Prologue
— Et c'est ainsi que le prince sauva la princesse, puis qu'ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants.
Clark referma le livre et le posa sur la table de chevet. Il retira ses lunettes pour se frotter les yeux, sa vision se faisant encore plus trouble que d'habitude. Lire à la simple lueur d'une chandelle lui causait toujours de légers maux de tête, mais la lecture de ce conte l'avait particulièrement fatigué.
— C'est nul.
Il leva la tête vers le petit garçon ayant prononcé ces mots. L'histoire qu'il venait de lui raconter était censée l'endormir, or Marcus paraissait on ne peut plus éveillé. Assis dans son lit, il croisait les bras avec fermeté et affichait un adorable air renfrogné.
— Pourquoi c'est toujours prince qui sauve princesse ? demanda-t-il de sa petite voix fluette.
Pris de court, Clark cligna les paupières et se gratta l'arrière de la tête.
— Eh bien... Bonne question.
Il remit ses lunettes, puis examina le livre pour enfants avec perplexité. Il était tard et il ne rêvait que d'une chose : essayer de dormir avant la journée du lendemain, qui s'annonçait déjà peu reposante. Toutefois, passer du temps avec son fils était bien plus important que ses heures de sommeil.
— Moi aussi je suis prince, reprit Marcus. Ça veut dire qu'un jour je devrai sauver princesse ?
— Pas forcément. J'espère que tu n'auras pas à le faire, en tout cas...
Le petit garçon demeura silencieux un instant, ses yeux d'un bleu extrêmement clair perdus sur sa couverture. Ses iris étaient de la même teinte que ceux de son père, tout comme ses cheveux bruns tirant sur le noir.
— Et qui sauve prince ? s'enquit-il en reportant son attention sur Clark.
Ce dernier ne saisit pas immédiatement et lui demanda de répéter. Lorsqu'il comprit ce que voulait dire Marcus, il ne sut quoi répondre. En tant que Grand Alpha, il aurait pourtant été bien placé pour parler, cependant... Il n'en avait pas la moindre idée.
Personne ne l'avait jamais vraiment sauvé, lui.
— Maman te dirait qu'il faut savoir compter sur toi-même, déclara-t-il finalement. Et elle a plutôt raison. Mais dans l'immédiat, elle et moi serons toujours là pour sauver notre petit prince.
Il lui lança un clin d'oeil et Marcus sourit de toutes ses petites dents de lait.
Afin de lui faire oublier cette histoire de princes et de princesses complètement idiote, Clark changea de sujet. Il lui demanda de lui relater son après-midi passé avec sa gouvernante, jusqu'à ce que le garçon baille trois fois d'affilée.
— Je vais te laisser dormir, décréta-t-il en faisant mine de se lever. Il est tard et...
Les minuscules doigts de Marcus agrippèrent aussitôt la manche de sa veste.
— Non ! Maman est pas encore venue, je peux pas dormir !
Clark consulta sa montre à gousset et écarquilla les yeux face à l'heure tardive. Anya aurait dû les avoir rejoints depuis longtemps.
— Elle a sûrement été retenue par quelque chose, supposa-t-il en songeant à une personne en particulier. Elle doit penser que tu dors déjà et n'a pas osé venir.
À peine eut-il terminé sa phrase que de discrets coups se firent entendre à la porte.
— Elle est là ! s'écria Marcus.
Le battant s'ouvrit, mais ce ne fut pas Anya qui apparut dans l'embrasure. Il s'agissait d'un valet, dont la veste rouge était étrangement mal boutonnée.
— Toutes mes excuses pour ce dérangement, monsieur. Je... J'ai à vous parler.
Sa voix tremblante et sa mine grave inquiétèrent le Grand Alpha, qui lui fit signe de continuer.
— C'est... C'est à propos de votre femme.
Son regard se porta brièvement sur Marcus. Clark crut deviner de quoi il voulait s'entretenir, et jugea préférable de poursuivre cette conversation loin des oreilles de son fils. Il lui souhaita une bonne nuit et l'embrassa sur la tempe, puis s'assura que son lit était bien bordé. Le petit garçon parut déçu, mais sa fatigue le poussa à se coucher.
Une fois dans le couloir, Clark ferma doucement la porte de la chambre.
— Si c'est par rapport au divorce, commença-t-il à l'adresse du valet, confirmez-lui que tout est sous contrôle. Les papiers seront signés demain matin et l'information sera rendue publique au cours de l'après-midi. Les messagers sont...
Il s'interrompit face au regard fuyant du domestique. Celui-ci resta muet quelques instants, avant d'entamer un récit presque incompréhensible. Il buta tant de fois sur les mots que Clark se demanda s'il n'était pas ivre. Néanmoins, lorsqu'il réalisa qu'il ne plaisantait pas, un vertige le gagna. Il s'appuya contre l'un des murs et laissa le valet lui donner tous les détails qu'il pouvait.
Au bout d'un moment, le domestique n'eut plus rien à dire. Un silence insoutenable s'installa, pendant lequel Clark se sentait incapable de parler.
— Ro... Rowan est au courant ? finit-il par s'enquérir d'une voix cassée.
Un hochement de tête confirma ses craintes.
Il serra les poings jusqu'à faire craquer ses os, dans une vaine tentative de se réveiller. Il avait forcément dû s'endormir en lisant l'histoire pour son fils, et tout ceci n'était qu'un cauchemar.
Ce qu'il venait d'entendre ne pouvait pas être réel.
— Devons-nous prévenir monsieur Marcus ? osa l'interroger le valet.
Clark tressaillit et se força à respirer afin de calmer ses tremblements.
— Non. Au contraire, veillez à ce que personne ne vienne l'embêter et ne circule dans ce couloir.
Le palais allait rapidement devenir sens dessus dessous, si ce n'était pas déjà le cas. Face au regard perplexe de son interlocuteur, il ajouta :
— C'est la dernière nuit qu'il passe en croyant que sa mère est toujours en vie. Je... J'irai lui parler demain matin.
Le domestique acquiesça, puis à la demande de son maître, s'éclipsa.
Clark aurait sûrement dû le suivre pour rejoindre l'affolement qui régnait quelques étages plus bas. Cependant, il savait qu'une fois pris dans ce tumulte, il n'aurait plus une seconde de répit.
Il s'autorisa une minute de solitude, adossé à ce mur sans lequel il se serait effondré.
Lorsque Marcus était né, il s'était promis que son enfance serait moins tourmentée que la sienne. Il avait tout fait pour le protéger des dangers qui le guettaient, quitte à commettre des choses dont il ne se pensait pas capable. Or voilà qu'une part de son petit garçon allait se briser à jamais, alors qu'il avait tout juste trois ans.
Clark eut la soudaine impression d'être l'un de ces stupides personnages de conte : prisonnier d'une histoire vieille comme le monde, vouée à se répéter.
Et la dernière fois que cette histoire s'était jouée, il n'en avait pas du tout aimé la fin...
Note de l'auteure :
Coucou tout le monde ! 💖
Déjà, merci beaucoup à vous d'avoir commencé cette histoire ! Elle trotte dans ma tête depuis un petit moment maintenant, donc je suis trop contente d'enfin pouvoir la commencer, j'espère vraiment qu'elle vous plaira !
L'intrigue se déroulant 21 ans avant Cendres de Lune et Sang de Rose, il est tout à fait possible de lire cette histoire sans avoir lu les autres tomes ! Le fonctionnement de l'univers sera expliqué ici aussi, mais si vous êtes perdus à n'importe quel moment, n'hésitez pas à me poser des questions ! Ne vous gênez aussi surtout pas si vous avez des remarques, des conseils, si vous repérez des fautes... ^^
On se retrouve normalement samedi prochain pour le premier chapitre ! 😘❤️
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