7. Arrogance
" L'insolence cache beaucoup de choses. Elle cache l'essentiel. "
PDV Chiara
— Bonjour à tous, j'espère que vous avez passé une bonne semaine ! Aujourd'hui nous allons faire quelque chose d'un peu différent, pour changer, s'exclame Mr. Flynn.
Nous sommes samedi après-midi et je suis assise sur une chaise, écoutant le thérapeute parler. Ethel est toujours à côté de moi, comme d'habitude. Nous formons un véritable duo inséparable. Et comme je m'en doutais un peu, Hadrien n'est pas venu. Je ne vais pas mentir, je suis affreusement déçue qu'il ait pris cette décision. Cette décision de passer à côté de la guérison, de la possibilité de passer à autre chose.
Mais c'est son choix, j'accepte. J'accepte, même si mon âme crie défaite.
Décidément, l'heure passe beaucoup trop lentement. Vingt interminables minutes se sont écoulées depuis le début de la réunion. Mr. Flynn s'évade dans ses paroles et fait donc une très longue digression, en nous parlant de son voyage caritatif fait à l'étranger l'été dernier, de sa femme et de ses enfants. Certaines personnes sont intéressées par ses dires, quant à moi, je compte chaque seconde qui passe. À chaque seconde, j'imagine inconsciemment Hadrien, rentrant dans la salle de la même façon que la semaine dernière. Mais chaque seconde s'avère être une déception de plus.
Alors je ferme les yeux et les rouvre en direction du thérapeute, histoire de ne plus me laisser distraire.
— Il raconte quoi, là ? Chuchoté-je à Ethel en me penchant discrètement vers elle.
— Il parle de sa rencontre avec le Président, répond-elle, concentrée sur les paroles du trentenaire.
Je souffle silencieusement, tout en me recroquevillant sur ma chaise. Andrew aborde des sujets intéressants, il est vrai. Son parcours est admirable. Mais aujourd'hui, je ne suis pas du tout concentrée. L'heure promet donc d'être longue, très longue...
Soudain, quelques instants plus tard, une porte claque. Mais cette fois-ci, le son qui se répercute dans mes oreilles est bien plus violent que la dernière fois. Mon rythme cardiaque s'accélère lorsque mon regard entre en contact avec celui qui est venu hanter mes pensées, et ce, depuis une semaine. Perdue dans son regard ténébreux, je n'arrive plus à penser clairement. Mon esprit est complètement brouillé.
Mais bordel, je ne rêve pas. Il est bel et bien là.
Je retiens ma respiration quand il fait trois pas vers nous, ses yeux ne quittant pas les miens. Ses pupilles sont dilatées, et son visage est fermé.
— Finalement vous avez changé d'avis ? Lui demande Mr. Flynn.
Hadrien ne prend même pas soin de tourner la tête vers son interlocuteur. Au contraire, celui-ci continue de me fixer amèrement. Son regard me méprise, me torture silencieusement. Quant à moi, je déglutis d'une difficulté sans nom. La tension est tellement palpable qu'une boule vient se former dans mon ventre, tandis qu'une décharge électrique vient me parcourir le corps. Merde, pourquoi cet homme me fait un tel effet ? Pourquoi cet homme me terrifie autant qu'il m'embrase à travers un regard ?
— Ouais, répond-il sans aucun enthousiasme.
— Bienvenue, dans ce cas. En revanche, les retards ne seront plus tolérés.
Sur ces mots, Hadrien rompt automatiquement son contact visuel avec moi pour se tourner vers le thérapeute. Ma respiration reprend enfin un rythme plus ou moins régulier.
— Va falloir s'y habituer, rétorque-t-il d'un air dédaigneux.
— Navré mais ici, les règles sont les règles. Allez vous assoir, reprend strictement Mr. Flynn.
Hadrien grogne puis traverse la salle d'un pas nonchalant. Il s'avachit dans une chaise libre, située juste en face d'Ethel et moi. D'un geste désinvolte, il place sa jambe sur son genou puis croise les bras.
— Bon. Vu qu'il y a pleins de nouveaux, je propose que l'on fasse un rapide tour de table pour se présenter un par un, avec le nom, le prénom et l'âge, annonce Andrew.
— Et justement, on va commencer par le retardataire, surenchérit-il en pointant du menton le concerné, situé en bout de rang.
Tout le monde tourne la tête vers celui-ci, dont moi. La curiosité de savoir l'âge qu'Hadrien peut avoir me ronge depuis un certain temps. Me voilà donc ravie. Néanmoins, l'expression qu'il arbore sur son visage laisse présumer que les mots prononcés par le thérapeute ne l'enchante pas du tout.
— C'est une plaisanterie ? S'indigne Hadrien.
— Pas le moins du monde, répond Mr. Flynn d'un ton calme.
Hadrien lâche plusieurs injures avant de passer la main dans ses cheveux désordonnés. Une mèche capricieuse barre son front. Je sais qu'il se force à rester calme, là, en cet instant précis. Je sais qu'il est entrain de se contenir. Et je sais pertinemment qu'il ne se contiendra pas si j'en viens à ouvrir ma bouche.
— Hadrien Lewis, vingt-trois ans, finit-il par dire d'un air beaucoup trop détaché.
Je ne suis pas étonnée. C'est l'âge que je lui donnais. Néanmoins, se bousiller la santé avec l'alcool à un tel âge est complètement stupide. Après, bien évidement, je ne sais pas pourquoi il a décidé que les événements prennent une telle tournure.
Tout le monde s'est présenté, il ne manque plus que moi. Hadrien, qui s'amusait à faire rouler ses bagues entre ses doigts, arrête finalement son geste. Il dirige ses yeux en ma direction, d'une lenteur diabolique.
Ce dernier semble être étrangement intéressé, lui qui ne manifestait auparavant pas grand intérêt pour les autres. Je ne sais pas du tout ce qui lui passe par la tête en ce moment même, mais cela n'augure rien de bon.
Lorsque je prononce (comme demandé) mon nom, mon prénom ainsi que mon âge - d'une manière faussement tranquille, je constate que le regard d'Hadrien se fait de plus en plus pesant...Sombre. Il vaudrait mieux que je l'ignore, mais ses yeux vert émeraude appellent les miens. Je redresse alors ma tête vers lui, et l'examine avec attention. Toujours muni de ses Doc Martens, ce dernier porte un pendentif argenté affichant un arbre de vie, d'une taille assez minime. Je n'avais pas vraiment remarqué ce détail, jusqu'à maintenant. Je jette ensuite une œillade vers son visage. Ses traits sont durs, sa tête est relevée avec arrogance.
Cela paraît malsain, mais là, tout de suite, je souhaiterai avoir le pouvoir de lire dans ses pensées. Actuellement, je ne sais pas si il est entrain de s'imaginer toutes les façons dont il pourrait me tuer, ou si il cherche juste à m'intimider, avec son attitude difficile à cerner. J'aimerai vraiment savoir quelles sont ses intentions.
La réunion arrive enfin à son terme. La salle commence à se vider, les quelques dizaines de personnes du groupe se ruent vers la sortie. Je me lève, récupère mon veston auparavant posé sur le dossier de ma chaise, et l'enfile par dessus mon top bordeaux. Je libère quelques mèches de mes cheveux ondulés, qui sont restés coincés entre mes vêtements. Je vérifie ensuite si je n'ai rien oublié, puis me dirige en direction du long couloir menant vers les escaliers, sans oublier de saluer Mr. Flynn avant de partir. Je suis persuadée d'être la dernière à sortir. Pratiquement persuadée. Et Ethel doit déjà sûrement être entrain de m'attendre à l'extérieur.
Longeant le couloir, je presse calmement le pas. Mais arrivant au milieu de celui-ci, je me retrouve quelque peu désorientée lorsque les lumières de l'endroit où je me trouve s'éteignent brusquement. Il s'agit d'un automatisme ; c'est-à-dire que ces dernières arrêtent de fonctionner au bout d'un certain temps. Pour y remédier, il faudrait que j'appuie sur un petit interrupteur, situé soit à l'entrée de la salle, soit vers la cage d'escaliers. Ce système est particulièrement chiant, et à revoir.
Vu qu'il fait beaucoup trop sombre, je décide d'allumer le flash de mon portable et de continuer de marcher vers la sortie.
Bizarrement, c'est lorsque les lumières sont éteintes que je me rend compte que ce couloir est vraiment long. Mais évidemment, je ne m'en suis pas rendue compte la dernière fois, vu que je n'avais pas ce problème-là. Heureusement, car sinon je n'aurai probablement jamais revu Monsieur Ténébreux.
J'arrive enfin vers la cage d'escaliers, mon esprit est donc soulagé. Mais tout s'écroule autour de moi, lorsqu'une voix familière s'exclame mauvaisement :
— Ne crois pas que c'est grâce à toi que je reste, Chiara.
Oh bordel, d'où il sort ?
Je sursaute d'effroi, faisant ainsi tomber mon smartphone à terre. Je le récupère fébrilement, le flash aveuglant mon visage.
Mon coeur s'affole. Je croirai presque qu'il s'extrait de ma cage thoracique. Et moi qui pensais être la dernière à sortir de la réunion...Eh bien j'ai eu fortement tord.
Je dirige rapidement le flash de mon portable vers l'interrupteur, que j'allume aussitôt.
Lorsque je me retourne, je découvre un Hadrien aux traits tiraillés par la malice et l'insolence. Ce dernier s'approche lentement de moi, d'une démarche calculée, loin d'être hésitante. Mon degré de nervosité commence à atteindre les sommets. J'en perds mes mots.
— Alors si c'est pas moi...C'est qui ? Fais-je mine de demander.
— C'est pas tes affaires.
Satisfait de lui, ce dernier me devance tout en prenant soin de me bousculer d'un coup d'épaule. Mais quel culot ! Reprenant petit à petit mes esprits, je soupire d'énervement et de frustration.
— Tu sais ce qui est con dans tout ça ? Dis-je d'une voix mi-neutre, mi-sarcastique.
Je sens qu'Hadrien s'arrête inopinément à l'entente de mes mots, alors je me tourne vers lui.
— Vas-y, je suis curieux de savoir quelle saloperie tu vas encore sortir de ta bouche, répond-il d'un ton provocant.
— C'est que tu est entrain d'agir comme le dernier des connards en agissant comme tu le fais, alors qu'au fond, je sais pertinemment que tu as besoin d'aide.
Celui-ci ne réagit pas pendant quelques secondes. Puis il arque un sourcil, un rictus apparaîssant sur ses lèvres. Ses yeux s'assombrissent dangereusement.
— Quel être pathétique tu es Chiara...
Mon ventre s'affole lorsqu'il prononce mon prénom. C'est un effet que je n'arrive même pas à décrire. C'est clairement inexplicable.
— Mais sérieusement, tu es tellement naïve en croyant pouvoir me percer à jour. Quelle idiote tu fais, continue-t-il, cinglant.
— Tu es dur. T'es entrain de te voiler la face, tu ne comprends pas que l'aide dont tu as besoin te tend la main. Mais t'es tellement borné que tu fais l'aveugle.
— Je ne suis pas cet homme que tu décris. T'es à côté de la plaque. En fait, ce que t'as pas compris, c'est que j'ai besoin de l'aide de personne, fait-il en s'avancant vers moi à pas lents.
Je vais décéder sur place si il ne s'arrête pas.
Mais il ne le fait pas, puisqu'il entreprend de réduire la distance entre nous. Voyant que je ne bouge pas, il approche soudainement son visage de mon oreille, ses lèvres frôlant mon lobe. Je frissonne. Je peux sentir son souffle chaud s'abattre contre ma peau, tandis que sa respiration régulière vient faire bouger quelques mèches de mes cheveux longs. Je jurerai sentir une odeur d'alcool, une odeur de whisky nauséabonde mélangée à de l'eau de cologne. D'une voix froide, il murmure :
— Donc soit tu arrêtes ton petit manège, soit tu continues. Mais assures-toi que si tu choisis la deuxième option, je te ferai regretter ce choix jusqu'à ce que tu chiales toutes les larmes de ton corps. C'est quitte ou double, à toi de voir.
Je ne lui répond pas. Je reste complètement interdite. Je savais qu'il était violent dans ses paroles, mais pas à ce point. Hadrien rompt finalement son contact et me laisse là, toute haletante, chancelante dans chacun de mes mouvements.
Je rejoins tantôt Ethel, qui m'attendait devant le bâtiment. La pauvre, j'en ai mis du temps. Cette dernière m'observe avec attention, fronçant les sourcils.
— Euh...Ça va ? T'es toute rouge, Me demande-t-elle, soucieuse.
— Oui c'est rien, juste une bouffée de chaleur, tu sais.
Je préfère ne rien dire, plutôt que de lui révéler la vérité. Car si c'était le cas, je ne suis pas sûre qu'elle digèrerait bien les menaces faites par Hadrien. Et puis, samedi dernier, elle m'a bien fait comprendre que je ne devais pas approcher Monsieur Ténébreux. Raison de plus pour ne pas lui en parler.
— Mmh...Je disais ça parce que je viens de voir sortir Hadrien il y a pas longtemps, j'espère juste que ça n'a aucun rapport avec lui, fait-elle, perplexe.
Je nie d'un mouvement de tête, puis nous nous dirigeons vers le métro.
Si elle savait...
_____________________________________________
Hey!
Ce nouveau chapitre vous a plu?
Dites-moi ce que vous en avez pensé ici.
Que pensez-vous d'Hadrien, de son comportement?
Et est-ce judicieux pour Chiara de ne plus rien dévoiler à Ethel?
La suite au prochain chap...qui sera un point de vue d'Hadrien! Oui Oui!
See you soon♡
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro