𝐕
Le lendemain matin, Charlie se réveilla, morose. Elle jeta un coup d'œil à son réveil... Et bondit hors de son lit, paniquée.
Elle était en retard, très en retard : les portes du lycée fermaient dans dix minutes. Paniquée, elle s'habilla et courut à l'extérieur, sans prendre de petit déjeuner.
Le bus de ramassage scolaire était déjà passé, bien sûr.
« Pourquoi Maman ne m'a pas réveillée ? » se demanda-t-elle en se remettant à courir.
Heureusement, la veille, elle avait regardé par la fenêtre pendant presque tout le chemin vers l'établissement où elle étudiait, si bien qu'elle n'eut pas grand mal à se repérer. La ville était vraiment petite, et tout le monde fréquentait le même lycée.
Charlie franchit les portes juste à temps. Hors d'haleine, elle se pencha et posa les mains sur ses genoux pour reprendre son souffle. Elle se rua en cours, pile à l'heure.
*
* *
À l'heure de la pause, l'adolescente trouva enfin le temps de parler à sa nouvelle amie.
— Salut, dit-elle. Désolée, pour tout à l'heure, si je n'étais pas dans le car... J'ai oublié de régler mon réveil, hier soir.
— Pas grave, la rassura Emy. Au fait, Joyeuse Saint-Valentin !
Surprise, la jeune fille passa une main dans ses longs cheveux bruns. Elle avait complètement oublié que c'était aujourd'hui.
— Merci, à toi aussi.
— Tu es en couple ? Avec quelqu'un qui vit à New York ? demanda la rousse.
— Euh... Non...
— Ah bon ? s'étonna Emy. Tu n'as pas de petit ami ? Tu es très jolie, pourtant.
Charlie grogna un remerciement, mais le cœur n'y était pas.
Elle ne se trouvait pas jolie, bien au contraire, et elle pensait aussi que l'amour était beaucoup plus complexe qu'un simple physique, avantageux ou non.
— En tout cas, poursuivit son amie en fouillant dans son casier afin de retrouver son cahier, je passe encore un quatorze février célibataire. J'espère que ça aura évolué, l'année prochaine ?
— Pourquoi, une personne en particulier t'intéresse ? la questionna Charlie.
— Non. Enfin, pour l'instant !
Elle lui fit un clin d'œil complice.
Charlie soupira en replongeant dûrement dans son mutisme.
Chaque année, le jour de la Saint-Valentin, ses parents dînaient au restaurant, dans une petite pizzeria ; celle où ils s'étaient rencontrés pour la première fois.
Mais plus celle-là, ni la suivante.
Plus jamais.
*
* *
Alors que les deux filles marchaient en discutant dans un couloir, Charlie vit Jack Sincer et sa bande. Ils étaient en train de ricaner en criant des insultes à un garçon brun.
L'adolescente ne voyait pas son visage, mais il avait l'air dans un mauvais état, recroquevillé par terre.
— Qu'est ce qui se passe ? chuchota-t-elle à Emy.
— Ah, c'est juste Jack. Celui qui est au sol, c'est Scott Anderson... Il est dans notre classe, mais il n'était pas là de toute la semaine.
— Mais pourquoi ils... Pourquoi ils font ça ?
— Ils ne l'aiment pas trop, répondit juste Emy.
La brune se figea. Jack venait de donner un coup de poing à Scott, tandis que ses amis scandaient insultes sur insultes. Parmi eux se trouvaient Will et Mary.
— Mais c'est du harcèlement ! s'écria la jeune fille, horrifiée.
— C'est pas si grave ! dit Emy en roulant des yeux. Tout le monde le sait, enfin. Si c'était si...
— Mais... Tu... Bien sûr que si ! l'interrompit Charlie. Tu te rends compte que rester comme ça, sans rien faire, ça fait de vous des complices ! C'est puni par la loi ! s'indigna l'adolescente.
Elle se précipita vers la bande d'imbéciles et s'interposa.
— Arrêtez ça tout de suite, ou je vais prévenir un adulte ! menaça-t-elle.
— Tiens tiens, la petite nouvelle a déjà pris la confiance ? demanda Jack à la cantonade, un sourire railleur collé aux lèvres.
— Laissez-le tranquille, marmonna l'adolescente sans bouger d'un pouce.
Le garçon approcha son visage du sien. Charlie remarqua qu'il avait un tatouage sur le biceps.
Son haleine était fétide, un mélange de cigarette et d'alcool.
Dégoûtée, la jeune fille recula d'un pas.
— Au fait, ça doit être dur pour Will et Mary. Une personne comme toi qui vit avec eux... Ils sont en danger non ? Tu me fais pitié, pauvre fille, dit-il en se campant devant elle.
Ce fut la phrase de trop. Charlie le gifla.
Les rires cessèrent brusquement, et un atmosphère pesant prit place dans le couloir.
— Qu'est ce qui t'as pris ? s'écria Jack.
— Laisse tomber, dit Mary en lui tirant le bras. Elle est complètement cinglée, elle aime bien frapper les gens.
Charlie serra les poings, bouillonnant de rage. Elle n'y était pas allé de main morte, et l'impact du coup s'était répercuté partout dans son corps, comme une vibration. Quant à sa paume gauche, elle était brûlante et rouge vif.
— C'est ça, allez vous-en, cracha-t-elle.
Soudain, le dénommé Scott se leva et l'attrapa par le poignet.
Il la traîna sans ménagement à l'extérieur.
La jeune fille put enfin le détailler du regard. Il n'était pas très grand, il devait faire seulement quelques centimètres de plus qu'elle. Ses cheveux ébouriffés formaient des épis à l'arrière de sa tête, et il avait des yeux verts émeraudes.
Des muscles saillants tendaient son t-shirt blanc. Pas le genre de muscle qu'avaient Will ou Jack, venant d'un entraînement intensif dans une salle de sport, mais des muscles de travail.
L'adolescent aurait pu être beau, il l'était même, dans un certain sens, mais des cernes creusaient son visage et il avait l'air... Vide. Comme si la lueur qui avait sûrement demeuré en lui auparavant s'était éteinte.
Une fois à l'abri des regards, il laissa sa fureur exploser :
— Tu es vraiment folle ! Bon sang, qu'est ce qui t'es passé par la tête !
— Mais... Je voulais juste... T'aider, bredouilla Charlie, désarçonnée par cette réaction qu'elle jugeait excessive.
Scott ricana.
— M'aider ? répéta-t-il. Tu ne peux pas m'aider. Personne ne peux m'aider. On a tous un démon en nous... Je suis mon propre démon.
Sur ce, il remonta son sac sur son épaule et s'en alla.
Il lança quand même, sans se retourner :
— En tout cas, merci, à cause de toi, ça va être encore pire, maintenant !
*
* *
Charlie manqua d'arriver en retard une deuxième fois, à cause de cette conversation, en fulminant.
« Ça m'apprendra, à vouloir aider des inconnus ! » pensa-t-elle avec amertume.
Elle s'assit dans les derniers rangs, derrière Emy.
En voyant son air mécontent, celle-ci l'interrogea du regard.
— Plus tard, chuchota Charlie entre ses dents, en sortant ses affaires.
Jack, qui était assis à côté de Mary, se retourna vers l'adolescente et fit un geste obscène.
Dégoûtée, elle baissa les yeux.
À la fin du cours, la jeune fille et son amie n'échangèrent pas un mot. Charlie lui en voulait d'être partie sans l'avoir attendu lorsqu'elle était avec Scott, mais ne lui dit pas car elle culpabilisait à l'idée de faire la morale à la rousse, qui était plutôt gentille.
Elle avait néanmoins l'air détachée du monde, et donnait l'impression d'assister aux événements sans vraiment y prêter attention, ou encore ne pas se rendre compte qu'elle avait un impact sur le monde autour d'elle.
— Tu veux venir chez moi ? proposa-t-elle pour se racheter auprès de sa propre conscience.
— Euh... Oui, bien sûr ! sourit l'autre, surprise par cette proposition inattendue.
— Je pourrais te présenter mon petit frère et ma mère, si tu veux.
— D'accord, répondit Emy.
Elles s'en allèrent bras-dessus bras-dessous. Même si Charlie n'aimait pas beaucoup cette position, elle voulait faire plaisir à son amie.
Les deux filles rentrèrent à pied, dédaignant le bus.
Il faisait chaud et lourd en ce mois de février, ce qui n'était pas le cas à New York. Charlie s'efforçait de garder des vêtements amples, mais la sueur perlait sur son front et son t-shirt lui collait à la peau, à cause de l'épaisseur par dessus.
Une fois enfin arrivées, elle se débarrassa de son pull-over avec joie.
Madame Clear descendit les escaliers pour rejoindre sa fille, et eut l'air ravie lorsqu'elle vit Emy.
— Bonjour madame ! dit poliment celle-ci. Je suis la meilleure amie de Charlie.
— Bonjour ma grande, c'est super ! Vous pouvez aller à la piscine, si vous voulez. Moi, je file, je dois aller chercher Leo à l'école !
Sur ce, elle embrassa rapidement la brune et s'en alla.
Désarçonnée, l'adolescente fit signe à son amie de la suivre dans la cuisine.
« Meilleure amie ? » se demanda-t-elle.
Avant, c'était Tara. Mais maintenant ? Après tout, Emy était vraiment gentille. Résignée, elle lui servit un verre de jus d'orange et des cookies aux pépites de chocolat.
— Tu m'en veux pour ce que j'ai dit à ta mère ?
— Non, la rassura la jeune fille en se servant à son tour. J'ai juste été un peu surprise, c'est tout... Bon appétit !
— Merci, à toi aussi !
Elles allèrent finalement manger dans la jardin, car la climatisation du rez-de-chaussée était cassée et que la chaleur était insupportable.
— Un de ces jours, on devrait aller à la plage ensemble. Il y a des choses incroyables à faire, tu verras ! se réjouit la rousse.
— Bien sûr, ce serait bien !
Charlie eut un petit sourire en fermant les yeux. Elle avait enfin une amie.
•••
Hey tout le monde !
J'espère que vous allez bien ^^
Moi en tout cas, ça va super :)
Je suis vraiment, vraiment contente de vous publier ENFIN ce chapitre !
D'ailleurs, qu'en avez-vous pensé ?
Personnellement, je l'adore, j'ai beaucoup aimé l'écrire ;)
Alors, vous ne vous y attendiez pas, n'est ce pas ?
Pas très romantique, comme rencontre...
Que pensez-vous de Jack ?
Et de Scott ?
Comment imaginiez-vous la rencontre de Charlie et lui, à la base ? Pas comme ça, je suppose •~•
Vous pensez qu'Emy va un peu trop vite ? Sera-t-elle une bonne meilleure amie ?
Kiss,
Luciole
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro