Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

[L01] Un voyage de mille lieues

Le livre de la vérité 1

Un voyage de mille lieues


Qu'est-ce qui fait l'essence d'un homme ? S'agit-il de ses rêves, ses aspirations, ses désirs les plus secrets, enfouis dans les replis de son âme ? Ou bien faut-il se fier à ses actes, aux principes qui régissent sa vie, aux choix qui le guident sur le chemin tortueux du destin ?

Sur quoi peut-il encore se reposer lorsque tout s'achève, que tout est dit et qu'il ne reste plus qu'à attendre que la mort s'approche, dans un claquement d'os grinçants, en visiteur redouté dont on connaissait pourtant la venue ? Peut-il compter sur les cendres de ses joies, les lambeaux de ses rêves, les fragments de souvenirs épars dont il réinvente sans cesse les chaînons manquants, perdus depuis longtemps dans les brumes de l'oubli ?

Que reste-t-il quand tout n'est plus que poussière, quand les volontés se sont éteintes, quand tout est vain et qu'il abandonne derrière lui ses espoirs déçus, ses désirs inassouvis, ses regrets éternels ? Quand le rêve qu'il croyait tenir se retourne contre lui pour plonger en son sein et le dévorer ? Quand les dieux facétieux lui offrent ce en quoi il a toujours aspiré, pour se moquer de lui ?

Que subsiste-t-il de l'essence d'un homme ? Quelle trace dépose-t-il dans le cycle infini de l'histoire humaine ? Un souvenir chéri dans un cœur aimant ? L'empreinte de sa main sur la face du monde ? Des légendes colportées par les bardes ? Une histoire contée au coin du feu, qui fait briller les yeux des enfants ?

J'ignore les réponses à ces questions qui ravagent l'humanité depuis la nuit des temps. Je ne suis pas poète, pour manier les mots avec verve. Ma main est plus habile à l'épée qu'à la plume. Ces questions, je te les livre, sans réponse, telles qu'elles me hantent.

Ma vie m'échappe, bribe après bribe, souffle après souffle, comme un écheveau de laine trop vieux qui s'effiloche, sans qu'aucun nœud ne puisse l'enrayer.

Bientôt, je ne serai plus.

J'imaginais bien autre chose que cette lente agonie. Je croyais finir en apothéose, le cœur vibrant et le défi aux lèvres. Le sort en a voulu autrement. Avec la lucidité qui me reste, je veux tracer les circonstances qui m'ont conduit, vaincu, à attendre la fin comme un vieillard moribond. Je veux peindre sur ces fragiles lamelles de bambou tous les événements dans leur vérité crue, pour que rien ne se perde, rien ne s'oublie... pour que demeurent à jamais inscrits les actes des cinq, pour que tu saches ce dont ils sont capables, jusqu'à la trahison finale, la plus amère et la plus terrible d'entre toutes.

Tout a débuté dans une taverne de Línzı̄, au royaume de Qí, car « un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas »... [1]

*  *  *

Je regardais l'épée. J'admirais ses gravures ciselées, son tranchant aussi fin qu'un cheveu de nymphe céleste. Je peux encore sentir son poids dans ma main, son équilibre parfait. Un simple prolongement de mon propre bras. Avec elle, le combat devient danse, poème, communion avec l'harmonie du yı̄n et du yáng, dénué de toute violence, dont l'issue s'inscrit dans le grand cycle du monde.

J'avais creusé toute la distance possible entre elle et son ancien propriétaire, et ce voyage m'avait conduit jusqu'à ces nattes crasseuses de graisse de porc et d'alcool de sorgho, dans la taverne de la Grue Céleste.

En cette année 858 naissante, au cœur de la plus peuplée des villes du Zhōngguó, j'espérais me fondre dans l'anonymat de la foule. Hélas ! Si ici les étrangers n'attirent pas le regard, ils sont bien plus souvent équipés d'un pinceau et de lamelles de bambous que d'une épée et d'une armure de cuir. Ma tenue me valut immédiatement le qualificatif de dàxiá [2] et une foule de questions avides sur mes exploits. J'aurais pu me sentir honoré si je n'avais consacré la moitié de mon temps à refuser d'enseigner l'art du combat à des loqueteux au passé douteux, et l'autre à rejeter les offres d'emploi des riches notables. Je n'avais nulle envie de m'encombrer d'un apprenti et aucune intention de m'inféoder à un quelconque maître.

Jamais je n'aurais imaginé rompre un jour ces deux préceptes qui avaient jusqu'ici guidé mon existence libre. Et pourtant, tout devait basculer en cet instant vers un chemin fatidique dont j'étais bien loin de mesurer les périls.

Le battant s'ouvrit sur un homme de haute taille, enveloppé dans un manteau qui lui descendait aux chevilles. Je m'assieds toujours dos au mur, face à la porte. Son arrivée attira mon attention. Buste droit, tête haute, le maintien fier, il n'était pas de la clientèle habituelle de ce quartier populaire de Línzı̄. L'habit de chanvre pouvait faire illusion, mais la moustache soignée, la courte barbichette lustrée, l'œil vif avec lequel il dévisageait les convives trahissaient les dāo [3] de sa bourse. Sa main droite ne quittait pas le pan de son manteau. Armé, donc. Dangereux ? Sans surprise, son regard s'arrêta sur moi. Mes doigts se resserrèrent sur la poignée de l'épée.

