[Ch02] Quand le voile du secret se soulève (1/2)
Cíqiǎo enroule la soie avec un soupir. Elle a fini par accepter la suggestion du grand chambellan et s'est plongée dans la sage lecture des enseignements de Kǒngzǐ et de Mèngzǐ [1] pour tromper les heures interminables de son emprisonnement. Cependant, ses pensées ne cessent de s'écarter vers d'autres préoccupations et l'empêchent de se concentrer. Par automatisme, elle recompte les rayures sur la petite table. Dix-sept jours se sont écoulés depuis leur entretien avec Lumière Éternelle, dix-sept journées peuplées d'un vide impuissant et hantées de questions sans réponse. Que deviennent ses filles ? Que fait le capitaine Jiágù ? Les armées ennemies ont-elles attaqué le Qí ? Pour un peu, elle se sentirait presque dans la peau de Mille Ruses, à tourner comme un tigre en cage. Le pauvre serait devenu fou au bout d'une journée de ce traitement, lui qui ne supportait aucune contrainte, aucune limitation, aucune inactivité !
Un léger bruit attire son attention par-dessus le froissement permanent des longues feuilles des bambous. Le chambellan, déjà ? Elle reconnaît le claquement caractéristique des semelles, agrémenté du chant discret des perles de sa coiffe. Est-ce l'heure du dîner ? Le temps aurait-il décidé, par quelque caprice miséricordieux, d'accélérer plutôt que de se distendre comme un vieux châle trop lâche ?
Pourtant, les bambous ne s'écartent pas ; ils se contentent de frémir un avertissement. Cíqiǎo se lève sans précipitation – les gestes brusques ont tendance à exciter ses gardiens végétaux. Dans sa poitrine, son cœur bat un peu plus vite. Le chángpáo bleu nuit du chambellan se profile derrière la barrière de tiges, mais il n'est pas seul. Une ombre canine agite la queue et une troisième silhouette l'accompagne.
— Je ne devrais vraiment pas faire cela, marmonne Zōu Hóuzhēn d'une voix plaintive, plus pour lui-même qu'à l'intention de son voisin. Le roi est en conseil avec ses ministres ; s'il revenait et nous trouvait ici, il serait furieux, déchaîné.
Un frisson le secoue jusqu'à l'extrémité de sa coiffe. Il se penche vers la prison de bambou, un souffle franchit ses lèvres à son attention.
— C'est tout ce que je peux me permettre de faire pour vous.
L'eunuque se tord les mains avec une grimace oppressée et file en direction du paravent.
— Je vais attendre dans le bureau, je vous fais confiance pour ne rien compromettre, n'est-ce pas ? termine-t-il à destination du visiteur avec un regain d'anxiété.
— N'ayez crainte, je respecte la loi.
La voix ciselée d'assurance, si familière, égaie le cœur de Cíqiǎo d'un rayon de soleil, le premier depuis plus d'une lune à percer les murs de cette prison sordide. Pourtant, la rigidité du ton fige le sourire sur ses lèvres.
La silhouette s'avance, dévoilant des formes féminines dans un chángpáo aux amples manches brodées, un visage où la douceur cède le pas à une sévérité toute professionnelle, un chignon impeccablement coiffé du bleu de la justice.
— Chánzhé...
Le reste de la phrase s'étrangle dans sa gorge. La vision de sa fille rayée des barreaux de sa cage la plonge dans un malaise singulier. Elle n'a jamais éprouvé une conscience aussi accrue de son enfermement qu'en cet instant suspendu à un simple nom. Malgré l'espacement nonchalant des bambous, elle a l'impression qu'un rideau impénétrable les sépare.
— Mère, salue son aînée d'une brève inclinaison de la tête.
Ses yeux aiguisés d'intelligence détaillent la prison avec une précision chirurgicale, puis les autres habitacles dans la pièce. Sa bouche se fond en une ligne de froide réserve.
Cíqiǎo s'humecte les lèvres d'un air gêné ; les circonstances ne plaident pas en sa faveur. Qu'est-ce qu'une diligente fonctionnaire de la justice peut bien conclure de la situation ? Par où commencer les explications compliquées ? Elle ouvre la bouche, mais sa fille la devance :
— J'ai trouvé ceci en évidence sur mon bureau, il y a deux jours, en arrivant au matin.
D'un geste un peu crispé, elle lui tend un unique bambou à travers les barreaux de la cage. Son expression se déride sur un sourcil interrogateur.
— Est-ce vrai ?
D'une main engourdie de pressentiment, Cíqiǎo attrape la lamelle peinte d'une poignée de hànzì. Comme dans un rêve virant inéluctablement au cauchemar, ses yeux survolent les trois phrases assassines.
« Votre mère était autrefois la plus talentueuse apprentie de maître Zhé.
Il semblerait que son dernier méfait ait éveillé la colère du roi.
Si vous en doutez, vous n'avez qu'à suivre le chien. »
Sa fille guette la réponse d'un masque impassible. Cíqiǎo n'est pas assez désespérée pour tenter de lui mentir en cet instant, Chánzhé le sentirait. Elle relève le nez vers le regard inaccessible et se contente de l'humiliante vérité :
— Oui.
— C'est donc vous, mère, qui avez disparu autrefois avec le Qíjı̄ng ?
— Oui, mais...
— Comment avez-vous pu nous tromper pendant toutes ces années ?
Aucune colère ne déborde de cette question accusatrice, juste une déception blessée. Le calme apparent chavire le cœur de Cíqiǎo. Lányě aurait tempêté, attaqué, sa fureur lui aurait donné prise pour réagir. Elle se sent démunie devant la coque de glace derrière laquelle Chánzhé s'est retranchée. Mille explications se bousculent dans son esprit, aucune ne la satisfait, aucune ne franchit ses lèvres.
— Quelle belle comédie vous nous avez jouée, à Lányě, moi, père peut-être ! Loyauté, justice, obéissance, tout cela n'était-il donc pour vous que des mots vains ?
La question, insidieuse, s'engouffre dans la brèche de ses propres doutes plus sûrement qu'un poignard effilé. N'a-t-elle pas abusé de ses prérogatives auprès de pauvres moines ? N'a-t-elle pas désobéi à un ordre direct de son souverain ? Elle voudrait s'insurger qu'il n'existe pas notions plus chères à son cœur que ces trois piliers, mais les mots restent étrangement bloqués au fond de sa gorge. Seule une bouillie de protestations en émane.
Le regard de Chánzhé se durcit devant l'absence de dénégations.
— Où est le Qíjı̄ng ?
— Je l'ignore, parvient-elle à articuler.
Après l'avoir eu à sa portée un si bref instant, elle l'a de nouveau laissé échapper. La honte de son échec doit s'inscrire en glyphes accusateurs sur son visage pour n'importe quel juge qui se respecte, et sa fille est parmi les meilleurs.
— Quels autres mensonges avez-vous tissés autour de nous ces dernières lunes ? Que complotiez-vous avec ce Trois Yeux ? Renverser le roi ?
Il y a encore ne serait-ce qu'une lune, la suggestion outrancière n'aurait été qu'une vaste plaisanterie balayée d'un revers de main. Aujourd'hui, elle ne sait que répondre à cet écho de ses propres incertitudes. Qílóng à demi fou, un héritier perdu. Ses réflexions l'ont conduite vers des sentiers glissants, des fondrières piégeuses, des terres inexplorées ; s'est-elle égarée en chemin ?
— Ce n'est pas ce que tu crois..., tente-t-elle sans se convaincre elle-même.
Ses yeux coulent sur le massacre violacé de ses doigts, le souvenir gravé dans sa chair des tortures de l'adorateur d'Èrláng. Les ongles noircis reflètent-ils quelque gangrène intérieure ? Finalement, qu'est-ce qui la distingue de ceux qui conspirent en secret contre le souverain ?
Un bref effarement se lit sur le visage de Chánzhé à la vue du désastre des mains. Cíqiǎo s'est habituée aux cicatrices rougies, mais la vision reste saisissante. Elle esquisse une grimace qui se veut rassurante. Sa fille recule d'un pas, secoue la tête, décontenancée, avant de reprendre son armure de politesse.
— Je ne vous connais plus.
Un éclat dur se reflète dans ses prunelles.
— Est-ce vous qui avez incendié la bibliothèque de l'académie ? Est-ce la raison de votre enfermement ?
Cíqiǎo relève le nez sous la pique d'une brusque alarme.
— Comment ?
— C'était il y a une dizaine de jours. Les flammes ont démarré dans la salle des rouleaux à copier, ceux dont nous ne disposons que d'un seul exemplaire. Le sinistre a été rapidement maîtrisé. Malgré tout, de nombreuses œuvres uniques sont parties en fumée, dévorées par le feu. Le coupable n'a pas pu être identifié, mais seuls les maîtres et les diplômés de Jìxià ont accès à ce lieu.
La voix de Chánzhé tremble d'outrage. La destruction de toute cette connaissance la touche dans son âme de lettrée et fissure sa contenance. Elle n'est pas aussi impavide qu'elle veut le faire croire, abritée derrière sa façade de juge.
Cíqiǎo n'a pas la prétention de la même retenue et ne cherche pas à dissimuler son bouleversement. Son visage se décompose, ses jambes menacent de céder. Ses pensées éperdues hurlent un avertissement silencieux, tandis qu'elle se refuse à donner à cet acte inique le sens que lui soufflent tous ses instincts. Le pacte. Qu'est-il advenu du pacte avec Pensée Docte ?
Cette fois, sa réaction plaide pour elle. Les traits austères de Chánzhé se relâchent sur un soulagement presque imperceptible.
— Pour quel crime, alors, Lumière Éternelle vous a-t-il enfermée ici ? Qu'avez-vous donc fait ?
Excellente question ! Qu'ont-ils fait, tous ? Ils ont pisté un voleur et un assassin à travers le royaume, ont laissé une promesse en suspens auprès d'un tigre grincheux, ont assisté à la renaissance d'un phénix au cœur d'une vallée de cendres, ont plongé dans les abysses pour rapporter son écaille à une tortue trop sage. Ils ont tenté à eux seuls de rattraper les brins des pactes brisés, de sauver ce qui pouvait encore l'être du royaume. Mais rien de tout cela ne permet de racheter leur faute.
— J'ai désobéi à mon roi, avoue Cíqiǎo dans une grimace honteuse.
Des pas claquent dans le silence qui s'ensuit. Zōu Hóuzhēn est de retour.
— En avez-vous terminé ? gémit-il. Sa Majesté risque de revenir à tout instant.
Chánzhé l'accueille d'une inclinaison respectueuse.
— Merci d'avoir autorisé cette entrevue, Monsieur le grand chambellan, malgré son caractère officieux. Je ne veux pas abuser de votre patience. Nous pouvons repartir.
Le soulagement se peint sur les joues poudrées de l'eunuque. Tous deux se détournent vers la sortie dans une dignité empressée, sans un regard en arrière. Avec eux, le dernier fil de communication avec le monde extérieur va disparaître. Cíqiǎo avance d'un pas, les bambous tressaillent en semonce.
— Attendez ! Chánzhé, je peux tout t'expliquer !
Sa fille jette un œil distant par-dessus son épaule, plus fatal que n'importe quelle lame.
— Je suis juge, mère, je sers la justice. Nous n'avons plus rien à nous dire.
Les pas quittent la pièce. Le chien s'aplatit au sol avec un gémissement et deux grands yeux humides, comme s'il voulait se faire pardonner d'être l'instigateur de cette visite.
Cíqiǎo s'affaisse à genoux, poignardée en plein cœur. Chánzhé ne fera rien pour elle, et elle n'est même pas certaine de lui donner tort. Sans doute aurait-elle réagi de la même manière autrefois – non, elle a réagi de la même manière quand elle a appris les projets du prince Jiàn : indignation, outrage. Oh, elle était toute drapée dans ses certitudes, aveuglée par la rassurante illusion que bien et mal se distinguent sans équivoque. Une naïveté de jeunesse. Les frontières sont bien plus troubles qu'il n'y paraît. Qu'il est facile de se fourvoyer !
Si elle avait disposé de plus de temps pour présenter la situation, peut-être sa fille aurait-elle écouté d'une oreille plus impartiale ? Ou si l'aveu était venu d'elle-même ? Mais il était trop tard, le message avait déjà soulevé le voile du secret et semé son poison insidieux dans l'esprit de Chánzhé. Aujourd'hui, leurs langues se sont agitées de concert, dans une chorégraphie convenue, mais elles ne se sont pas vraiment parlé.
Une humidité amère glisse sur sa joue. Elle est seule fautive de cette incompréhension ; elle s'est toujours refusée à mêler sa fille à cette affaire. Peut-être a-t-elle eu tort ? Sans doute aurait-elle dû lui faire confiance. Il est trop tard pour les regrets, maintenant. Tout le passé enfoui resurgit. Rien ne peut plus l'arrêter et cette déferlante engloutit la paix heureuse des vingt-quatre années écoulées. Chánzhé et Lányě ignorent tout des événements auxquels elle s'est trouvée mêlée autrefois. Quán Ān et elle avaient convenu qu'il valait mieux les taire.
Elle se souvient encore de leur discussion. À cette époque, la fièvre des sept héros enflammait l'imagination ; l'adulation populaire les élevait au rang de quasi-divinités aux côtés du roi-dieu Lumière Éternelle. Elle a fui cette célébrité intrusive, elle ne voulait pas que ses filles grandissent dans l'ombre de Petite Pierre Noire. Elle s'était dit qu'elle leur expliquerait, plus tard, quand elles auraient l'âge de comprendre et qu'elles auraient tracé leur propre chemin dans la vie. Le moment opportun ne s'est jamais présenté. Dix années se sont écoulées, puis vingt, et Ān les a quittés, emporté par l'âge avant elle. Déterrer ce secret oublié n'avait plus aucun sens. Elle l'a laissé sédimenter au fond de l'étang du passé, avec les projets inaboutis, les rêves perdus et les regrets éternels.
Aujourd'hui, à genoux dans une prison improbable, alors que le royaume qu'elle a défendu autrefois titube au bord du gouffre, elle contemple, impuissante, les éclats brisés de sa vie.
Elle n'a jamais voulu tout cela. Elle avait trouvé la paix, elle avait tourné la page ! Ses poings se crispent d'un sursaut de rage, contre l'injustice de leur sort, contre les dieux qui se jouent d'eux, contre Lumière Éternelle qui leur a imposé sa volonté.
Des présences s'enroulent autour de son esprit. Elle perçoit la compassion attristée de Hǔníng, le questionnement discret de Tāo, la chaleur réconfortante de Měifèng, le soutien indéfectible de Zhúgāng. Peut-être ont-ils entrevu Chánzhé au travers des barreaux de leur prison, peut-être même surpris une partie des mots prononcés par sa fille ? Cependant, pour avoir maintes fois essayé de leur parler, elle sait qu'ils n'entendent pas ses paroles, tout comme elle ne distingue pas les leurs. Ils s'interrogent ; ils s'inquiètent.
Alors, quelque chose en elle se révolte.
Elle ne veut plus du poids de cette responsabilité forcée. Elle veut reprendre sa vie simple d'avant, retrouver ses filles, oublier. Elle veut rentrer chez elle comme si rien ne s'était produit, comme si le roi ne les avait jamais convoqués en ce jour fatidique de la fête des sept héros. Tout effacer.
Elle veut être seule dans sa tête.
D'une poussée, elle rejette les sensations qui ne lui appartiennent pas. Une bile lui remonte à la gorge. Les présences s'étiolent, chassées par les bourrasques de sa colère. Un tourbillon d'amertume emporte les pensées rationnelles, plus sages, qui devraient la calmer. Son esprit se craquelle. Elle croit entendre la plainte d'une corde tendue à se rompre ; tout vibre comme un navire en pleine tempête. Un élément doit céder.
Puis un jappement inquiet retentit et brise l'écrin de sa fureur. Elle reprend ses esprits, hébétée par la violence de ses émotions. La tension retombe avec un pincement de honte, ses épaules s'affaissent. Qu'elle est belle, la philosophe à la langue bien pendue ! Elle donne des leçons aux vieux sages, mais reste désemparée face à sa fille. Elle qui se croyait prête à tout affronter cède à la première adversité ?
Ses yeux glissent sur la lamelle de bambou et son message délétère, abandonnée par Chánzhé. Les traits à l'encre noire tranchent la pulpe jaune tels des coups d'épée. D'un doigt hésitant, elle suit les contours des caractères. La compréhension la cueille au creux du ventre. Ce n'est pas une simple dénonciation mesquine, c'est une attaque. Une attaque à la pointe du pinceau, mais pas moins mortelle pour autant. Une attaque précise, de quelqu'un qui savait où frapper pour détruire et qui a bien failli réussir : briser la loyauté de sa fille, miner sa confiance, la pousser à l'écart, la séparer des autres. Elle s'est laissée submergée sans réfléchir, elle a réagi exactement comme l'auteur du message le voulait. Qui est-il ? Comment savait-il ?
Elle attrape la lamelle et la brise entre ses doigts, en deux, en quatre, encore, comme si elle pouvait ainsi nier son influence néfaste. La réponse est évidente. Ils sont au troisième jour de la lune. Il y a deux nuits de cela, quand la dénonciation a été déposée sur le bureau de sa fille, aucune lune n'éclairait le ciel nocturne.
Sa résolution vacillante se raffermit. Elle se relève, un pli déterminé planté entre les sourcils. Depuis quand se laisse-t-elle abattre si facilement ? Elle n'a pas dit son dernier mot. Comment le dragon noir ose-t-il s'en prendre à Chánzhé pour mieux l'atteindre ! Il veut la guerre ? Il ne sait pas à qui il a affaire !
Les pensées des autres se rapprochent, percevant son revirement, et cette fois, elle accepte leur réconfort. Ils n'y sont pour rien dans son malheur. Revenir en arrière n'est pas possible. Unis, ils sont plus forts. Ensemble, ils lutteront contre l'ombre de Qílóng.
Car leur ennemi vient de frapper une nouvelle fois. L'incendie dans la bibliothèque de Línzı̄ ne peut être un hasard. Le texte scellant le pacte avec le gardien de l'Est est parti en fumée. Comment ce criminel a-t-il osé détruire des lamelles de bambou dont l'unicité n'avait pas de prix ? Comment a-t-il pu accéder à ce lieu ? Aucun élève, aucun maître de l'académie ne ferait jamais une chose pareille !
Cíqiǎo revient vers le coussin de ses méditations avec un soupir désabusé. Pourquoi n'y a-t-elle pas pensé plus tôt ? Comment ont-ils pu être assez stupides pour laisser ce texte végéter pendant des années ? Aucun d'eux ne s'en est soucié, inconscients de sa fragilité. Autrefois, quand ils ont débarqué au palais, de retour des forêts de bambous, les événements ne leur ont accordé aucun répit ; et après la bataille, chacun est reparti de son côté. Tián Jiàn n'était plus là.
Un érudit a dû dénicher le rouleau, oublié dans les anciens appartements du prince, et l'a apporté à l'académie. Elle savait qu'il s'y trouvait, l'y ayant redécouvert, un peu par hasard. Par la suite, il lui est même arrivé de le consulter, plusieurs fois, par nostalgie ; et pourtant, à aucun moment, il ne lui est venu à l'esprit d'en réaliser des copies. Il ne s'agissait ni d'un enseignement de maître, ni de traité philosophique, pas même d'un savoir-faire susceptible d'intéresser les artisans de la ville, juste une simple légende d'une contrée lointaine qui la faisait rêver en lui remémorant des souvenirs. Qui s'en serait préoccupé ?
Désormais, il ne reste plus qu'un seul pacte.
Cependant, cette fois, ils sont aveugles. Mille Ruses et Tián Jiàn étaient partis de leur côté pour le mont Tài avec une poignée d'hommes fidèles pendant qu'eux cinq organisaient les défenses de la ville. Ils ignorent la teneur de l'accord passé autrefois avec Corne Céleste, la qílín gardienne du Centre. Ils ne sauront même pas reconnaître l'attaque qui le brisera, encore moins la prévenir. Que se passera-t-il alors, lorsque le dernier lien maintenant le dieu du Qí sur terre sera rompu ? Quel cataclysme déferlera en répercussion de cette ultime tragédie ?
Peuvent-ils empêcher l'inéluctable ?
* * *
1. Mèngzǐ est un penseur confucéen, connu en occident sous le nom de Mencius ou Meng Tseu.
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