𝐈𝐈
La veille de l'enterrement, madame Clear exigea que Charlie et Leo aillent dormir assez tôt, pour ne pas être fatigués le lendemain.
— Bonne nuit, Maman, dit le petit garçon. Bonne nuit, Cha'.
— Bonne nuit, dormez bien. Reposez vous, d'accord ?
— Ne t'inquiète pas, la rassura Charlie. À demain.
Elle alla dans sa chambre et s'allongea sur son lit. Les minutes passèrent, puis les heures ; mais le sommeil ne la gagnait toujours pas.
Finalement, elle attrapa son téléphone portable et l'alluma. Aussitôt, une cinquantaine de notifications s'affichèrent à l'écran. Tant de messages et d'appels manqués...
Elle finit par s'endormir en relisant ses conversations avec son père.
*
* *
Le lendemain matin, Charlie, Leo et madame Clear s'habillèrent tout de noir ; Charlie se regarda dans le miroir en refoulant ses larmes.
Elle portait robe noire, qui lui descendaient aux genoux, et ses longs cheveux bruns étaient noués en un chignon.
« Il m'aurait trouvée jolie ? » se demanda-t-elle.
La jeune fille rejoignit sa mère et son frère dans l'entrée.
— Prêts ?
— Oui...
Madame Clear prit la main de Leo et ils quittèrent l'appartement.
— Nous allons prendre le bus pour aller à l'église, expliqua celle-ci. On retrouvera vos grands-parents et Peter devant. Et puis, il y aura tous les autres... À l'intérieur.
— D'accord...
Charlie sortit ses écouteurs et vit avec horreur qu'ils étaient cassés, à force d'être pliés dans sa poche.
— Non ! cria-t-elle.
La musique était extrêmement importante à ses yeux, elle l'utilisait comme moyen d'évacuer tous ses soucis en pensant à autre chose.
— Ce n'est pas le plus important, répondit sèchement madame Clear.
« Non. Le plus important, c'est Papa... »
— Oui, désolée.
Les trois Clear montèrent dans le bus et s'assirent tout au fond. Les gens les dévisageaient sur leur passage. Charlie baissa la tête et fixa ses bottines.
Ne les regarde pas... Ne les regarde pas, ne les regarde surtout pas !
Elle agrippa l'assise de son siège et le serra de toute ses forces.
— Chérie ? dit soudain sa mère. Est-ce que tout va bien ?
Non.
— Oui, c'est juste... Je vais bien, ne t'inquiète pas.
Leo lui jeta un coup d'œil puis détourna la tête pour regarder par la fenêtre.
Quand ils arrivèrent devant l'église, les parents de Harnold, ainsi que Peter, Will et Mary, les attendaient dehors malgré la pluie.
— Désolés, il y avait beaucoup de circulation... Nous ne sommes pas en retard ? s'inquiéta madame Clear en les embrassant et en leur présentant ses condoléances.
— Non, ça n'a pas encore commencé, la rassura Peter.
— Salut, dit Mary en s'avançant vers Charlie. J'ai appris que vous alliez venir vivre avec nous. Nous allons pouvoir faire des choses incroyables ensemble, comme les meilleures amies du monde !
Sa voix dégoulinait tant d'hypocrisie que Charlie préféra ne pas répondre. Elle serra dans ses bras ses grands-parents en essayant de ne pas pleurer ; pour cela elle dut se mordre la lèvre inférieure de toutes ses forces.
— Entrons, dit Peter, la cérémonie va commencer.
Ils s'installèrent tous au premier rang, avec les autres membres de la famille Clear.
Derrière, il y avait quelques cousins éloignés et des amis d'Harnold.
Le prêtre arriva et salua tout le monde. Puis, il dit :
— Bonjour, asseyez-vous tous. En ce jour, nous allons faire en sorte qu'Harnold Clear trouve la paix en montant aux cieux, nous allons ensemble prier pour son repos éternel dans le bonheur auprès des siens qui sont déjà dans l'au-delà. Commençons.
La cérémonie débuta par des chants religieux. Charlie n'en connaissait aucun, mais essaya de se concentrer sur les paroles, bien qu'elle pensait que tout cela n'avait aucun sens, que son père n'aurait pas souhaité ce genre d'enterrement.
— À présent, annonça le prêtre, quelques membres de la famille proche d'Harnold vont nous réciter leurs discours. Je laisse d'abord la place à sa femme, Enola Clear.
Madame Clear pressa la main de ses deux enfants et monta sur l'estrade, puis elle récita le poème préféré d'Harnold.
Ce fut ensuite au tours de Charlie.
Elle prit une grande inspiration, se leva et monta. Le prêtre se poussa pour lui laisser de la place.
L'adolescente ferma les yeux une fraction de secondes, puis elle commença réciter ce discours qu'elle avait appris par cœur.