Il contourna les tables basses et les nattes encombrées pour venir s'agenouiller en face de moi. Le chángpáo brodé entraperçu lorsqu'il prit place confirma mon intuition.

— Vous êtes celui qui se fait appeler Mille Ruses ? Le dàxiá aux cheveux d'airain ?

Une question de pure forme. Combien existait-il de guerriers en ville correspondant à ma description ? Par réflexe, je lui servis ma réponse habituelle, sans beaucoup d'aromates pour en adoucir le piquant.

— Je ne suis ni garde du corps ni capitaine de garnison. Je n'escorte aucune caravane. De manière générale, je ne cherche pas de travail. Merci, mais ce que vous avez à me proposer ne m'intéresse pas.

Un léger sourire souleva sa moustache.

— Quel dommage. Je cherchais quelqu'un d'habile pour une mission à la fois périlleuse et subtile. On m'aura mal renseigné. Je ne voulais pas interrompre votre repas. Toutes mes excuses.

Il fit mine de se lever, mais les quelques mots délibérés m'avaient dressé l'oreille. Un soupçon de curiosité me souffla de réviser mon jugement. Je rangeai l'épée et poussai mon bol vide.

— Quelle mission ?

Le sourire s'accentua. Le fourbe avait pris ses renseignements. J'étais ferré comme un vulgaire poisson.

— J'ai besoin d'un livre, un rouleau de soie.

Je haussai les épaules.

— J'imagine que ce n'est pas ce qui manque dans cette ville !

— Ce n'est pas n'importe quel livre. Il s'agit d'un texte sacré, soigneusement conservé dans le grand temple de Wénchāng, en plein cœur de l'académie de Jìxià.

— Demandez au prêtre, en ce cas.

— J'ai déjà placé ma requête auprès de maître Zhé, qui m'a aimablement répondu que cet ouvrage ancien n'était pas consultable, rétorqua-t-il avec une pointe de contrariété.

Il s'appuya sur la table et baissa la voix.

— Je dois lire ce document. Je le restituerai ensuite. L'université grouille d'agitation en journée, mais à la faveur de la nuit, un homme intrépide pourrait se faufiler dans l'enceinte, éviter les patrouilles et emprunter le rouleau. Cet homme se verrait largement rétribué pour sa peine.

Je plissai les yeux. Tout paraissait trop facile. Me tendait-il un piège ?

— N'importe quel voleur se fera un plaisir d'accepter cette mission, refusai-je d'un revers dédaigneux.

— Et n'importe quel voleur se fera prendre dans les filets de Wénchāng. Le temple est défendu par de puissants sortilèges. J'ai besoin d'un héros audacieux, capable de se faufiler dans le sanctuaire du Scribe de l'Empereur de Jade sans éveiller son attention et de lui dérober l'un de ses trésors les plus précieux.

Certains mots se pimentaient d'une saveur particulière qui n'était pas pour me déplaire. Défier un dieu, s'emparer d'un livre sacré au nez et à la barbe de ces lettrés imbus d'eux-mêmes penchés sur leurs pinceaux en poils de chèvre ! Mon regard glissa vers l'épée à mes côtés ; un frisson d'aventure me picota les doigts. Je lissai les poils de mon menton, fis mine de réfléchir, mais ma décision était déjà scellée. La mission était à la fois complètement folle et provocante. Taillée sur mesure, en somme. Mon commanditaire savait me prendre par les sentiments.

Devant mon silence, il se redressa avec une moue déçue.

— Mais je comprendrais que l'entreprise vous effraie.

Effrayé, moi ? Pour un peu, je lui aurais ri au nez, mais il risquait de mal l'interpréter. En revanche, je n'allais pas me laisser insulter de la sorte.

— Revenez ici dans cinq jours. J'aurai votre rouleau, affirmai-je, sourire retors à l'appui. Nous pourrons alors discuter de son prix.

Il fronça les sourcils et me dévisagea, sans doute pour s'assurer que je ne me moquais pas. Je conservai mon sérieux le plus impassible.

— Vous savez comment je me nomme, ajoutai-je. Puis-je savoir pour qui je travaille ?

— Mon nom n'a pas d'importance. Appelez-moi Deuxième Fils. Le rouleau porte le titre de Qíjı̄ng. Je reviendrai dans cinq jours, même heure.

Il se leva et quitta la taverne sans un regard en arrière.

*  *  *

Je me souviens avoir poussé un léger ricanement. Tant de mystère était bien inutile. Au vu de la demande et de la situation politique, son identité ne faisait aucun doute. Ce que j'ignorais par contre totalement, c'était que je venais d'enfiler le doigt dans un engrenage qui allait me conduire à ma perte.



*  *  *

[1] Lǎozǐ, connu en occident sous le nom de Lao Tseu, fondateur du taoïsme – Dàodéjı̄ng (Livre de la voie et de la vertu), chapitre 64.

[2] Dàxiá: noble guerrier.

[3] Un dāo (littéralement couteau) est une pièce de métal en forme de couteau, en fer ou bronze, servant de monnaie dans les royaumes de Qí, Yān et Zhào.

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro