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Chapitre deux - Nous le sommes


« Et quand le froid de l'hiver aura tout englouti, que le nombre de soleil éteints seront égaux aux grandes demeures lunaire, le second printemps de celui qui a tout perdu et de celui qui a tout commencera, les réunissant à nouveau. »

Il suffoquait. Malgré sa bouche grande ouverte, aucun air, aussi infime soit-il, ne parvenait à emplir ses poumons douloureux ou à gorger son corps de cet invisible source de vie. Ses yeux exorbités par une peur immense et incontrôlable, se mouvants dans tous les sens, perdus dans le néant le plus profond, le jeune homme se sentait lentement perdre pied. Allongé sur une surface dure qu'il ne voyait pas mais dont il sentait parfaitement les imperfections, ses omoplates étrangement nues comme brûlées par la rugosité du matériaux, il s'exhortait difficilement au calme. Tous ses sens étaient complètement anesthésiés alors qu'une panique irrépressible l'engloutissait de plus en plus.

Pourtant, parvenant aisément à franchir l'épais silence qui l'assourdissait, où seule sa respiration plus que difficile résonnait, un imperceptible son, incongru dans ces ténèbres inconnues, le figea brusquement. Ses yeux toujours grands ouverts dans le vide, son visage entièrement pétrifié par une expression de pure terreur et sa respiration bloquée dans sa gorge sèche, le jeune homme tendit l'oreille. Le bruit, d'abord comme étouffé par l'obscurité dense qui l'entourait, s'était fait de plus en plus fort, son écho rythmé et calme s'accordant étrangement avec les battements affolés de son cœur. Quelqu'un, ou quelque chose, s'approchait lentement de lui.

Toute son attention tournée vers ce son dissonant sonnant pourtant étrangement réconfortant aux oreilles du jeune homme, il ne perçut pas immédiatement la présence froide à ses côtés. Ce fut une violente décharge électrique au niveau de sa carotide – l'objet métallique glacé tout contre la peau fine de son cou le figeant un court moment – qui le ramena brusquement à l'instant présent. La douleur ne mit pas longtemps à se propager dans tout son corps, celui-ci se crispant intensément, tous ses muscles se contractant, tirant ses membres à leur maximum. Ce ne fut qu'à cet instant que l'infime partie consciente de son cerveau – curieusement préservée de la torture qu'il subissait – réalisa que les mouvements de ses poignets, ainsi que de ses chevilles, étaient entravés par d'épaisses et lourdes chaînes. Et alors que la souffrance s'intensifiait, le supplice semblant duré des heures, le jeune homme laissa échapper un unique cri d'entre ses lèvres sèches au goût ferreux.

- NAMJOON !

Les yeux grands ouverts sur le plafond bas de son petit studio, le regard flou et le souffle rapide, Yoongi venait de se réveiller brusquement. Dans le silence de l'étroite pièce, seul le bruit étouffé des rues animées du centre ville de Daegu au petit matin se faisait entendre, les secondes semblant alors durer des heures. Le jeune homme avait beaucoup de mal à remettre en ordre ses idées, son cerveau encore légèrement englouti par ce monde onirique plein d'incompréhension et de douleur. Il était en sueur entre les draps trop chauds de son lit. Une goutte humide coulait lentement le long de sa tempe, suivait la courbure de sa mâchoire avant de finir sa course dans le creux de son cou, mouillant un peu plus ses draps clairs.

Pourtant, il n'avait que faire de la chaleur étrangement élevée de son corps ou de la moiteur de sa peau. L'unique chose qui attirait assez son attention pour le sortir plus rapidement de son état d'hébétude était l'agitation de son loup. La peur incompréhensible qui tordait son estomac le faisait prendre légèrement le pas sur sa condition humaine, la longueur bien trop longue de ses ongles et de ses canines en témoignaient parfaitement. Il fallait qu'il se calme avant qu'il ne déchire sa parure de lit toute neuve. Cependant, alors qu'il allait repousser comme il le pouvait sa couette épaisse à présent légèrement humide, se dégageant enfin de son lit trop chaud, le jeune homme se figea.

Sa lèvre supérieure légèrement relevée, dévoilant ses canines toujours bien trop longues, le jeune homme tourna vivement sa tête vers le fond de son petit studio, un long frisson parcourant toute la longueur de sa colonne vertébrale. Quelqu'un l'observait. Pourtant, là, dans le coin opposé de son lit, il n'y avait rien. Tout son corps réagissait, ses muscles se tendant violemment sous la fine peau de son dos, alors qu'à l'intérieur de lui, il sentait son loup s'agitait un peu plus tant la peur était profonde. Seulement, ce n'était qu'une mauvaise impression. Aucune présence invisible et malfaisante ne se tenait là. Il était seul, tout seul dans son minuscule appartement, alors que seul le bruit extérieur, se mélangeant aisément avec sa respiration rapide, résonnait dans le silence absolu de la pièce.

Secouant doucement sa tête de droite à gauche, Yoongi laissa un petit rictus moqueur étirer le coin de ses lèvres alors qu'il levait les yeux vers le plafond bas de son logement. Son cauchemar, dont seulement quelques brides lui revenaient en mémoire, lui avait apparemment laissé quelques fugaces séquelles. Soufflant longuement, laissant l'air chaud de ses poumons quitter son corps tendu, le jeune homme ramena ses jambes à lui, s'installant confortablement en tailleur sur son lit aux draps défaits. Les yeux fermés et les mains posées sur ses frêles genoux mis à nu par son short de nuit, Yoongi se concentra uniquement sur sa respiration, expirant et inspirant dans un rythme lent. Depuis des années, le jeune homme avait instauré de longues séances matinales et quotidiennes de méditation, ces instants hors du temps devenant le seul moyen de calmer son loup facilement agité. Ainsi, comme souvent, au bout d'à peine quelques secondes, ses canines bien trop pointues reprirent une longueur humaine alors que ses griffes animales laissaient à nouveau place à des ongles courts et ronds.

Ouvrant à nouveau les yeux, laissant son regard parcourir rapidement sa pièce de vie, s'assurant une dernière fois que tout était bien en place, Yoongi finit par se lever, délaissant sans un regard en arrière son lit aux draps à présent froids. Récupérant au passage sa pile de vêtements pour la journée, le jeune homme partit s'enfermer dans sa petite salle de bain avant d'en ressortir quelques minutes plus tard, lavé et habillé. Comme à son habitude, il était exclusivement vêtu de noir, ses vêtements contrastant alors presque violemment avec la couleur opaline de sa peau et le blond platine de ses fins cheveux. Sa tenue était composée d'une simple chemise, presque entièrement engloutie sous un long et large pull en laine épaisse – si large qu'il tombait sur l'une de ses épaules et recouvrait en partie ses cuisses –, et d'un jean usé et troué aux genoux. Ces vêtements comptaient parmi ses favoris tant ils étaient confortable et passe-partout, et c'était exactement ce que le jeune homme recherchait : la discrétion.

Prenant à peine le temps d'avaler un grand verre d'eau, le petit-déjeuner étant une étape qu'il avait toujours eu l'habitude de sauter, Yoongi mit rapidement ses chaussures – des Doc Martens si abîmées qu'il se demandait régulièrement quelle magie pouvait bien les faire tenir en un seul morceau – avant de sortir de chez lui, sa veste noire rapidement enfilée, sa besace pour ses cours en équilibre sur son épaule droite et son vieux téléphone portable dans sa main gauche. Jetant un vif coup d'œil à l'heure – 8h28 –, le jeune homme ralentit brusquement sa foulée : il était bien trop en avance. Son unique cours de la journée ne commençant qu'une heure plus tard et habitant à seulement quelques mètres de l'université, il pouvait se permettre de flâner un peu dans les rues déjà animées de son quartier avant de rejoindre les strapontins inconfortables de son premier cours de la matinée. Après tout, il ne devait rejoindre personne devant les larges grilles de la faculté. Personne ne l'attendait jamais, ni là-bas ni chez lui d'ailleurs. Il était seul.

Cela faisait bientôt quatorze ans que Yoongi avait perdu son père et sa mère, et bientôt quatre ans qu'il était réellement devenu orphelin, sa tante étant décédée après une longue et douloureuse lutte contre un cancer incurable. Il se souvenait encore de son premier jour dans cette nouvelle ville, près de cette femme qui lui était quasiment étrangère, ne l'ayant aperçu qu'une ou deux fois durant les dix premières années de sa vie, pendant des réunions de famille bien trop ennuyantes pour le petit garçon qu'il était alors. Le jour de son arrivée dans la petite maison de sa tante, celle-ci lui avait tendrement souris avant de lui montrer sa nouvelle chambre et de le laissait seul. Elle, plus que quiconque, pouvait comprendre le besoin de solitude que le jeune Yoongi réclamait silencieusement. Quelques années auparavant, la jeune sœur de sa mère avait perdue son mari dans un accident de la route, violemment arraché à la vie après seulement un an d'un merveilleux et tendre mariage. Avec la perte de sa sœur aînée, elle avait alors dû à nouveau faire face à cette douleur immense. Ainsi, ils avaient fait front commun, acceptant comme ils le pouvait cette dure réalité : ils n'avaient plus qu'eux deux.

S'arrêtant devant le disquaire du bas de sa rue, ses pas l'y menant presque par automatisme, Yoongi laissa un tendre sourire ourler discrètement ses lèvres. La petite boutique à la légère odeur de poussière était l'endroit préféré de feu sa tante, son échoppe favorite parmi le nombre incalculable que la grande ville de Daegu comptait. Ils avaient passé des heures et des heures à flâner entre l'étroitesse de ses multiples rayonnages, à chercher de vieux titres désespérément tout en se moquant des nouveautés. Sur ce point là, sa tante et lui avaient toujours été en parfait accord : rien au monde ne valait le bon vieux rock américain des années soixante sur tourne-disque. Rien. Alors, caressant du bout des doigts la vitre froide du magasin encore clos, des centaines de souvenirs emplis du rire cristallin de sa tante en tête, Yoongi tourna les talons, ses yeux un peu plus perdus dans le vague.

C'est dans cet état second, tout son être entièrement plongé dans ses souvenirs, que le jeune homme parvînt légèrement en avance à l'université. La plupart des étudiants étant en cours, Yoongi traversa les immenses bâtiments pratiquement vide de vie dans un silence presque religieux, ses yeux baissés vers le sol, sa longue silhouette inconsciemment recroquevillée sur elle-même. Seules ses chaussures attiraient le regard des quelques personnes qu'il croisait, ses vieilles Doc Martens claquant fortement contre le vieux linoléum des interminables couloirs. Ce fut finalement au bout de quelques mètres que le jeune homme parvînt à destination. Il eut alors l'agréable surprise de constater avec bonheur que le petit amphithéâtre dans lequel son cours devait se dérouler était vide, lui permettant ainsi de s'installer tranquillement dans les rangés les plus hautes, choisissant la place la plus excentrée. Ne pas se faire remarquer, ne pas attirer l'attention, voilà ce qu'il désirait le plus. Et depuis quatre ans qu'il fréquentait cette grande université, il avait brillamment obtenu la tranquillité qu'il recherchait tant.

Son cours ne commença qu'une vingtaine de minutes plus tard alors que plus de la moitié des strapontins de l'amphithéâtre étaient vides d'étudiants. Levant vivement les yeux au ciel devant le manque de sérieux de certains de ses camarades de classe – camarades avec qui il n'avait jamais vraiment échangé un mot, mais avec qui il partageait les heures de cours depuis sa première année universitaire –, Yoongi se concentra sur la voix posée et claire du jeune professeur présent sur l'estrade. Ainsi, après trois heures, quand celui-ci annonça la fin de son cours, le jeune homme toujours aussi silencieux au fond de la salle se fit la réflexion que les heures avait filé à vitesse de la lumière, le sujet lui plaisant grandement. Étant son unique cours de la journée, Yoongi rangea alors lentement ses affaires, laissant les quelques étudiants présents quitter la salle avant lui.

Il était plus de midi et demi quand Yoongi sortit du grand bâtiment, le soleil étrangement fort du mois de novembre tapant fortement contre les toitures des hauts édifices universitaires. Fronçant doucement ses yeux – la luminosité de l'astre brûlant étant presque aveuglante après ces longues heures passées dans une semi-pénombre –, le jeune homme se dirigea prestement vers les larges grilles, impatient de retrouver le calme de son petit logement. Pourtant, avant qu'il n'atteigne la sortie, un petit attroupement près des panneaux d'affichage du large campus attira son attention. Sans qu'il n'y réfléchisse à deux fois, le jeune homme pourtant discret et peu au fait des derniers ragots et autres activités de l'université se dirigea vers le groupe bruyant que formaient les nombreux étudiants. Une large affiche aux couleurs sombres – un nuancier de rouges et de noir – déclamait dans une typographie parodiant les anciennes écritures gothiques européennes l'organisation d'un second Halloween, et ce la semaine suivante, à l'occasion de la prochaine lune rouge. À la lecture de ses mots, alors qu'autour de lui les étudiants s'excitaient, discutant déjà de leurs prochains costumes ridicules, le ventre de Yoongi se tordit violemment sans qu'il ne se l'explique réellement.

- Min Yoongi ?

Se détournant alors du tableau d'affichage, les sourcils légèrement froncés par l'incompréhension, Yoongi planta son regard interrogateur dans celui de l'inconnu qui se tenait tranquillement derrière lui, un petit sourire aux lèvres. Il ne fallut qu'une demi-seconde au jeune homme pour qu'une foule de souvenirs où se mélangeaient d'innombrables sentiments n'envahissent son esprit. Les yeux largement écarquillés, son cœur tambourinant violemment dans sa cage thoracique, Yoongi sut que l'inconnu n'en était finalement pas un.

- Jin ... Kim Seokjin ?

- Bonjour Yoongi, ça faisait longtemps, n'est ce pas ?

***

Les trois heures de voyage en voiture jusqu'à Séoul avaient semblé durer des jours aux yeux de Yoongi. Malgré le confort de la berline toute équipée du plus âgé et de la douceur de sa voix quand celui-ci essayait d'engager la conversation, le plus jeune était resté assez silencieux, légèrement prostré dans le siège avant du véhicule, son regard perdu sur le paysage qui défilait rapidement à l'extérieur. Il était mal à l'aise et Seokjin l'avait rapidement compris. Il avait à peine entendu la voix de son cadet – bien plus grave qu'il ne l'aurait imaginé – répondre poliment à ses questions de courtoisie au début du trajet avant que celui-ci ne se mure dans un profond silence. Soupirant doucement, alors que les premiers immeubles de la capitale faisaient leur apparition au loin, ses mains légèrement crispées sur son volant en cuir, le plus âgé se détourna un moment de la route pour poser ses yeux sur le visage impassible de Yoongi.

- Dis-moi Yoongi, pourquoi ... Pourquoi as-tu accepté de me suivre, sans même poser de question ?

L'interrogé laissa lui échapper un imperceptible soupir à l'entente de la question de son aîné, lui répondant alors d'une voix lasse, sans pour autant se détourner du paysage qu'il redécouvrait presque avec curiosité.

- Je t'ai suivi parce que je n'ai pas oublié où est ma place Seokjin. Je suis, et même après toutes ces années loin d'ici, un membre à part entière de cette meute. Alors, quand on me somme de venir, je ne peux qu'obéir, n'est ce pas ? Surtout si c'est un membre de la famille dirigeante qui me l'ordonne.

- Je ne te l'ai pas ordonné Yoongi, je te l'ai demandé, nuance.

- Est-ce une réelle différence ?

Seokjin ne répondit rien, ses yeux à nouveau braqués sur la route, ses sourcils légèrement froncés. Il ne pouvait s'empêcher d'analyser les dernières heures grandement surprenantes et déconcertantes passées auprès son cadet. Après quatorze années vécues loin l'un de l'autre, ils étaient devenus de véritables étrangers, et cette vérité lui explosait presque violemment au visage alors que la voix lasse de Yoongi semblait encore résonner entre eux. Il était loin le temps où le plus jeune, un grand sourire aux lèvres, sa gencive du haut légèrement visible, lui courait après pour qu'il soit à son tour le chat dans leur jeu interminable, son rire clair s'envolant dans l'air humide d'un mois de juillet beaucoup trop chaud. Pourtant, comment lui en vouloir ? Seokjin était bien conscient de la chance qu'il avait : contrairement à Yoongi, il n'avait pas tout perdu. Lançant alors un dernier coup d'œil au jeune taiseux près de lui, le plus âgé se concentra à nouveau sur la route, comblant le silence légèrement électrique en augmentant le volume sonore de son autoradio dernier cri.

