Dylan et Hugo à l'hôpital. On allait régulièrement chez eux, ils ont l'air tellement heureux malgré leurs cernes. Thomas et moi n'avions pas reparlé d'enfant depuis. Il est en déplacement pendant quelques semaines, quant à moi, ma routine continuait simplement. Ce weekend je le passe chez mes parents, rester seule dans ce manoir aussi longtemps me donne des frousses incroyables. Le moindre petit bruit me fait sursauter.

J'adore rentrer chez moi. Même si je vie avec Thomas au manoir, je n'ai pas la sensation d'être vraiment chez moi. Ce manoir est un peu froid malgré les rénovations qu'on y a faite. Chez moi c'est bien plus petit, très chaleureux, et bien-sûr j'y ai grandi. L'odeur de la maison m'apaise toujours. Certainement car elle a l'odeur des plats que ma mère cuisine à longueur de journée. Cependant la maison est bien plus calme depuis que Justin est parti pour les études. Il rentre certains weekends, mais la plupart du temps il reste à Oxford pour faire la fête avec ses amis. Ce n'est pas moi qui vais pas le blâmer pour ça. Ce weekend il ne rentre pas, il y a une fête organisée par un petit riche qu'il ne faut absolument pas louper d'après lui. Mes parents ne sont jamais serein lorsqu'il ne rentre pas, ils ont peur que quelque chose lui arrive alors ils sont un peu sur son dos mais je les trouve plutôt cool avec lui malgré les coups de téléphone constant.

En arrivant chez moi, la première chose que je fais est de prendre un bon thé avec mes parents, on discute de la semaine, de nos projets, des potins du quartier, et d'innombrables choses sans importances. Après ça je me rends au cimetière pour rendre visite à Lucie. Aujourd'hui il fait gris, la neige recouvre le sol d'une épaisseur d'environ 5 centimètres. J'adore lorsque la neige craque sous mes bottes, sentir le vent froid caresser le peu de visage qui n'est pas couvert par une écharpe et un bonnet. Ely est une très jolie ville la nuit. Certaines illuminations de Noël scintillent déjà. J'aime beaucoup cette ambiance calme et posée. En arrivant devant le cimetière je m'arrête toujours un instant, je contemple l'entrée et la tombe de Lucie de loin. C'est si cruel. J'ai encore du mal à m'y faire. J'ai un pincement au cœur à chaque fois. Parfois je verse quelques larmes, d'autres fois je pleures ou d'autres fois encore rien ne se passe.

« - Tu ne rentres pas ? Tu as peur de croiser un fantôme peut-être ? »

Cette blague ridicule venant de derrière moi ne pouvait qu'être dite par une seule personne. J'aurais dû me douter qu'il serait là.

« - Qu'est-ce que tu veux Adam ? »

Il se rapprochait de moi sans que je ne me tourne. Il se positionne à ma gauche en regardant droit devant lui, exactement comme moi.

« - Moi, j'aurais peur d'en croiser un si j'étais seul. »

Je ne lui réponds pas. Nous ne nous voyons pas très souvent. Il arrive que l'on se croise ici, qu'on discute, qu'on aille boire un thé ensuite, mais c'est tout. Adam va de l'avant. Il a rencontré quelqu'un, il vie avec elle depuis 4 ans maintenant. J'ai pu la rencontré quelques fois, c'est étrange de le voir avec quelqu'un d'autre... Mais il semble heureux, alors ça me va.

« - Qu'est-ce qui t'amène Adam ?

- J'ai besoin d'une autorisation pour rendre visite à l'amour de ma vie le jour d'anniversaire de sa mort ? »

Il ricane. Je le regarde enfin. Son visage n'a pas changé d'un trait depuis tout ce temps. Il affiche un petit sourire attristé, mais il essaye de sourire quand même. Il ne montre plus vraiment sa tristesse depuis qu'il est avec Sophie. Du moins quand elle est là.

« - Pourquoi tu continues de l'appeler comme ça ?

- Parce que c'est la vérité. Le premier amour de ma vie. Celle que je ne cesserais jamais d'aimer. »

Je ne comptais pas pleurer ce soir. J'étais venue sereinement, mais Adam me fou toujours le cafard. Je me demande comment Sophie prend la situation. Je me demande si elle sait que Adam a ce genre de pensé, si elle sait qu'il vient encore ici.

Je m'avance lentement pour rejoindre la tombe de Lucie.

Lucie Phines,

1998-2016

« - Dix ans... Murmurais-je.

- Ça craint. »

Adam s'assied sur le banc et sortit une fiole qui je présume contient de l'alcool. Il m'invite à m'assoir auprès de lui, j'accepta. Il boit une gorgé avant de me tendre sa fiole, je la pris, sentis l'odeur et la lui rend.

« - Tu bois pas ?

- Non.

- Tu es enceinte ?

- Non plus.

- Je t'ai connu plus amusante Perry. »

Il prit à nouveau une gorgé. On resta silencieux un long moment. On ne parle jamais beaucoup quand on est ici. Adam lâche des soupirs de temps à autre, comme s'il l'attendait mais qu'elle n'arrivait jamais.

« - Thomas n'est pas là ?

- Non, il est en déplacement encore deux semaines.

- Et Dylan ?

- Avec son bébé.

- Wow. C'est bizarre d'entendre ça. »

Je le regardais prendre une nouvelle gorgé. Ses yeux brillent, il n'essaie plus de sourire. Il me fait tellement de peine. Je me rapprochais de lui et posa ma tête sur son épaule. Je le sens retenir ses larmes, il renifle plusieurs fois avant que je ne lui tende un mouchoir. C'est comme si le temps s'était arrêté. Il n'y a pas de vent, aucun bruit, rien ne bouge. Il n'y a que nous. Malheureusement il n'y a que nous.

« - Je pense souvent à elle. Même tout le temps enfaite. Elle me hante. Parfois je la déteste, et toi aussi. »

Je serrais son bras aussi fort que mon cœur ne me sert. Il me parle souvent de ça. Quand une nouvelle étape arrive avec Sophie il se met à culpabiliser, à penser que c'est avec Lucie que ça aurait dû arriver. Et quand il arrive une nouvelle étape dans ma vie c'est la même chose, il m'en veut parce que j'avance et pas elle... Je ne pourrais jamais lui en vouloir pour ça.

« - Je l'aime tu sais, mais ça ne sera jamais pareil... »

Dans ces moment-là je ne sais jamais vraiment à qui il s'adresse. A moi ou à Lucie ? C'est une question que je n'ai pas envie de lui poser.

« - L'amour de ma vie partie en fumé, ma vie partie en fumé.

- Tu as Sophie, tu as une famille, des amis, tu m'as aussi même si tu ne me veux pas.

- Quelle chance ! Dit-il ironiquement. Aucun de vous ne l'a vau. Personne ne pourra la remplacer. Jamais. Je t'ai raconté le jour où j'ai essayé de me suicidé ?

- Je t'ai raconté le jour où je suis arrivé chez toi et que tu avais essayé de te suicidé ? »

Il raconte toujours ça comme si c'était banal. On essaye de ne pas en discuter mais lorsqu'il amène le sujet c'est qu'il pense à recommencer.

« - C'était une si belle soirée Adam, tu as tout gâcher.

- Comme la fois où je suis arrivé à ton anniversaire bourré ?

- C'était mon mariage.

- Ah oui, très belle fête en tout cas. »

Je ricane en essayant de détendre l'atmosphère. Adam n'était pas invité à la cérémonie religieuse car je me doutais qu'il ne serait pas bien, je l'avais plus invité pour la forme, pensant qu'il ne viendrait pas. Il était arrivé au repas déjà bien amoché. J'avais prévenu quelques amis de son éventuel comportement. Il n'a pas gâché notre soirée, on a eu la chance qu'il ait l'alcool festif ce soir-là. Cependant, je doute que ce soit le cas de ce soir.

« - Ma vie est déprimante, non ?

- Je dirais même tragique. »

Je me lève du banc et lui tend la main, il l'a prit et je nous emmenais à la voiture pour nous rendre chez lui. Il ouvre la porte et m'invite à rentrer. Je m'attendais voir Sophie mais elle ne semble pas être là.

« - Elle a une soirée ''fille''. »

Il s'installe dans le canapé et se frotte les yeux.

« - Tu veux quelque chose ?

- Rien de possible, merci. »

Je m'installe en face de lui en silence.

« - A quelle heure Sophie rentre ?

- J'en sais rien, j'espère que t'as apporté de la lecture. »

On sait très bien tous les deux qu'il ne doit pas rester seul. J'envoie un message à mes parents pour ne pas qu'il s'inquiète.

« - Tu veux monter ?

- Alors comme ça tu m'invite à monter Perry ? »

Je roule des yeux et il se lève pour monter dans sa chambre. Je le suis de près. Il trébuche dans les escaliers mais se rattrape de peu. On arrive difficilement à sa chambre, je lui prends sa fiole de whisky et je vais m'installer sur le petit fauteuil qui a spécialement été mis ici pour ce genre de moment. Je le demande comment ça se passe quand je ne suis pas là. Je n'ose pas lui demander, j'ai peur de savoir. Adam possède une bibliothèque incroyable. Il a toujours aimé lire et relire. Je me tourne vers sa bibliothèque et passe en revue les titres de tous les bouquins, je m'attarde sur un et je le prends pour lire le résumer.

« - Il meurt à la fin. »

Je soupire.

« - Merci Adam.

- Pourquoi il ne raconte jamais ce qu'il se passe après ? Pourquoi on ne sait pas ce qu'il arrive après « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants » ?

- J'en sais rien. C'est pas moi qui écrit les livres.

- Tu me passes ma fiole ? »

Je lui envoyais sans regarder. Je ne sais pas comment l'aider. Sa famille vit loin et il ne veut pas y retourner, je ne sais pas pourquoi. Ses autres amis font comme moi j'imagine et ce qui en est de Sophie, je n'en n'ai aucune idée.

Il est 01h00 du matin, j'ai déjà pu lire la moitié d'un livre de 600 pages et Sophie n'était toujours pas rentrée. Je commençais sérieusement à fatiguer. Ma tête tombe de plus en plus alors qu'Adam dort comme un bébé. Pourtant je n'ai pas envie de le laisser seul. On ne sait jamais, il pourrait faire un cauchemar et se réveiller avec d'irréparables envies. Je me lève et vais vers Adam, sur sa table de nuit se trouve son téléphone. Je l'allume en espérant trouver des notifications venant de Sophie, mais rien. Je m'assieds sur le lit, désespérée. J'envoie des messages à Thomas pour faire passer le temps mais il dort déjà depuis un moment à mon avis.

« - Tu peux rentrer Helena... »

Je me tourne et vois Adam regarder dans le vide sous sa couverture. J'ai certainement dû le réveiller.

« - Je vais attendre. »

Je retourne dans mon fauteuil et m'enroule dans un plaid blanc et m'installe confortablement. Les autres fois, Sophie était déjà à la maison quand on rentrait, c'était beaucoup plus simple. Adam se retourne plusieurs fois avant de ronfler doucement. Je laisse mes yeux se reposer un instant. Je sens le sommeil m'attraper. Si Adam se réveille je l'entendrais, et Sophie ne devrait plus tarder maintenant...

J'ouvre les yeux, très difficilement, pour m'assurer que Adam est toujours là. Il est 3h00, je me lève pour voir Adam. Il n'est plus là. Je me précipite dans le couloir, je vois de la lumière provenir de la salle de bain. Mon cœur palpite et ma respiration s'accélère. Je n'aurais jamais dû m'endormir ! Je fonce contre la porte de la salle de bain et je frappe.

« - Adam ? Tu es là ? Adam ! »

J'entends des bruits venant de l'intérieur, ma respiration se calme pour mieux entendre. La porte s'ouvre brusque ment et je le vois tout droit devant moi avec un petit sourire narquois.

« - Tu 'inquiétais pour moi ? »

Son sourire bête m'énerva et je lui donnai un coup dans le bras. Mon cœur ralentissait doucement, l'adrénaline redescend à son tour.

« - Qu'est-ce que tu faisais ?

- J'étais au toilette. »

Je soupir et je me retourne pour aller dans la chambre.

« - Quand rentre Sophie ?

- Je ne sais pas. Elle ne m'a pas envoyé de message.

- Comment ça se fait ? »

Il semble réfléchir à la question un moment. Il retourne dans son lit et je m'installe à nouveau dans mon fauteuil.

« - Je ne sais pas si elle va rentrer. On s'est disputé avant et elle est partie. Je pense qu'elle est chez ses parents à cette heure-ci. Rentre Helena. J'irais la voir dans la journée et on va se réconcilier. Tu peux rentrer. Je ne vais pas me tuer cette fois-ci. »

Non, il ne va pas se tuer cette fois-ci. Mais il meurt à petit feu, il se bat, il essaye, mais cette part d'ombre ne le lâche pas. Je sais parfaitement ce qu'il se cache sous ses manches longues, il est trop tard pour éviter ça, il s'est déjà un peu tué ce soir... Je m'avance vers lui et je le prends dans mes bras rapidement. Je veux l'aider et le soutenir mais je ne suis pas dupe et je veux lui montrer. Je lui serra fort l'avant-bras et il grimace.

« - Tire au moins la chasse d'eau la prochaine fois. Ce sera plus crédible. »

Il me fixe un peu perdu et je pars. Je ne me retourne pas. Ça me fend le cœur. Je prends ma voiture et je rentre chez mes parents. Complétement exténuée je me laisse tomber dans mon lit et m'endors immédiatement.

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