43. Lisa Marlier
Samedi 13 mai
Je regarde une nouvelle fois ma montre. Il est quatorze heures dix-huit et Eugène est en retard. Ça fait une vingtaine de minutes que je poireaute sur la place du marché et ça commence à me saouler. J'ai l'air idiote avec mon vélo. Je souffle et attrape mon téléphone pour lui envoyer un message. Il fout quoi ?
Moi : T'es où ?? Je t'attends là ! Si t'es pas là dans une minute, je rentre chez moi.
Je regarde le reflet de mon visage sur une fenêtre de voiture. Je suis plutôt pas mal aujourd'hui. Je sais pas si c'est une bonne idée de m'être maquillée alors qu'on va faire du sport. Je sais même pas pourquoi je lui ai proposé d'ailleurs. Sûrement parce que je suis une bonne âme. Quand je le vois essoufflé après avoir couru dix mètres, ça fait un peu pitié.
Je recois une notification. Il m'a répondu.
Débile/20 : Déso, je suis presque là ! J'ai dû gonfler mes pneus, j'avais pas prévu :/
Moi : Pas une excuse. Allez dépêche !
Après quelques minutes, je le vois arriver sur un petit vélo. J'ai envie de me frapper la tête contre un mur. Il est ridicule avec son casque sur la tête en plus. C'est gênant de traîner avec lui.
- Il est trop petit ton vélo, imbécile ! constate-je en le voyant galérer.
- J'en avais pas d'autres, s'excuse-t-il penaud.
- Fallait me le dire, j'aurais pu t'en prêter un. T'as vraiment l'air trop con là.
Je me mets à rire à pleine gorge. Qui m'a mis un idiot pareil sur les bras ? Il fait une grimace mais ne dit rien de plus. Sur nos vélos, on se dirige vers la forêt. J'ai pris l'itinéraire qu'on fait avec mes parents. On ne parle pas beaucoup mais je vérifie qu'il me suit bien. Il est pas très doué et va hyper lentement. Il tombe plusieurs fois. C'est un peu frustrant mais je vois qu'il fait de son mieux alors je ne rajoute rien.
Après plus d'une heure de trajet, on se retrouve près d'un étang. On s'arrête pour se reposer un peu et on s'assoit dans l'herbe. Je sens son regard posé sur moi mais je ne dis rien. Je suis habituée, il me scrute toujours d'un air bizarre comme s'il était sur le point de m'assassiner. C'est perturbant mais je crois qu'il ne ferait pas de mal à une mouche.
Il a ramené un sac à dos avec pleins de snacks pour le goûter. Je secoue la tête avec désapprobation en voyant ça. C'est pas hyper sain mais je le laisse tranquille. Il est tout rouge à cause du soleil et de l'effort, il en a besoin.
Je reçois un message de mon copain. Depuis quelques temps, on s'éloigne un peu. Je crois que je suis moins amoureuse qu'avant. En fait, je le suis plus du tout. Peut-être ne l'ai-je jamais été ? C'est bizarre... La diffusion de ma photo m'a fait réfléchir à pleins de trucs sur moi et ce que je ressentais. J'en ressort grandie.
Namoureux <3 : Tu fais quoi ? J'ai envie de te voir...
Je souffle.
- Qu'est-ce qu'il y a ? demande Eugène un Twix à la bouche.
- Rien, c'est mon mec. Faut que je trouve un moyen de le larguer, ça me saoule de lui parler.
- Ah ? Pourquoi ? fait-il surpris.
- Pour rien. C'est juste comme ça, je ne suis plus intéressée.
- Tu lui envois des photos de toi à poil mais au final, t'es pas intéressée. C'est un peu débile. C'est nul pour lui...
Je fronce les sourcils.
- C'est qui ta pote ? Moi ou lui ? m'exclame-je sur un ton dédaigneux.
- T'énerve pas, je disais juste... Ce que t'es susceptible, rajoute-t-il tout bas.
Quand il se rend compte que je l'ai entendu, il s'excuse avec un sourire me prouvant qu'il n'en pense pas un mot. Je le frappe pour la peine.
- Du coup, comment je le largue ? reprends-je.
- Tu veux faire ça maintenant ?
- Maintenant ou demain. Le résultat c'est le même. Au moins, c'est fait !
Il se rapproche de moi et regarde mon téléphone par dessus mon épaule. Il est super proche. Je hume son odeur. Il a mis du parfum. C'est pas typique d'Eugène mais je suis agréablement surprise. Depuis quelques temps, sa légendaire mauvaise odeur a disparu et voilà maintenant qu'il met du parfum. J'ai vraiment une bonne influence sur lui ! Je souris. Ça fait du bien de lui être utile.
- Dis-lui ce que tu m'as dit, soit honnête, conseille-t-il.
- Mais j'ai la flemme. Il voudra en discuter et me convaincre, ça m'épuise rien que d'y penser.
- T'es vraiment pas gentille comme fille, soupire-t-il.
J'ai jamais affirmé le contraire. Je lève les yeux au ciel.
- Autre idée ? Parce qu'au pire je le ghost juste, j'arrête de lui répondre et le bloque partout.
- Mais c'est affreux ! Fait pas ça, s'écrie-t-il.
- T'es pas drôle, grogne-je.
- Laisse moi écrire un message de rupture et je te le montre ? Ça va te plaire.
Je hoche la tête et le laisse faire. Il prend environ dix minutes avant de me rendre le portable. Je lis ce qu'il a écrit avant de l'envoyer.
Moi : Hey, suis désolée d'avoir pris du temps à répondre. Je suis sortie à vélo avec quelqu'un. J'ai quelque chose à t'annoncer. C'est un peu compliqué après tout ce qu'on a vécu mais je te le dois, je nous le dois. Je pense qu'on est plus sur la même longueur d'onde. T'as dû le remarquer. On s'éloigne et c'est plus comme avant. C'est très difficile pour moi car j'ai beaucoup d'affection pour toi mais je dois te quitter. Je sais que ça va être très dur pour toi mais dis-toi que j'étais de toute façon pas honnête avec toi. J'ai rencontré un nouveau mec et il est trop canon, il s'appelle Eugène. Il est mille fois mieux que toi. Je vois pas pourquoi je resterais avec la version leader price. Bref, me recontacte plus, fais toi une raison. Nous deux c'est fini. C'était bien le temps que ça a duré. Bye ( ps : c'est pas toi, c'est moi lol )
- T'es un putain de fou toi en fait, ris-je. Espèce de monstre. Après ça fait le gentil.
Je frappe son épaule et il sourit, fier de lui. Mais quel bâtard ! Je ris en relisant le message.
- Ma mère passe toute sa vie devant les téléfilms TF1 et M6. Du coup, j'ai appris deux trois trucs, s'excuse-il. J'ai rajouté un peu ton attitude de connasse dedans, c'est tout.
- C'est réussi. Je suis célibataire ! hurle-je.
Deux ou trois oiseaux me répondent. Je me sens plus légère. On remonte sur nos vélos et on fait le chemin inverse. Il me raccompagne jusqu'à chez moi.
- C'était cool de passer l'après-midi avec toi, fait-il.
Il rougit beaucoup mais je souris simplement et lui fais la bise avant de rentrer chez moi. C'est vrai que c'était sympa. C'est cool d'avoir un pote comme lui même si il est un peu con. On aurait pas dit de base mais on se ressemble un peu.
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