La fin du trajet en voiture ne dura qu'une petite demi-heure. Les arrondissements riches et animés, aux immeubles de hauts standings, laissèrent rapidement place à des quartiers bien plus paisibles. Se redressant alors imperceptiblement dans son siège en cuir, Yoongi observa avec surprise les petites maisons qui défilaient devant ses yeux. Le quartier de son enfance n'avait pratiquement pas changé, si ce n'était une ou deux nouvelles maisons par-ci par-là, des façades aux couleurs plus étincelantes ou au contraire plus en désuétudes, ou bien encore le terrain de jeu qui s'était vu compléter par un toboggan alors inexistant à son époque. C'était à la fois réconfortant, comme la fin d'une errance bien trop longue, et à la fois étrange de se retrouvait à nouveau dans ce décors si familier. Et en quelques secondes, alors que la voiture de son aîné ralentissait, le manque de ses parents se fit plus présent, faisant grimacer imperceptiblement le jeune homme.

Quand le véhicule s'arrêta finalement pour la dernière fois, et que Seokjin éteignit le moteur, Yoongi réalisa enfin qu'il se trouvait dans le quartier de sa meute, garé devant la grande et ancestrale demeure de la famille Kim. À ces yeux, elle n'avait pratiquement pas changé, les quelques marques du temps passé lui donnant encore un peu plus de charme. Au moins ici, contrairement à ce qui s'était opéré involontairement dans son esprit et dont il prenait enfin conscience, le temps ne s'était pas arrêté, et la vie avait reprit ses droits après la catastrophe qui s'était abattue sur leur grande et puissante famille.

Le jeune homme finit pourtant par sortir lentement de la confortable berline, Seokjin lui ayant ouvert la portière sans qu'il ne s'en aperçoive, trop perdu dans ses pensées où tourbillonnaient de lointains souvenirs. Le vent plus frais de la capitale, contrastant brusquement avec la chaleur bienfaisante de l'habitacle tout confort de la voiture, le fit doucement frissonner. Refermant vivement les pans ouverts de sa veste sombre finalement bien trop fine, Yoongi laissa son regard curieux analyser les quelques fissures visibles qui couraient le long de la façade de la grande bâtisse. Seokjin le laissa faire un petit instant, l'observant à la dérobée, un petit sourire aux lèvres, avant de l'apostropher gentiment.

- Aller, suis-moi.

La voix douce du plus âgé le ramenant calmement sur terre, Yoongi ne fit qu'acquiescer tout en le suivant sur le même petit chemin de cailloux blancs de son enfance, ses yeux toujours un peu perdus sur cet environnement à la fois si familier et pourtant si déstabilisant. Et quand il pénétra enfin à l'intérieur de l'ancienne maison, enlevant par automatisme ses vieilles chaussures, l'impression étrange d'être à la fois chez lui tout en y étant étranger se renforça. Il avait tant de souvenirs entre ces murs, les fissures n'étant alors plus les seules à lézarder sur les vieilles parois, les nombreux éclats de rires qui remplissaient ses souvenirs d'enfance y courant également.

Ainsi, au bout du long couloir d'entrée, où seules quelques photos de plus venaient orner les murs – photos que Yoongi ne prit d'ailleurs pas la peine de regarder –, se trouvait toujours la grande pièce centrale. Quand il passa le pas de la double porte, ce fut comme si le jeune homme de vingt-quatre ans laissait à nouveau place au petit garçon timide d'une dizaine d'années qu'il avait été. Les yeux pour la énième fois perdus dans le grand espace de la pièce, il se rappelait y avoir souvent accompagné ses parents, ceux-ci venant régulièrement rendre visite au couple dirigeant de la meute. L'enfant qu'il était alors avait passé le plus clair de son temps les yeux perdus par delà la grande baie vitrée qui composait tout un pan de mur, son regard curieux irrémédiablement attiré par la végétation mouvante du grand jardin qu'il ne faisait qu'apercevoir. Seulement, cette attirance pour l'extérieur ne dura pas longtemps, disparaissant au profit d'une toute autre obsession : l'héritier de la grande famille Kim.

- Seokjin, je viens de voir ta voiture. Nous ne t'attendions pas avant ce soir, je– ...

À l'entente de ces mots prononcés par une voix douce et féminine, Yoongi se détourna vivement de la grande baie vitrée et de son paysage automnale qui l'avaient comme durant son enfance rapidement absorbés. Bien avant de leur faire face, et même après toutes ces années loin d'eux, le jeune homme avait immédiatement senti les auras puissantes de l'Alpha Kim et de son épouse. Baissant alors instinctivement la tête, son menton touchant pratiquement son torse, le jeune oméga se mit instantanément à genoux, sa nuque largement découverte en signe de soumission, retenant de justesse un gémissement plaintif. À l'intérieur de lui, son loup était grandement chamboulé.

- Mon oncle, ma tante, je– ...

- Yoongi ... Min Yoongi ... Est-ce bien toi ?

La voix pleine de tendresse de Mme Kim, aux accents légèrement vacillants, coupa sans cérémonie Seokjin dans ses explications. La femme s'était dans le même temps avancée doucement vers la silhouette courbée à même le sol alors que son neveu s'était silencieusement glissé près de son oncle. L'homme, silencieux et attentif, observait avec curiosité les mouvements de son épouse et les réactions du jeune Min. Sa compagne avait en effet fait se relever Yoongi d'une douce pression sur l'épaule, un sourire rassurant aux lèvres, alors que celui-ci, les joues imperceptiblement rougies, laissait son regard baissé vers le sol, toujours dans un léger signe de soumission. Il n'était après tout qu'un oméga entouré de deux bêtas et de son Alpha ; Il ne devait pas oublier où était sa place, surtout à cet instant.

- Min Yoongi, sait-tu pourquoi nous t'avons fait venir ?

La voix franche de l'Alpha Kim avait résonné dans la pièce, coupant aisément le monologue de bienvenue de son épouse et les réponses monosyllabiques du jeune homme toujours aussi mal à l'aise. N'osant également poser son regard sur l'homme qui venait de prendre la parole, le jeune oméga secoua négativement la tête de droite à gauche, sa lèvre inférieure mordue par ses canines pointues. Un peu plus loin, se faisant discret, Seokjin observait la scène, légèrement fasciné par le contraste entre le Yoongi qu'il avait eu dans sa voiture, légèrement plus véhément malgré leur différence de statut, et le Yoongi en présence du couple Alpha. Cependant, alors que son oncle allait reprendre la parole, s'étant lentement avancé vers le duo que formaient son épouse et l'oméga toujours près d'elle, le bruit de la porte d'entrée, rapidement ouverte et refermée, attira vivement son regard et celui des autres.

- Père, Mère, vous êtes là ? J'ai reçu un message de Jin me disant de venir le plus vite possi– ...

À l'entrée de la pièce, et face à la scène qu'il avait sous le yeux, Namjoon s'était figé, les yeux écarquillés et la bouche légèrement ouverte. Son regard avait voyagé d'un bout à l'autre de la pièce, s'étant arrêté brièvement sur les visages de ses parents et de son cousin, avant de finalement s'ancrer dans les surprenant yeux d'un noir profond appartenant à un être qu'il n'avait pas revu depuis près de quatorze ans.

- Yoongi ? C'est bien toi ?

Se tenant toujours à l'entrée de la pièce, comme immobilisé par cette apparition, Namjoon ne pouvait détacher ses yeux de son aîné, débout à seulement quelques mètres de lui. Perdu dans ses nombreuses pensées, la tête douloureuse sous le trop plein d'informations, le jeune homme se permettait pourtant de détailler du coin de l'œil l'oméga silencieux. Il appréciait peut-être plus qu'il ne le devrait la façon dont la mince silhouette de son aîné était mise en avant par ces vêtements parfaitement coupés ou la couleur toujours aussi fascinante de sa peau ivoirine. De son côté également, Yoongi n'était pas en reste. Une fois la surprise passée de voir ressurgir dans sa vie le plus jeune, il s'était lui aussi mis à le détailler furtivement. Il fallait dire qu'avec sa tenue de travail négligée et poussiéreuse, ses cheveux châtains débraillés et sa peau mate légèrement humide de transpiration, Kim Namjoon était des plus attirants.

Les deux jeunes hommes, alors entièrement absorbés dans leur appréciation respective, ne virent pas les regards rassurés que les parents du jeune alpha se lancèrent, avant que son père ne s'avance au milieu de la pièce, attirant enfin leur attention.

- Yoongi, tu n'es pas sans savoir que notre meute s'est toujours laissée guider par les étoiles et par notre Mère la Lune, n'est ce pas ?

Le désigné acquiesça, ses yeux une nouvelle fois braqués vers le sol et ses mains à présent légèrement moites. La présence écrasante de l'Alpha près de lui le rendait fébrile alors qu'en face, Namjoon avait enfin bougé, rejoignant lentement son père au milieu de la large pièce.

- Il me semble que tu es, comme tous les membres de la meute, au courant de l'ancestrale prophétie qui guide également nos choix, n'est ce pas ? Et relève la tête s'il te plaît Yoongi.

- O– ... Oui.

Le jeune homme avait laissé un petit filet de voix s'échappait d'entre ses fines lèvres imperceptiblement tremblantes alors qu'il avait, comme le lui avait ordonné son Alpha, relevé vivement la tête.

- Sais-tu ce que la prophétie dit ?

- Je ... Un ... Je sais qu'un Alpha et un Oméga désignés par elle seront liés pour inverser le pouvoir actuel. Ensemble, ils réduiront à néant les inégalités dont notre peuple est victime.

- Exactement. Et sais-tu qui sont l'Alpha et l'Oméga désignés ?

Détournant ses yeux de ceux, sérieux et froids, de l'homme face à lui, Yoongi chercha du regard celui de Namjoon, alors curieusement braqué vers le sol de la demeure familiale. Le malaise de Yoongi ne fit que se renforcer un peu plus quand il se rendit compte que l'épouse de l'Alpha, ainsi que Seokjin, avaient discrètement disparu.

- Je ... Je ne sais pas, je ... Namjoon ... Il est le plus à même d'être l'Alpha désigné, si la prophétie doit se réaliser de nos jours ...

- C'est une nouvelle fois exacte. Et l'Oméga, Yoongi ? Qui serait l'Oméga désigné par la prophétie ?

- L'Oméga ? Je ne ... Je–...

Yoongi avait inconsciemment reculé dans la pièce tout au long de l'échange alors que sa tête s'était mise à se mouvoir lentement de droite à gauche, dans un signe de dénégation futile. Et alors qu'il cherchait vaguement une inutile échappatoire à cet étrange interrogatoire, le jeune homme finit enfin par rencontrer le regard de Namjoon. L'acceptation, la tristesse, la colère ou bien encore le désire se mêlaient et tourbillonnaient dans les profondeurs de ses pupilles à présent bien plus sombres et ancrés presque durement dans les siennes.

- Min Yoongi, tu es l'Oméga de la prophétie.

- Non, je ne ... Non.

- Tu l'es tout comme Namjoon est l'Alpha de la prophétie. Vous avez tous les deux été désignés par notre Mère la Lune bien avant votre naissance. Les signes sont là, et tu le sais. Votre arrivée dans notre monde durant deux éclipses solaires ou vos marques de naissances au niveau de vos omoplates n'en sont que de visibles témoignages.

- Non, ça ne veut rien dire, ce n'est pa– ...

- Nous le sommes, Yoongi.

La voix douce de Namjoon, pleine d'une vérité incontestable, avait immédiatement mis un terme à la débâcle de Yoongi. Son regard perdu plongé dans celui, plus déterminé que précédemment, du jeune alpha, le plus âgé su qu'il n'y avait rien de plus à dire ou à faire.

- Nous sommes l'Alpha et l'Oméga de la prophétie, désignés par les étoiles comme les salvateurs de notre peuple. Il est à présent de notre devoir de tout faire pour être à la hauteur de ce pour quoi la Lune Mère nous a fait naître dans ce monde. Il faut nous soumettre. Nous n'avons pas le choix Yoongi.

- Nous ne l'avons jamais eu, n'est ce pas ?

Ses yeux toujours ancrés dans ceux de son aîné, Namjoon acquiesça doucement, un rictus triste étirant ses lèvres alors que le murmure du jeune oméga résonnait faiblement dans la pièce. Au moins, ils étaient deux.

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