— Mon père, Harnold Clear, ne croyait pas en Dieu. Il ne croyait pas non plus aux miracles, à la résurrection ou à ce genre de "mythes", comme il disait. Mais, s'il y avait bien quelque chose en quel il croyait, et ce dur comme fer, c'était le Destin, le Destin avec un "D" majuscule tant il y croyait. Je... Je ne sais pas si il avait raison d'y croire, mais en tout cas, il disait souvent que tout ce qui nous arrivait était écrit, et que l'on ne pouvait rien y changer. Par exemple, je me souviens d'un jour, en particulier... J'avais huit ou neuf ans, et Papa et moi, nous étions déjà très proches. Je dois avouer que pour moi, il n'était pas tout le temps mon père, mais parfois mon grand frère... En tout cas, ce jour-là, nous étions allé acheter des gaufres dans une petite camionnette ambulante. Il en avait pris une au sucre, et moi au caramel beurre salé. Sauf que, alors qu'on était encore dans la rue, j'ai fait tomber ma gaufre et elle s'est émiettée sur le sol. J'étais très triste. Alors, il m'a dit : « Le Destin a voulu que je t'en rachète une ! », et nous étions retournés voir le marchand de gaufres.
Elle se crispa en sentant tous les regards tournés vers elle, mais poursuivit, en essayant de concentrer tout l'amour qu'elle avait pour son père dans ses paroles :
— Malheureusement, il n'en avait plus. Papa était horrifié à l'idée qu'il ai dit une bêtise sur le Destin, alors nous avons fait le tour de New York pour trouver exactement la même. Et ça a marché, ça a marché. Je voudrais vous dire...
Elle leva la tête pour refouler ses larmes et continua :
— Je voudrais vous dire qu'il n'était pas parfait.
« Pourquoi est-ce que je parle au passé ? » pensa-t-elle.
Toutes ses émotions étaient réunies en une seule, et elle ne se sentait pas très bien, embrouillée.
— Qu'il n'est pas parfait. Mais je l'aime, je l'aime tellement... C'est mon père. Papa, si tu entends ça... C'est le Destin qui l'a choisi, n'est-ce pas ? Je t'aime Papa. Soit heureux, où que tu sois, je pense à toi.
Elle sourit à travers son rideau de larmes et descendit l'estrade.
Les gens pleuraient encore plus, à présent.
Leo et quelques autres récitèrent aussi leurs discours, mais elle ne les écouta pas le moins du monde.
Après la cérémonie, étant donné que l'enterrement se tiendrait le lendemain, madame Clear, Leo et Charlie souhaitèrent rentrer. Ils préféraient se joindre à la famille plus tard, et rester entre eux.
*
* *
Charlie ne se souvint jamais de l'enterrement. Mais elle se souvint de son père, et cela valait tout l'or du monde.
Deux jours avant le déménagement, presque tous les cartons étaient déjà prêts.
Leo, qui n'avait que neuf ans, avait été le plus efficace et le plus rapide dans son tri. Quant à sa sœur, elle avait jeté tout ce qui lui passait sous la main sur la pile des objets à garder, sans vraiment se rendre compte de ses mouvements, perdue dans ses pensées.
— Pas très intelligent, fit remarquer le petit garçon en la voyant à la tâche.
— De quoi ? Ah, oui. C'est juste que... Je suppose que je veux tout garder... Dans mon inconscient ? tenta Charlie, prise au dépourvu.
— Je dirais plutôt que ton inconscient ne sait pas ce qu'est un tri, se moqua Leo. Je peux t'aider, si tu veux ? proposa-t-il gentiment.
L'adolescente haussa les épaules et lança une boîte de bottes sur la pile des choses à jeter.
— Tu vois, je ne garde pas tout.
Le garçon rit tristement.
— J'ai hâte d'aller en Floride, lui confia-t-il.
— Pourquoi ? Vivre avec Will et Mary, ça va être épouvantable.
— Mais non, habiter tous ensemble va nous rapprocher. Même si je suis le plus petit... Enfin, tout ça pour dire que leur maison est gigantesque ! Et la plage est juste à côté ! Ça ne te fais pas rêver, de marcher sur le sable chaud ?
— Non, répliqua Charlie. Comment peux-tu t'amuser sans Papa ?
— Ce n'est pas ça que je voulais dire, se défendit précipitamment Leo.
Madame Clear entra soudain dans la chambre de sa jeune fille, une pile de linge à la main.
— Les enfants, il ne reste que ces vêtements à mettre dans les cartons et tout sera prêt, annonça-t-elle.
— D'accord, je vais les ranger, dit Charlie.
Un peu plus tard, tous les cartons étaient fermés. Il restait juste du linge pour les deux prochains jours, des sandwichs, des salades composées et des sacs-à-dos pour le voyage du sur-lendemain.
— Je suis fière de vous, s'exclama madame Clear en embrassant sa fille sur le front.
— C'est normal, Maman, répondit celle-ci en l'étreignant.
« Je fais tout ça pour toi » se dit-elle intérieurement. « Ne sombre pas, je t'en prie. Je serais toujours là pour toi, je le jure. »
Comme si elle avait lu dans ses pensées, sa mère la serra contre elle encore plus fort.
•••
Hey tout le monde !
Comment allez-vous ?
Qu'avez-vous pensé de ce nouveau chapitre ?
Il a été fort en émotions, n'est-ce-pas ?
Je dois vous avouer qu'il a été compliqué pour moi de l'écrire, car je devais vraiment imaginer ce que cela ferait si j'étais à la place de Charlie, et elle ressent une tristesse tellement insurmontable que c'est difficile de le retranscrire à l'écrit >.<
Avez-vous aimé le discours de Charlie ?
Croyez-vous, tout comme monsieur Clear, au Destin ?
Au fait, aimez-vous cette nouvelle couverture ?
Elle est de allxciante- ! C'est magnifique n'est ce pas ? <3
Allez vite faire un tour sur son compte ;)
Kiss,
Luciole
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