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16. L'arène


(1200 mots)

Le pouvoir de l'empire est indissociable du spectacle.
Un empire qui ne sait plus se mettre en scène sera amené à disparaître.
Comment cela fonctionne-t-il ?
De nombreux traités ont été écrits sur la question.

Caelus, Notes


C'était une mer humaine, dont les eaux s'écartaient au passage de Catius. Des eaux blanches, car telle était la couleur des victoires. Le peuple d'Amor jetait à son passage de pleines brassées de pétales qui tourbillonnaient à ses pieds, alourdis par l'air matinal. Après quelques instants, le consul referma sa main sur son glaive, le seul objet dans sa tenue qui avait vraiment connu le combat. La lame de bronze, affûtée par les artisans du Sénat, resplendit d'un éclat rougeoyant tandis qu'il saluait la foule, comme s'il lui offrait le sang des ennemis de l'empire.

Catius ne pouvait pas se permettre de regarder en arrière, mais il entendait les vivats de la foule. Tivan et son groupe cheminait après lui. Les honneurs faits au vainqueur se muaient en haine du vaincu ; sur ce sol encore couvert de fleurs, on jetait des pierres aux prisonniers, essayant d'arracher un ou deux gémissements à ces hommes sales, affamés et hagards, déjà couverts de blessures.

Que sommes-nous ? songea Catius, face à ces visages souriants qui se transformaient, sitôt hors de son regard, en monstres de cruauté.

Le chemin lui parut interminable. Lorsque l'arène se rapprocha, les gardes prétoriens se firent plus nombreux pour contenir la foule. On lui présenta le chef de cérémonie, dont il oublia le nom dans la seconde. Quelque chose avait capté son attention. Dans l'aube blanche et rouge, au milieu de la foule innombrable qui se pressait sur les toits des maisons pour le voir, surgit un regard perçant, des yeux clairs. Le légionnaire Othon.

Je suis un imposteur, se dit Catius tandis qu'on le poussait vers la tribune. Je ne suis pas l'homme qu'ils devraient applaudir. Ils ne me rendent hommage que parce qu'ils m'ont choisi pour ce rôle.

Je suis devenu un objet politique.

Il perdit Othon du regard, la foule humaine les absorba de nouveau tels deux naufragés qui s'égarent dans la tempête.

« Le peuple est agité, nota le chef de cérémonie. Ils ont du mal à vous apercevoir, premier consul, vous auriez dû garder votre casque. »

Cet homme ventripotent, aux yeux exorbités, n'existait que pour manier de telles foules. L'empire s'appuyait autant sur des guerriers de la trempe de Catius que sur les chevaucheurs de tornades capables de maîtriser ses remous intérieurs. Cette société immense, toute entière consacrée à des tâches difficiles, avait besoin d'exutoires. Le peuple devait vivre pour se divertir ; sans quoi il aurait compris qu'il ne vivait que pour l'empire, et que l'empire ne faisait rien pour lui.

Catius imagina la garde prétorienne écrasée telle une digue qui se rompt ; une marée de plébéiens, hommes, femmes et enfants confondus, s'abattant sur les patriciens comme une invasion d'insectes. Ce n'était pas la force et la violence de ces soldats qui maintenait le peuple en place, mais le jeu plus subtil d'hommes comme ce maître de cérémonie.

« Nous sommes arrivés » déclara-t-il.

Sol Neredia se trouvait en face d'eux, lui aussi spectateur de ce jour de gloire. Sa lumière se répandait dans l'atmosphère comme une matière filamenteuse. De chaque côté de la tribune, des cors annoncèrent Catius. Le premier consul s'avança jusqu'à la rambarde de pierre, visible de vingt mille citoyens d'Amor. D'un seul geste, il tira le glaive de son fourreau et fit de nouveau chanter son éclat au soleil. Le peuple lui répondit par une clameur si forte que la terre en tremblait.

« Je n'ai jamais vu cela, murmura le maître de cérémonie en ajustant ses manches. Ils ont votre attention. Parlez, Catius.

— Peuple de l'empire ! »

Le grondement se répercutait dans l'arène, obligeant Catius à des pauses de deux secondes, afin que ses paroles ne soient pas avalées par l'écho. Cette fourmilière humaine, comprit-il, était un fauve. Seul un homme d'une trempe exceptionnelle pouvait dompter un tel monstre. Il ne pardonnait aucune faiblesse.

« Je suis parti de cette ville aux commandes de la Troisième Légion !

J'ai traversé les milliards de lieues qui s'étendent entre Neredia et les autres astres de notre empire !

Le Sénat m'a dit : va à Stella Nemus !

Je suis venu !

Le Sénat m'a dit : vois les traîtres à notre empire s'emparer d'une de nos planètes !

J'ai vu !

Le Sénat m'a dit : reprends Stella Nemus !

J'ai repris Stella Nemus !

Sois victorieux des traîtres à notre empire !

J'ai vaincu ! »

La phrase suivante lui manqua.

Catius leva son épée plus haute encore. Le peuple se moquait qu'il ait encore quelque chose à dire ou non ; l'hystérie était à son comble, il tenait cette foule en son pouvoir. S'il criait ici et maintenant : massacrez les prétoriens, brûlez les hauts quartiers de Neredia ! La foule le suivrait et l'équilibre sur lequel était bâtie Amor, fragile comme toute société de millions de sujets, s'effondrerait.

Que devait-il conclure ? Maudire le kaldarisme ? Moquer les rebelles ? Mettre en garde le peuple contre les ennemis de l'empire, l'appeler au courage dans les guerres à venir ? Oui, tout ce que le Sénat attendait de lui : mener ces millions d'hommes dans la grande offensive qu'ils préparaient dans son dos. Catius serait le fer de lance de la gloire d'Aton.

Il crut voir le regard d'Othon briller au milieu de cette foule, comme un joyau perdu dans le limon d'un fleuve, aussitôt emporté par l'agitation.

Catius s'écarta.

« Ils sont à vous » dit-il au maître de cérémonie.

Surpris, l'homme reprit néanmoins le cours du spectacle. Il annonça que les meilleurs gladiateurs s'affronteraient dès maintenant, en hommage à la gloire des Légions de l'Imperium et au courage du premier consul. Catius s'assit dans son fauteuil réservé.

Les grilles de l'arène grincèrent. Les gladiateurs, une cinquantaine au moins, se dispersèrent sur le disque de sable. Chacun avait ses armes et ses chances de vaincre. Le premier sang fut répandu. Dans les rangées très serrées des estrades, on passait déjà en récoltant l'argent des paris.

« Tu m'as l'air absent, souffla Lucius en s'asseyant tout juste derrière lui. À quoi penses-tu, Catius ? C'est ton jour de gloire. Le peuple t'acclame.

— Si vous aviez mis quelqu'un d'autre à ta place, il l'acclamerait autant. Le peuple m'aime parce que le spectacle d'aujourd'hui est gratuit, parce qu'on distribuait du pain autour de la procession.

— Tu sais comment sont les foules, sourit Lucius.

— Non, je l'ignore. Mais tu sembles mieux informé.

— Allons, mon vieil ami. Je gage que tu as hâte de passer une journée tranquille chez toi. Ou bien penses-tu à quelqu'un en particulier ? Une femme d'Amor aurait-elle fait chavirer ton cœur ? On dit que les voyages au loin révèlent nos sentiments les plus profonds.

— Toi, Lucius, es-tu déjà allé dans l'espace ?

— Jamais.

— Sache que ces voyages ne révèlent rien. Sinon que nous sommes minuscules et que les astres se rient des vanités humaines. »

Lucius renonça et se tourna vers un autre sénateur, avec qui il commenta le combat en cours sous leurs yeux. Catius méprisait la passion d'Amor pour ces spectacles. Ses pensées divaguèrent, jusqu'à ce que sonnent les cors annonçant la fin du combat.

« Et maintenant, clama le maître de cérémonie... maintenant... les ennemis de l'empire vont connaître le sort des traîtres ! »

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